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3/5 (sur 2 notes)

Nationalité : France
Biographie :

Patrick Le Tréhondat est un autogestionnaire de longue date. Il adhère, alors lycéen, au Parti socialiste unifié (PSU) en 1976, et sera plus tard notamment membre des Comités communistes pour l’autogestion (CCA) ainsi que de la Tendance marxiste-révolutionnaire internationale (TMRI). Appelé sous les drapeaux en décembre 1980, affecté à la base navale de Brest, il rejoint le comité de marins « Tonnerre de Brest » et adhère à Information pour les soldats (IDS), il participe en tant qu’appelé à la Conférence européenne des organisations d’appelés (ECCO) qui se tient en octobre 1981 dans la région parisienne. Il sera, pendant plusieurs années, membre du secrétariat européen d’ECCO. Éditeur chez Syllepse, il a publié (avec Patrick Silberstein) Vive la discrimination positive : Plaidoyer pour une république des égaux (Syllepse, 2004) et L’ouragan Katrina (Syllepse, 2005). Il a été membre du collectif Lucien Collonges qui a publié Autogestion : Hier, aujourd’hui, demain (Syllepse, 2010). Il participe aujourd’hui à l’Association Autogestion.
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Source : Syllepse
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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
Tous les citoyens étant égaux aux yeux de la loi sont également admissibles à toutes les dignités, places et emplois publics, selon leur capacité et sans autre distinction que celle de
leurs vertus et de leurs talents.
Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, 1789.

Imaginons un cent mètres dans lequel l’un des deux coureurs aurait les jambes attachées. Durant le temps qu’il lui faut pour faire dix mètres, l’autre en a déjà parcouru cinquante. Comment rectifier la situation ? Doit-on simplement délivrer le premier coureur et laisser la course se poursuivre, en considérant qu’il y a désormais « égalité des chances » ? Pourtant, l’un des coureurs a toujours quarante mètres d’avance sur l’autre. Est-ce que la solution la plus juste ne consisterait pas plutôt à permettre à celui qui était attaché de rattraper son retard ? […] Ce serait là agir concrètement dans le sens de l’égalité. […] En vérité, on ne peut considérer avoir été parfaitement équitable envers une personne enchaînée si l’on se contente de la débarrasser de ses chaînes et de lui faire prendre place sur la ligne de départ […] en lui disant: « Voilà. Tu es libre de rivaliser avec les autres.»
Lyndon B. Johnson, président des États-Unis, 4 juin 1965.

Il peut sembler pour le moins incongru, voire intolérable, d’ouvrir cet essai par la mise en exergue de la Déclaration de 1789 aux côtés d’une longue citation d’un Lyndon la Peste de sinistre mémoire. Même s’il s’agit essentiellement de rhétorique, le bourreau du Vietnam a su trouver les mots justes pour expliquer ce qu’il faut entendre par « affirmative action ». Il est d’ailleurs tout aussi incongru, voire troublant, de constater qu’en France cette question est sortie des amphithéâtres de droit et des revues universitaires parce qu’un Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’intérieur, aura lancé, comme un os à ronger, l’idée de la « discrimination positive ». Néanmoins, la mise en parallèle de ces deux citations nous invite avec une certaine brutalité, à considérer la question de l’égalité de façon dynamique et non plus comme une donnée établie et intangible. Pas plus que la Liberté ou la Fraternité, l’Égalité ne peut être une simple proclamation dont la présence gravée dans la pierre des frontons de nos mairies attesterait de la réalité. L’Égalité, comme la Liberté, n’est pas un état mais un processus qu’il faut construire, consolider, défendre, approfondir, pour ne pas dire radicaliser. Pour ce faire, la volonté politique, l’appel à l’intervention citoyenne des mouvements sociaux, la mise en œuvre de différents dispositifs législatifs et réglementaires et la mise en cause de certains pouvoirs sont nécessaires. Nous voudrions défendre ici l’idée de la « discrimination positive », c’est-à-dire d’une discrimination « anti-discriminatoire », désignée aussi comme une « contre-discrimination » par Gwénaële Calvès ou comme une «action compensatoire et réparatrice » par Élise Marienstras. Dans son essai Je suis noir et je n’aime pas le manioc, Gaston Kelman [2003] compare la discrimination positive à une «rampe pour que les personnes handicapées puissent évoluer à peu près comme tout le monde ».
Il s’agit d’éclairer ici les enjeux d’un train de mesures démocratiques et égalitaires qui permettrait, nous semble-t-il, de sortir des blocages actuels. Cette situation enferme en effet les unes dans les effets rémanents de la division sexuée tandis que les quelques cabines de l’ascenseur social qui fonctionnent encore sont inaccessibles à certaines catégories de la population, parmi les plus démunies certes, mais affublées de surcroît de « stigmates » ethnoculturels. Habile bonimenteur qui chevauche le tigre en espérant le dompter, Nicolas Sarkozy, candidat putatif à la présidentielle de 2007, doit néanmoins répondre à une question simple : à qui fera-t-il croire que l’on peut mener une politique de discrimination positive digne de ce nom alors que, dans le même temps, la droite s’emploie à la destruction massive et brutale des bases matérielles de l’égalité héritées des combats des générations passées ? La première des discriminations positives n’est-elle pas en effet une politique économique et sociale (notamment dans par le biais de l’impôt direct) qui oriente vers les plus démunis (individus ou territoires) une part plus importante des dépenses publiques et des prestations sociales, favorisant ainsi la solidarité par la redistribution ? Nous sommes évidemment loin du « donner plus à ceux qui ont moins » avec l’offensive néolibérale de destruction des acquis sociaux, des solidarités et du service public dont les frères Sarkozy comptent parmi les maîtres d’œuvre.
Nous ne pouvons malheureusement que partager la crainte de Philippe Bernard : « Il reste à faire en sorte que le bébé – la nécessité d’ouvrir l’emploi aux membres des minorités visibles – ne soit pas jeté avec l’eau du bain, une vulgaire querelle préélectorale. » [Le Monde, 24 janvier 2004] En effet, si au début de l’année 2004, le débat semblait lancé – il ne se passait alors guère de jour sans que les mots de « discrimination positive » ne soient prononcés à la radio ou à la télévision – il n’y a eu qu’«fugace flambée de discussion» [Epok, 2004]. Néanmoins, comme le note Horizons 2015 [CNAF, juillet 2004], plus de soixante dépêches de l’AFP ont utilisé l’expression « discrimination positive » en 2003 soit quatre fois plus qu’entre 1997 et 2002.
Cependant, en fait de débat, nous avons souvent assisté au bal des masques où la poudre d’escampette et la poudre aux yeux dissimulaient difficilement l’embarras et les difficultés à répondre aux défis de la ségrégation par autre chose que des effets de manche et des formules magiques où le mot « République » n’est souvent qu’un voile destiné à cacher la vacuité.
Les politiques d’affirmative action mise en œuvre dès la fin des années 1960 aux États-Unis ont été désignées en français par l’expression « discrimination positive » alors que la traduction naturelle aurait été «action positive». C’est d’ailleurs celle-ci que les Canadiens ont choisie. Nous avons donc hésité à reprendre à notre compte les termes de « discrimination
positive » car nous partageons l’opinion de Sylvie Kauffmann [Le Monde, 9 janvier 2004] qui indique que, selon elle, celle-ci a été choisie parce qu’elle avait une « connotation péjorative». Faire ce choix, écrit-elle encore, c’était «déjà porter un jugement sur le concept ». Véronique De Rudder va dans le même sens quand elle écrit qu’il s’agit d’une traduction « falsificatrice » [2001]. Ce n’est pas tant finalement la reprise générale de l’expression – Le Monde du 17 septembre 2004 titrant par exemple un de ses articles « Les entreprises tentent la discrimination positive » – qui nous l’a fait adopter, que l’abîme de réflexions dans lequel nous a plongés son utilisation. Car, au contraire du sociologue Michel Faure qui dans les colonnes de Libération considère que « discrimination » et « positive » sont deux termes antinomiques, nous pensons qu’une telle oxymore possède une insondable richesse dialectique qui devrait, si un puissant mouvement pour l’égalité des droits politiques et sociaux s’en emparait, permettre une transformation réelle et profonde de notre société et de ses institutions.
Il est néanmoins vrai que la réception en France de l’affirmative action sous les traits de la « discrimination positive », en même temps que déferlait ici la confusion autour d’un « politiquement correct» censé ravager les États-Unis d’Amérique, n’a fait qu’entretenir les incompréhensions. Enfin, les parti-pris et une certaine dose de « franco-centrisme » plus ou moins
bien emballé dans le papier de soie d’un pseudo-universalisme ont autorisé les tenants, de droite comme de gauche, d’une «rhétorique auto satisfaite sur les vertus du modèle républicain » [De Rudder 2001] proclamé « universel » et donc immuable, à empêcher tout débat sérieux en dévalorisant le sens de la discrimination positive. Pourtant, vingt ans après
la Marche des Beurs pour l’égalité, la discrimination positive s’impose désormais à nous comme une réponse – parmi d’autres – à la question que pose à la démocratie politique
et sociale l’existence de minorités ethno-culturelles victimes de ce qu’on pourrait appeler un « apartheid de facto » [www.amnistia.net/news/articles/voile/voile.htm]. Elle s’impose aussi au vu de la situation faite aux femmes pour lesquelles l’égalité proclamée n’a, le plus souvent, d’égale que le nom.
La discrimination positive ne peut évidemment se résumer à la nomination d’un préfet « musulman » – ou, après correction sémantique, d’un préfet « issu de l’immigration ». Pas plus que ne peut suffire la nomination d’Ali Bencheneb comme recteur de l’académie de Reims, ou l’affichage, ambitionné plus que réel, sur les plateaux de télévision d’une palette colorée de journalistes et de vedettes du show biz. Mais, faits du prince plus que politique égalitaire systématique, ces symboles sont le symptôme évident que la préoccupation est désormais sur la place publique. La France à la fois plurielle à l’image des Bleus et mono-colore doit prendre des mesures pour que ses minorités sortent de l’invisibilité.
Néanmoins, une fois les vents les plus mauvais apaisés, le risque est grand de se contenter de mesures en trompe-l’œil et d’effets de manche. Allons-nous encore une fois, en repoussant la discrimination positive au nom de l’égalité, laisser la discrimination en l’état ? Ou au contraire, allons-nous enfin ouvrir une véritable bataille pour les droits civiques et l’égalité qui aille au-delà des slogans égalitaires aussi généreux qu’abstraits ?
Pour notre part, nous pensons que la bataille pour la discrimination positive, dont nous allons présenter ici quelques-uns des aspects, est un élément essentiel de la bataille pour l’égalité, afin que, pour paraphraser Voltaire, cette « chose » si naturelle qu’est l’égalité ne soit plus une chimère.
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À sa manière, de façon certes limitée mais réelle, l’événement a dynamisé un nouveau débat politique que chaque segment de la société appréhende de son point de vue. Quelle est la situation réelle de notre société ? Que voulons nous en faire ? Qui décide et comment ? Ce sont aussi ces questions que concentre le droit au retour que posent les dizaines de milliers de parias de l’ouragan Katrina.
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Les eaux ne se sont pas encore retirées de La Nouvelle-Orléans que, le 10 septembre, apparaissent dans les rues de la ville d’étranges patrouilles d’hommes en armes que ne contrôlent ni la police, ni l’armée. Ce sont les mercenaires de la société Blackwater (littéralement «eau noire», cela ne s’invente pas), de retour d’Irak où ils officiaient pour le compte de compagnies privées américaines. Pour les journalistes qui les croisent et qui s’entretiennent avec eux, leur présence est étonnante. Que protègent-ils ? Quelle est leur mission ? Qui sont leurs employeurs ? Surprise… ils portent un badge de l’État de Louisiane qui les a engagés. D’autres structures étatiques sous-traitent d’ailleurs elles aussi, de la même façon, l’« ordre public ». Le Department of Homeland Security agit de même et le justifie en expliquant qu’il répond ainsi « à une demande de sécurité en utilisant des forces mixtes». Des hôtels et des propriétaires de luxueuses maisons ont également engagé des milices privées. L’assureur Axa veille sur les trésors du musée de La Nouvelle-Orléans grâce à une troupe composée d’anciens marines et d’anciens policiers de New York. Blackwater ne fait pas mystère de sa présence à La Nouvelle-Orléans et revendique ouvertement sur son site une participation « aux opérations de secours » (www.blackwaterusa.com). À l’évidence, les manoeuvres de l’après-Katrina quant au devenir économique (donc immobilier), social (donc racial) et politique (donc « démocrate ») de la ville ont commencé. Dans l’immédiat, les sociétés rapaces sont à l’affût des crédits fédéraux – on parle de 200 milliards de dollars d’aides fédérales pour les années à venir. Parmi elles, la reine de la captation de fonds public, Halliburton, qui s’est joyeusement taillé la part du lion avec les premiers subsides. Fin septembre, Business Week proposait déjà aux investisseurs boursiers une première liste d’entreprises qui allaient profiter de la reconstruction.
Citons, parmi d’autres, Manitowoc (infrastructures), Quixote (constructeur d’autoroutes), Caterpillar (équipementier, « car une demande d’équipements électriques doit être anticipée » ajoute l’hebdomadaire financier), Astec (équipementier). Les secteurs d’activité de ces entreprises indiquent à leur manière l’ampleur des dégâts qu’a connus la ville. « Bien que personne ne souhaite, selon Business Week, apparaître comme profitant de la tragédie, ces sociétés joueront un rôle dans la reconstruction»…, il est donc conseillé d’acheter des actions de ces sociétés. C’est, dans un premier temps, de la reconstruction des infrastructures que naîtront les profits boursiers. Mais à plus long terme que faire de cette ville ? Le débat est lancé.
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La situation des évacués, éparpillés souvent à des centaines de kilomètres de chez eux, est une question cruciale. On estime à plus de 200000 personnes le nombre de ceux qui ont dû fuir leurs quartiers dévastés. La ville qui compte 455000 habitants a été inondée à plus de 80 %. Dans les plans des élites dirigeantes de la ville, nous l’avons vu, il faut faire obstacle à la réinstallation de la majorité d’entre eux. Le droit au retour est donc une revendication sensible et centrale
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