Chez nous, à l'ile, on dit que conscience nette vaut mieux que mobilier luisant.
Ce que l'on va quérir ne vaut pas toujours ce que l'on quitte.
Je n'aurais jamais cessé d'être un employé modèle, s'il n'avait dépendu que de moi, mais il y a une fatalité plus forte que l'homme.
-Ce bruit, sur votre gauche, c'est l'enfer du Raz, et cette grève, au pied de la falaise, c'est la baie des trépassés.
Ces mots nous glaçaient. Cette femme en noir, dans tout le noir, tout l'inconnu de ces lieux sinistres, m'inspira je ne sais quelle angoisse mêlée d'épouvante.
Le Léon n'est pas une terre de légendes, [...] mais la superstition, en revanche, s'est assurée bonne place dans les esprits. Le plus souvent, elle revêt un caractère funèbre.
-Lorsque l'âme, au moment du trépas, quitte le corps, elle a certaines formalités terrestres à remplir, avant de se présenter au tribunal de Dieu. Pour cela, elle se change soit en souris, soit en moucheron, soit en quelque animal encore plus subtil et plus fugace. Ainsi déguisée, elle va à la rencontre de tous les objets, toutes les bêtes, tous les lieux qui évoquent pour elle un souvenir, afin de prendre congé d'eux. Retenez-le, car ce n'est pas dans les livres. Cela s'appelle la randonnée de l'âme défunte.
Chez nous, là-bas, lorsqu'une femme est convaincue de lubricité, son mari l'emmène paisiblement, un soir, à la basse mer, dans les grèves rocheuses qui sont au nord de l'île, sous prétexte de goémonner. Là, il lui garrotte bras et jambes, lui attache une pierre au cou et lui conseille de réciter son mea culpa. Les propres parents de l'épouse font mine de découvrir le lendemain son cadavre. On célèbre au plus vite ses obsèques et elle en a pour jamais.
Tu as raison, décidément. Il faut qu'il y ait en elle du sang des sirènes ! Elle est, pour sûr, la première femme qui traverse le Raz en chantant.
Dans ce vivant , il n'y avait plus que de la mort.