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4/5 (sur 6 notes)

Nationalité : Allemagne
Né(e) le : 03/07/1709
Mort(e) le : 14/10/1758
Biographie :

Frédérique Sophie Wilhelmine de Prusse, margravine de Bayreuth, fille aînée du roi de Prusse Frédéric-Guillaume Ier, et sœur du grand Frédéric II de Prusse.

Comme son frère cadet, le futur Frédéric II dont elle était très proche, elle eut beaucoup à souffrir dans sa jeunesse des violences de leur père le roi. Ainsi qu'elle l'écrit dans ses Mémoires écrits en français : « J'étais occupée tous les jours par mes maîtres et mon unique récréation était de voir mon frère. Jamais tendresse n'a égalé la nôtre.»

Elle épousa en 1731 l'héritier du margraviat de Bayreuth Frédéric de Brandebourg-Bayreuth et fut la mère d'Élisabeth Frédérique Sophie de Brandenbourg-Bayreuth (1732-1780), décrite par Casanova comme la plus belle fille d'Allemagne, qui se maria à Charles II de Wurtemberg en 1748.

Voltaire a écrit une Ode sur sa mort.

Elle a laissé des Mémoires (de 1700 à 1742), qui n'ont paru qu'en 1810 et ont été réimprimés à Paris en 1845. Ils offrent les détails les plus intéressants sur la vie à la cour de Prusse.

La Correspondance de cette princesse avec Frédéric II a été imprimée en partie dans les Œuvres du roi
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Bibliographie de Margrave de Bayreuth   (2)Voir plus

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Citations et extraits (6) Ajouter une citation
[...] ... Nous suivîmes [le roi] peu de temps après à Postdam, où il tomba malade d'une violente attaque de goutte aux deux pieds. Cette maladie, jointe au dépit qu'il avait de voir ses espérances évanouies, le rendait d'une humeur insupportable. Les peines du purgatoire ne pouvaient égaler celles que nous endurions. Nous étions obligés de nous trouver à neuf heures du matin dans sa chambre, nous y dînions et n'osions en sortir, pour quelque raison que ce fût. Tout le jour ne se passait qu'en invectives contre mon frère et contre moi. Le roi ne m'appelait plus que la canaille anglaise, et mon frère était nommé le coquin de Fritz. Il nous forçait de manger et de boire des choses, pour lesquelles nous avions de l'aversion, ou qui étaient contraires à notre tempérament, ce qui nous obligeait de rendre quelquefois en sa présence tout ce que nous avions dans le corps. Chaque jour était marqué par quelque événement sinistre, et on ne pouvait lever les yeux sans voir quelques malheureux tourmentés d'une ou d'autre façon. L'impatience du roi ne lui permettait pas de rester au lit, il se faisait mettre sur une chaise à rouleaux et se faisait ainsi traîner par tout le château. Ses deux bras étaient appuyés sur des béquilles, qui le soutenaient. Nous suivions toujours ce char de triomphe comme de pauvres captifs, qui vont subir leur sentence. Ce pauvre prince souffrait beaucoup, et une bile noire, qui s'était épanchée dans son sang, était cause de ses mauvaises humeurs.

Il nous renvoya un matin que nous entrions pour lui faire la cour. Allez-vous en, dit-il d'un air emporté à la reine, avec tous vos maudits enfants, je veux rester seul. La reine voulut répliquer mais il lui imposa silence, et ordonna qu'on servît le dîner dans la chambre de cette princesse. La reine en était inquiète, et nous en étions charmés, car nous devenions maigres comme des haridelles, mon frère et moi, à force d'inanition. Mais à peine nous étions-nous mis à table qu'un des valets de chambre du roi accourut tout essoufflé en lui criant : venez, au nom de Dieu, au plus vite, Madame, car le roi veut s'étrangler. La reine y courut aussitôt tout effrayée. Elle trouva le roi, qui s'était passé une corde autour du cou, et qui allait étouffer, si elle n'était venue à son secours. Il avait des transports au cerveau et beaucoup de chaleur, qui diminua cependant vers le soir, où il se trouva un peu mieux. Nous en avions tous une joie extrême, dans l'espérance que son humeur se radoucirait, mais il en fut autrement. Il conta le midi à table à la reine, qu'il avait reçu des lettres [du margrave] d'Anspach, qui lui marquaient que le jeune margrave comptait être au mois de Mai à Berlin, pour y épouser ma soeur, et qu'il enverrait M. de Bremer, son gouverneur, pour lui porter la bague de promesse. Il demanda à ma soeur, si cela lui faisait plaisir et comment elle règlerait son ménage lorsqu'elle serait mariée ? Ma soeur s'était mise sur le pied de lui dire tout ce qu'elle pensait, et même des vérités, sans qu'il le trouvât mauvais. Elle lui répondit donc avec sa franchise ordinaire, qu'elle aurait une bonne table délicatement servie, et, ajouta-t-elle, qui sera meilleure que la vôtre, et si j'ai des enfants, je ne les maltraiterai pas comme vous et ne les forcerai pas à manger ce qui leur répugne. Qu'entendez-vous par là, lui répondit le roi, que manque-t-il à ma table ? Il lui manque, lui dit-elle, qu'on ne peut s'y rassasier, et que le peu qu'il y a ne consiste qu'en gros légumes que nous ne pouvons pas supporter. Le roi avait déjà commencé à se fâcher de sa première réponse, cette dernière acheva de le mettre en fureur, mais toute sa colère tomba sur mon frère et sur moi. Il jeta d'abord une assiette à la tête de mon frère, qui esquiva le coup ; il m'en fit voler une autre, que j'évitai de même. Une grêle d'injures suivirent ces premières hostilités ; il s'emporta contre la reine, lui reprochant la mauvaise éducation qu'elle donnait à ses enfants ; et, s'adressant à mon frère : "Vous devriez maudire votre mère, lui dit-il, c'est elle qui est cause, que vous êtes mal gouverné. J'avais un précepteur qui était un honnête homme, je me souviens toujours d'une histoire qu'il m'a contée dans ma jeunesse. Il y avait, me disait-il, un homme à Carthage, qui avait été condamné à mort pour plusieurs crimes, qu'il avait commis. Il demanda à parler à sa mère dans le temps qu'on le menait au supplice. On la fit venir. Il s'approcha d'elle comme pour lui parler bas, et lui emporta un morceau de l'oreille avec ses dents. Je vous traite ainsi, dit-il à sa mère, pour vous faire servir d'exemple à tous les parents, qui n'ont pas soin d'élever leurs enfants dans la pratique de la vertu. Faites-en l'application !" continua-t-il en s'adressant toujours à mon frère, et voyant qu'il ne répondait rien, il recommença à nous invectiver jusqu'à ce qu'il fût hors d'état de parler davantage. Nous nous levâmes de table et comme nous étions obligés de passer à côté de lui, il me déchargea un grand coup de sa béquille, que j'évitai heureusement, sans quoi il m'aurait assommée. Il me poursuivit quelque temps dans son char, mais ceux qui le traînaient me donnèrent le temps de m'évader dans la chambre de la reine, qui en était fort éloignée. ... [...]
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Wilhelmine, soeur de Frédéric II de Prusse, raconte dans ses Mémoires les multiples violences exercées par son père sur le futur roi.


"Mon frère commençait de même de recevoir ses caresses accoutumées de coups de canne et de poing. Nous cachions nos souffrances à la reine. Mon frère s'impatientait de plus en plus, et me disait qu'il était résolu de s'enfuir et qu'il n'en attendait que l'occasion. Son esprit était si aigri, qu'il n'écoutait plus mes exhortations et s'emportait même souvent contre moi. Un jour, que j'employais tous mes efforts pour l'apaiser, il me dit : "vous me prêchez toujours la patience, mais vous ne voulez jamais me mettre en ma place ; je suis le plus malheureux des hommes, environné depuis le matin jusqu'au soir d'espions, qui donnent des interprétations malignes à toutes mes paroles et actions; on me défend les récréations les plus innocentes : je n'ose lire, la musique m'est interdite, et je ne jouis de ces plaisirs qu'à ma dérobée et en tremblant. Mais ce qui a achevé de me désespérer est l'aventure qui m'est arrivée en dernier lieu à Potsdam, que je n'ai point voulu dire à la reine pour ne pas l'inquiéter. Comme j'entrai le matin dans la chambre du roi, il me saisit d'abord par les cheveux et me jeta par terre où, après avoir exercé la vigueur de ses bras sur mon pauvre corps, il me traîna malgré toute ma résistance, à une fenêtre prochaine ; (...) prenant la corde qui attachait le rideau, il me la passa autour du cou. J'avais eu par bonheur pour moi le temps de me relever, je lui saisis les deux mains et me mis à crier. Un valet de chambre vint aussitôt à mon secours et m'arracha de ses mains."
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[Dans les lignes qui suivent, la future Margrave fait le portrait des notables qu’on lui présente.]

Je fus très-mal édifiée de cette cour, et encore plus de la mauvaise chère que nous fîmes ce soir-là ; c’étoient des ragoûts à la diable, assaisonnés de vin aigre, de gros raisins et d’ognons. Je me trouvai mal à la fin du repas et fut obligée de me retirer. On n’avoit pas eu les moindres attentions pour moi, mes appartemens n’avoient pas été chauffés, les fenêtres y étoient en pièces, ce qui causoit un froid insoutenable. Je fus malade à mourir toute la nuit, que je passai en souffrances et à faire de tristes réflexions sur ma situation. Je me trouvai dans un nouveau monde avec des gens plus semblables à des villageois qu’à des courtisans ; la pauvreté régnoit partout ; j’avois beau chercher ces richesses qu’on m’avoit tant vantées, je n’en voyois pas la moindre apparence. Le prince s’efforçoit de me consoler ; je l’aimois passionnément ; la conformité d’humeur et de caractère lie les cœurs ; elle se trouvoit en nous, et c’étoit l’unique soulagement que je trouvasse à mes peines.
Je tins appartement le lendemain. Je trouvai les dames aussi désagréables que les hommes. »
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Epouse de l’héritier de Bayreuth (qu’on écrit alors Bareith), la future margrave arrive dans sa nouvelle capitale en 1732. Elle décrit la réception qui lui est faite et l’appartement qui sera désormais le sien.

« J’y arrivai enfin le 22. de Janvier [1732] à six heures du soir. On sera peut-être curieux de savoir mon entrée ; la voici. A une portée de fusil de la ville, je fus haranguée de la part du Margrave par Mr. De Dobenek, grand-bailli de Bareith. C’était une grande figure tout d’une venue, affectant de parler un allemand épuré et possédant l’art déclamatoire des comédiens germaniques, d’ailleurs très-bon et honnête homme. Nous entrâmes peu après en ville au bruit d’une triple décharge de canon. Le carosse où étoient les Messieurs commença la marche ; puis suivoit le mien, attelé de six haridelles de poste ; ensuite mes dames ; après les gens de la chambre et enfin six ou sept chariots de bagages fermoient la marche. Je fus un peu piquée de cette réception, mais je n’en fis rien remarquer. Le Margrave et les deux princesses ses filles me reçurent au bas de l’escalier avec la cour ; il me conduisit d’abord à mon appartement. Il étoit si beau, qu’il mérite bien que je m’y arrête un moment. J’y fus introduite par un long corridor tapissé de toiles d’araignées et si crasseux, que cela faisoit mal au cœur. J’entrai dans une grande chambre, dont le plafond, quoique antique, faisoit le plus grand ornement ; la hautelice qui y étoit, avoit été, à ce que je crois, fort belle de son temps, pour lors elle étoit si vieille et si ternie, qu’on ne pouvoit deviner ce qu’elle représentoit qu’avec l’aide d’un microscope ; les figures en étoient en grand et les visages si troués et passés, qu’il sembloit que ce fussent des spectres. Le cabinet prochain étoit meublé d’une brocatelle couleur de crasse ; à côté de celui-ci on en trouvoit un second, dont l’ameublement de damas vert piqué faisoit un effet admirable ; je dis piqué, car il étoit en lambeaux, la toile paroissant partout. J’entrai dans ma chambre de lit, dont tout l’assortiment étoit de damas vert avec des aigles d’or éraillés. Mon lit était si beau et si neuf, qu’en quinze jours de temps il n’avoit plus de rideaux, car dès qu’on y touchoit ils se déchiroient. Cette magnificence à laquelle je nétois pas accoutumée, me surprit extrêmement.
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[...] ... J'en reviens à l'entrevue du roi et de la reine. Cette princesse était seule dans l'appartement de ce prince lorsqu'il arriva? Du plus loin qu'il l'aperçut, il lui cria :

- "Votre indigne fils n'est plus, il est mort !"

- Quoi," s'écria la reine, "vous avez eu la barbarie de le tuer ?"

- "Oui, vous dis-je," continua le roi, "mais je veux la cassette [qu'il vous a laissée]."

La reine alla la chercher. Je profitai de ce moment pour la voir ; elle était hors d'elle-même et ne discontinuait de crier : "Mon Dieu, mon fils, mon Dieu, mon fils !" La respiration me manqua et je tombai pâmée entre les bras de Madame de Sonsfeld. Dès que la reine eut remis la cassette au roi, il la mit en pièces et en tira les lettres qu'il emporta. La reine prit ce temps, pour rentrer dans la chambre où nous étions. J'étais revenue à moi. Elle nous conta ce qui venait de se passer, m'exhortant à tenir bonne contenance. La Ramen releva un peu nos espérances, en assurant la reine que mon frère était en vie et qu'elle le savait de bonne main. Le roi revint sur ses entrefaites. Nous accourûmes tous pour lui baiser la main, mais à peine m'eût-il envisagée, que la colère et la rage s'emparèrent de son coeur. Il devint tout noir, ses yeux étincelaient de fureur et l'écume lui sortait de la bouche. "Infâme canaille, me dit-il, oses-tu te montrer devant moi ? va tenir compagnie à ton coquin de frère." En proférant ces paroles, il me saisit d'une main, m'appliquant plusieurs coups de poing au visage, dont l'un me frappa si violemment la tempe, que je tombai à la renverse et me serais fendu la tête contre la carne du lambris, si Madame de Sonsfeld ne m'eût garantie de la force du coup, en me retenant par la coiffure. Je restai à terre sans sentiment. Le roi, ne se possédant plus, voulut redoubler ses coups et me fouler aux pieds. La reine, mes frères et soeurs, et ceux qui étaient présents l'en empêchèrent. Il se rangèrent tous autour de moi, ce qui donna le temps à Mesdames de Kamken et de Sonsfeld de me relever. Ils me placèrent sur une chaise dans l'embrasure de la fenêtre, qui était tout proche. Mais voyant que je restais toujours dans le même état, ils dépêchèrent une de mes soeurs, qui leur apporta un verre d'eau et quelques esprits, à l'aide desquels ils me rappelèrent un peu à la vie. Dès que je pus parler, je leur reprochai les soins qu'ils prenaient de moi, la mort m'étant mille fois plus douce que la vie, dans l'état où les choses étaient réduites. Il est impossible de décrire la funeste situation où nous étions. ... [...]
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[...] ... J'en reviens à l'entrevue du roi et de la reine. Cette princesse était seule dans l'appartement de ce prince lorsqu'il arriva? Du plus loin qu'il l'aperçut, il lui cria :

- "Votre indigne fils n'est plus, il est mort !"

- Quoi," s'écria la reine, "vous avez eu la barbarie de le tuer ?"

- "Oui, vous dis-je," continua le roi, "mais je veux la cassette [qu'il vous a laissée]."

La reine alla la chercher. Je profitai de ce moment pour la voir ; elle était hors d'elle-même et ne discontinuait de crier : "Mon Dieu, mon fils, mon Dieu, mon fils !" La respiration me manqua et je tombai pâmée entre les bras de Madame de Sonsfeld. Dès que la reine eut remis la cassette au roi, il la mit en pièces et en tira les lettres qu'il emporta. La reine prit ce temps, pour rentrer dans la chambre où nous étions. J'étais revenue à moi. Elle nous conta ce qui venait de se passer, m'exhortant à tenir bonne contenance. La Ramen releva un peu nos espérances, en assurant la reine que mon frère était en vie et qu'elle le savait de bonne main. Le roi revint sur ses entrefaites. Nous accourûmes tous pour lui baiser la main, mais à peine m'eût-il envisagée, que la colère et la rage s'emparèrent de son coeur. Il devint tout noir, ses yeux étincelaient de fureur et l'écume lui sortait de la bouche. "Infâme canaille, me dit-il, oses-tu te montrer devant moi ? va tenir compagnie à ton coquin de frère." En proférant ces paroles, il me saisit d'une main, m'appliquant plusieurs coups de poing au visage, dont l'un me frappa si violemment la tempe, que je tombai à la renverse et me serais fendu la tête contre la carne du lambris, si Madame de Sonsfeld ne m'eût garantie de la force du coup, en me retenant par la coiffure. Je restai à terre sans sentiment. Le roi, ne se possédant plus, voulut redoubler ses coups et me fouler aux pieds. La reine, mes frères et soeurs, et ceux qui étaient présents l'en empêchèrent. Il se rangèrent tous autour de moi, ce qui donna le temps à Mesdames de Kamken et de Sonsfeld de me relever. Ils me placèrent sur une chaise dans l'embrasure de la fenêtre, qui était tout proche. Mais voyant que je restais toujours dans le même état, ils dépêchèrent une de mes soeurs, qui leur apporta un verre d'eau et quelques esprits, à l'aide desquels ils me rappelèrent un peu à la vie. Dès que je pus parler, je leur reprochai les soins qu'ils prenaient de moi, la mort m'étant mille fois plus douce que la vie, dans l'état où les choses étaient réduites. Il est impossible de décrire la funeste situation où nous étions. ... [...]
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