Des centaines de livres étaient rangés là, dans un alignement parfait. J'examinai cette bibliothèque magnifique qui réunissait les grandes œuvres classiques de la littérature française : Hugo, Balzac, Sand, Zola et autres Lamartine et Voltaire... Plus bas, se côtoyaient Verlaine et Rimbaud au-dessus des aînés e anticonformistes Rabelais et Villon. Au milieu du rayonnage, deux volumes étaient positionnés de face : Les Fleurs du Mal et les traductions d'Edgar Poe de Baudelaire.
La haine est un mal dont on ne guérir pas facilement, dit-elle. Elle vous ronge, elle dénature vos pensées.
Il faut que le peuple français réagisse ! pensai-je. Qu'il se réveille ! Qu'il se rende compte de la situation dramatique dans laquelle il se trouve ! Je ne devais plus me sentir étrangère au douloureux dilemme qui hantait sûrement la conscience collective.
Une 4 ème de couverture prometteuse... Il y a mieux dans le genre. Je l'ai lu sans plaisir. Beaucoup de longueurs inutiles ainsi qu'une mise en scène tirée par les cheveux. Livre suivant...
Depuis quelque temps, je traverse une période difficile et j’éprouve l’impérieux besoin de me claustrer. Cette semaine d’isolement m’a permis de faire le point sur mon passé, mon enfance. J’ai fouillé dans les tiroirs à la recherche de vieilles photos, et dans les profondeurs de ma mémoire pour revivre les instants de bonheur partagés avec ma mère. J’ai mis mon muscle cérébral à rude épreuve pour lui extirper les mots de tendresse et d’amour dont elle m’avait gratifié.
A quelques pas de la guillotine, tapies dans l'obscurité, je devinais les ombres statufiées des représentants de la loi.
Mon mari est mort, lui aussi. Il me manque énormément… Je n’ai jamais pu accepter son absence. Je vous l’avoue franchement, j’aurais préféré l’oublier complètement et refaire ma vie avec un autre homme. Tout aurait été bien plus simple pour moi. Avec un autre compagnon, j’aurais pu construire une nouvelle vie, élever des enfants qui auraient bousculé notre paisible quotidien. Une vie banale et linéaire, sans grandes surprises, avec des joies et des peines, comme dans toutes les familles, vous comprenez. Mais ne vous méprenez pas ! Je ne vais pas vous jouer le refrain de la veuve éplorée. Je ne vis pas dans l’ombre de son spectre, me pâmant devant sa photo jaunie posée sur le buffet, ou passant des heures dans un coin de cimetière jusqu’à la tombée du jour…
Le jour commence à décliner alors qu'il n'est que dix-sept heures. De gros nuages noirs recouvrent la ville d'un voile bas et opaque. J'entre dans le hall de la gare Matabiau, mes pensées aussi sombres que les cumulus qui vomissent leurs trombes d'eau.
Je m’intéresse peu à cette foule remuante et bruyante, qui, du reste, ne me voit pas plus que je ne la vois. Je n’ai pas envie de côtoyer les gens, de leur parler et de supporter leurs jérémiades. J’ai besoin d’être seul ! Seul avec moi-même, seul avec mes souvenirs. Si autrefois le spectacle offert par la rue et les gares suscitait en moi un intérêt particulier, aujourd’hui ce divertissement me semble complètement futile et vide de sens. Je me serais bien passé de venir m’agglutiner à ces usagers pressés qui me poussent, me bousculent.
Mon esprit vagabondait. Je n’avais jamais éprouvé cette sensation étrange, ressenti ce bien-être à l’écoute d’un récit me plongeant dans un passé inconnu, et qui pourtant me laisse une impression de déjà-vu, ou plus exactement de déjà entendu. Le sentiment que cette histoire a préalablement marqué ma vie.