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Citation de Florence94


Qu’on imagine la scène : d’un côté Mahmoud, fils d’une grande famille musulmane de Haïfa, qui avait dû quitter sa ville à cause de la tension qui y régnait entre Arabes et Juifs, et qui pressentait déjà qu’il ne pourrait probablement plus y retourner , de l’autre côté Stefan, juif d’Europe centrale, venu précisément s’installer dans cette même ville , tous deux proches parents des nouveaux mariés …
J’avais décidé de me borner aux présentations les plus sommaires. Mahmoud Carmali, mon beau-frère. Stefan Temerles, l’oncle de Clara. Ils se sont serré la main.
Alors mon père a dit à voix haute, en français :
»Vous avez quelque chose en commun. Mahmoud est de Haïfa. Et l’oncle de notre belle-fille habite justement à Haïfa. »
Un regard échangé entre Clara et moi. Nous nous tenions par la main, comme pour mieux affronter la bourrasque.
- Asseyez-vous tout près, a poursuivi mon père, vous avez certainement des choses à vous dire.
Il insistait, n’est-ce pas à Mais ne pensez surtout pas que c’était par inadvertance ou par manque de tact. Plutôt par défi, en un sens, par esprit de bravade. Il y avait chez lui un profond mépris pour cette attitude, très répandu au Levant, qui prétend « ménager » les susceptibilités et les appartenances , cette attitude qui consiste par exemple à chuchoter à ses invités :
- Attention, Untel est juif , Untel est chrétien , Untel est musulman !
Alors les uns et les autres s’efforcent de censurer leurs propos habituels, ceux que l’on prononce lorsque l’on est « entre nous », pour débiter les banalités mielleuses qui sont censées refléter les respect que l’on a pour l’autre, et qui ne reflètent en réalité que le mépris et l’éloignement. Comme si l’on appartenait à des espèces différentes.
Et si ces deux hommes qu’il avait placé l’un près de l’autre s’étripaient à Tant pis, c’est qu’ils méritaient de s’étriper, un point c’est tout. Lui, son devoir, c’était de les traiter en humains, embarqués en fin de compte dans la même vaste aventure. S’ils ne s’en montraient pas dignes, tant pis pour eux. Et si, à cause de cela, la fête en était perturbée à Tant pis encore, c’est que nous ne méritions pas une telle fête !
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