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4.72/5 (sur 18 notes)

Nationalité : Roumanie
Né(e) à : Timișoara , le 25/03/1942
Biographie :

Otilia Valeria Coman (née le 25 mars 1942 à Timișoara) est sous son nom de plume d'Ana Blandiana, une poétesse, essayiste et figure politique roumaine.
Son surnom de Blandiana vient du nom du village du Județ d'Alba en Transylvanie, le village natal de sa mère.

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Ana Blandiana
Village

Odeur
Plus qu’image, plus que son,
Odeur de fumée, le soir, surtout
Quand reviennent les troupeaux somnolents
De trop de lait fleuri dans les les champs,
Odeur du lait mousseux d’écume,
Traite sensuelle du pis, comme si
S'unissaient sur sa chair bleutée
Le souffle vert de l'herbe
Sauvage et le souffle doux et tendre de la fumée,
Odeur de pailles humides
Et de grains amoncelés,
Odeur des pyramides de blé dressées jusqu'au ciel,
Tandis que la lueur du soir se retire en elle-même.
Et les nuages s'effilochent
En contes éthérés, puis disparaissent.
Odeur de toi-même,
De tes cheveux emplis de soleil,
De ta peau assoiffée d'herbe,
De tes mots et de ton sommeil–

Ô, Village ! Surgi dans l'air
Grâce à cette image éternelle !
Aimé de tout mon âme
Et bercé par le vent !

(Traduit par François Nicolas)
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Ana Blandiana
Elégie du matin

Au début, j'avais promis de me taire
Mais plus tard, au matin,
Je vous ai vus sortir avec des sacs de cendre devant les portes
Et la répandre comme on sème le blé ;
N'y tenant plus, j'ai crié : Que faites-vous ? Que faites-vous ?
C'est pour vous que j'ai neigé toute la nuit sur la ville,
C'est pour vous que j'ai blanchi chaque chose toute la nuit - ô si
Vous pouviez comprendre comme il est difficile de neiger !
Hier soir, à peine étiez-vous couchés, que j'ai bondi dans l'espace
Il y faisait sombre et froid. Il me fallait
Voler jusqu'au point unique où
Le vide fait tournoyer les soleils et les éteint,
Tandis que je devais palpiter encore un instant dans ce coin,
Afin de revenir, neigeant parmi vous.
Le moindre flocon, je l'ai surveillé, pesé, éprouvé,
Pétri, fait briller du regard,
Et maintenant, je tombe de sommeil et de fatigue et j'ai la fièvre.
Je vous regarde répandre la poussière du feu mort
Sur mon blanc travail et, souriant, je vous annonce :
Des neiges bien plus grandes viendront après moi
Et il neigera sur vous tout le blanc du monde.
Essayez dès à présent de comprendre cette loi,
Des neiges gigantesques viendront après nous,
Et vous n'aurez pas assez de cendre.
Et même les tout petits enfants apprendront à neiger.
Et le blanc recouvrira vos piètres tentatives à le nier.
Et la terre entrera dans le tourbillon des étoiles
Comme un astre brûlant de neige.

Traduction de Ana Blandiana et Jean-Pierre Rosnay
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Ana Blandiana
Prière

Dieu des libellules, des papillons de nuit,
Des alouettes et des hiboux,
Dieu des vers de terre, des scorpions
Et des cafards de la cuisine,
Dieu qui as enseigné à chacun autre chose
Et qui sais à l’avance tout ce qui arrivera à chacun,
Je donnerais n’importe quoi pour comprendre ce que tu as ressenti
Quand tu as établi les proportions
Des poisons, des couleurs, des parfums,
Quand tu as déposé dans un gosier le chant et dans un autre le croassement,
Et dans une âme le crime et dans l’autre l’extase,
Je donnerais n’importe quoi, surtout, pour savoir si tu as eu des remords
D’avoir fait des uns des victimes et des autres des bourreaux,
Egalement coupable vis-à-vis de tous
Puisque, tous, tu les as mis devant le fait accompli.
Dieu de la culpabilité d’avoir décidé tout seul
Du rapport entre le bien et le mal,
Balance difficilement maintenue en équilibre
Par le corps ensanglanté
De ton fils qui ne te ressemble pas.

(Traduit du roumain par Muriel Jollis-Dimitriu)
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Ana Blandiana
Élégie du matin

Au début, j'avais promis de me taire
Mais plus tard, au matin,
Je vous ai vus sortir avec des sacs de cendre devant les portes
Et la répandre comme on sème le blé ;
N'y tenant plus, j'ai crié : Que faites-vous ? Que faites-vous ?
C'est pour vous que j'ai neigé toute la nuit sur la ville,
C'est pour vous que j'ai blanchi chaque chose toute la nuit - ô si
Vous pouviez comprendre comme il est difficile de neiger !
Hier soir, à peine étiez-vous couchés, que j'ai bondi dans l'espace
Il y faisait sombre et froid. Il me fallait
Voler jusqu'au point unique où
Le vide fait tournoyer les soleils et les éteint,
Tandis que je devais palpiter encore un instant dans ce coin,
Afin de revenir, neigeant parmi vous.
Le moindre flocon, je l'ai surveillé, pesé, éprouvé,
Pétri, fait briller du regard,
Et maintenant, je tombe de sommeil et de fatigue et j'ai la fièvre.
Je vous regarde répandre la poussière du feu mort
Sur mon blanc travail et, souriant, je vous annonce :
Des neiges bien plus grandes viendront après moi
Et il neigera sur vous tout le blanc du monde.
Essayez dès à présent de comprendre cette loi,
Des neiges gigantesques viendront après nous,
Et vous n'aurez pas assez de cendre.
Et même les tout petits enfants apprendront à neiger.
Et le blanc recouvrira vos piètres tentatives à le nier.
Et la terre entrera dans le tourbillon des étoiles
Comme un astre brûlant de neige.

(Poème traduit conjointement par
Ana Blandiana et Jean-Pierre Rosnay à Paris en 1967.)

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Nous sommes ici
Entre des murs d’argile,
Avec la vache des voisins,
Dont nous buvons le lait
Chaque soir,
Trait par des mains gercées et raides
Comme du bois mort.
Nous sommes ici
Parmi les vieux pruniers
Qui n’ont plus la force de donner des fruits
Et les paysannes trop vieilles pour enfanter des paysans.
Nous sommes ici
Nous nous sentons bien et comme chez nous
Dans ce monde
Qui nous apprend à mourir.
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Ana Blandiana
Fatiguée

Je suis fatiguée de naître d'une idée,
je suis fatiguée de ne pas mourir.
J'ai choisi une feuille,
voici, c'est d'elle que je vais naître
à son image et à sa ressemblance.
Sa sève fraîche va m'envahir doucement
et ses nervures seront mes tendres reliques.
Elle m'apprendra à trembler, à grandir,
à briller dans le peine ;
puis à me détacher de la branche
comme un mot quitte les lèvres.
De cette façon simple
enfantine
dont on meurt
chez les feuilles.

(traduit du roumain par Radu Bata)
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Ana Blandiana
J’entends

J'entends marcher un homme derrière moi
sous la lune
Semant de pleurs les traces de mes pas.
Pour un pas sage, des bleuets,
Un mauvais pas, des mandragores.

J'entends marcher un homme derrière moi
sous le soleil
Déposant des œufs d'oiseaux dans les traces de mes pas.
Pour un pas sage, des tourterelles,
Un mauvais pas, des oiseaux et leurs chants.

J'entends marcher un homme derrière moi
dans l'éternité,
Abandonnant des mots dans les traces de mes pas.
Pour un pas sage, des guillemets
Un pas mauvais, de la poésie.

(Traduit par Nathalie Laubreton)
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La solidarité dans la révolte est une activité physique. C'est une lutte, une opposition, une complicité en dehors des mots, impossible à formuler. Il faut la comparer à un processus chimique, s'effectuant dans les profondeurs de la matière vivante, là où pas un décret, pas un appareil de répression ne peut intervenir. D'ailleurs, chacun a un frère, un cousin, un fils enrégimenté dans l'appareil de répression, si bien qu'entre les gens de l'appareil et ceux qui l'alimentent de leur progéniture, se produit, à terme, un mélange inextricable que personne ne voudrait démêler.

(extrait du chapitre 21 de Sertarul cu aplauze [Le Tiroir aux applaudissements], dans la traduction d'Hélène Lenz, in Les Belles Étrangères, 12 écrivains roumains, sous la direction de Laure Hinckel, p. 51)
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Ana Blandiana
Quand la justice ne parvient pas à être une forme de mémoire, la mémoire peut être une forme de justice.

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Ana Blandiana
Tu ne vois jamais les papillons

Tu ne vois jamais
Les papillons, de quel air ils se regardent au-dessus de nos têtes ?
Ni les signes que le vent
Fait à l'herbe quand nous passons ?
Si brusquement je me retourne
Les branches se figent
Et attendent qu'on s'éloigne.
Tu n'as pas remarqué que les oiseaux s'éclipsent ?
Tu n'as pas remarqué que les feuilles s'éteignent ?
Tu n'as pas remarqué ces murmures
Qui grandissent derrière nous
Comme la mousse sur les troncs, du côté du nord ?
Et le silence qui nous attend, partout…
Ils doivent tous savoir quelque chose qu'on nous cache, à nous.
Nous sommes peut-être condamnés.
Peut-être nos têtes ont-elles été mises à haut prix.
La nuit, les étoiles scintillent excitées.
Quand s'élève le cliquetis des feuilles de maïs.

(traduction en français par Aurel George Boeșteanu)
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