Le livre "Georges Sanders, profession fripouille - Mémoires" (bit.ly/3YCLLUh) présenté par Jean le Gall, directeur des Editions Séguier, dans l'émission littéraire "L' heure des Livres" d' Anne Fulda sur CNEWS
Page 130 : Quand le narcissisme est l'essentiel et non un effet secondaire, quand il y a la photo de Paris Match et pas le projet, en revanche cela devient un problème, essentiel. Moi j'attends le projet. Je lui a dit à plusieurs reprises. (Propos de Jacques Attali).
Je pense que dans la vie, il faut se tenir. Préserver une part de mystère. (p. 188)
Ce nom, En Marche!, continue Korsia, n'est pas anodin [...] C'est aussi une référence à la sculture de Giacometti "L'homme qui marche", ou Dieu qui dit à Abraham : "Quitte tes certitudes, mets-toi en marche."
Page 113 : Emmanuel a toujours eu des fidélités successives, ou plutôt des infidélités successives, analyse l'un de ses collègues de l'ENA, qui précise qu'il ne renvoie pas l'ascenseur. Il se sert des gens. Mais ce qui est exceptionnel, c'est que les gens, souvent intelligents, le savent mais se sont quant même avoir !
Le regard des autres, celui des représentants du « vieux monde », de la caste, du système politique–dont il tient soigneusement à se différencier–, a évolué bien sûr. D'abord intrigué, puis moqueur, il est devenu vaguement inquiet et incrédule. Serait-il possible qu'Emmanuel Macron, cet ovni politique, encore parfaitement inconnu il y a quatre ans, puisse gagner, à la barbe des plus anciens, faisant fi des règles non on écrites de la politique, la campagne présidentielle de 2017 ?
Un regard qu'au fil des ans l'étudiant retrouvera chez des personnes souvent plus âgées que lui. Des aînés, des « sachants», des puissants. Les seuls qu'il reconnaît. Les seuls qui le reconnaissent aussi, apprécient sa culture, son intelligence, son esprit de synthèse, sa maturité…sans tomber dans le rapport inévitable de compétition, de rivalité, qui peut exister chez ses contemporains, ceux de son âge qui, au fond, ne l'intéressent pas vraiment, car pas de la même planète.
Ce nom, En Marche!, continue Korsia, n'est pas anodin. C'est une allusion à une phrase de Saint-Exupéry dans Vol de nuit : "Dans la vie il n'y a pas de solution. Il y a des forces en marche : il faut les créer et les solutions suivent."
Ce jour-là, après le déjeuner, le Guépard me fit visiter ses bureaux, boulevard Haussmann. Une sorte de musée Delon. Avec ses icônes, ses références. Toutes du passé. Beaucoup de photos de femmes. Dalida, Bardot, Mireille Darc, Edwige Feuillère, sa fille Anouchka. Des photos de Gabin, aussi. Beaucoup de photos liées à ces années d’or qu’il ne cesse de regretter. Car c’est ainsi depuis longtemps : Delon vit dans le souvenir, la nostalgie de cette époque qui n’est plus et qu’il regrette tellement. Il n’en finit pas, lors de ses rares interviews, de traîner son blues.
Étrange tout de même : il aurait pu voler des disques, des motos, mais pourquoi des livres ? La réponse fuse : « J’adorais faire semblant d’être cultivé, ça pose les gens. » Il lit alors dans la nature, loin de la maison familiale, de la misère qu’elle lui renvoie. Aussi fasciné par certains auteurs, comme Hugo, Balzac, Jardin, « le père », Mérimée, que par leur œuvre.
Lui, il a été proche de Marguerite Duras. « Margotton », comme il l’appelait. Margotton qu’il allait voir au troisième étage de la rue Saint-Benoît, vêtue de son éternel col roulé et à qui il doit son premier rôle au cinéma, dans Nathalie Granger. Il ne la quittera plus après. Deviendra un peu l’homme à tout faire de l’auteure de La Douleur. Celui qui, comme il le raconte dans son livre Ça s’est fait comme ça, a « débouché ses chiottes, son évier, repeint ses chambres de bonne » car elle était un peu près de ses sous, la Duras, elle « aimait bien le pognon ». Elle s’aimait bien aussi. Il se souvient d’une rencontre avec elle. Dans son appartement. Ils sont assis l’un en face de l’autre. Quinze minutes de silence. À s’observer sans rien dire. Car leur amitié, c’était ça aussi, des silences et Duras qui rompt la glace. « On m’a dit que j’étais la plus géniale. – Si on te l’a dit, ça doit être vrai. »
C'est aussi de se voir condamné à être un spectateur impuissant de ce pouvoir « qui, comme tous les pouvoirs, coupe de la réalité, qui devient uniquement perçue à travers des filtres déformants ». Il est, lui aussi, une victime collatérale de l'ascension fulgurante de « Manu ». La politique lui a volé son fils. A créé un Alien, un personnage fictif. Qui s'emballe sur scène lors de grands-messes que lui n'apprécie guère (« cela devient un peu excessif »).