"[...]pour que les femmes deviennent des citoyennes à part entière, faire appel à la loi, invoquer le droit, changer les comportements ne suffit pas. Il faut aussi œuvrer sur les mentalités, modifier culturellement l'image de la femme, à la maison, dehors, dans les livres scolaires afin que les droits des femmes, cessant d'être un vain mot, soient dans notre pays aussi respectés que ceux des hommes"
Yvette Roudy.
"L'écoute par rapport aux revendications des femmes est à une époque critique où il faut vraiment voir comment repositionner le discours, et c'est un danger qui guette le féminisme [...] Je dirais qu'il faut accroître notre vigilance, et peut-être réévaluer nos stratégies d'intervention, tout en visant les mêmes objectifs de recherche effective d'égalité tant dans les faits qu'en droits entre les femmes et les hommes. Et ça nous demande aussi d'être capable de continuer à illustrer la situation réelle des femmes par rapport à celle des garçons, en étant capable de passer le message que c'est la situation de la population générale du Québec qu'on veut améliorer en améliorant celle des femmes, on ne veut pas le faire au détriment de celle des hommes, on ne veut pas prendre leur place... On veut prendre notre place [...] (Entretien avec Diane Lavallée, septembre 2012)
Elles [=institutions de la femme] rencontrent [...]des difficultés à établir leur légitimité dans l'appareil gouvernemental : non seulement elle sont de faible rang ministériel, mais elles sont en quasi-totalité portées par des femmes [...] Elle pâtissent de la faible légitimité, de la méconnaissance voire du discrédit du sujet dont elles traitent.
[...], il s'agit d'instances [=instances concernant la Condition de la femme au Québec] à faible rang ministériel, qui disposent d'une administration de soutien restreinte (avec des statuts d'emploi souvent précaires) par rapport aux autres départements ministériels, et d'un budget d'intervention limité, voire nul. Cette fragilité est comparable à celle d'autres instances à caractère intersectoriel, telles que les instances étatiques chargées de l'environnement.[...] Leur personnel administratif et politique a connu, en France comme au Québec, une évolution relativement similaire d'un personnel militant à un personnel administratif/partisan plus classique.[...] Il s'agit donc d'institutions relativement marginales au sein de l'appareil étatique.
Le genre, en tant que système d'inégalité traversant l'ensemble de la société (au même titre que la classe sociale, la race ou le handicap par exemple), touche tous les domaines de la vie sociale. Il s'incarne aussi bien dans l'inégale répartition de la prise en charge des tâches domestiques au sein du couple hétérosexuel que dans les obstacles à la progression hiérarchique des femmes dans l'organisation de travail. Il marque de son empreinte la socialisation des enfants comme les pratiques sportives ou encore la sexualité. Comment, dans ces conditions, définir de façon simple une "cause" des femmes?
Avec sa politique en matière d'équité salariale, le Québec s'est doté d'une politique d'égalité professionnelle beaucoup plus ambitieuse et solidement instrumentée (avec la Commission d'équité salariale) que la France. Simplement, au Québec, la politique à l'égard des femmes ne se réduit pas à la sphère professionnelle, alors qu'en France elle reste plus concentrée dans ce domaine, au détriment notamment d'un investissement des politiques de la famille.
Au début du XXe siècle, le mouvement des femmes québécois s'organise autour de deux clivages structurants, un clivage linguistique/confessionnel, opposant les "Canadiennes françaises" catholiques et les anglophones protestantes, et un clivage social/géographique séparant des femmes bourgeoises de milieux urbains et des femmes de milieux ruraux et plus populaires. Ces dernières font plus particulièrement l'objet de l'attention des pouvoirs publics, qui voient en elles la clé de la perpétuation de la nation canadienne-française et un frein à l'exode rural.
[...]la comparaison franco-québécoise fait apparaître des lectures dominantes du problème (l'une, française, centrée sur l'égalité professionnelle et l'autre, québécoise, sur l'autonomie économique)
Un premier ensemble d'analyses théoriques des inégalités de genre, issu des courants féministes matérialistes, identifie la division sexuée du travail comme racine de ces inégalités.[...] [notamment au travers de] la traditionnelle assignation des femmes à un travail domestique non rémunéré, les hommes pouvant réciproquement se consacrer entièrement à un travail rémunéré. En résulte dans le couple hétérosexuel une situation d'exploitation du travail domestique et de dépendance financière des femmes vis-à-vis des hommes.
Cette remise en question [=adhésion au discours de la "Condition féminine"] d'une crédibilité jusqu'alors en grande partie acquise s'inscrit dans le contexte de la montée en puissance d'un contre-mouvement masculiniste proposant une lecture des rapports de genre fondée sur une construction des hommes (et non plus de femmes) comme victimes.