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Critiques de Anne Sinclair (132)
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La rafle des notables

La légende familiale disait que le grand-père d’Anne Sinclair avait été sauvé de manière presque rocambolesque par son épouse. En cherchant à en savoir plus, elle s’est rendue compte que c’était beaucoup plus complexe et a tenté de reconstituer les évènements malgré le peu de documents à sa disposition au départ. Ce qui nous donne ce récit captivant.



Le 12 décembre 1941 commence ce qu’on va appeler la rafle des notables. On a longtemps (Vichy) affirmé que les Juifs français avaient été pris pour cible à partir de la fin 1942, ce qui est faux : cette rafle est la première. Elle est composée de 743 notables et comme les SS exigeaient un compte rond : mille personnes, d’autres Juifs ont été arrêtés dans les rues. Il s’agissait de personnes ayant subi des pogroms depuis des générations, habitués à fuir, aux antipodes des notables qui étaient en France depuis très longtemps et n’avaient jamais subi de persécution.



Les notables sont arrêtés au petit matin, ils ont à peine le temps de s’habiller de prendre une petite valise et sont embarqués, interrogés, emmener d’un endroit à un autre dans Paris et pour finir le train pour les emmener à Compiègne qu’ils traverseront à pieds sur 5 km, sous les coups bien sûr : près de 24 heures se sont déroulées, sans manger ni boire et entasser dans un camp, dans un bloc spécial qu’on appellera le « camp des Juifs ». Dans d’autres blocs sont incarcérés des communistes ou des Russes arrêtés (offensive sur Moscou, car le pacte germano-soviétique a été rompu par Hitler en mai 1941).



Ils sont soumis à un régime spécial, visant à les faire mourir de faim (la soupe où trois navets se courent après, mais donnant parfois lieu à des conflits, tant ils sont affamés) une hygiène déplorable, avec les poux dans les paillasses… Tout est fait pour les humilier et les détruire, mais ils résistent autant qu’ils peuvent, les plus valides organisant des conférences dans leurs domaines respectifs : René Blum (le frère de Léon) sur Alphonse Allais par exemple, ou encore Louis Engelmann, le voisin de Léonce sur l’électricité…



En fait, ils auraient dû être envoyés dans les camps de l’Est (Auschwitz) mais, les trains étaient réquisitionnés pour les permissions de Noël des soldats allemands. On apprend aussi, au passage que René Blum sera jeté vivant dans les fours crématoires à son arrivée.



Je précise que Léonce Schwartz était commerçant dans la dentelle, d’origine alsacienne, et tentant de remonter dans l’historique de la famille, Anne Sinclair a pu retrouver un ancêtre aux alentours de 1600 en Alsace ! Donc Français depuis très longtemps. Pour lui, comme pour ses codétenus, il se considérait avant tout Français.



« Léonce Schwartz, en effet, n’est pas un intellectuel. Il vend de la dentelle en gros, qu’il fait tisser à Bruges…«



Serge Klarsfeld a fourni à Anne Sinclair, la liste exacte de ces notables et de leurs professions, certains étaient des officiers de l’armée, décorés pour leur bravoure pendant la première guerre mondiale. C’est impressionnant!



Anne Sinclair étaye son récit, citant les travaux de Klarsfeld, mais aussi les témoignages de compagnons d’internement de son grand-père, elle ne laisse rien dans l’ombre car elle savait peu de choses sur lui, qui a réussi à être sauvé de la déportation car il était trop mal en point, il est mort quelques jours après l’armistice, en ayant pu revoir son fils Résistant engagé auprès du Général de Gaulle.



J’ai beaucoup apprécié ce livre, récit détaillé sans concession de l’enfer qu’ont vécu ces hommes, dans un camp tenu par des Allemands. Je connaissais très peu choses au sujet de ce camp de Royallieu (vestige de la Royauté comme son nom l’indique) situé près de Compiègne, et pas loin du fameux wagon de Rotondes… et Anne Sinclair m’a profondément touchée et donné l’envie d’en savoir plus et d’aller fouiller pour trouver les témoignages qu’elle cite dans son livre.



En refermant ce livre qui est un uppercut, je me suis rendue compte qu’il y avait encore beaucoup de choses que je connaissais mal, alors que j’ai lu énormément d’ouvrages sur la seconde guerre mondiale, le nazisme, la barbarie du troisième Reich mais devant la montée des intégrismes, des populismes, ce que l’on pensait à jamais dans les oubliettes peut refaire surface…



J’ai très envie de lire l’ouvrage que l’auteure a consacré à sa famille maternelle : « 21, rue de la Boétie »



Un grand merci à NetGalley et aux éditions Grasset qui m’ont permis de découvrir ce livre.



#Larafledesnotables #NetGalleyFrance
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La rafle des notables

12 décembre 1941, commençait la rafle des notables. Parmi eux Léonce Schwartz; le grand père paternel de l'autrice.

L'objectif, pour satisfaire l'occupant allemand, était d'interner à Compiègne mille juifs. Près de sept-cent-cinquante, des juifs français bien installés, des notables, seront raflés cette nuit là. Ils seront rejoints par trois cents juifs étrangers internés à Drancy.

Puis ce sera le départ pour les camps de la mort...



À la recherche de son passé, de celui de sa famille, Anne Sinclair mène l'enquête.

Elle recompose l'histoire de ces notables, qui se croyaient à l'abri de la barbarie nazi et qui, pour la plupart, mourront dans les camps.

Elle ne cache pas les trous : des mémoires se sont perdues, qu'elle ne peut pas, ne veut pas, tenter de reconstituer par l'imagination.

Un court essai historique, fort bien écrit, facile à lire, à conseiller à tous ceux, notamment les adolescents, qui s'interrogent sur l'histoire contemporaine. Ici, pas de complotisme, juste des faits.

Un très beau témoignage.
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La rafle des notables

un petit livre, court, trop court. Malgré ses recherches, elle le sait ...il y a peu de traces de la fuite de son grand-père. un livre presque intimiste, qui laisse sur sa faim. Je déplore un peu le manque de développement des personnages cités, chacun aurait mérité largement plus. Mais ce livre a le mérite de parler de cette rafle et de ce camp si peu connus.
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La rafle des notables

Anne Sinclair a déjà fait revivre le souvenir de son grand-père maternel Paul Rosenberg, célèbre marchand d’art, dont la galerie se trouvait 21 rue La Boétie. Dans « La rafle des notables » elle poursuit son devoir de mémoire en évoquant son grand-père paternel, Léonce Schwartz, qui fut arrêté à l’aube du 12 décembre 1941, comme ces 743 autres juifs français arrêtés ce jour-là, - des médecins, des avocats, des militaires - conduits au camp de Compiègne « le camp de la mort lente ». Pour raconter cette douloureuse histoire, la journaliste disposait de peu d’éléments recueillis au niveau familial, « une légende familiale, une évasion rocambolesque » plus de témoins directs… Alors Anne Sinclair va se rendre sur les lieux du drame, enquêter, consulter les archives, les monographies, les témoignages poignants d’autres internés en bénéficiant de l’appui de Serge Klarsfeld.

Elle a pu ainsi mettre en exergue les abominables conditions de détention : le froid, la faim, la promiscuité…mais aussi, la solidarité d’autres détenus

Léonce va tomber gravement malade, il pourra alors être admis au Val-de-Grâce, en février 1942, libéré dans des conditions énigmatiques , bénéficiant peut être de la complicité de l’équipe médicale, échappant ainsi au transfert vers le camp d’Auschwitz le 27 mars 42. Pourtant, il ne survivra que peu de temps à cette libération, il décédera en mai 45.

Ce livre « pour redonner un peu de chair aux disparus » constitue un vibrant hommage à ce grand-père qu’elle n’a pas connu, et apporte un témoignage complémentaire à cette sombre page de notre Histoire.





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Passé composé

Merci aux éditions Grasset et à NetGalley pour cette lecture.

Le début de 7 sur 7 marquait la fin du week-end. Anne Sinclair, ses yeux bleus piscine (Desproges), son stylo à la main et ses invités prestigieux. L’émission au cours de laquelle Jacques Delors, donné favori aux élections présidentielles de 1995, annonce qu’il ne se présentera pas. L’émission qui offre aussi un rapide tour d’horizon de l’actualité hebdomadaire.

Anne Sinclair évoque sa carrière, les invités qu’elle a reçus à 7 sur 7, hommes politiques ou artistes. Elle brosse le portrait de certains d’entre eux.

En quelques pages pleines de pudeur, elle revient sur l’impact que l’affaire DSK a eu sur sa vie.

Une excellente autobiographie.


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La rafle des notables

«  Se résigner c'est abandonner sa dignité » .

«  Cette histoire me hante depuis l'enfance » .

«  Pourquoi ces êtres français ont- ils été livrés par l'état français sans aucune apparence de résistance?

Et encore « Primo-Levi déporté à Auschwitz emploie ces mots tels que «  Loques , Larves , Damnés » cités par l'auteure .



Trois extraits significatifs de ce témoignage poignant pour , comme l'écrit la célèbre journaliste : Redonner un peu de chair aux disparus, mettre une peu de lumière sur l'histoire du camp de Compiègne administré par les Allemands , fait historique peu connu et peu abordé par les historiens .

Son grand - Père paternel , Léonce Schwarz, faisait partie de ces 743 juifs français, magistrats , chefs d'entreprise , écrivains .....

L'écrivaine et journaliste a réalisé un travail d'enquêtrice , d'Historienne , a effectué des recherches..

J'ajoute que son métier de journaliste lui a évidemment permis de se rė- approprier la vie de Léonce et celle de ses compagnons d'infortune confrontés au froid , à la saleté , à la longueur des appels , les stations innommables , pieds nus, mais surtout à la famine qui devint , au fil des jours la troisième arme aux mains du sadisme des allemands .

La nourriture devint très vite une obsession cruelle. ..

Son enquête familiale nous fait connaître dans le détail, aidée bien sûr par Serge-Klarsfeld, , Laurent Joly Karine Taïeb, et d'autres ,les détails historiques, qui servent de fil rouge à un récit très personnel , à la fois intime et universel , aidant à la mise en oeuvre de la mémoire collective .

Elle relate les faits, les retrace clairement avec beaucoup d'objectivité, faisant référence aussi à la vie et à la descente aux enfers de prisonniers , qui passaient leur temps à redouter des départs vers l'Est sans trop savoir ce que cela signifiait .

Ces questions torturaient ces hommes , pour la plupart «  Protégés par la vie jusqu'ici » projetés brutalement dans un ailleurs sordide , qui végétaient dans des baraques glacées où ils crevaient de faim.

Ce camp des juifs va devenir , à partir du 12 décembre 1941 «  le camp de Douleur des Juifs » ...

On referme ce petit livre documentaire , trop court ......



Une lecture témoignage en hommage à ceux , très , très nombreux qui ne sont pas revenus ——à propos du destin énigmatique de Léonce ——avec douleur et respect :

Un ajout de plus écrit avec retenue, pudeur, émotion contenue, exactitude ..

La mise à jour de cette inhumanité , ces persécutions et exactions commises de sinistre mémoire .

Pourquoi La Croix Rouge ne put jamais entrer «  Dans le camp des Juifs » ?



«  Pour les Juifs ,pas de pitié ! Nous étions bien les plus mal partagés des animaux , n'ayant même pas pour veiller sur notre sort , la Société Protectrice des Animaux » écrit Roger-Gompel.



«  C'était un acheminement implacable vers la mort , pour humilier, avilir ,abrutir , épuiser, sorte de pogrom à froid » .



Merci à l'auteure de nous avoir fait connaître le destin de son grand - Père paternel .
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Passé composé

"Avancer en âge invite parfois à se retourner sur soi : l'avenir se raccourcit, le passé est un refuge. Je n'échappe pas à la règle, après avoir prétendu l'ignorer ou l'avoir même moquée.

Je me suis longtemps refusée à imiter les confrères qui publient leurs Mémoires, persuadés que leur moi mérite exhibition et que les épisodes de leurs vies personnelle et professionnelle suscitent l'intérêt. Le journalisme est un métier comme un autre et la télévision, qui gonfle les ego, n'est souvent qu'une usine à baudruches. À tous ceux qui m'interrogeaient à ce sujet, je n'ai cessé de déclarer urbi et orbi qu'à ce petit jeu narcissique, on ne me prendrait pas. Publier cet ouvrage m'oblige à manger mon chapeau. Me voici à mon tour piégée dans ce paradoxe : écrire comme tout le monde, en espérant intéresser tout le monde à une vie qui ne serait pas celle de tout le monde. Il faut assumer ses contradictions et ne pas avoir peur de se désavouer. C'est dit."

Ainsi, par ce prologue, s'ouvrent les Mémoires d'Anne Sinclair, qui sont loin d'approcher même de très loin, celles de feu Chateaubriand, et dont Jean d'Ormesson affirmait qu'elles étaient "un chef-d'oeuvre absolu".

Cela étant, toute époque gardée, Chateaubriand n'avait pas lui non plus l'intention d'écrire ses Mémoires, c'est le chant d'une grive qui, lors d'une promenade au parc de Montboissier, lui rappelle son enfance et le convainc d'entreprendre cet exercice littéraire "impudique".

Lui aussi mange son chapeau, mais lui enrichit le patrimoine littéraire universel là où la poussière du temps confondra les particules.

Un mot encore sur ce prologue "j'anticipe", "je-prends-les-devants", qui est une caractéristique récurrente de l'auteure de - Passé composé -.

Ce n'est pas le chant d'une grive qui a déclenché ce virage sur l'aile (trop tentant... sourire) d'Anne Sinclair, mais ce qui motive beaucoup de personnes, dont certains payent un professionnel pour écrire leur autobiographie... témoigner pour nos enfants et nos petits-enfants, et accessoirement un public qui, dans son ensemble, s'est toujours montré bienveillant à l'égard de celle qui a marqué le PAF ( paysage audiovisuel français ) pendant un règne sans partage de treize années sur TF1, et fut même aux yeux d'une très grande majorité de maires français la Marianne qui devait succéder à Bardot ou à Deneuve ; un phénomène bien de chez nous.

Donc, entre deux pincées livrées du bout des doigts à son clavier sur l'intime d'Anne Sinclair, ce livre, pour l'essentiel, est un livre de Mémoires sur ce qui précéda, fut, et suivit le parcours professionnel d'une très grande professionnelle.

Certes A.S nous avoue qu'elle est "fondamentalement craintive, pusillanime et timorée", qu'elle est "sensible à l'extrême, mélancolique souvent, angoissée fréquemment".

"Je ne m'estime pas assez pour être sûre de moi et mon ego mesuré me rend, je crois, plutôt plaisante à fréquenter car je ne me prends pas pour ce que je ne suis pas ; mais il est un handicap dans l'action et fatigue mes proches lassés d'avoir à me rassurer.

Je suis peu audacieuse... je suis paresseuse, mais je le cache ; gourmande et tout le monde le sait.

Enfin, j'aime la vie et j'aurai du mal à la quitter car elle a été douce pour moi et généreuse en bienfaits"... poursuit-elle dans un autoportrait qui écume une personnalité plus qu'il ne plonge dans ses abysses.

Elle confesse vivre dans l'aisance, mais loin d'être une milliardaire... lorsqu'on connaît la liste de son patrimoine mobilier et immobilier, de la fortune qui lui vient de son grand-père collectionneur d'oeuvres d'art( "Aujourd'hui, Anne et sa tante Elaine, âgée de 80 ans, sont donc les seules héritières d'une fortune estimée à plusieurs dizaines de millions d'euros. Ce qui n'a pas empêché Anne Sinclair de remettre sur le marché plusieurs chefs-d'œuvre de la collection Rosenberg: en novembre 2003, elle a vendu chez Christie's un tableau qui fut longtemps accroché aux cimaises du Centre Pompidou, la Femme en rouge et vert de Fernand Léger, pour 22,4 millions de dollars, et, en novembre 2007, L'Odalisque, harmonie bleue de Matisse, pour 33,6 millions de dollars."), de ce que lui coûta une femme de chambre new-yorkaise du nom de Nafissatou Diallo... on se dit qu'employer le mot milliardaire n'eût choqué personne... en tout cas pas moi !

A.S est née dans cette ville américaine où elle n'a séjourné enfant que trois ans.

Fille unique, c'est, semble-t-il, une béance affective dont elle a souffert, elle a adoré son père trop tôt disparu, et a eu des rapports difficiles avec une mère qui ne s'est pas épanouie comme compagne domestique et comme mère au foyer.

Ses parents l'ont surprotégée, ce qui ne l'a pas empêché d'être, après un début de scolarité moyen, une dévoreuse de livres, une élève brillante à partir de la cinquième, surtout dans les matières littéraires.

De se découvrir, grâce à la guerre d'Algérie expliquée par sa mère, une vocation pour le journalisme.

Sciences Po en deux étapes, puis Europe numéro 1 ( comme on disait à l'époque ) vont être les jalons qui conduiront la brillante et volontaire Anne Sinclair jusqu'aux portes de TF1 nouvellement privatisée par Bouygues.

Enfin, la consécration avec cette émission 7 sur 7, diffusée tous les dimanches entre 19 et 20 heures... dont je fus un téléspectateur assidu.

A.S n'étant mon aînée que de cinq ans, nos époques de vie sont pour ainsi dire jumelles, et ce qu'elle retrace dans son livre copie-colle ce qui fut mon actualité.

Aussi, en dehors des cuisines dont j'avais un peu entendu parler, toutes ses émissions, tous ses invités ne sont qu'un exercice qui permet de rafraîchir ma mémoire mais ne m'a fondamentalement rien appris que je ne savais déjà.

Je passerai donc sur Delors ( un moment très fort de télévision ), Mitterrand, Rocard, Chirac, Giscard, Veil, Marchais, Gorbatchev... ou Montand, Signoret, Bedos, Devos, Bruel etc etc... j'ai eu l'impression de relire ce que j'avais déjà vu...

Pareil pour - Questions à domicile -, émission qui dura quatre ans et dont je n'ai rien oublié.

A.S se voit en mère imparfaite, en féministe de coeur mais pas de fait.

Oui, bon... et après !

Puis vient l'avant-dernier chapitre intitulé "Le chapitre impossible".

Là, nul n'est sensé ignoré que très à contrecoeur, l'auteure va nous parler de DSK "ce séisme qui a dévasté ma vie".

Les mots sont forts pour évoquer ce qui n'appartient pas à la presse de caniveau, au voyeurisme... mais à l'histoire de notre pays.

Et c'est là où il y a un hiatus entre le traitement que consent à en faire Anne Sinclair, qui vécut "l'affaire" plus près que n'importe lequel d'entre nous et qui rechigne à considérer que ce n'est pas qu'une sordide affaire de moeurs mais l'histoire qui s'est invitée à la table de chaque français le samedi 14 mai 2011.

C'est un peu comme si Marie-Antoinette ( à laquelle elle se compare en montant les marches du tribunal de New York comme on monte à l'échafaud ), disait à propos de Louis XVI... "Qui c'est celui-là... il a une drôle de tête (pardon ...) ce type-là ? ! "

Voir le patron français du FMI, ancien ministre des Finances, futur candidat socialiste à la présidentielle de 2012, menotté, entouré par une armada de flics américains, puis incarcéré au pénitencier de Rikers Island pour agression sexuelle... apprendre plus tard que l'homme est un véritable prédateur..., pour une ancienne étudiante de Sciences Po, refuser de voir et de mesurer l'impact politique, sociologique et psychologique que les méfaits de DSK ont causé à notre société depuis déjà longtemps sous l'emprise du doute et de la méfiance à l'égard du politique et de la politique, c'est de l'aveuglement...

Je ne suis investi, qu'à Dieu ne plaise, d'aucun droit qui me permette de juger de ce que furent les rapports de l'une et de l'autre dans ce couple pendant vingt ans.

Que l'on vive vingt années auprès d'un homme et se retrouver "brutalement" à côté d'un "inconnu (?)" ... "la révélation d'arrangements nauséabonds ; soirées scabreuses ; prostituées cornaquées par un mac au surnom poisseux ; textes de SMS crasseux échangés entre mon mari et... la crevasse devenait abîme...", c'est effectivement un mystère aux allures énigmatiques...

Version "moderne" de Jekyll et Hyde.

Les preuves, les faits sont accablants, mais l'intéressée qui se qualifie de "femme aveugle et bornée", va vivre encore deux années auprès d'un homme violent violeur probable...

"On m'a reproché, non sans raison (je-prends-les-devants), d'être restée. J'aurais pu (dû), cette fois, partir. Trois fois, je l'ai tenté, sans y parvenir... jusqu'au moment où j'ai senti que j'allais sombrer. Notre histoire se terminait dans un cloaque".

Et de conclure de manière troublante et déconcertante à propos de cette et ces affaires : " Nous n'avons jamais eu d'explications de fond. Je suis partie, le laissant à ses mystères, m'en allant avec mes questions".

"J'ai donc raconté les épisodes qui me concernent seule ( ? )... je n'y reviendrai pas, je préfère les enfouir dans l'oubli."

C'est votre choix, chère Anne Sinclair.

Au regard de l'histoire, il pèsera d'un poids que vous mésestimez.

Ces Mémoires se concluent sur la renaissance, la paix retrouvée grâce, professionnellement, à la belle aventure du Huffingtonpost et sentimentalement à l'amour retrouvé avec Pierre Nora.

J'aime la femme qui se définit dans cet ordre comme Française, juive, de gauche.

J'aime ces trois femmes et je les respecte.

J'aime Anne Sinclair, dont j'ai toujours été un admirateur.

Nous sommes cancer tous les deux ( je ne crois pas à ces sornettes... quoique...), et nous partageons beaucoup de visions et de combats communs... pas mal de divisions aussi.

Des Mémoires écrites par une journaliste qui a une belle plume de journaliste.

Des Mémoires qui m'ont un peu appris... si peu...

Des Mémoires dont je regrette que les vingt ans de vie commune passés auprès d'un homme qui entrera noirci de l'encre d'immoralité dans les manuels d'histoire, d'un homme qui aura entaché sa vie, sa carrière politique et dans une mesure non négligeable la France, occupent au final moins de place dans lesdites Mémoires que treize ans passés à commenter une actualité devant laquelle Anne Sinclair journaliste ne se serait pas dérobée si DSK n'avait pas été son mari...



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La rafle des notables

J’ai lu ce livre parce que ma bibliothèque va le rendre à la BDP qui le réclame, alors que j’aurais voulu une lecture plus… légère, je dirais. Mais dès les quelques pages d’introduction, j’ai compris que, avec le type d’infox historiques que certain(s) s’attache(nt) à faire courir ces temps-ci, une enquête comme celle-ci prend une importance toute particulière. Anne Sinclair revient sur le passé de sa famille paternelle, des commerçants de confession juive installés en Alsace au début du XVIIe siècle. La période qui l’intéresse, c’est la Deuxième Guerre mondiale, ce n’est pas une surprise. Elle s’attarde donc sur ses grands-parents paternels, Léonce et Marguerite Schwartz, sur lesquels courent certaines légendes. Anne, jeune fille, n’y a pas prêté assez d’attention, pas plus qu’elle n’a tenté d’interroger sa grand-mère pendant qu’elle le pouvait encore pour trier le vrai du faux. Elle le regrette aujourd’hui et, par ce livre, tente de découvrir la vérité.

***

Ce que la journaliste raconte dans ce trop bref ouvrage « vient infirmer la thèse élaborée par Vichy dès la Libération et reprise aujourd’hui par des polémistes révisionnistes – toutefois démentis par tous les historiens – selon laquelle le gouvernement du Maréchal aurait servi de bouclier aux Juifs français ! » Les Français juifs n’ont pas commencé à être arrêtés fin 42, en représailles au débarquement en Afrique du Nord, comme on l’entend souvent, mais dès août 41. La rafle dans laquelle le grand-père d’Anne Sinclair sera pris a eu lieu le 12 décembre 1941. Ce jour-là, 743 Français juifs seront entassés dans le camp de Compiègne-Royallieu et, sur la demande des autorités allemandes, 300 juifs étrangers les y rejoindront. Beaucoup d’entre eux seront déportés dans des camps où la plupart mourront dans les conditions que l’on sait. Anne Sinclair s’appuie sur des sources familiales et amicales (peu), mais surtout sur des ouvrages de spécialistes, des journaux intimes de certains prisonniers, et les travaux de Serge Klarsfeld (voir la bibliographie en fin de texte). Je suis contente d'avoir découvert ce livre intéressant et nécessaire.

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Passé composé

J’admire cette femme depuis longtemps et comme beaucoup je me suis demandé comment une personne aussi brillante, intelligente, cultivée et riche avait pu se retrouver prise dans ce mauvais roman de gare il y a dix ans. Surtout pourquoi être restée si longtemps après le scandale. Je connais plusieurs personnes qui acceptent un mariage bancal car elles ont l’impression de ne pas avoir le choix, n’ayant ni diplôme ni travail, mais Anne Sinclair n’avait pas ce problème.



Même si je suis peu attirée par la télévision, j’ai eu l’occasion de regarder 7 sur 7 et Questions à domicile à plusieurs reprises et je suis admirative de sa manière de gérer l’émission. Elle incarne à mes yeux une femme qui a su s’imposer et briller dans un milieu d’hommes, ce que j’admire et j’avais très envie de lire ses mémoires. Elle nous parle de sa vie de manière pudique et intéressante, se présentant comme une personne peu sûre d’elle-même, vite angoissée, ce qui ne m’avait jamais sauté aux yeux. Elle a une très belle plume, très agréable à lire. L’essentiel du livre parle des treize années passées à TF1 à animer son émission phare. Elle explique sa conception du journalisme, l’importance de l’éthique et de l’objectivité dans ce métier, tout comme sa responsabilité. Elle se refuse à la complaisance envers ses invités lorsqu’il s’agit d’hommes politiques mais veut leur permettre de s’exprimer clairement, d’expliquer leur vision du monde. Elle tient aussi à se montrer objective vis à vis d’eux, même s’ils n’appartiennent pas à son camp, ce que tous reconnaissent. Elle refuse toutefois de tendre son micro à des personnes qui se situent, selon elle, en dehors du champ de la démocratie. A cette époque, il s’agit avant tout de J.M . Le Pen, mais aujourd’hui cela inclurait des dirigeants comme Trump, Poutine et Erdogan. Elle parle de ses rencontres avec ses différents invités et donne quelques anecdotes, mais aucune révélation fracassante, ce n’est pas le genre de la maison. Elle a aussi invité des artistes ou des penseurs, mais s’est montrée plus clémente avec eux, qui n’ont pas de compte à rendre à la nation. Certains invités se sont révélés insipides comme Madonna ou Mc Cartney, tandis que d’autres ont été peu appréciés par les dirigeants de la chaîne, intéressés par la seule audience au détriment de la qualité.



Si cette émission occupe la place centrale du livre, elle nous parle de toute sa vie, de son enfance protégée à sa renaissance professionnelle et personnelle après 2011. Quant à la fameuse affaire DSK, elle l’évoque sous le titre Le chapitre impossible. Elle y raconte avec pudeur son ressenti et sa souffrance face à cette tempête qui ravage sa vie, elle ne donne pas d’explication sur le fond, disant qu’ils n’en ont jamais parlé et se sont quittés en emportant chacun ses mystères ou ses questions. Elle se dit aveuglée par l’amour et n’ayant jamais rien vu venir, même si ça paraît incroyable, soulignant que son ex-mari n’a jamais été violent avec elle même si elle était sous son emprise affective. Il n’a pas hésité à utiliser le chantage affectif pour l’obliger à déménager à Washington et a trouvé tout naturel qu’elle abandonne son émission pour ses beaux yeux, ce qui est quand même une forme de violence. Toutefois je pense qu’elle n’a pas saisi l’importance de ce tsunami sur la vie politique française.



J’ai trouvé très intéressante son analyse de la banalisation progressive de l’extrême-droite en France (et aussi dans le reste de l’Europe !) des années 1980 à nos jours, car même si elle a gommé ses aspects les plus répugnants, son fond de commerce est resté le même. J’ai aussi beaucoup aimé voir cette rétrospective des années soixante à nos jours, avec notamment l’évolution de la place des femmes dans la société et la vie professionnelle. Ses rapports avec sa famille, surtout sa mère, ainsi que son identité juive m’ont également largement interpellée.



J’ai beaucoup aimé ce livre à la fois pudique et passionnant, très bien écrit et abordant de nombreux thèmes. La rafle des notables figure aussi dans ma Pal et je vais le lire très prochainement. Même si je ne comprends toujours pas que l’amour puisse rendre aveugle à ce point, mon admiration pour cette journaliste et femme de qualité s’est confirmée. Un grand merci à Netgalley et aux Editions Grasset pour cette belle lecture.



#Passécomposé #NetGalleyFrance
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La rafle des notables

Avec l’âge, Anne Sinclair se rend compte qu’elle connaît peu l’histoire de son grand-père paternel, Léonce Schwartz, son père Robert lui en a très peu parlé et elle n’a pas posé de questions dans sa jeunesse, du moins pas assez, mais on sait bien à quel point une chape de silence s’est abattue sur les descendants des victimes de la Shoah au sortir de la guerre. Elle connaît mieux l’histoire de ses grands parents maternels, Paul Rosenberg, un marchand d’art connu, ami de Picasso, qui a pu fuir aux USA à temps. De Léonce, elle ne connaissait qu’une légende familiale qui raconte son évasion rocambolesque, de Drancy, croyait-elle, grâce à l’héroïsme de sa femme Marguerite. Anne Sinclair décide de rechercher les traces de cet homme, mort trois ans avant sa naissance, juste après l’armistice de mai 1945.



Léonce n’a pas été interné Drancy, mais à Compiègne, un petit camp de transit. Il a été arrêté le 12 décembre 1941, pris dans la rafle des notables, l’une des deux premières, avec celle dirigée contre des avocats Juifs en août de la même année. La solution finale et la machine de mort nazies sont encore en phase de rodage. Ces deux premières rafles concernent des notables, soit des intellectuels, des membres de profession libérale ou des chefs d’entreprise aisé comme Léonce qui est négociant en dentelle de Bruges. Ils sont sept cent quarante trois, arrêtés au petit matin dans leurs immeubles cossus. Toutefois Berlin exige mille prisonniers, le lot sera complété par trois cents Juifs étrangers arrêtés dans la rue et qui n’appartiennent pas du tout à la même classe sociale.



Ces notables ne se sentent pas Juifs le moins du monde, ils ne fréquentent pas les synagogues, vivent en France depuis des siècles et se sentent uniquement français, ils sont parfaitement assimilés et appartiennent à l’élite de la nation. Malgré la montée de l’antisémitisme dans les années 1930, le fait que les théories d’Hitler sont largement connues dans l’opinion, et même assez partagées, ils ne voient rien venir. Les Juifs étrangers, le plus souvent des artisans venus se réfugier au pays des Droits de l’Homme, arrivent de pays où on les persécute depuis toujours et n’ont aucune naïveté sur les intentions du régime de Vichy. Leurs visions sont radicalement opposées et le sujet de l’identité juive n’est jamais discutée au camp, sous peine que cela ne tourne en conflits ouverts.



L’internement de ces personnes durera jusqu’à fin mars 1942 et Anne Sinclair nous raconte avec pudeur la vie de ces notables tombés de haut, qui n’ont jamais eu à souffrir d’antisémitisme jusqu’à ce jour. Ils essaient de résister moralement malgré la faim, la crasse et les maladies, ils organisent une vie culturelle. Il n’y a ni travaux forcés, ni extermination et ce camp est le seul placé directement sous l’autorité de l’armée allemande alors que Drancy est géré par la police française, du moins officiellement. Ce camps est destiné à faire mourir les prisonniers à petit feu, principalement en les affamant.



En mars 1942, plus de cinq cents survivants partiront par le premier convoi pour Auschwitz et pratiquement personne n’en reviendra. Les plus jeunes et les plus malades seront libérés, non parce que les nazis auraient eu des scrupules, mais par des errements administratifs, la voie vers l’Est est enfin libre, les permissionnaires allemands sont retournés au front. Léonce sera transféré à l’hôpital d’où Marguerite le fera évader on ne sait comment. Il mourra trois ans plus tard suite aux mauvais traitements endurés et personne ne sait comment ils ont vécu ce laps de temps.



Anne Sinclair n’a pas retrouvé de traces concrètes de son grand père, mais elle a évoqué le destin de ses compagnons dont beaucoup étaient très connus, elle souligne leur courage et leur grandeur face à l’indicible. Ce témoignage est nécessaire pour rappeler ce fait peu connu et c’est pour moi un coup de coeur qui m’a beaucoup touchée.



#Larafledesnotables #NetGalleyFrance !
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La rafle des notables

Comme tout le monde, pendant une période de sa jeunesse, Anne Sinclair n'était pas spécialement intéressée par la vie de son grand-père paternel et son père n'en parlant pas, son manque de curiosité était légitime. Sa seule connaissance était l'histoire d'une évasion plus ou moins rocambolesque à l'instigation de sa grand-mère !



Avec ce petit livre, certainement beaucoup plus mince que la somme des recherches qu'elle a effectuées, sa plume de journaliste lui a permis de se réapproprier la vie de son grand-père. Par la même occasion elle a partagé tout ce qu'elle a appris de cette rafle, un peu oubliée, et de la mort par famine qui était appliquée au camp de Compiègne.



Je savais qu'il y avait un camp d'internement à Compiègne mais je n'avais jamais su qu'une partie des internés étaient des notables juifs, français de longue date.



Toutes les petites histoires dans l'Histoire de l'holocauste sont les bienvenues pour continuer de mettre au jour toutes les exactions commises et par son talent d'écriture elle a rendu celle-ci accessible à tous !



Merci à NetGalley et Grasset pour cette lecture témoignage !



CHALLENGE RIQUIQUI 2020
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La rafle des notables

Anne Sinclair explique qu'elle n'avait que peu d'éléments pour aborder dans ce livre uniquement une histoire familiale, et qu'elle ne souhaitait pas en faire un roman « car j'aurais eu l'impression de trahir le récit si douloureux qu'ont livré les quelques survivants. »



C'est un témoignage, une enquête fouillée sur le camp de détention de Compiègne-Royallieu qui a vu le jour.



Anne Sinclair met en effet en lumière ce camp français administré par la Wehrmacht, moins connu que celui de Drancy, Pithiviers ou Beaune-la-Rolande.

Elle raconte la rafle des notables, comment le 12 décembre 1941, les vies de Léonce et Margot, Schwartz, ses grands-parents paternels, et celle, de tant d'autres familles, ont basculé. Ce matin-là, 743 notables juifs français et 300 juifs étrangers, ont été interné dans « Le Camp de la mort lente » pour une détention barbare, inhumaine.

Quelques-uns furent libérés. Pour les autres, le convoi n°767, parti de la gare du Bourget-Drancy, les achemina à Auschwitz, trois mois et demi plus tard.



Un pan triste et sombre de l'Histoire que l'auteure dépose « comme un fardeau intime devenu mémoire collective ».

Elle évoque à plusieurs reprises ce sentiment de culpabilité qui la tiraille, la hante, celui de ne pas avoir interrogé davantage son père sur le passé, sur ce qui s'est passé dans ce camp. Elle nourrit alors une obsession, celle « [d'essayer] de redonner un peu de chair aux disparus. »



Un grand et bel hommage à son grand-père.



« Léonce restera donc comme une ombre qui passe dans ce récit. Mais l'effort pour retrouver sa trace durant ces mois de 1941-1942 m'aura permis d'entrer par effraction dans une tragédie déchirante et mal connue, et me donner la volonté d'en transmettre le récit à mes enfants et petits-enfants. »



Texte toujours et ô combien nécessaire, à l'heure où l'on assiste en France, depuis quelques années déjà, à la résurgence de l'antisémitisme ainsi qu'à la montée de l'extrémisme et du populisme.
Lien : https://seriallectrice.blogs..
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La rafle des notables

Le 12 Décembre 1941, Léonce Schwartz, grand-père d'Anne Sinclair, commerçant en dentelle d'origine juive, est arrêté ainsi que 743 autres Juifs d'origine bourgeoise pour la plupart et 300 Juifs transférés de Drancy. Ils sont conduits à Compiègne, au camp d'internement de Royallieu. Ils endurent pendant 3 mois le froid, le manque d'hygiène, la faim, la promiscuité, la maladie et l'ennui. Beaucoup sont transférés à Auschwitz fin mars 1942 d'où ils ne reviendront pas. Léonce Schwartz a eu plus de chance lui puisqu'en février, il a été conduit au Val-de-Grâce d'où sa femme arrivera à l'en faire sortir. Il meurt quelques semaines après la fin de la guerre.



C'est par les médias que j'ai appris qu'Anne Sinclair, que je connaissais comme journaliste, a eu un grand-père interné pendant la Seconde Guerre Mondiale en raison de ses origines juives. Il s'en est sorti de peu.

J'ai trouvé ce récit intéressant car il éclaire les arrestations et déportations en France de personnes juives ou dont les ascendants l'étaient. Ici, il s'agit de personnes de milieu bourgeois, certains comme le grand-père de l'auteur avaient même reçu la Légion d'Honneur. C'est d'autant plus choquant que ces gens-là qui avaient honoré la France, aient été arrêtés, déportés et exécutés. Cela m'a fait penser au film "La rafle" où un des acteurs principaux a combattu pour la France pendant la Première Guerre Mondiale et est déporté malgré cela.

On voit aussi dans ce récit le rôle de la Police française qui s'associe à la Police allemande pour arrêter la population. Encore une fois, cela met en lumière le fait que le gouvernement ait collaboré pleinement aux exigences allemandes.

Je ne connaissais pas l'existence de ce camp d'internement français qui a rempli un rôle identique à ceux de Drancy et Beaune-la-Rolande, avant que les détenus soient envoyés vers les camps de la mort. Ce récit m'a donc appris quelque chose.

Même si ce camp ne faisait pas travailler les détenus, c'est aussi révoltant car il s'agissait de personnes d'un certain âge qui enfermées dans le dénuement quasi total, la faim, le froid, la maladie, sont mortes à petit feu avant d'être conduites à Auschwitz, leur sort n'a donc pas été plus enviable que les détenus d'Auschwitz lui-même.

Ce court récit d'une centaine de pages a donc été instructif pour moi.
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La rafle des notables

La nuit du 12 décembre 1941, 743 Juifs français sont arrêtés et emprisonnés au camp de Compiègne. Ils sont commerçants, avocats, écrivains, médecins… Cette rafle qui a lieu plusieurs mois avant celle du Vel d’Hiv, en juillet 1942, est appelée la rafle des notables. Les Allemands, aidés de la police française, arrêtent aussi des Juifs, dans la rue. Quand ils s’aperçoivent qu’ils n’obtiendront pas de cette manière le quota de mille détenus exigé par Berlin, ils font venir 300 prisonniers de Drancy.





Anne Sinclair écrit que cette histoire la hante depuis l’enfance, mais qu’elle n’a pas posé de questions, entretenant le silence familial. Lorsqu’elle a commencé ses recherches sur son grand-père, Léonce Schwartz, elle a découvert qu’il avait été emprisonné à Compiègne, et non pas à Drancy, comme elle le croyait.





L’auteure a fondé son essai sur des témoignages « peu nombreux mais décisifs » qu’elle a tenu à citer au fur et à mesure. Elle n’a découvert que peu de documents au sujet de son grand-père, mais il est toujours en toile de fond, à travers tous ces hommes à qui elle donne la parole. Ils ont été prisonniers trois mois, dans ce camp. Quelques-uns furent libérés, par exemple, les « très grands malades » que « les Allemands préféreraient voir mourir à l’hôpital », d’autres furent déportés à Auschwitz. Comme l’auteure le fait, au nom de leur mémoire, je vous cite les éléments du transfert : c’était dans « le convoi n°767, composé à la gare de Bourget-Drancy entre 12 heures et 17 heures le 27, arrivé en gare de Compiègne à 18 h 40, et reparti à 19 h 40. Il arriva à Auschwitz le 30 mars 1942 à 5 h 33 du matin. »





Dans ce camp que, dans un témoignage, Jean-Jacques Bernard a appelé Le camp de la mort lente, les détenus semblent destinés à mourir de faim et de maladie. Et malgré cette souffrance, une vie culturelle s’organise : les prisonniers donnent des conférences pour permettre à l’esprit de survivre.





Pour écrire La rafle des notables, Anne Sinclair s’est beaucoup documentée et a enquêté. Les fruits de ses recherches sont retranscrits avec énormément de respect et de dignité. Dans la préface, l’auteure écrit que d’« essayer de redonner un peu de chair aux disparus est devenu pour moi une obsession ». Merci à elle pour ce travail de mémoire. Grâce à elle, cette rafle n’est plus connue seulement des spécialistes.





Je remercie sincèrement NetgalleyFrance et les Éditions Grasset pour ce service presse.




Lien : https://valmyvoyoulit.com/
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21 rue La Boétie

J'ai énormément aimé ce livre. J'ai d'abord vu l'exposition à Paris qui m'avait beaucoup séduite : sensation d'intimité avec Paul Rosenberg et ses peintres. La scénographie était particulièrement bien étudiée afin d'aborder aussi la spoliation des biens appartenant à ces familles françaises juives et aussi le thème vu par les nazis de l'art dit "dégénéré". Mais le livre m'a touchée particulièrement. La soixantaine, les parents qui nous quittent, et ce besoin de connaître "d'où je viens, qui je suis, où je vais". Anne Sinclair se livre, elle fait un beau cadeau au lecteur, c'est bien écrit, j'ai ressenti son besoin de mener cette quête, rassembler les morceaux de son puzzle familial. Elle s'était toujours reconnue comme la fille de son père, héros de la résistance, et avait délaissé sa branche maternelle, considérant cette dernière, peut-être, moins noble que son héros. Bien sur nous découvrons, sous sa plume, le monde d'un marchand d'art mais c'est surtout son émotion que j'ai ressentie dans son écriture, son questionnement aussi, qui donne beaucoup de profondeur à ce livre. J'ai été interpellée par le fait que ses grands-parents ont dû fuir la France alors que les Etats-Unis les ont recueillis et qu'Anne Sinclair a dû quitter les Etats-Unis après des évènements douloureux pour revenir en France. La boucle est bouclée!
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Passé composé

Cela se lit très bien. On se jette sur l'affaire du Sofitel, pas forcément pour lire du croustillant ou de l'inédit, mais pour voir les mots que la journaliste aura posés sur cette période, sachant qu'elle veut en dire très peu. On mesure ce que ça a dû être d'être épiée à ce point, y compris pour des actes anodins (comme aller acheter de la vaisselle, car il n'y en avait pas dans la maison louée en catastrophe - pas facile à trouver car personne ne voulait que son bien soit investi par les paparazzi, immeubles attenants compris, loués à prix d'or car ils donnaient sur la maison du couple -). On apprend aussi que Sarko et sa clique avaient déjà un dossier sur l'affaire du Carlton, qu'ils prévoyaient de dégainer dès que DSK aurait été investi par le PS. C'est sournois les hommes politiques ! A lire aussi pour découvrir les grosses colères, assez surréalistes, de Patrick Le Lay, obnubilé par le cours de l'action TF1.
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21 rue La Boétie

J'ai effectué le chemin contraire à celui pris par L'une, auteure d'une critique de ce livre : je l'ai lu après avoir visité la très belle exposition de Liège, et je ne le regrette pas. Je ne suis pas certain que mon intérêt se serait manifesté de la même manière.

Sa lecture me permettait de me replonger dans le circuit de cette exposition qui, en fin de compte, m'a paru plus passionnante que le livre.

L'histoire pourtant ne manque pas d'intérêt, celle d'un marchand d'art éclairé, Paul Rosenberg, qui sût déceler les talents de Picasso, Braque, Léger, Marie Laurencin, les faire connaître en Europe et aux Etas-Unis. Un marchand d'art juif, et dont nombre de tableaux furent dérobés par les Nazis et qui s'attachera dès la fin de la guerre, à les retrouver et à se les faire restituer non sans peine.

Les souvenirs et l'idée de rechercher l'histoire de son grand-père maternel trouvent leur origine dans une entrevue en 2010 qu'elle eût avec un fonctionnaire : " Vos quatre grands-parents, ils sont nés en France, oui ou non ?". Nous la sentons révoltée à ce moment-là et à beaucoup d'autres lorsqu'elle évoque plusieurs collaborateurs notoires, les lâchetés, les vols.

Une lecture facile, intéressante mais qui ne me laisse pas un souvenir inoubliable.



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La rafle des notables

Un récit glaçant et émouvant d’une femme qui cherche des souvenirs familiaux. Comme souvent, ce n’est que trop tard que l’on cherche à savoir, lorsque les personnes qui auraient pu nous raconter ne sont plus là.

Ce sont les circonstances de l’arrestation de son grand-père Léonce et ses conditions de détention qu’Anne Sinclair cherche à retrouver. A partir du peu de récits familiaux dont elle dispose, elle part dans des recherches notamment au Mémorial de la Shoah, pour comprendre ce qui s’est passé en ce 12 décembre 1941.

Elle nous décrit la stupeur, la naïveté de ces hommes qui ne se sentaient que français, et qui avaient du mal à s’identifier comme juifs. Elle nous raconte ce camp d’internement de Compiègne, là où on mourrait lentement.

Un récit et une lecture nécessaires.

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21 rue La Boétie

« On oublie d’interroger les grands quand on est jeune. »



Après une période difficile de sa propre vie (affaire DSK en 2011), Anne Sinclair se recentre sur ses racines et met en scène son ascendance maternelle Rosenberg, notables juifs parisiens, avec son grand-père Paul , mythique marchand et collectionneur d’art. Une aventure familiale bousculée par la Grande Histoire avec la fuite vers les États Unis en 1940 et la spoliation des biens en France.

Entre ses recherches dans les archives personnelles et la documentation sur une époque, Anne Sinclair ressuscite les disparus avec ses propres souvenirs d’enfance et cette nostalgie de les suivre dans les lieux qui les ont vus vivre ou passer.



Le 21 rue La Boétie devient une entité vivante dans les pas d’un marchand visionnaire sur l’art moderne, croisant la fine fleur de la création artistique de l’entre-deux-guerres. Si le destin des Rosenberg a été plutôt clément en miroir de la Shoah, il convient de mesurer les conséquences de ce bouleversement avec l’installation définitive de la famille aux États Unis et le parcours chaotique de récupération des biens spoliés.



Un livre passionnant écrit avec brio et une distance affectueuse, évoquant les aléas de la fortune, le sentiment d’exclusion et l’exil.

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21 rue La Boétie

Reconnaissons volontiers à Anne Sinclair bien du courage pour avoir écrit ce livre dans une période particulièrement douloureuse de sa vie de femme.



Cet hommage à ses grands-parents vénérés lui a sans doute servi de catharsis pendant la tourmente qui la consigna à New York dans les circonstances que tout un chacun a pu suivre au jour le jour. Ceci étant, Anne Sinclair est journaliste et pas biographe. C’est en lisant rapidement son livre – en moins d’une journée – que je me suis souvenue à quel point j’avais apprécié LA biographie d’un autre grand marchand d’art, je veux parler du livre de Pierre Assouline, L’Homme de l’Art : D-H Kahnweiler, paru en 1989, et qui figure dans la bibliographie.



Anne Sinclair est ma contemporaine à deux ans près. Simplement, quand elle publie une photographie d’elle à 20 ans, elle est en compagnie de Pablo Picasso, qui la couve d’un regard attentif. Elle est née à New York dans une famille très riche qui a eu la possibilité de fuir la barbarie nazie, et en a payé le prix. Pas le prix du sang, certes, et personne ne saurait le leur reprocher, mais celui du courage puisque son père s’est engagé dans la 2ème DB du Général Leclerc, et celui de la spoliation des œuvres d’art que son grand-père Paul Rosenberg avait choisies et acquises auprès de peintres majeurs du XXème siècle : Matisse, Braque, Léger et surtout Picasso, artistes auxquels il offrait de larges émoluments.



Ce livre est un hommage à Paul Rosenberg, homme nerveux, visionnaire, expert, anxieux, obstiné. Mécène aussi, qui fit don de splendides tableaux aux Musées de France et de cette Amérique qui l’avait accueilli. Elle eut bien de la chance d’avoir en partage le privilège d’être la petite-fille adorée d’un tel homme. Elle le raconte avec passion et humilité, en parcourant les archives familiales, les correspondances entretenues pendant de nombreuses années entre Paul et Picasso, son presque jumeau. C'est son patrimoine à elle, nul ne pourra le lui contester. Ce livre est aussi le manifeste d’une journaliste de talent, qui reprend sa carrière à zéro, à 63 ans.



La partie la plus intéressante du livre se trouve à la fin, lorsqu’elle décrit les patientesrecherchent de son grand-père pour retrouver partout en Europe ses tableaux volés par les Allemands, revendus par des marchands peu regardants sur leur origine, les procès qu’il intenta pour les récupérer – en très faible partie – son rebond professionnel à New York après la guerre.



C’est aussi, pour l’auteur, un pèlerinage aux sources de sa parentèle maternelle, avec toutes les surprises que l’on découvre souvent dans les histoires de familles. Une illustration de l’attitude lamentable de certains français pendant l’occupation vis-à-vis de leurs compatriotes, voisins, patrons – je pense au couple de concierges de l’immeuble sis au 21 rue La Boétie - qui se trouvaient être juifs.

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