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3.84/5 (sur 21 notes)

Nationalité : France
Biographie :

Agrégée de langue et de littérature hispaniques, docteur en littérature générale et comparée, Annick Le Scoëzec Masson est l'auteur d'un essai littéraire (Ramón del Valle-Inclán et la sensibilité "fin de siècle, 2000), de deux romans (Mélancolie au Sud - 2004 - ; Esplanade Avenue - 2010) et d'un recueil de poèmes (Suite indienne, 2001). Elle a également publié une édition critique et nouvelle traduction des Sonates de Ramón del Valle-Inclán (Sonates, mémoires du marquis de Bradomín et autres textes inédits, Editions Classiques Garnier, 2014).

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Bibliographie de Annick Le Scoëzec Masson   (11)Voir plus

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Citations et extraits (45) Voir plus Ajouter une citation
On dit que le château de Tréhogonteuc fut bâti en une seule nuit par des êtres venus des profondeurs de la forêt. Ce n’étaient pas de ces créatures qui peuplent sources ou feuillages, au front bombé sous la résille, joncs graciles des bords de rivière. Ennemies du soleil, les korriganes se matérialisaient dans les émanations des marais lorsqu’une clarté parvient à fendre la ténèbre qui pèse sur les fourrés, de ce côté-là du bois. Elles jaillissaient alors avec des cris, vacillaient un instant au-dessus des tourbières, puis franchissaient à la vitesse de l’éclair les landes, les vallons, les taillis et les hautes futaies de Bréchéliant, pour planter leurs griffes dans les tempes des endormis, et leur ravir le peu d’âme dont ils se souvenaient. Après s’en être fait des colliers, après avoir tourné sur elles-mêmes comme des louves en ouvrant grandes leurs bouches folles, elles repartaient avant les lueurs du jour, vers les bas-fonds où elles enfouissaient leur butin à jamais.
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- Comme il fait froid, dit la dame, comme il fait froid toujours !
- Voulez-vous qu’on ajoute à votre chambre un brasero ? Bientôt finit l’hiver...
- Non, rien ne saurait mieux réchauffer mon âme que vous entendre. La fleur de givre à ma fenêtre ne m’est alors plus décembre, mais nez espiègle du printemps. Chantez, Ariane, chantez encore pour que mon cœur dégèle, pour que le sang à nouveau en moi coule ! Chantez ce poème...
La suivante prépara sa vielle en courbant le genou. Elle tendit les cordes sous l’archet.
- « Tant ai le cœur plein de joie, que tout pour moi change de nature. Fleur blanche, vermeille et claire, me semble la froidure... Tant au cœur d’amour, de joie et de douceur, que l’hiver me semble une fleur et la neige verdure ! »
Les notes s’évaporèrent après avoir tenu un moment dans l’air.
- Oui, parlez-moi de lui, de ce troubadour, de la légende..., soupira la dame.
- Celle du cœur mangé ?
Elle tressaillit :
- Oh, non, par pitié ! Tant de finesse, côtoyer tant de cruauté !
- C’est jalousie, Madame ! Jalousie qui retourne en nous le loup prêt à tout dévorer... Nul n’en est à l’abri et les médisants sont légion.
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L'arbre au-dehors

L'arbre vint à moi.
Comme un petit oiseau, un chien, un chat.
Sur la terrasse où j'étais assise,
ses branches poussées depuis le bas
par un peu d'air léger,
s'accrochaient à ma frange.
Derrière, sous la véranda,
une rumeur de vent de plaine,
de conversations inlassables.
Des pétales tombaient à mes pieds.
L'arbre contait bien des choses
que je ne saurais dire.
Ses odeurs énergiques
de sève en ruisseaux, d'écorce saignante,
me soulevaient.
Je perdais consistance,
mes yeux infirmes s'ouvraient.
Je voyais la ronde
des poussières sous mes doigts,
pensais :
«Si tu sais regarder
à l'intérieur,
c'est tout le paysage
qui s'élargit
aux quatre coins des perspectives.
Le passé est là tout entier
qui se dépose autour de toi,
chaque particule,
l'éclat d'une vie qui
passa la frontière invisible
en un lointain jadis.
Le monde est en train de passer en toi.
Personne ne te le volera».
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[...]
Parce que j'ai beau te regarder,
tu peins sans sourciller,
la forêt, ses nuages et la pluie,
mille monts aux nombreux arbres rouges,
les cloches d'un monastère plein de brume,
et les brouillards, les murmures
qui hantent là-haut,
tout en haut sur les sommets,
ledit Pavillon Haut.


(p.85, fin du dernier poème "JADE CHERCHAIT TOUJOURS")
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Aboiements furieux au point du jour : / j’ai fait pendre un esclave.
J’avais surpris / les reflets d’un embrasement
sur la cheville nue / de Chântra.
Il n’a rien dit, / signant ainsi son crime.
Chântra a jeté, entre elle et moi,
le long pan de son voile ;
avec la fixité d’une statue,
elle a raidi son corps, l’a tendu
comme un arc.
Je me suis précipité, face contre terre,
j’ai embrassé ses genoux,
le regard perdu, ma langue avide sur ses
pieds.
Elle n’a rien dit.
J’ai fermé la porte de sa chambre, / donné la clef
à la vieille édentée / qui en garde le seuil
couchée de tout son corps.
Je suis parti sept jours dans la montagne.
Veillant dans un abri de chasseur,
je voyais l’aurore / enflammer le vallon,
le soleil se pendre dans les arbres,
descendre l’essaim des ombres,
les étoiles fuser.
Des chiens hurlaient au point du jour :
j’avais fait pendre un esclave / et Chântra...
J’ai fumé trois jours encore / et trois nuits dans ma tanière.
Je ne voyais plus rien, / la noire Kâlî s’enroulait dans les flammes,
excitant les grelots de ses chevilles.
Au petit matin elle se dissipait / dans le brouillard vert
d’un lointain Udaipur.
J’ai fumé encore / et j’ai cru deviner, dans la vallée,
la luxuriance d’une battue :
brocarts et satins, / pashmînâ d’Amritsar,
tarpans de soie / sur l’herbe éclatante
et la bave des chiens.
J’ai senti la fourrure sous mes doigts,
l’odeur aigre du fauve, / son sang coagulé.
Je me suis déguisé, me suis coulé
en feulant dans les fourrés.
La Noire a crevé mon sommeil
de son masque hideux et sanglant.
Toute la nuit j’ai senti / la mort labourer mes veines.
La gueule en feu, habité d’un tonnerre / à faire rugir les montagnes,
je me suis désaltéré / à une flaque de boue
dans les relents de vieux cuir d’un / troupeau d’éléphants.
Haletant, je me suis affaissé, / j’ai laissé passer dans mes yeux
un vol de babouins qui ne reviennent / jamais.
Repu de nuit, la sueur glaçait mon front.
Maintenant,
une femme est à mes côtés,
pieds maquillés de henné.
Elle m’enveloppe de sa voix berçante,
me cajole
de ses mélodies.
Elle a défait ses cheveux, me dit que,
si je veux, elle est prête :
que le bûcher soit allumé.
Mais voilà qu’elle hurle que je suis fou;
dans l’orage de mes rugissements,
je ne l’écoute pas.
Pourquoi vouloir retenir mon âme ?
La Noire seule le sait, / mais qu’y puis-je ?
Je ne m’habite plus,
cette maison n’est plus la mienne.
("Le tigre" p.68).
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[...]
Des paroles fracassantes
traceraient sur les pages
la pureté de leurs signes,
se formeraient des paysages,
ondoiements
intacts et anciens.
Une bulle de silence heureux
alors
s'évaderait par la fenêtre.



(p.15-16, "SIGOU LE CHAT SAVAIT", extrait)
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[...]
Du pavillon où nous arrivions,
il ne restait plus,
à pinceau levé,
qu'un seul trait,
ébauché
comme on fait un signe.


(p.18, extrait de "DES VENERABLES AUX PIEDS CROTTES")
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Shuimo

Il peignait.


Ciel dégagé, rosissant au loin,
se grisant soudain,
se couvrant de brume,
vapeur de rivière
qui s'élève enfin jusqu'au lendemain.

Pins étirés noirs
regardant devant,
clous échevelés,
frange irrégulière sur le crêt des monts,
squelettes dessinés sur les nuées,
molle écharpe mauve qui se détend,
se dissout vers l'Est,
rôde près des arêtes
en se défaisant.

Un nuage énorme, masse violacée,
dresse à l'arrière-plan
son galbe au vertige
de vive montagne,
de roc écrasant.

Ses contours se découpent en se chevauchant.

La lumière faiblit,
fleurs de cerisier
emportées,
léger vent levé.

Feuillage étagé d'une poignée de cèdres,
géants rapetissés, enchevêtrés.

Une silhouette infime est arrêtée
comme s'interrogeant
sur un sentier.

Lueur ténue derrière les nues,
la lumière n'est plus.

Et puis flotte encore
la ligne confuse
qui ne sépare plus
le haut et le bas.
Car elle n'est plus rien
qu'ombre diffuse,
le vaste trou
du noir.
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* Il rêvait. *



Quand il s'éveilla
au bruit des cordes pincées,
à l'odeur de vieilles roses tombées
sous la pluie,
rosée de nuit,
à la suave érosion de l'aube sur sa peau,
brûlure glissée au long de son dos,
il était devenu
papillon.



(p.36 - "LE CITHARISTE")
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Cheval à la bouche dure,
descendu au galop avec l'éclair,
abîme dans la nuit,
d'où viens-tu ?
Ce n'est pas le tonnerre
que j'avais d'abord perçu,
mais ce long cri de torrent des montagnes,
de furieux tremblement.
Minérale, implacable,
ta crinière se hérissait dans la tempête.

(p.49 - extrait de "L'ORAGE")
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