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Critiques de Antonine Maillet (39)
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Les Cordes-de-Bois

Un roman des années 70, d’une autrice qui a redonné la fierté de leur langue aux Acadiens, comme Michel Tremblay avait fait pour les Québécois en osant mettre en scène le langage de la rue.



C’est une histoire qui présente« ces conteux, radoteux, discoureux, défricheteux-de-parenté… » qui mélangent le conte et la réalité.



C’est aussi un roman qui met en valeur des femmes fortes, des femmes libres qui habitent un lieu dit « les Cordes-de-bois » :

- la Piroune des années 1920, la première à raccourcir ses robes et à se faire couper les cheveux

- la tante Patience qui envoie des lettres humoristiques et des caricatures et des bandes dessinées.

- la Bessoune, fille de la Piroune, qui tient tête aussi bien au curé qu’au propriétaire de l’entreprise locale. Elle affronte même «Ma-Tante-la-Veuve », le pilier de la rigidité morale du coin.



Les mots que l’autrice met dans la bouche de ses personnages sonnent parfois bizarrement, on ne comprend pas tout de suite, mais les paragraphes suivants clarifient les expressions particulières sans qu'on ait besoin d'un lexique.



Une belle lecture, avec le charme de l’ailleurs et de l’autrefois, avec le petit goût des embruns salés des côtes acadiennes.

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La Sagouine

Si la musique des langues régionales vous enchante, la pittoresque Sagouine vous ravira.



La Sagouine c’est une pièce de théâtre, le monologue d’une femme de ménage acadienne, une pauvre vieille qui n’a pas beaucoup d’instruction, mais beaucoup de sagesse.



Dans son langage particulier, la première personne du pluriel sert à toutes les conjugaisons : « je pouvons », « il pouvont ». De plus, le texte étant destiné à la scène, son écriture comprend tous les sons de l’accent ou des mots déformés : noir devient « nouère », plus devient « plusse ». Il faut parfois lire à voix haute pour en comprendre le sens.



Pour les savoureuses expressions locales, un lexique est heureusement fourni à la fin du livre, ce qui permet d’apprendre ce qu’est un « frolic », une fête, ou la « flatacoune », une bière de fabrication domestique.



Les Acadiens d’aujourd’hui ne parlent pas vraiment le langage caricatural de la Sagouine, mais on y reconnaît le même accent. Il se métisse aussi de chiac, mélange de français et d’anglais.



La Sagouine a connu une grande popularité au Canada, elle a fait l’objet d’une série télévisée et de très nombreuses parodies. Dans son Acadie natale, il y a même le « Pays de la Sagouine », une reconstitution historique destinée aux touristes.



L’ouvrage est devenu un classique, la femme de ménage est devenue une grande vedette, mais n’a rien perdu de son charme…

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Pélagie-la-charrette

Si on m'avait dit que je lirais un Goncourt sans le savoir, et qu'en plus je l'aimerais bien, je ne l'aurais pas cru.

Pourtant, c'est ce qui est arrivé avec Pélagie-la-charrette, roman qui m'a été conseillé et dans lequel je me suis plongé assez dubitativement, sans trop y croire, et même un peu dérouté au commencement. Au final une très bonne surprise.



C'est l'histoire de quelques Acadiens dont la vie basculera en 1755 lorsque le roi d'Angleterre décidera de vider leurs terres de ses occupants. Grand seigneur, ceux qui ne seront pas tués seront déportés au sud, en tant qu'esclaves. Ici arrive Pélagie, jeune mère lors de cette déportation, elle y perdra, outre un mari et quelques enfants, sa Liberté. Mais durant tout son temps d'esclavage elle n'aura de cesse que de rêver à sa Grand'-prée et à sa terre natale. Alors, une fois libre, elle montera une expédition pour retourner au pays. Au fur et à mesure de son voyage, les réfugiés s'agglutinent à sa charrette qui devient convoi, et les aléas de la vie et du climat vont jouer leur rôle à cœur joie. Dix ans de remontée vers le nord, de privations, de morts et de naissances, de rencontres plus ou moins heureuses, d'espoirs et de craintes. Dix ans pendants lesquels la charrette de Pélagie montera inexorablement vers l'Acadie, suivie de près par la sombre charrette de la mort...

Ce roman m'a extrêmement plu, tant par son histoire, véritable odyssée terrestre et rurale, que par ses personnages bien trempés et le style de l'auteur. Ce dernier peut être déroutant au début, mais on s'y fait rapidement une fois que l'on a compris que le narrateur contait tout en s'adressant aux personnages dont il / elle raconte l'histoire. C'est un pur plaisir de lecture que ces tournures désuètes et patoisantes aux accents oubliés, que ces patronymes montrant toutes la filiation et le peu d'imagination des parents lorsqu'il s'agit de trouver un prénom à leur progéniture. Ça plus la dimension fabuleuse de cette histoire, avec la métaphore de la charrette noire, avec les superstitions et autres croyances ou pratiques plus ou moins utiles, donnent une saveur particulière à ce récit totalement iconoclaste.

Et de surcroît, un petit cours d'Histoire.

Que du positif.
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Clin d'Oeil au temps qui passe

Après avoir visionné le documentaire Les possibles sont infinis de Ginette Pellerin, j’avais glané quelques faits sur Antonine Maillet et souhaitais en approfondir certains en parcourant ce récit autobiographique. L’auteure de Pélagie-la-Charrette, Prix Goncourt 1979, reprend ce fil déroulé et l’étoffe avec sa verve littéraire particulière et au final, ça donne un ouvrage un peu décousu mais dans lequel j’ai pu comprendre les ressorts qui l’habitent au moment d’écrire. Passant rapidement sur l’enfance et l’adolescence, son propos s’attarde plus précisément sur la création de ses nombreux personnages qu’elle porte continuellement en elle, n’hésitant pas à discuter avec ceux-ci alors qu’elle se penche sur ses prochains écrits, y revenant souvent « soûle de [son] voyage en territoire imaginaire ».

La vieillesse trouve aussi son chemin dans Clin d’œil au temps qui passe; maintenant nonagénaire, Antonine Maillet s’insurge contre Charles De Gaulle qui en faisait un naufrage. Une attitude positive qui l’a toujours habitée et qui ne cesse pas malgré les ans qui s’accumulent et qui lui amènent quelques deuils.

Bref, j’ai passé un bon moment de lecture et sa bibliographie féconde m’en promet bien d’autres.







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Pierre Bleu

Une ode à la culture francophone ! Un conte moderne pour faire vibrer les fibres nationalistes en nous. Pierre Bleu, un ange venu du ciel pour aider les habitants d'un village, sur plusieurs générations, qui se battent pour rester bien vivants, et bien français. Je n'avais jamais lu les écrits de Maillet, et je suis contente que ce soit maintenant chose faite. Une écriture qui a fait écho en moi, avec toutes les particularités de langue ''québécoise'', la langue du terroir. C'était fluide, imagé, bien ancré dans le réel. Une bonne lecture.
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Pélagie-la-charrette

Il y a des moments qui conviennent pour la lecture d'un livre et d'autres qui non. J'ai lu ce livre en 1980 et le seul souvenir qui m'en restait était que je ne l'avais pas apprécié. Je viens de le relire et j'ai aimé... Peut-être à l'époque ai-je été découragée par l'évocation de toutes les lignées des personnages (surtout "dans un pays où la demi-belle soeur cadette épouse en seconde noce le père du mari de sa soeur du premier lit". Mais l'énumération de ces lignées se comprend lorsque l'on sait que les "Acadiens-Français" ont tous perdu un ou plusieurs membres de leur famille (ascendants ou descendants) lors de leur déportation (le dérangement comme ils disaient) de l'Acadie par les Anglais Et pour évoquer cela, il y a la langue, sans doute celle que parlait nos ancêtres et dont on retrouve encore des expressions (asteure, aller qu're...) dans le patois, notamment dans le wallon liégeois.
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Fabliau des temps nouveaux

Une fable, un tout petit livre de la grande autrice acadienne.



On y rencontre des personnages imagés : des animaux, le jeune « Pain Chaud » créé à partir d’une boule de pâte, ou des figures plus imposantes comme le Passé ou l’Avenir.



Un court texte plein de charme et de poésie, avec de jolis jeux de mots, mais qui, mine de rien, amène aussi des sujets d’actualité, comme la destruction de la planète par certains de ses habitants.



Un instant de lecture inspirant…

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Pélagie-la-charrette

« Un peuple qui n'a pas oublié la France après un siècle de silence et d'isolement n'oubliera pas au bout de quinze ans d'exil ses rêves d'Acadie. Il se souvenait de sa frayère comme les saumons, et comme les saumons, il entreprit de remonter le courant. »

En 1770, Pélagie Bourg dite LeBlanc entreprend avec ses enfants et plusieurs autres familles démembrées de retourner au village de Grand-Pré en Acadie (Nouvelle-Écosse). Après le Grand Dérangement de 1755, alors que les Anglais déportaient par milliers les Acadiens à bord de goélettes affrétées à cet effet tout le long du littoral de la Nouvelle-Angleterre, Pélagie n'a pas oublié le pays natal. Quittant la Géorgie, une première charrette tirée par trois paires de boeufs sera suivie par d'autres le long de la route vers le nord, à chaque rencontre d'un exilé décidé à revoir la terre ancestrale. L'art de raconter d'Antonine Maillet prend ici plusieurs formes : conte fantastique, récit historique, généalogie, un peu de romance, le tout baignant dans une parlure ancienne dont on perçoit même l'accent chantant acadien.

Le Prix Goncourt décerné à Antonine Maillet pour cet ouvrage en 1979 avait fait grand bruit au Québec, et c'est à la suite du visionnement du documentaire Les possibles sont infinis de Ginette Pellerin retraçant le parcours de l'auteure, qu'il m'est devenu impératif de lire Pélagie-la-Charette. Un roman poétique d'une grande valeur historique.
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La Sagouine

J'étais à l'Université de Montréal et nous avions reçu une invitation pour le lancement d'un livre ou le début d'une pièce de théâtre.



C'était un événement mondain et nous discutions une coupe de vin dans la main lorsque...



Lorsqu'une femme de ménage entra dans la salle avec son seau et sa moppe et commença à débiter un monologue que personne ne comprenait.



Notre première réaction a été de nous tourner vers la porte, nous attendant à voir entrer la sécurité pour demander à cette ménagère de sortir.



Il n'en fut rien. Viola Léger continua son monologue. Peu à peu on s'est habitué à son accent et on a commencé à comprendre quelques mots.



J'ai acheté le livre, et à l'aide du lexique fourni à la fin du livre, j'ai commencé à déchiffrer ce que La Sagouine nous racontait.



J'ai relu le livre une deuxième et troisième fois. Non pas pour déchiffrer ce qu'elle disait mais pour découvrir de plus en plus la sagesse de cette femme.



Ce n'est pas parce qu'une personne "parle mal" qu'elle est une demeurée. Dans le cas de la Sagouine, j'en ai beaucoup appris sur sa vie, sur son entourage et sur la vie.
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Pélagie-la-charrette

Chassées par les anglais, lors du grand Dérangement, les familles acadiennes sont envoyées comme esclaves dans le sud des " Etats-Unis".

Pélagie-la-charrette est l'histoire d'une de ces familles qui décide de prendre le chemin du retour, à travers le côte est de ce qui va devenir les Etats-Unis. Elle sera suivie de beaucoup d'autres familles.

Ce parcours vers le pays natal sera mouvementé.

J'ai beaucoup aimé ce livre d'Antonine Maillet, à l'écriture savoureuse , qui me fait découvrir l'histoire du Canada.

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Pélagie-la-charrette

Je n'ai pas du tout accroché sur ce texte qui passe du français à l'ancien français sans arrêt.

L'intrigue n'est pas inintéressante mais le style a été pour moi une barrière qui m'a laissée à la traîne du convoi de la Charette. Dommage.
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La Sagouine

Tout d'abord, il faut avertir le lecteur ou la lectrice que la narration ne se fait pas dans un "français de France". Ce long monologue est sciemment écrit dans la langue locale, idiomatique et populaire du Québec.

S’il convient d'accepter ce postulat dès le départ, les lecteurs français s’habituent petit à petit en retrouvant un écho lointain d’une langue commune et que l’écrivaine fait vivre avec succès dans son contexte. Le décor et le personnage sont ainsi mis en place dans leur authenticité. En fin de compte, et grâce tout de même au lexique judicieusement fourni, le français de France arrive à suivre la pensée du personnage.

La Sagouine n’est pas un roman moralisateur mais une « pièce pour une femme seule ». Ce sous-titre original définit sans ambiguïté le défi d’Antonine Maillet.

Lire plus sur http://anne.vacquant.free.fr/av/index.php/2021/11/09/antonine-maillet-la-sagouine/
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Pélagie-la-charrette

Roman nous contant le retour d'un groupe d'acadiens vers leurs terres , quinze ans après avoir été déportés. Ils mettront dix ans à faire la route du retour, menés par la courageuse Pélagie-la-charette. C'est ce périple qui nous est conté dans le sens premier du terme puisque ce récit est un le résultat de transmission orale, d'histoires telles qu'on peut se les dire autour d'un feu.

Le langage employé par Antonine Maillet, vieux canadien, est très difficile à comprendre . Il permet bien néanmoins de situer l'histoire dans le lieu et l'époque mais nuit énormément à la compréhension. Même si au fil des pages, on s'y habitue et comprend mieux, j'ai eu l'impression de lire en langue étrangère.

Je me suis accrochée pour le lire .

Tout dépend de ce que l'on cherche, un contexte, une ambiance ou la compréhension et l'histoire!
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Pélagie-la-charrette

Quel ennui ! Certes, attribuer le Goncourt à un livre aussi original se tentait, mais justement, est-ce que ce n’est pas trop original ? Pélagie-la-charrette à beau être attachante, ça ne suffit pas pour accrocher le lecteur qui doit « débroussailler » l’histoire perdue dans un vocabulaire d’un autre temps.
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Madame Perfecta

Je dois dire qu'au départ, je n'était pas très à l'aise de lire l'histoire d'une femme de ménage écrite par sa patronne privilégiée...



Les premiers chapitres n'ont fait que confirmer mon malaise...

Madame Maillet parlant de Perfecta, sa femme de ménage, comme si elles avaient eu une relation d'amitié égalitaire. Et ne prenant jamais en considération le fait, que Perfecta était son employée et que les pouvoirs n'étaient pas partagés également...



Puis au fil des pages, mon malaise s'est atténué et j'ai mieux compris les liens entre Mme Maillet et Perfecta.



Bref, c'est un bon petit roman qui nous parle d'une riche écrivaine très seule et de la famille espagnole qui l'a accueillie parmi eux. C'est aussi et surtout l'histoire de Perfecta qui a tout sacrifier pour que sa famille s'installe au Canada. Pour que sa famille se sente chez elle dans ce pays pourtant si loin de son Espagne natale.
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Les Cordes-de-Bois

De la même façon que je l’ai signalé pour "La Sagouine" (voir article), la narration ne se fait pas dans un « français de France ». Ce roman est écrit dans la langue acadienne, la « langue des côtes".

Avec une joie de vivre et un rythme incroyables, Antonine Maillet apporte le témoignage d'un peuple au fort tempérament, fier de ses sorcières et de ses pirates, de ses vandales et de ses amazones, de ses origines et de ses légendes. Elle a su donner vie à cette matière "brassant le fictif et le vrai" (p 162).

Lire plus sur http://anne.vacquant.free.fr/av/index.php/2021/11/15/antonine-maillet-les-cordes-de-bois/
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Pélagie-la-charrette

Je me rappelle que je n'arrivais pas à démarrer cette lecture, je ne comprenais pas en quoi consistait l'obstacle. Et j'ai entendu un jour une interview de cette autrice à la radio. J'ai rouvert le livre avec cette voix, cet accent dans la tête, et tout est devenu fluide -
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Les Cordes-de-Bois

Moins connu que "Pélagie-la-charette", premier prix Goncourt (1979) attribué à un écrivain non européen et qui racontait l'histoire d'une veuve, acadienne, qui décide, après avoir été déportée - comme beaucoup d'acadiens en 1775 et être devenue "esclave" en Géorgie (USA) - de retourner sur sa terre natale, le roman précédent de cette auteure hors norme "Les cordes de bois" est une ode magnifique à ce peuple de gens courageux, à leurs terres en bord de mer, au climat qui secoue et peut tuer, et à leur langage savoureux.



Premières phrases : " Si les filles du barbier savaient qu'elles furent à deux doigts de naître aux Cordes-de-Bois, au début du siècle, d'une garce appelée la Piroune, ou de la Bessoune, sa fille, elles chanteraient moins haut les vêpres. Et pourquoi pas ? Elles n'auraient pas pu naître aux Cordes-de-Bois, les filles du barbier, si le grand-père Guillaume, au lieu de s'en aller prendre femme à la Barre-de-Cocagne, avait louché du côté des Mercenaire, hein ?

Nous sommes tous, au pays, à deux doigts d'un mercenaire, d'un pirate, d'un matelot étranger échoué sur nos côtes un dimanche matin, entre la mer qui gagne et la mer qui perd. C'est si petit, le pays. Et des côtes, c'est si instable."



Dans ce roman passionnant, la narratrice, très intéressée à l'histoire des terres et des familles d'un village côtier du Nouveau Brunswick, essaie de " débrouiller les fils d'une histoire nouée par tant de mépris, haine, colère et chicanes épiques entre deux clans d'un même pays" depuis des générations...



Nous sommes dans les années 1930, et ce village acadien situé au bord de l'océan, est divisé en quartiers qui sont autant de clans : la Forge, les Cordes-de-Bois, le Pont... et habité de personnages hauts en couleur comme Ma-tante-la-Veuve, la Bessoune (des Cordes-de-Bois) qui fricotte avec les marins de passage, Pierre à Tom qui raconte quand il a envie et ce qu'il a envie, mais aussi Peigne, Zelica, Patience, Barbe-la-Défunte... Pas de nom de famille à l'époque : le fils de "Jérôme à Tilmon à Mélas à Jude", tout le monde sait de qui il s'agit...



Les Cordes-de-Bois, la butte qui domine le village et où habitent la famille Mercenaire, la Bessoune et sa mère la Piroune, abritent plutôt les clochards et les hors-la-loi ; c'est un lieu de fête et d'insouciance malgré la pauvreté qui y règne. La tribu de Ma-Tante-la-Veuve, les filles du barbier, sont plus aisées, mieux élevés, vont à la messe et représentent la bienpensance... et pourtant...



Comme dans tous les livres et pièces de théâtre d'Antonine Maillet, le thème des injustices sociales, des "bonnes gens" d'un côté et des "pauvres" de l'autre est fortement présent ; le curé, qui fait tonner son sermon depuis le haut de la chaire et son vicaire "de l'étoffe d'évêque" ne sont pas épargnés par l'esprit caustique de l'auteure ! Mais finalement, qui recupérera au marché de la paroisse, les vieux et les éclopés ?



L'écriture est sensationnelle, c'est le vocabulaire et l'humour qui font tout le sel de l'histoire ; quelques exemples ces ennemis qui se lancent des cailloux, s'appellent des noms, se grattent les nerfs... ; la Bessoune, et avant elle il y avait eu la Piroune, sa mère. Toutes de la race des crassoux, sargailloux et dévergondées... ; par rapport qu'ils étiont poursuivis dans les bois pis le long des côtes, ils aviont point le temps, nos aïeux, de ben équarrir leurs châssis de cabanes ni de planter ben droites leurs piquets de bouchures.



Une fresque constituée de plein d'histoires de vies pas faciles mais présentées de façon rigolote ; un excellent moment de lecture !
Lien : https://www.les2bouquineuses..
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Pélagie-la-charrette

Après un séjour en Louisiane et la rencontre de nos cousins acadiens, je me suis rappelée ce livre que j'avais essayé de lire en vain . Je me suis donc replongée et ne l'ai plus quitté. Une fois la barrière de la langue acadienne franchie, je me suis laissée emporter par l'épopée de Pélagie et des siens. Ce n'était plus un livre mais un film que l'on suivait et les multiples aventures de cette "arche de Noe" revenant sur ses terres d'origine.



A lire avant ou après un voyage au Canada ou en Louisiane et comprendre ainsi l'attachement de nos cousins à leurs racines, à notre langue et le traumatisme laissé par le "grand dérangement".
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Fais confiance à la mer, elle te portera

« Rien dans la vraie vie ne justifie notre raison d'être au monde, il faut la chercher ailleurs. »



Antonine Maillet a largement justifié sa raison d'être au monde en embrassant l'écriture... et dans cet essai sur le métier d'écrivain, elle subjugue le lecteur en démontrant le pouvoir incommensurable des mots. Les mots dits, les mots écrits.Son enfance ayant été bercée par les récits de ses aînés, la petite Antonine a vite découvert le chemin de la fiction, là où il croise celui de la réalité. C'est au carrefour de ces deux chemins qu'elle se tient toujours, racontant avec passion sa très chère Acadie qui refuse de mourir. Même si on n'a jamais reconnu cette nation, même si les Britanniques ont chassé ses enfants à tout vent.« Chaque fois qu'un Québécois engagé interroge son homologue acadien sur la réticence de son peuple à se défendre contre les injustices subies pendant des générations:



- Vous n'auriez pas pu comme nous mordre celui qui vous a mordus?- Pas nous autres, on n'a pas les dents pour ça. - Vous avez préféré vous faire dévorer?- Non plus, on est toujours là. -Alors?...-L'Acadien n'est pas un loup, mais un renard. »







L'écrivaine constate que nos grandes institutions éducatives n'ont jamais vraiment tenu pour valable l'oralité en tant que littérature. Pourtant, la langue des Acadiens ne manque pas de poésie... avec des termes tels que ragorner, calouetter, aveindure, avec des insultes telles que la godêche de sacordjé de forlaque...



L'ironie, ici, c'est qu'Antonine Maillet a justement écrit une thèse de doctorat sur Rabelais parce qu'elle appréciait son Patangruel, ce grand (!) classique de la littérature, à la fois pour la robustesse de ses farces souvent crues et la justesse de ses mots qui savaient « élever l'esprit du lecteur comme lui secouer les boyaux à force de rire».







Pour Antonine, sa raison d'être au monde pourrait bien être justement la mise au monde de tous ces personnages plus vrais que nature. Ainsi, Radi, en qui elle a déposé une bonne part d'elle-même et que j'ai découverte dans son merveilleux roman «Le Chemin Saint-Jacques», ainsi la Sagouine qui nous saisit au coeur par son franc-parler et sa lucidité face à la nature humaine, ainsi madame Perfecta, sa femme de ménage qui fut surtout sa grande amie et qui lui disait souvent: «Mamozelle Tonine, on est en confiance.»C'est bien vrai qu'avec cette femme au grand coeur et cette écrivaine aux mots doux, vifs, fous et vrais, on est en confiance... «J'ai attendu trop longtemps, quatre cents ans, barricadée dans le silence d'un peuple qui n'avait droit de parole ni sur la place publique, ni à l'église, ni dans les écoles, je ne vais pas me priver! Le mot pour moi gardera toujours la saveur des premiers aliments du premier repas d'un rapatrié. Je ne l'ai pas toujours su, mais maintenant je peux l'affirmer: je n'écris ni sous le regard terrorisant des critiques, ni sous la caution des postpoststructuralistes! Laissez-moi déballer en mille mots ce qui pourrait se dire en cent... au cas où dans les neuf cents autres se cacheraient les plus beaux.»

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