AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations de Antonio Skármeta (139)


Durant les deux mois qui suivirent, les scènes que vécut Mario dans le lit de Beatriz lui firent comprendre que toutes les jouissances qu’il avait connues jusque-là n’étaient que le pâle synopsis d’un film projeté désormais sur un écran officiel en cinérama et en technicolor.
Commenter  J’apprécie          320
Son premier mois de salaire, payé suivant les usages chiliens avec un mois et demi de retard, permit à Mario Jimenez de faire l’acquisition des biens suivants : une bouteille de vin Cousiño Macul « Vieille Réserve » pour son père, un billet de cinéma qui lui permit de savourer West Side Story, Natalie Wood comprise, un peigne de poche en acier allemand acheté au marché de San Antonio à un vendeur ambulant dont le slogan était : « L’Allemagne a perdu la guerre mais elle n’a pas perdu son industrie. Peignes inoxydables Solingen », et l’édition Losada des Odes élémentaires de son client et voisin, Pablo Neruda.
Commenter  J’apprécie          281
- Et rappelle-toi que j’ai lu Neruda bien avant toi. Comme si je ne savais pas que quand ça leur chauffe le bas-ventre, tous les hommes font les poètes !
- Neruda est quelqu’un de sérieux. Il va être président !
- Quand il s’agit d’aller au lit, ils sont tous pareils, présidents, curés ou poètes communistes. Tu sais qui a écrit : « J’aime l’amour des marins qui donnent un baiser et s’en vont. Ils laissent une promesse et jamais ne reviennent » ?
- Neruda ?
- Bien sûr que c’est Neruda. Et toi, tu bois ça comme du petit lait.
- Je ne vois pas pourquoi tu fais un scandale pour une histoire de baiser.
- Pour un baiser, non, mais le baiser, c’est l’étincelle qui provoque l’incendie. Tiens, écoute encore ce vers de Neruda : « J’aime l’amour qui se partage entre les baisers, le lit et le pain ». En clair, fillette, ça veut dire que cette chose-là c’est petit déjeuner au lit compris.
Commenter  J’apprécie          271
- Écoute ce poème : « Ici dans l’Île, la mer, et quelle mer. A chaque instant hors d’elle-même. Elle dit oui, et puis non, et encore non. Elle dit oui, en bleu, en écume, en galop. Elle dit non, et encore non. Elle ne peut se faire calme. Je me nomme mer, répète-t-elle en battant une pierre sans réussir à la convaincre. Alors, avec sept langues vertes de sept tigres verts, de sept chiens verts, de sept mers vertes, elle la couvre, la baise, la mouille et se frappe la poitrine en répétant son nom. »
Il observa une pose satisfaite.
- Comment le trouves-tu ?
- Bizarre.
- « Bizarre ». Quel critique sévère tu fais !
- Non, don Pablo. Ce n’est pas le poème qui est bizarre. Ce qui est bizarre, c’est ce que moi j’ai ressenti pendant que vous le récitiez.
- Mon cher Mario, il va falloir te dépêcher de mettre un peu d’ordre dans tes idées parce que je ne peux pas passer toute la matinée à jouir de ta conversation.
- Comment vous expliquer ? Pendant que vous disiez ce poème, les mots bougeaient, ils passaient d’un bord à l’autre.
- Comme la mer, bien sur !
- Oui, c’est vrai, ils allaient et venaient comme la mer.
- Ça, c’est le rythme.
- Et je me suis senti bizarre, parce que tout ce mouvement m’a chaloupé.
- Tu tanguais ?
- C’est ça. J’allais comme un bateau tremblant sur vos mots.
- « Comme un bateau tremblant sur mes mots » ?
- C’est ça !
- Sais-tu ce que tu viens de faire, Mario ?
- Quoi ?
- Une métaphore.
- Mais ça ne compte pas, elle m’est venue simplement par hasard.
- Il n’est pas d’autres images que celles qui sont dues au hasard, fils.
Commenter  J’apprécie          262
-Et pourquoi, si c'est une chose tellement facile, on emploie un nom si compliqué ?
-Parce que les noms n'ont rien à voir avec la simplicité ou la complexité des choses. Avec ta théorie une petite chose qui vole ne devrait pas avoir un nom aussi long que papillon. Pense qu'éléphant a le même nombre de lettres que papillon et pourtant c'est beaucoup plus grand et ça ne vole pas, conclut le poète d'un air accablé. (Editions du Seuil, 1987, p.27)
Commenter  J’apprécie          230
— C'est ridicule ! Parce qu'un homme m'a dit que mon sourire voltige sur mon visage comme un papillon, il faut que j'aille à Santiago !
— Ne fais pas la dinde ! éclata à son tour la mère. Aujourd'hui, ton sourire est un papillon, mais demain tes tétons seront deux colombes qui veulent qu'on les fasse roucouler, tes mamelons deux framboises fondantes, ton cul le gréement d'un vaisseau et la chose qui fume en ce moment entre tes jambes le sombre brasier de jais où se forge le métal en érection de la race ! Bonsoir !
Commenter  J’apprécie          222
-Il y avait une fois un poète qui était tombé amoureux d'une certaine Béatrice. Les Béatrice provoquent des amours incommensurables.
Le facteur s'escrima avec son bic sur la paume de sa main
-Que fais-tu ?
-J'écris le nom de ce poète : Dante.
- Dante Alighieri
- Alighieri avec un H majuscule ?
- Non, mon garçon, avec un A.
-Et sa Beatriz à lui: avec un z comme la mienne ?
- Non, Béatrice , avec un c.
- C comme coquelicot ?
- Comme coquelicot, pavot, opium. (Seuil, 1987, p.39)
Commenter  J’apprécie          220
Il n'y a de pire drogue que le boniment. Il peut faire croire à une serveuse de village qu'elle est une princesse vénitienne. Et ensuite, quand vient l'heure de vérité, le retour à la réalité, tu te rends compte que les mots sont un chèque sans provision. Je préfère mille fois qu'un ivrogne te mette la main au cul dans le bar plutôt qu'on vienne te raconter que ton sourire vole plus haut qu'un papillon !
Commenter  J’apprécie          222
[Le Ministre de l'Intérieur à Adrian Bettini, qui vient de refuser de diriger la campagne électorale du "oui à Pinochet":]
- Mais votre conduite, maintenant, n'a rien de moral. Il n'est pas déontologique de repousser une offre en raison de divergences politiques. Imaginez un médecin qui refuse de soigner un malade parce qu'il est son ennemi politique. Diriez-vous qu'il agit selon les codes de la déontologie?
- Si le malade s'appelle Pinochet, franchement oui, monsieur.
Commenter  J’apprécie          213
— Je t’ai rapporté de Santiago un cadeau très original : « l’hymne officiel des facteurs ».
Sur ces mots, la musique de Mister Postman par les Beatles se répandit dans la pièce, déstabilisa les figures de proue, culbuta les voiliers dans leurs bouteilles, fit grincer des dents les masques africains, liquéfia les cailloux, stria le bois, brouilla les filigranes des chaises artisanales, ressuscita les amis morts aux poutres du toit, fit fumer les pipes depuis longtemps éteintes, sonner comme des guitares les céramiques pansues de Quinchamali, exhaler leur parfum les cocottes de la Belle Époque qui tapissaient les murs, galoper le cheval bleu, siffler la longue et antique locomotive arrachée à un poème de Whitman.
Commenter  J’apprécie          202
- Avec ta logique, on aurait dû arrêter Shakespeare pour l'assassinat du père de Hamlet. Si le pauvre Shakespeare n'avait pas écrit de tragédie, il ne serait rien arrivé au père.
Commenter  J’apprécie          200
- Eh bien, quand tu dis que le ciel pleure : qu'est-ce que tu veux exprimer?
- C'est facile! Qu'il pleut, voyons!
- Eh bien, c'est ça, une métaphore.
- Et pourquoi, si c'est une chose tellement facile, on emploie un nom si compliqué?
- Parce que les noms n'ont rien à voir avec la simplicité ou la complexité des choses. Avec ta théorie, une petite chose qui vole ne devrait pas avoir un nom aussi long que papillon. Pense qu'éléphant a le même nombre de lettres que papillon et pourtant c'est beaucoup plus grand et ça ne vole pas, conclut le poète d'un air accablé.
Commenter  J’apprécie          202
- Et qu’est-ce qu’il t’a dit, comme « métaphores » ?
- Il m’a dit… Il m’a dit que mon sourire se déploie comme un papillon sur mon visage.
Commenter  J’apprécie          200
Il n'y a pas de pire drogue que le boniment. Il peut faire croire à une serveuse de village qu'elle est une princesse vénitienne. Et ensuite, quand vient l'heure de vérité, le retour à la réalité, tu te rends compte que les mots sont un chèque sans provision. Je préfère mille fois qu'un ivrogne te mette la main au cul dans le bar plutôt qu'on vienne te raconter que ton sourire vole plus haut qu'un papillon !
Commenter  J’apprécie          190
- Il règne au Chili un mécontentement et une colère contre Pinochet, et cette grogne est majoritaire. Mais le problème est que ce sont les indécis d'aujourd'hui qui seront la clé de ce plébiscite.
- Il y a encore des indécis au Chili, après quinze ans de terrorisme?
Commenter  J’apprécie          190
- J’ai entendu dire que tu t’adonnes à la poésie ? On raconte que tu fais concurrence à Pablo Neruda.
Les éclats de rire des pêcheurs explosèrent aussi fort que la rougeur de sa peau : il se sentit étranglé, interloqué, asphyxié, abasourdi, atrophié, malotrus, rustre, incarnat, écarlate, cramoisi, vermeil, vermillon, pourpre, moite, avili, agglutiné, point final. Pour une fois les mots accoururent au galop dans son esprit, mais c’était : « Je voudrais mourir ».
Commenter  J’apprécie          180
La première chose qu'on vous demande lorsque vous n'avez ni père, ni mère, c'est comment s'appellent vos parents.
Commenter  J’apprécie          180
Mais les trains qui mènent au paradis sont toujours des omnibus et ils restent en souffrance dans des gares moites et suffoquantes (sic). Seuls sont des rapides les trains qui conduisent en enfer.

* suffocantes
Commenter  J’apprécie          172
-Poète et camarade, dit-il d'un ton décidé, c'est vous qui m'avez mis dans cette mélasse et c'est vous qui devez m'en sortir. Vous m'avez donné des livres, vous m'avez appris à me servir de ma langue pour faire autre chose que de coller des timbres. C'est de votre faute si je suis tombé amoureux.

-Non, Monsieur ! Cela n'a rien à voir. Je t'ai donné mes livres, mais je ne t'ai pas autorisé à les plagier. Tu as même trouvé le moyen d'offrir à Beatriz le poème que j'ai écrit pour Mathilde !

-La poésie n'est pas à celui qui l'écrit mais à celui qui s'en sert ! ( Seuil, 1987,p.80)
Commenter  J’apprécie          170
- Papa, tu es contre la dictature ?
L'homme regarda son fils, puis sa femme, et tous deux se regardèrent à leur tour. Alors le père baissa et releva lentement la tête, en acquiesçant.
- Toi aussi, ils vont t'emmener en prison ? demanda Pedro.
- Non, dit son père.
- Comment est-ce que tu le sais ? demanda l'enfant.
- Tu me portes bonheur, petit, répondit-il en souriant.
Commenter  J’apprécie          170



Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Antonio Skármeta (725)Voir plus

Quiz Voir plus

As-tu bien lu "La rédaction"?

Quelle est la grande préoccupation de Pedro au début du livre?

rendre à temps sa rédaction
trouver comment avoir un ballon en cuir blanc et noir
être gentil avec ses parents
trouver comment avoir plus d'argent de poche

10 questions
83 lecteurs ont répondu
Thème : La rédaction de Antonio SkármetaCréer un quiz sur cet auteur

{* *}