Les hommes partaient avant le jour sur de lents chariots. Le village était encore flou à cette heure-là, avec cette tour imprécise qui cherchait sa vérité pratique dans la brume. Le chariot de tête avait une lampe accrochée au moyeu arrière, pour ouvrir la route. Il n’y avait pas de chansons, pour ne pas avaler d’air froid, et le chapeau enfoncé jusqu’aux yeux était la nostalgie du lit. Ils arrivaient aux marais quand le soleil était déjà haut et les hommes entraient dans les barques deux par deux, l’un pour couper, l’autre pour ramer à tour de rôle. Ils avançaient en cercle, comme des rabatteurs d’animaux imaginaires