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4.1/5 (sur 65 notes)

Nationalité : Italie
Né(e) à : Rome , le 01/07/1972
Biographie :

Ascanio Celestini est un acteur et auteur italien.

Il appartient à la seconde génération du théâtre-récit - né à la fin des années 1980 dans la lignée de Dario Fo - appelé aussi théâtre de narration.

Depuis quelques années, Ascanio Celestini fait l'objet d'une large reconnaissance littéraire en Italie, où les textes de ses spectacles sont publiés comme romans par les éditions Einaudi.

Son engagement civique et politique l'a amené à multiplier les activités. Il a notamment réalisé ou soutenu plusieurs documentaires, écrit un album de chansons, écrit des textes courts pour la télévision et a participé à la réalisation d'un film adapté de son roman "La brebis galeuse" ("La pecora nera", 2006), sorti en 2010.

Son spectacle, "Il razzismo è una brutta storia" (2009), lui a été demandé par l'Arci (Association italienne de loisirs et de culture) dans une campagne de sensibilisation contre le racisme.

Plusieurs de ses textes ont été montés en Belgique au théâtre du Rideau de Bruxelles. La "Fabbrica" (2003) a été créée dans une nouvelle traduction d'Olivier Favier par Charles Tordjman au théâtre Vidy-Lausanne. Il est présenté au Théâtre de la Ville à Paris en janvier 2010. "Radio clandestine" ("Radio Clandestina", 2020) est en cours de création par Dag Jeanneret au théâtre SortieOuest de Béziers.
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Source : Wikipédia
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Citations et extraits (30) Voir plus Ajouter une citation
Les curés, Mazzini, qu'est-ce qu'ils ne vont pas inventer, hein, les curés ? A Rome, pour faire peur aux gens, ils faisaient courir le bruit que les statues en pierre détournaient la tête tellement la République les dégoûtait, et même que les madones pleuraient.
(p. 54)
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Equipé d'un morceau de savon et d'un rouleau de papier hygiénique, tu te rends dans la cellule de transition où tu commences à apprendre une langue étrangère, celle qu'on parle en taule ou au chtar. Le premier truc qu'il faut capter, c'est que, la gamelle de la zonze, y en a pas bézef et c'est dégueu, de sorte que quand t'as le popotier qui rapplique pour le surplus de croustance tu cantines, sinon t'auras qu'à te brosser le ventre. Mais pour avoir accès au rabiot de croustance, faut de la fraîche. Si t'as de la fraîche, c'est vraiment zarbi que t'aies fini taulard. Ou alors c'est que t'as un blaud et que tu palpes une enveloppe. L'enveloppe va rejoindre ton pécule, et plus ton pécule il grossit, plus tu peux éviter la gamelle de la zonpri. Si après ça tu passes auxi, alors t'as décroché la timbale parce que tu peux te faire une jolie pelote, tu passes plus de temps dans la cour et on te laisse la cage ouverte.
(p. 24)
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Il y a des gens que ça amuse de jeter de la nourriture. Ils la rapportent chez eux dans leur cabas en plastique, ils la mettent au frigo et ils attendent qu’elle se transforme en immondices. On dirait qu’ils l’achètent exprès pour la balancer à la poubelle. Des gens qui achètent des immondices pour les jeter à la poubelle et aller se coucher tranquilles. Des boîtes emboîtées dans des boîtes, du papier empaqueté dans du papier, du plastique plastifié qui traverse l’Italie et le monde sur les autoroutes hiver comme été pour être jeté dans une poubelle à l’étranger. Si ça se trouve ce lait a été produit à l’autre bout du monde. On trait les vaches en Pologne, on écrème le lait en Hollande et on le vend en Italie. Et quand il se transforme en immondices il finit dans une décharge napolitaine, on l’emballe dans les Abruzzes, il voyage en train jusqu’en Allemagne où un ouvrier turc défait la balle, différencie, recycle et revend le plastique qui va servir à faire la bouteille de lait. Et toi tu rachètes du lait pour le laisser tourner au frigo. Parce que tu n’as pas le temps d’en boire, parce que tu fais trois boulots, parce que la fois où tu avais quatre sous de côté la banque t’a dit « investis ton argent, achète des actions Parmalat » et que tu es devenu un nouveau pauvre et que la télévision parle de toi quand elle parle des Italiens qui « n’arrivent pas à la fin du mois », c’est comme ça qu’on dit. La fin du mois, la fin de l’année, la fin du monde en direct à la télé. Que des produits à date de péremption.
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Moi, j’ai une technique.
Quand je participe à une réunion,
je m’assois, je sors le revolver et je le pose sur la table.

C’est juste une technique,
je l’utilise pour vivre en paix avec mes semblables.
Mais je dois me fixer des règles.

La règle numéro un, c’est de «sortir tout de suite le revolver».
Je dois le sortir des que j’arrive.
Il ne faudrait pas que quelqu’un aille penser que si je le sors
c’est à cause de la tournure que prend la conversation.

La règle numéro deux, c’est de «ne jamais regarder le revolver».
C’est une règle fondamentale.
Autrement, quelqu’un pourrait penser
que j’essaie d’appuyer mes propos
par quelque forme d’intimidation,
en lorgnant le revolver du coin de l’œil
comme pour dire « Faites gaffe, je vais tirer dans le tas ! ».
Le revolver ne doit jamais faire l’objet d’une discussion.

D’ailleurs, la règle numéro trois, c’est de
«ne jamais parler du revolver»,
sinon ça pourrait sembler redondant.
Il y en aurait qui penseraient
que si j’ai besoin de rappeler à autrui que j’ai un revolver
c’est parce que sans revolver
ce que je dis ne serait pas aussi convaincant.

Bien entendu, mon silence à propos de ce revolver
ne signifie pas que je ne pense pas a ce revolver,
tant il est vrai que la règle numéro quatre, c’est justement de
«penser constamment au revolver».
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Ascanio Celestini
Les pauvres

Les pauvres étaient tellement pauvres
qu’ils prirent leur faim, ils la mirent en bouteille et ils allèrent la vendre.
Les riches l’achetèrent.
Les riches avaient déjà mangé de tout dans leur vie, du caviar farci au trouduculapraline en brochette, et ils voulaient aussi connaître le goût de la faim des pauvres.
Ils l’achetèrent, ils y mirent le prix,
et les pauvres eurent de quoi s’en sortir pendant quelque temps.

Après quoi ils redevinrent aussi pauvres qu’avant.
Alors ils mirent leur soif en bouteille et ils allèrent la vendre.
Les riches l’achetèrent. Ils avaient bu de tout dans leur vie,
du Brunello au Tavarnello, mais ils n’avaient pas encore goûté à la soif des pauvres.
Ils l’achetèrent, ils y mirent le prix,
et les pauvres eurent de quoi s’en sortir pendant quelque temps.

Après quoi ils se retrouvèrent dans la pauvreté.
Alors ils prirent leur colère, ils la mirent en bouteille et ils allèrent la vendre.
Les riches l’achetèrent.
Les riches avaient déjà été déçus dans leur vie,
il leur était arrivé de se casser le cul
mais ils n’avaient jamais éprouvé de vraie colère.
Ils l’achetèrent donc aux pauvres, qui en avaient beaucoup.
Ils y mirent le prix,
et les pauvres eurent de quoi s’en sortir pendant quelque temps.

Après quoi ils se retrouvèrent pauvres.
Ils vendirent donc également la pudeur, la honte et la souffrance.
Ils mirent l’émotion et l’insubordination en bouteille, et aussi la violence,
l’émancipation, la révolte et la pitié.

Avec le temps, les caves des riches se remplirent de bouteilles.
À côté des grands vins millésimés
ils collectionnaient la faim des sans-culottes de la révolution
et la colère des journaliers qui occupaient les terres dans le sud.

Entre les mousseux et les champagnes
la folie des pellagreux des campagnes trouva sa place
avec l’orgueil de l’aristocratie ouvrière qui avaient défendu les usines contre les nazis et conquis ses droits par la lutte syndicale.

Entre les vins nouveaux et les vins doux
on trouvait l’écœurement des précaires et des sans-abri
et aussi la détermination des zapatistes qui marchèrent cagoulés sur Mexico

Après quelques générations, les pauvres avaient tout vendu.
Les pauvres devinrent si pauvres
qu’ils prirent leur pauvreté, la mirent en bouteille et allèrent la vendre
Les riches l’achetèrent car pour être vraiment riches il fallait qu’ils aient aussi la misère des misérables.

Quand les pauvres se retrouvèrent sans rien, ils s’armèrent.
Pas de fourchette et de couteau, mais de pistolets et de fusils
car la révolution n’est pas un dîner de gala, c’est un acte de violence.

Ils marchèrent vers la mairie
mais quand ils arrivèrent sous le balcon du podestat
ils s’arrêtèrent et ne surent pas quoi dire.

Car sans la colère et la faim,
sans l’orgueil et l’écœurement,
sans culture ni conscience de classe, on ne fait pas la révolution.

Alors le podestat descendit à la cave,
revint avec une bouteille et la donna au peuple.
Elle contenait la liberté conquise par leurs grands-parents,
mais que leurs parents avaient vendue depuis belle lurette.
Ils pouvaient s’en faire un hymne, un parti, un cercle ou un drapeau.
Ils la débouchèrent, mais pour terminer ils n’en firent rien du tout.

Parce que la liberté, seule, ne sert à rien.

Alors le podestat fouilla dans sa poche et trouva une boîte de bonbons à la menthe.
Il la donna au peuple.
Et à compter de cet instant les pauvres furent libres.

Libres de sucer des bonbons à la menthe.
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Pendant la guerre, les nuits ont des allures de fin du monde.
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Je suis angoissé.
Pourquoi suis-je angoissé ?
À cause de l’avenir de mon fils ?
À cause du gouvernement et de sa dérive autoritaire ?
À cause des guerres et de la pauvreté et de la pollution ?
Ai-je une alternative ? Un autre monde est-il possible ?
Ai-je mis le doigt sur la coupure de la tronçonneuse existentielle ?
Puis-je enfin aller chez le médecin et lui dire
«Le mal est là. Mettez-moi un pansement, de la gaze, un plâtre» ?

J’envie les camarades.
Les maquisards de l’ancien temps qui pendent Mussolini
par les pieds
sur le Piazzale Loreto,
qui le détestent et continuent à lui tirer des coups de feu
dans la tête quand il est déjà mort.
Qui hurlent «Ordure d’assassin», à lui,
Et «Pétasse», à la Petacci.

J’envie les anticommunistes viscéraux,
Les fascistes décomplexés,
parce qu’ils se consolent en faisant le salut romain.
Ils vont au lit et ils s’endorment en souriant le bras tendu.

Les supporters aux onze héros,
les soldats qui ont un drapeau à honorer
et cent mille autres sur lesquels cracher et tirer.

Mais moi par contre
je suis sans armes.
Je suis sans foi
et sans drapeaux.

Moi, j’ai l’angoisse.
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Quand le docteur a ouvert ma mère, il n'a pas trouvé l'œsophage. Il avait brûlé à cause de l'acide. Mon père s'en servait pour tuer les rats dans la poulaillère. [...] Alors il jetait de l'acide dans les trous à rats et il les brûlait. Mais l'hiver n'était pas loin et mon père voulait savoir si avec le froid l'acide gèle. Il disait "si ça se trouve je leur balance de l'acide dessus et au lieu de cramer les rats font du patin à glace". Il a mis la bouteille au freezer pour faire un test et ma mère l'a sifflée. C'est arrivé par erreur. Quand le docteur l'a ouverte, il n'a pas trouvé l'œsophage. (p.9)
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Ascanio Celestini
Histoire d’une goutte d’eau

Un homme est assis dans la pièce. Il regarde le robinet qui fuit. L’homme pense : c’est juste une goutte d’eau.

Il va bien falloir que quelqu’un trouve une solution à ce problème de goutte d’eau. Je pourrais me lever et aller fermer le robinet, mais je ne peux quand même pas tout faire tout seul.

C’est que je suis un démocrate, moi, et je pense qu’un citoyen élit ses représentants pour qu’ils s’occupent des problèmes importants.
Je ne suis pas comme tous ces gens qui ne croient plus dans les institutions, moi, qui créent des comités et des collectifs et qui veulent s’organiser entre eux ! L’homme assis dans la pièce regarde le robinet et il pense : c’est le gouvernement qui devrait trouver une solution à ce problème de goutte d’eau. S’il y avait là un gouvernement de droite, l’homme de droite, il dirait, mettons un bouchon de métal soudé sur le tuyau du robinet et il ne gouttera plus. Bien sûr, je dis, bien sûr soudons le tuyau. Mais si je veux aller me laver les mains et que le tuyau est soudé, il n’y aura plus d’eau.

L’homme de droite me répondrait : oui enfin bon, en attendant on a résolu le problème de la goutte d’eau. Quand un problème de lavage de mains arrivera on s’en occupera aussi. Un problème à la fois. C’est vrai, je dis, c’est vrai mais je ne suis pas convaincu par l’idée du bouchon. S’il y avait là un gouvernement de gauche, l’homme de gauche dirait... Sauf qu’en réalité un homme de gauche ne vient jamais seul. Ils vont toujours par deux. Un de la gauche modérée et un de la gauche radicale. Je recommence. S’il y avait là deux hommes de gauche, l’homme de la gauche modérée dirait : mettons un bouchon de métal soudé sur le tuyau du robinet... comme l’homme de droite.

Alors que l’homme de la gauche radicale me conseillerait de me lever et d’aller fermer le robinet. En fait il dirait ce que je pense moi aussi, et d’ailleurs je me considère comme un homme de gauche. Mais l’homme de la gauche radicale ajouterait : sauf que si on fermait le robinet, on se trouverait objectivement en contradiction avec la gauche modérée qui, étant proche des idées de la droite, quitterait la coalition... Par conséquent, il faut être responsable, on ne peut pas prendre le risque de faire tomber le gouvernement.

Donc, fermer le robinet pour qu’il ne goutte plus est une excellente solution, mais ce n’est pas le chemin à suivre.

Par conséquent, on attend.

C’est vrai, je dis, c’est vrai mais je ne suis pas convaincu par l’idée qu’il faille attendre. Peut-être que je devrais m’adresser au syndicat. S’il y avait là un syndicaliste, il dirait peu importe de savoir quelle est la meilleure solution. On pourrait aussi bien fermer le robinet ou souder le tuyau, mais choisir entre l’une ou l’autre impliquerait un affrontement entre des positions différentes.
Et s’il y a un affrontement, personne ne sait comment ça peut finir ! Non, nous, nous sommes pour la médiation. Et d’abord, est-ce qu’on est vraiment sûrs qu’il s’agit d’une goutte d’eau ? Et si ce n’était pas une vraie goutte d’eau ? Si c’était une métaphore ? Si c’était une provocation ?

C’est vrai, je dis, c’est vrai mais je ne suis pas convaincu par la position du syndicat. Un homme est assis dans la pièce. Il regarde le robinet qui fuit. L’homme pense : c’est juste une goutte d’eau. Je pourrais me lever et aller fermer le robinet, mais je ne peux quand même pas tout faire tout seul. En attendant, les gouttes d’eau tombent, l’une après l’autre. L’homme dans la pièce voit l’évier se remplir. Il voit la goutte d’eau fatale qui fait déborder le vase. Il voit l’eau qui coule sur le sol. Il sent ses pieds qui commencent à être mouillés et il pense : tôt ou tard, goutte après goutte, la pièce va finir par être inondée. Il pense : le sol va céder sous le poids de l’eau.

Mais le sol de cette pièce, c’est le plafond de la pièce du dessous. Des milliards de gouttes d’eau vont enfoncer le sol et inonder la pièce du dessous et tout ses objets utiles et inutiles et les gens qui l’habitent.

Les pièces vont s’effondrer les unes sur les autres jusqu’à ce que tout le bâtiment s’écroule et l’eau ensevelira les décombres. Un homme est assis dans la pièce. Il regarde le robinet qui goutte et il voit le déluge. Et il pense : ce n’est pas possible. Non, vraiment, ce n’est pas possible. Alors il se tourne et il regarde le mur. Il arrête de penser à la goutte d’eau. Il sourit, il s’endort, et se noie, sereinement.
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Chez moi, on me croyait mort. Alors quand je suis revenu… pas un membre de ma famille ne m’a reconnu. Quand ils ont vu arriver ce militaire fourbu, ils n’ont pas pensé une minute qu’il pouvait s’agir de leur parent, du barbier […] Bref, ma famille ne m’a pas reconnu.
Et moi, j’ai failli ne pas reconnaître Rome. Mon quartier était éventré. En arrivant à Rome, on m’avait parlé des bombardements et j’avais tout de suite demandé pour San Lorenzo. En chemin, on m’expliquait que c’était le premier quartier à avoir été touché. On m’avait raconté que « c’est un désastre. Il ne reste rien de ton quartier.» Et maintenant que j’étais chez moi, j’avais l’impression contraire. Il restait tout de mon quartier, mais avec quinze autres entassés par-dessus. J’avais imaginé que les bombes faisaient le vide, je les voyais comme une main gigantesque qui emporte les immeubles et les fontaines. Alors qu’à San Lorenzo, elles avaient accumulé un tel fatras qu’on ne pouvait plus marcher dans les rues. C’est à peine si on voyait les immeubles émerger des tas de décombres. J’ai reconnu mon quartier, mais imaginez par-dessus les ruines de Pompéi.
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