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Critiques de Azar Nafisi (49)
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Mémoires captives

L'auteure du best-seller mondial "Lire Lolita à Téhéran", nous offre dans cet ouvrage l'histoire de sa famille sur un fond d'histoire mouvementée de son pays d'origine, l'Iran.

Azar Nafisi est née à Téhéran en décembre 1955 et s'est exilée en 1997 aux États-Unis qui lui ont accordé la nationalité américaine en 2008.



J'ai trouvé le début de son récit un peu long. Elle y parle abondamment de sa mère Nezhat Khanoum (1920-2003), une véritable beauté (à en juger par les petites photos rajoutées au texte), mais effroyablement fabulatrice et carrément difficile. Azar lui reproche de ne pas l'avoir protégé comme enfant contre les attouchements pédophiles d'un de ses amis. L'auteure spécifie que la pédophilie était assez répandue dans un certain milieu de la société iranienne, lorsqu'elle était gamine. Elle relate que sa propre grand-mère a été donnée en mariage à l'âge de 9 ans et a mis son premier bébé au monde à 13 ans.



Nezhat Khanoum a cependant réussi à être élue au parlement, comme une des premières femmes iraniennes, conforme au terme de la "Révolution Blanche" ou le programme de réformes importantes du Chah de 1963. Mais le régime de l'ayatollah Khomeini l'a évidemment renvoyé et l'a obligé à rembourser ses honoraires de député !



À 13 ans, l'auteure fut envoyée dans une école à Lancaster en Angleterre, puis en Suisse et finalement aux États-Unis, où elle a obtenu un doctorat en littérature anglaise et américaine à l'université d'Oklahoma. À Téhéran elle a donné des cours de littérature iranienne et anglophone à 2 universités différentes.



Avec son mari, l'architecte Bijan Naderi qu'elle a épousé en 1977, et leurs 2 enfants, Negar née en 1984, et Dara en 1985, elle vit actuellement à Potomac dans le Maryland et assure des cours à l'université John Hopkins à Baltimore.



L'auteure a eu un très bon lien avec son père, Ahmad Nafisi (1919-2004), qui a été un homme fort cultivé et aimable. Il a connui un carrière rapide dans l'administration gouvernementale et fut nommé par Mohammad Chah Pahlavi (1919-1980) à 41 ans le plus jeune maire de Téhéran. Le livre contient une photo de son père avec le Chah et une autre avec le général de Gaulle.



Ce mandat, le jeune maire a dû le payer très cher par 4 ans de prison (1963-1967) pour sois-disante corruption et propos rebelles à l'adresse du souverain. Du récit de sa fille, qui est allée visiter son père en taule tous les jours, il apparaît clairement qu'il a été victime de jalousies et rivalités en haut lieu, entre autres par le chef de la SAVAK (la police politique) et un homme qui deviendra plus tard premier ministre, Hassan Ali Mansour (1923-1965).

Après sa libération de prison, où il a traduit les Fables de La Fontaine en Iranien, un autre haut job lui fut proposé, qu'il a gentiment refusé. Pendant quelque temps, Ahmad Nafisi fût directeur d'une usine de textiles avant de devenir directeur adjoint de la Banque d'Iran.



J'ai trouvé le récit de l'arrivée triomphale à Téhéran de l'ayatollah Ruhollah Khomeini (1902-1989), le 1er février 1979 et la naissance de la république islamique, 2 mois plus tard, le plus intéressant dans la mesure où l'auteure décrit extrêmement bien le climat d'insécurité et d'arbitraire qui a régné dans la capitale, à Ispahan et le reste du pays. Surtout pour les femmes confrontées à des lois et restrictions médiévales. Et après, le peuple a eu droit à une guerre sanglante de 8 ans avec le peuple voisin irakien (1980-1988).



L'ouvrage d"Azar Nafisi est intéressant comme témoignage d'un moment tragique dans l'histoire d'un pays fascinant.

J'estime, toutefois, que certains passages auraient bénéficié d'être légèrement écourtés.



Plus récemment, un autre maire de Téhéran, Mohammad-Ali Najafi, né en 1952, a été condamné à mort pour avoir tué à coup de balles sa seconde épouse, Mitra Ostad, née en 1984, dans la salle de bain de leur appartement le 28 mai 2019.

Après un accord (financier) avec la famille Ostad, il a été bizarrement libéré de prison sous caution, déjà le 28 août 2019 !

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Lire Lolita à Téhéran

Après avoir découvert par le plus grand des hasards et avec passion l'essai " La République de l'imagination" ... j'ai enchaîné avec un récit antérieur de cette dame, qui date de 2004. Nous ne pouvons être qu'époustouflés par le courage et la détermination de cette enseignante-écrivaine, qui s'est battue avec panache et courage pour la liberté d'enseigner dans son pays d'origine, l'Iran...afin de transmettre son amour de la littérature à ses étudiants. ...



Dans ce récit qui date de plus de dix années, elle relate une expérience singulière et unique avec huit de ses étudiantes les plus motivées...



Brimée à l'Université de Téhéran où elle enseigne, elle tient bon tant qu'elle peut, et finit par démissionner.



Ne pouvant pas non plus partir d'Iran pour enseigner dans un autre pays, elle concrétise une idée de séminaire à domicile autour de la littérature américaine, et plus spécifiquement autour de "Lolita" de Nabokov... La littérature comme espaces de liberté, d'apprentissage

du sens critique et de rebéllion !



Expérience originale et hautement "subversive" dans un pays sous dictature, où les interdits succèdent aux interdits, la censure à d'autres censures, où règne la forte ségrégation entre les étudiants et les étudiantes...



Les étudiants entrant quotidiennement à l'Université par la porte centrale, la "Grande porte", alors que les étudiantes doivent pénétrer par une petite porte de

côté, "honteuse"... où elles sont , chaque jour, avant leurs cours, fouillées, inspectées de pied en cap, pour vérifier que leur tenue est correcte !!!



Ce pays natal que l'auteure adore, mais qui devient à son grand désespoir, une terre de terreur !



Ce séminaire de littérature à son domicile nous montre ces jeunes étudiantes brillantes , paralysées, contraintes dans leur quotidien , dans leur famille, etc...arrivant chez leur professeur, avec les vêtements, et le voile obligatoires...Premier geste pour couronner ces cours de littérature, particuliers, à tous points de vue: le

"déshabillage"... pour faire place à des vêtements colorés, joyeux, les chevelures se défont... thé et gâteaux partagés, que chacune apporte à tour de rôle...et place à La LITTERATURE, sorte de reconquête d'un espace de liberté et d'expression spontanée



Un très beau témoignage qui fait honneur à la Littérature et au courage des femmes...dans un pays de dictature et de fanatisme religieux...

J'achève cette modeste critique (car ce récit est très dense et très riche de multiples questionnements) par deux extraits qui offrent l'essentiel de la teneur centrale de ce récit incroyable !



"Les seuls moments où elles s'ouvraient et s'animaient vraiment étaient ceux de nos discussions autour des livres. Les romans nous permettaient d'échapper à la réalité parce que nous pouvions admirer leur beauté, leur perfection, et oublier nos histoires de doyens, d'université et de milice qui arpentait les rues. (…)

Les romans dans lesquels nous nous évadions nous conduisirent finalement à remettre en question et à sonder ce que nous étions réellement, ce que nous étions si désespérément incapables d'exprimer. (p. 64-65)"



Cette pièce devint pour nous un lieu de transgression. Le pays des merveilles. Installées autour de la grande table basse couverte de bouquets de fleurs, nous passions notre temps à entrer dans les romans que nous lisions et à en ressortir. Lorsque je regarde en arrière, je suis stupéfaite de tout ce que nous avons appris sans même nous en rendre compte. Nous allions, pour emprunter

les mots de Nabokov, expérimenter la façon dont les cailloux de la vie ordinaire se transforment en pierres précieuses par la magie de la fiction. (p.22-23)
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La République de l'imagination

Une très, très belle découverte de ce début de semaine avec cet essai d'Azar Nafisi, auteure iranienne dont je fais la connaissance avec moult bonheur... en prenant également note d'un autre texte antérieur , "Lire Lolita à Téhéran", que je m'empresserai de lire après cette extraordinaire "République de l'imagination".



Un hommage exceptionnel aux livres, à la lecture, et à la force de réappropriation de chaque lecteur aux quatre coins du monde... Un partage universel sans équivalent !

L'auteur débute son essai par la très touchante histoire de son père bien-aimé, lui lisant, enfant, "Le Petit Prince", oeuvre universelle qui a accompagné, accompagne encore des millions de lecteurs... et continuera à illuminer les générations futures et à venir !



L'auteure relie à sa façon, engagements politique, humain et amour de la littérature...

Elle y parle avec talent de déracinement, de l'exil, et de la lecture des grands textes (principalement américains, en expliquant , en argumentant cette préférence...)

Grands textes qui rassemblent...Des outils uniques de construction individuelle, comme de résistance !



"Vivre sous le système en noir et blanc du régime islamique m'avait appris à développer des vues plus complexes, plus nuancées. Je me suis rapprochée de la fiction que j'aimais tant, où chacun avait le droit de se faire entendre, même les méchants. Les étudiants qui désapprouvaient mes idées

politiques- et qui, étant du côté du pouvoir, auraient pu me dénoncer (...)- venaient dans mon bureau parler de Bellow ou de Nabokov, d'Ibsen ou bien d'Austen. J'avais sans le vouloir trouvé une façon de communiquer avec des gens qui ne m'auraient autrement jamais adressé la parole. Cela a changé ma vie, et mon attitude envers la vie. (...)

J'en suis arrivée à considérer mon amour des livres et de la lecture comme intimement lié à mes responsabilités de citoyenne, de professeur et d'écrivain. "(p. 57)
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Lire Lolita à Téhéran

Azar Nafisi nous plonge avec ce livre au cœur de la révolution qui a mené à la république islamique iranienne : le départ du Shah, le bras de fer entre communistes et religieux pour le pouvoir, et finalement la victoire de ces derniers. Pour les femmes, le choc est rude : voile obligatoire, liberté de plus en plus restreinte, … la révolution a à ce point marqué les esprits que le moindre détail insignifiant doit faire partie du combat contre l'impérialisme : des ongles trop longs, le port de la cravate, applaudir, deviennent des gestes de la culture occidentale décadente à bannir.



Face à un gouvernement qui a de moins en moins conscience de la réalité du terrain, les iraniens se scindent en deux : une personnalité publique qui s'efforce de coller à l'image qu'on attend d'eux, rappelée régulièrement par la police des mœurs ; et une privée, qui ne s'exprime qu'entre quatre murs, en présence de gens de confiance.



Azar Nafisi nous parle également de son expérience en tant que professeur de littérature anglo-saxonne, puis plus tard, après avoir démissionné, des petits séminaires organisés dans son appartement avec quelques uns de ses anciennes étudiantes. Elles y étudient ensemble Nabokov, Fitzgerald, Austen, … , des auteurs qui ne sont pas particulièrement bien vus par le pouvoir en place. Ces œuvres les aident à la fois à mieux analyser ce qu'elles sont en train de vivre et leur donne la possibilité de rêver.



Lire Lolita à Téhéran offre un aperçu de l'Iran vécu de l'intérieur, et de la vie quotidienne, des peurs, des rêves, des espoirs de ses habitants. Il aidera aussi à mieux comprendre toute la complexité du pays, trop souvent réduit à quelques diatribes de ses dirigeants.
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Lire Lolita à Téhéran

Azar Nafisi est professeur de littérature à Téhéran. Opposée à toute forme de totalitarisme mais profondément attachée à son pays, elle a tenté, à travers l’étude de certaines œuvres classiques, de développer le sens critique de ses étudiants. Dans l’intimité de son salon, elle a tenu pendant deux ans un séminaire réunissant plusieurs jeunes filles qui partageaient leurs rêves et leurs réalités en compagnie de Lolita, Gatsby, Elisabeth Bennet, et bien d’autres.



Ce récit, qui se situe entre le roman et l’essai, fait partie de ces lectures nécessaires qui font réfléchir. Parce qu’il est impossible de ne pas appréhender l’ouvrage sans faire le lien avec la situation actuelle en Europe. Au point qu’il m’a fallu faire une pause en pleine lecture (et lire autre chose), ce qui ne m’arrive jamais. Parce que les mécanismes mis en œuvre, insidieusement, avec l’assentiment d’une partie de la population fragilisée et crédule, qui ont fait basculer l’Iran moderne du Shah dans la République Islamique, modèle dans lequel se sont perdus les érudits, la culture, le libre arbitre et l’esprit critique, ces mécanismes donc, s’apparentent fortement aux politiques actuelles dans nos contrées.



Difficile, voire impossible, de ne pas faire le lien entre les brigades de la morale qui arpentent les rues pour vérifier que les femmes portent bien leur foulard et les brigades Covid de nos polices ; impossible de ne pas comparer la propagande médiatique par la peur et la censure « anti-occidentale » qui l’accompagnait avec ce qu’il se passe aujourd’hui dans la presse et sur les réseaux sociaux. En prenant un peu de hauteur, bien que le fond n’ait aucun rapport, les exemples sur la forme ou les risques de dérives qui y sont liés sont légion et rend d’autant plus glissante la pente sur laquelle nous nous sommes engagés.



A travers ce contexte qui la perturbe beaucoup car il la pousse à se questionner sur l’impact qu’elle pourrait avoir sur des étudiants en souffrance, qu’ils soient acquis à la cause islamique ou en désaccord avec le régime qui se met en place, l’autrice a d’abord exploité l’œuvre de Fitzgerald et a été jusqu’à organiser le procès de Gatsby. Dans un auditoire composé de jeunes femmes qui tentent de conserver leur liberté de parole et de pensée et de jeunes hommes de plus en plus convaincus que l’occident en général et l’Amérique en particulier incarnent le Mal sur terre, Azar Nafisi s’expose constamment. A la vindicte du corps professoral que ses prises de position dérangent et à l’agressivité d’une partie de ses élèves qui rêveraient de la voir « remise à sa place ».



Quand la République islamique sera installée, que la guerre contre l’Irak aura débuté, c’est Henry James qui lui servira de prétexte à tenir débat, à secouer les idées reçues avant de se faire éjecter de l’université.



Et une fois un semblant de paix revenue, sans pour autant que les dogmes installés sous Khomeyni disparaissent, c’est grâce à Jane Austen et Nabokov qu’elle réunira chaque jeudi pendant deux ans des étudiantes qui oseront enlever leur voile et leur longue robe noire le temps des échanges.



Une certaine complicité unira ces femmes entre elles, sans pourtant parler d’amitié. Chacune se posera mille et une questions, aussi bien sur le présent que sur l’avenir. Quand on se sent étranger en son pays, vaut-il mieux partir en espérant un monde meilleur, ou faut-il rester par patriotisme, pour résister et montrer que l’on n’est pas à terre ?



Azar Nafisi nous propose donc ici un témoignage poignant, bouleversant par moment et nous confirme que la littérature, pour imaginaire qu’elle soit, et la liberté d’expression au sens large, restent des socles de démocratie solides que nous avons tous le devoir de protéger. Et que même si le doute, voire le découragement, sont parfois inévitables, rester en cohérence avec ses convictions profondes, plier mais ne jamais rompre, poser un regard critique sur les croyances et les dogmes et désobéir s’il le faut, permettent à l’humain de rester Libre, même en enfer.
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Lire Lolita à Téhéran

Comment parler de littérature en pleine dictature islamique, quand tout est suspect, y compris des romans d'amour ? Comment sont reçus et analysés les œuvres de fiction ?

Ce sont 2 questions, parmi les nombreuses qui se posent dans ce récit. Que se soit parmi les étudiantes du groupe du jeudi ou lors des cours à l'université, la fiction et la complexité des personnages ne laissent personne indifférent. Et permet de comprendre pourquoi elles sont interdites et/ou très contrôlées par les régimes totalitaires : elles sont porteuses d'incertitude, alors que ces régimes ont besoin de certitude, même si pour cela il faut créer des êtres binaires.

C'est ce que Nafisi montre bien dans son récit de 18 ans en République islamique d'Iran. Heureusement, le passage par la fiction lui permet de démontrer également que même des jeunes femmes issues de milieux traditionalistes ne se sentent pas à leur place dans une théocratie imposée, et qui s'impose partout. la fiction lui permet d'aborder des sujets tabous, comme l'amour et la sexualité, si occultés qu'aucune des jeunes femmes non mariées ne sait ce qui peut se passer entre un homme et une femme.

C'est souvent poignant, révoltant, mais comme Marjane Satrapi avec Persépolis, Nafisi démontre que se couvrir des pieds à la tête pour sortir dans l'espace public, accepter de mettre un voile pour faire cours ne signifie pas que l'on accepte la politique gouvernementale. Mais à la différence de Satrapi, où la plupart des actes "séditieux" sont commis en famille, ici le risque est plus grand : des femmes issues de toutes les couches de la société, autant de risques de se faire dénoncer. Pourtant, aucune d'elles ne peut accepter de vivre dans la vie imaginée pour elle par un autre, sans avoir un seul espace de liberté.

La littérature leur a offert cet espace de liberté, pour respirer mais aussi pour enfin oser se découvrir, se penser en tant qu'être humain ayant le droit d'existence.
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Lire Lolita à Téhéran

Merci à Azar Nafisi pour ce livre qui a été pour moi un coup de cœur !

Elle est née à Téhéran en 1955 dans une famille d'un haut niveau socio-culturel et passionnée de littérature. Envoyée à l'étranger à 13 ans pour poursuivre ses études, elle rentre en Iran en 1979 juste après la Révolution qu'elle avait soutenue ardemment depuis les États-Unis. Azar Nafisi, comme tant d'autres, tombe de haut : le régime islamique réprime durement ses opposants, y compris les communistes qui s'étaient eux aussi opposés au Chah, et s'empresse d'imposer des lois plus restrictives les unes que les autres. Elle restera en Iran jusqu'en 1997 où, ne pouvant en supporter davantage et malgré son attachement à son pays, elle repartira avec mari et enfants aux États-Unis.

Lire Lolita à Téhéran a un intérêt double. D'une part, il s'agit d'un document de grande qualité quant à la vie sous la République islamique d'Iran, la société iranienne et les évènements des années 80 et 90. Azar Nafisi relate tout cela avec nuances et sincérité, elle parvient à dépeindre de manière claire l'état d'esprit de ceux qui, comme elle, ont été déçus par l'après-Révolution. D'autre part, il s'agit d'une immense déclaration d'amour à la littérature. Elle indique dans les derniers chapitres être incapable de faire en sorte que son style ne devienne pas un cours mais cela fait justement partie des points forts de ce livre. Avec Azar Nafisi, non seulement nous avons droit à une analyse d’œuvres de Vladimir Nabokov, Jane Austen ou F. Scott Fitzgerald mais elle nous donne en plus envie de nous plonger nous aussi dans ces romans.

Comme je le disais dès le début de ma critique, ce livre m'a passionnée et c'est un coup de cœur !



Challenge ABC 2022/2023
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Lire Lolita à Téhéran

Impressions de lecture…



Lolita de Nabokov est un de mes livres préférés, le titre a donc immédiatement attiré mon attention. Et en tant que féministe et amoureuse de la littérature, l’histoire de ce groupe de femmes - réuni clandestinement autour de l’auteur elle-même, dans son salon, pendant la révolution islamique en Iran, pour lire de grandes œuvres occidentales – a éveillé mon intérêt. L’avis de Margaret Atwood, cité en quatrième de couverture, a fini de me décider : « Un livre captivant. Il explore avec ferveur et conviction le pacte tacite existant entre l’écrivain, le livre et le lecteur. Tous les lecteurs devraient lire ce livre ». Chose curieuse, quand j’ai acheté puis lu ce livre, je n’avais pas vraiment fait attention au nom de Margaret Atwood (dont je n’avais encore rien lu) et, hasard des pérégrinations et envie de lectures, après avoir terminé cet ouvrage de Nafisi, j’ai plongé dans La Servante écarlate d’Atwood. Et bien sûr, on ne peut s’empêcher de voir des résonnances entre les deux œuvres, notamment la description des sensations qu’on peut avoir quand on sort voilée, la contrainte physique de ne rien laisser dépasser, la négation du corps, le fait d’être ramené à un regard, la réduction du champs visuel…



Je reviens sur le livre d’Azar Nafisi. L’œuvre est inclassable : ni roman, ni reportage, il est à mi-chemin entre les deux. Azar Nafisi y raconte son expérience de professeur de littérature anglo-saxonne à l’université de Téhéran, puis chez elle quand elle se retrouve obligée de démissionner et qu’elle organise dans son salon des séminaires avec certaines de ces étudiantes. Le livre est donc le témoignage d’une intellectuelle dans un monde en guerre, où les libertés individuelles, notamment celle des femmes, se réduisent comme peau de chagrin. Mais il se rapproche du roman, car l’auteur a été obligée d’injecter une certaine dose de fiction. Comme elle l’indique dans une note préliminaire, pour des raisons de sécurité, pour protéger les gens concernés, elle a dû changer leurs noms et « certains traits des personnages et des évènements décrits dans ce récit ont été déformés ».



Bien que le livre m’ait déçue, ce fût pour moi une lecture très instructive. Je n’y ai pas trouvé ce que le titre et la quatrième de couverture m’avaient laissé présager et j’ai donc eu tout le long un goût de promesses non tenues. J’avais imaginé comment à travers les œuvres d’écrivains que j’affectionne moi-même énormément : Nabokov, Fitzgerald … (elle traite aussi d’Austen et de James), l’auteur nous montrerait le pouvoir de la littérature. Qu’elle resterait bien plus collé à l’analyse littéraire pour nous raconter ce qu’une lectrice de Téhéran, oppressée par les interdits pouvait ressentir et penser à la lecture de ces œuvres très mal vues par le pouvoir politique en place. Comment certains auteurs ont déjà en leur temps bravé la censure, comment les livres et l’imaginaire peuvent préserver des espaces de liberté. J’y ai trouvé cela, dans une certaine mesure (Mention spéciale à l’épisode du procès de Gatsby le Magnifique que Nafisi organise dans sa classe (à partir de la p.173)), mais l’auteur raconte surtout des éléments de sa vie personnelle et de celles de ses étudiantes. Comment elle a vécu la guerre, les bombardements, comment ces femmes et elles même ont vécu l’oppression et ont tenté de résister face à elle, en laissant par exemple dépasser une mèche de cheveux de leur voile, au péril de leur vie, dans un pays où tout geste était alors interprété comme « politique ». Elle nous montre ce que c’est de vivre dans un pays où la liberté d’expression est muselée, où l’on est surveillé, où la censure règne, en cela cette lecture m’a rappelé certains passage de Kundera. Pour nous occidentaux de ma génération, vivant en France, nous avons du mal à nous rendre compte de ça, c’est quelque chose que nous n’avons pas connu. Pas dans une telle mesure… car on aurait tort de penser que nous ne vivons dans une société où la censure n’existe pas et où les citoyens ne sont pas fichés, fliqués, rangés dans des cases (ne serait-ce qu’au nom des intérêts commerciaux), mais c’est un autre débat.



La question des générations est d’ailleurs un thème important qu’Azar Nafisi traite dans son œuvre. Car elle, elle fait partie d’une génération de femme qui a connu le pays autrement, qui a perdu des libertés, qui mesure donc cette perte et la différence entre la vie actuelle et la vie d’avant, « Nous avions des souvenirs, des images de ce qui nous avait été pris. Ces jeunes femmes n’avaient rien. Leur mémoire était celle d’un désir qu’elles ne pouvaient exprimer, de quelque chose qu’elle n’avait jamais eu. » p.115. Livre instructif et touchant donc dans le témoignage qu’il délivre sur une période particulière de l’histoire iranienne, plusieurs passages m’ont marqués. Mais je n’ai pas particulièrement apprécié le style, régulièrement j’ai du m’accrocher pour ne pas abandonner la lecture. Et j’ai été fâchée par le côté racoleur du titre, qui est aussi celui du premier chapitre, les autres chapitre portant tous le nom d’un auteur, jusqu’à l’épilogue. J’ai trouvé que cette construction était plutôt artificielle et ne convenait pas au propos. Donc oui, le côté racoleur du titre, on prend une œuvre sulfureuse (de loin la plus sulfureuse de celles traitée par Nafisi) et on l’accole à Téhéran (et donc à ce que la ville charrie dans les imaginaires collectifs, aidé par la couverture sur laquelle deux femmes voilées s’embrasse en souriant) pour créer un oxymore (jeu des contrastes oxymorique aussi sur le visuel de couverture voile/sourire et sensualité du touché et femmes voilée/ femme visage nue qui regarde droit dans l’objectif), une provocation. Provoc soulignée par le premier mot : l’emploi d’un verbe du premier groupe, vecteur dynamique (je lis, j’accomplie une action, c’est une forme de libération, de résistance, de lutte. Je lis, je pense, j’écris etc…). À noter que le titre français colle au titre original : Reading Lolita in Tehran (car Azar Nafisi a écrit le livre en anglais, elle est d’ailleurs citoyenne américaine depuis 2008 et vis aux Etats-Unis). Tout ça et le fait que ce titre soit trompeur par rapport au contenu, a sonné très « marketing » pour moi, ce qui m’a dérangé.


Lien : http://quelscaracteres.eklab..
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Mémoires captives

Cette autobiographie de l'auteure de "Lire Lolita à Téhéran" est une pure merveille d'honnêteté et de réflexion. Lisez-la !



Azar NAFISI relate, dans un rythme parfait, les différents évènements qui ont façonné sa vie et son pays, l'Iran. Depuis sa plus tendre enfance jusqu'à son installation définitive aux Etats-Unis, l'auteure porte un regard lucide et philosophe sur sa famille et le contexte dans lequel elle a évolué. Et ils sont rares les témoignages sans langue de bois, qui parviennent à maintenir le juste équilibre entre récit familial et témoignage géopolitique.



Ainsi, la fille de l'ancien maire de Téhéran ne cache jamais ses relations houleuses avec sa mère, personnalité complexe, sombre et perpétuellement insatisfaite. Elle ne place pas sous silence non plus les difficiles années où son père a été emprisonné par les sbires du Shah ou encore la difficulté d'enseigner dans les universités encadrées par les mollahs. On retrouve dans cet ouvrage le sens du récit et la forte densité de réflexion qui ont marqué "Lire Lolita à Téhéran", et on ne peut qu'y adhérer. Les mots me manquent pour exprimer la passion que j'ai eu à découvrir le récit de cette vie captivante, et je ne peux que regretter le fait que Nafisi ne soit pas une auteure plus prolifique (quoique cela assure peut-être la qualité de ses oeuvres ?).



En tous cas, j'ai été fasciné de la première à la dernière page par ce livre, à un point que je me suis forcé à ralentir mon rythme de lecture afin de faire durer le plaisir ! Un énorme coup de coeur 2017 !
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Lire Lolita à Téhéran

Un étonnant et passionnant document, j'avoue n'avoir jamais rien lu de comparable à ce récit ! C'est celui d'une professeure d'université de Téhéran, spécialiste de la littérature anglo-saxonne, qui se retrouve contrainte, parce que femme, de démissionner de son poste sous le régime des ayatollah. Elle réunit alors secrètement chez elle ses meilleures étudiantes, pour continuer à étudier de grandes oeuvres littéraires.



Il s'agit d'un livre qui réussit le tour de force, en même temps, de :

- analyser la relation du lecteur au livre et nous faire réfléchir à ce qui distingue un roman réussi des autres



- offrir une analyse littéraire fascinante de quelques romans



- être un témoignage précis, psychologique et sociologique, poignant sans être jamais pathétique, de la vie quotidienne sous un régime totalitaire.



En ce qui concerne les analyses littéraires, j'ai découvert grâce à cette lecture que "Lolita" de Nabokov n'est pas que la confession d'un "vieux pervers qui viole une fille de douze ans", mais aussi une fable sur les régimes totalitaires qui confisquent la vie des individus, tout comme Humbert confisque celle de Lolita. Les Iraniens se comportant comme cette dernière en essayant de trouver leur "poche de liberté", avec une marge de manoeuvre des plus réduites.

L'analyse du traitement des femmes dans les "Contes des Mille et une Nuits" est aussi remarquablement originale.

Quant à l'examen de la structure narrative d'"Orgueil et Préjugés", comparée à une danse de cette époque, et à celui des différents points de vue de la narratrice/auteure (comportement des personnages dans différents lieux, zooms sur les relations, polyphonie...), il est jubilatoire...



Enfin, la lecture d'A. Nafisi m'a fait réaliser que "1984" d'Orwell (roman non étudié dans cet ouvrage) restitue sans la forcer l'ambiance d'un régime totalitaire, à quelques détails technologiques près. Oui, on peut pénétrer A CE POINT l'intimité des gens et les contraindre à un comportement -voire à une pensée- unique dans la réalité quotidienne.
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Lire Lolita à Téhéran

Le regard d’une intellectuelle sur son pays m’a permis d’apprendre de nombreuses choses sur l’Iran mais aussi de redécouvrir et d’envisager certains ouvrages sous un nouvel angle de réflexion comme pour Lolita de Nabokov.



Avec ce témoignage, j’ai découvert cette envie de changer de régime, de renverser le Shah pour les jeunes iraniens vers une transformation de la révolution avec la prise du pouvoir par les islamistes et la mise en place d’une République islamique. On découvre que les étudiants étaient extrêmement politisés et agissaient au sein des universités pour diffuser leurs idées. C’est aussi la découverte d’alliances surprenantes entre islamistes et communistes pour faire front aux libéraux liés aux Etats-Unis.



J’ai également découvert (car j’étais convaincue du contraire) et fut réellement surprise en apprenant que malgré la révolution, les violences commises (meurtres, assassinats, enlèvements, etc.) et le régime islamique, les universités ont continué à fonctionner, que même la littérature étrangère était enseignée non sans provoquer des conflits parmi les étudiants. Par exemple, dans la partie de Gatsby, Azar Nafisi met en place un tribunal afin de juger le roman. C’est ainsi l’occasion de découvrir que certains étudiants préfèrent ne pas exprimer leurs opinions afin de ne pas être considérés comme de mauvais éléments par des étudiants influents.







Lire Lolita à Téhéran c’est aussi parler de la place de la femme dans la société iranienne de plus en plus réduite. Cette thématique est extrêmement importante et la présence des 7 étudiantes permet de découvrir différentes visions de la religion et surtout de la pratique. Par exemple, l’imposition du voile aux femmes par le régime a provoqué un effet inattendu sur celles qui le portaient par conviction religieuse entrainant parfois l’installation du doute et la remise en question de leur foi.



Ce régime a aussi entrainé une transformation des jeunes femmes qui parfois se retrouvent sans identité propre mais plutôt avec des contours flous sans savoir qui elles sont véritablement. Car le voile les cache au monde, fait disparaitre leur individualité même si parfois elles expriment leurs rébellions dans des gestes simples comme du vernis, des cheveux qui dépassent du voile ou des chaussettes roses.



Avec cette perte de l’identité, une place réduite à l’image de l’épouse, l’amour et la relation au mariage n’est vu que d’un point de vue pratique afin d’être tranquille. Elles se marient mais sans savoir ce qu’aimer veut réellement dire car le régime les en empêche. Ainsi, la relation avec l’autre dans certaines circonstances peut devenir étrange, distante et cet amour est complètement dissocié de la sexualité. C’est un amour où l’on partage des affinités intellectuelles mais pas sexuelle car les discours proféraient ont fini par les persuader que le désir est péché.





Merci pour ce magnifique témoignage, encore un gros coup de coeur ❤ pour un ouvrage qui devrait être étudié et pour que l’on pense à ces femmes.
Lien : https://autempsdeslivres.wor..
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Lire Lolita à Téhéran

L’auteur, universitaire spécialiste de la littérature anglo-saxonne a enseigné à la faculté de Lettres de Téhéran depuis le début de la révolution khomeiniste. Après avoir dû démissionner, elle a réuni chez elle, clandestinement, un séminaire littéraire regroupant quelques jeunes femmes. Elle retrace l’évolution de l’Iran, des premières heures de la révolution aux dernières années précédant son exil aux USA, en évoquant à travers sa passion pour les écrivains anglo-saxons (Nabokov, Fitzgerald, H. James, J. Austen) sa lutte quotidienne contre le régime d’oppression, notamment des droits des femmes, mis en place dans son pays.

Un témoignage vivant et riche sur la place laissée aux intellectuels et aux femmes dans un Iran évoluant au jour le jour vers une répression accrue.

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Lire Lolita à Téhéran

Lire Lolita à Téhéran, ou le pouvoir des livres. Comment avec les livres on lutte contre une dictature. Comment des femmes se sortent de l'oppression et arrachent le voile sous lequel un régime inhumain prétend les faire disparaître, leur corps, leur âme, et leur liberté de penser et d'imaginer. Comment de victime on devient vainqueur. Grâce aux livres.
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Lire Lolita à Téhéran

"A l'automne 1995, après avoir démissionné de l'université, j'ai décidé de me faire plaisir et de réaliser un rêve. j'ai choisi sept de mes étudiantes, parmi les meilleures et les plus impliquées, et je les ai invitées à venir chez moi tous les jeudis matin pour parler littérature."



Ainsi débute cet ouvrage inclassable, pas vraiment un roman, qui nous parle de "lire, discuter des oeuvres de fiction et y réagir" ; au cours de ce séminaire de deux ans sont abordées de grandes oeuvres d'auteurs classiques (Nabokov, Fitzgerald, James, Austen,...). Ces étudiantes et leur professeur discutent aussi de leurs expériences quotidiennes. Tout cela se passe en Iran, et Azar Nafisi relate "de l'intérieur" l'histoire de ce pays entre 1979 et maintenant : le départ du Shah, la révolution islamique, l'instauration de nouvelles lois et l'évolution de la pression, bouleversant la vie des différents protagonistes.

"Il ne fallut pas longtemps au gouvernement pour faire instaurer une nouvelle réglementation qui limitait la liberté des femmes en matière d'habillement et les obligeait à porter le tchador ou la longue robe et le foulard."

Et puis :

"Je pris l'habitude de rentrer mes mains à l'intérieur de ces manches et de faire comme si je n'en avais pas. Au bout du compte, j'imaginais que sous la longue robe mon corps disparaissait petit à petit, que bras, poitrine, ventre et jambes fondaient, s'enfonçaient dans le sol, et qu'il ne restait plus qu'un morceau de tissu qui prenait le forme de mon corps et allait d'un endroit à un autre, guidé par une force invisible."

Dans ce monde là, l'"évasion" dans les oeuvres de fiction a permis à ces femmes et jeunes filles d'affronter et comprendre la réalité et aussi de se remettre en question et se connaître . Lire Lolita à téhéran devient un hymne merveilleux à l'importance de la littérature.



J'ai été "scotchée" par de nombreux passages de ce livre extrêmement riche quant aux thèmes abordés, qui peut faire réfléchir, sourire, s'émouvoir, frissonner. A lire absolument.



http://en-lisant-en-voyageant.over-blog.com/article-21492728.html
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Lire Lolita à Téhéran

Un parallèle passionnant et tout en finesse entre la littérature et la révolution islamique en Iran. Des analyses d'une justesse et d'une clairvoyance à couper le souffle, rythmées en quatre grandes parties : Nabokov, Gatsby, Henri James et Jane Austen, au travers d'une multitude évènements dans la vie de l'auteure et de son entourage. Une très légère déception à l'arrivée : peut-être aurais-je aimé plus encore d'analyses, de comparaisons, tant elles sont brillantes et avisées. Mais passer à côté des "anecdotes" de l'auteure, peut-être pas toutes à proprement parler captivantes, aurait été le risque de passer à côté de toutes les couleurs et des questionnements de l'Iran en ces temps épineux.
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La République de l'imagination

Iranienne ou américaine ? La romancière exilée opte pour une troisième citoyenneté, celle des amoureux de la fiction... et de la libre-pensée.
Lien : http://www.telerama.fr/criti..
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Lire Lolita à Téhéran

Lire Lolita à Téhéran de Aznar Nafisi, née à Téhéran diplômée de l'université des États-Unis, enseignante en littérature n'est pas véritablement un roman mais une sorte de récits documentaires. Ils portent essentiellement sur la maltraitance des femmes en Iran suite à l'arrivée au pouvoir de l'Ayatollah Khomeini en 1979 puis des mollahs. Ils expliquent aussi l'utilisation de l'islam comme instruments de pourvoir, devenu "un business comme le pétrole pour Texaco, avec le meilleur emballage" comme nous le déclare une opposante au régime. Ils portent également sur l'analyse d'oeuvres littéraires dont Lolita de Nabokov. Il s'agit pour ce professeur de littérature d'utiliser les personnages de fiction de ces oeuvres et de comparer leurs destins aux situations vécues essentiellement par de jeunes femmes étudiantes de 1979 à 1997 mais plus généralement par toute la société iranienne. En trame de fond l'auteur nous fait revivre les événements historiques dont la guerre avec l'Irak et la répression des gardiens de la révolution, notamment sur les femmes, les intellectuels et les opposants. C'est une oeuvre originale par ce parallèle entre ces oeuvres de fictions et la réalité vécue. Les oeuvres permettent de mieux qualifier les vécus avec plus d'aisances que des analyses sociologiques et politiques en limitant les implications des acteurs. C'est une sorte de critiques, d'oppositions indirectes au réel -le regime, la société, les situations individuelles- par des critiques de situations analogues d'oeuvres de fictions. On réalise que les oeuvres de fictions sont d'excellents outils pour analyser toutes sortes de situations comme si ces fictions avaient anticipé de réels destins ou situations historiques. C'est un chef d'oeuvre de par cette originalité mais aussi par l'universalité des analyses qui conviennent parfaitement pour ce pays à cette époque mais plus généralement pour toutes les dérives de l'islam dans tout pays et toute époque. On ne peut s'empêcher de faire un parallèle avec les gouvernements islamistes, les rivalités et guerres civiles entre frères musulmans suite “au printemps arabe“ avec peut-être des situations en pire...
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Lire Lolita à Téhéran

Azar Nafisi est d'origine Iranienne.

Avant de fuir l'Iran pour les Etats Unis, elle a longtemps enseigné la littérature anglo saxonne à l'université de Téhéran, et a vécu l'avant/pendant/après Révolution.

Madame Nafisi nous raconte donc la Révolution Islamique Iranienne au travers de son métier de professeur.



Ce livre est bouleversant.

Extrêmement bien écrit (et traduit), j'y ai énormément appris.



Tout d'abord sur des livres que j'avais déjà lu sans approfondir (notamment Orgueil et Préjugés de Jane Austen) grâce aux extraits de cours retranscrits dans le livre.

Mme Nafisi nous parle ainsi de Lolita de Nabokov (que je n'avais pas lu mais pour le coup, le thème est tellement terrible que je ne le lirai pas!), de Daisy Miller de Henry James, de Gatsby de Francis Scott Fitzgerald et d'Orgueil et Préjugés.



Enfin et c'est ce que j'ai préféré, sur l'histoire de la révolution islamique en Iran.

Je ne savais que très peu de choses sur le sujet et ce livre nous raconte étape par étape ce qui s'est passé. Avec la page Wikipedia dédiée au sujet à côté, on recolle tous les morceaux et on suit bien la chronologie.

J'ai vraiment pris conscience de l'horreur de ce régime à ses débuts (et pas qu'à ses débuts), particulièrement envers les femmes.

Madame Nafisi lutte tout d'abord, refuse de se plier à ce gouvernement et continue d'enseigner cette littérature occidentale décadente.

Puis devant les menaces, et suite à son renvoi de l'université elle abandonne et se consacre à la lecture.

Une émissaire de l'université Tabatai de Téhéran, supposée libérale, vient la chercher afin qu'elle reprenne l'enseignement de la littérature anglo-saxonne. Mme Nafisi hésite, puis accepte, décidant de ne pas se laisser intimider par le régime islamique alors en place.

Elle rencontre lors de ses cours des jeunes femmes issues de tous les milieux et d'histoires différentes, et décide de les réunir tous les jeudis lors de séminaires.

Mme Nafisi nous raconte leurs histoires, leurs réunions, leurs chagrins d'amour, leurs frustrations vis à vis du régime. On plonge alors totalement dans la vie de ces femmes.
Lien : http://piccolanay.blogspot.f..
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Lire Lolita à Téhéran

Azar Nafisi, professeur de littérature anglo-saxonne en Iran, est interdite de cours par les autorités. Elle décide alors de réunir chez elle sept de ses étudiantes: pendant deux ans, elle organiseront un séminaire clandestin de littérature.



Je croyais ne pas pouvoir lire ce type de livre. Trop dense, trop ardu. Et pas du tout! c'est une révélation. J'ai passé un vrai bon moment avec Mme Nafisi. C'est pour moi une découverte littéraire et humaine. Sur fond d'actualité brûlante, l'Iran m'a semblé plus accessible, moins incompréhensible.



On suit pas à pas cette femme, ces femmes luttant pour ne pas sombrer, ne pas devenir ces ombres muettes auxquelles les autorités veulent les réduire. Mais il y a de l'humour aussi, de la littérature, de la grande littérature qui les aide à tenir, à croire en la liberté, en ces années de peurs et d'oppression.

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Lire Lolita à Téhéran

"Lire Lolita à Téhéran" ou De l'Importance de la Littérature.



Je transcris l'avis de Margaret Atwood (romancière, poétesse et critique littéraire canadienne) : "Un livre captivant. Il explore avec ferveur et conviction le pacte tacite existant entre l'écrivain, le livre et le lecteur. Tous les lecteurs devraient lire ce livre."



Importance de la littérature lorsque lire devient source de dangers, objet d'interdits. Importance du livre lorsque la vie est bafouée, l'existence réduite à ce que d'autres décident sans vous laisser la moindre chance d'y échapper.



Livre liberté où l'on se connaît soi-même, où l'on apprend que "compassion et empathie" sont ce qui permet d'entendre l'autre dans ce qu'il est profondément, d'accepter les différences.



Livre qui ouvre les portes de la vie à ceux qui sont brimés parce que d'autres ont connu ces brimades et les ont révélées grâce à l'oeuvre fiction.



Livre espoir pour ce qu'il contient de rêves, d'existences, de pensées, de prises de conscience, d'amour.



Livre document, livre témoignage que celui de Azar Nafisi. Sa voix s'élève nous entraînant "chez nous, hors de chez nous", nous faisant mesurer l'ampleur de la tyrannie et de ses blessures, nous amenant à relativiser nos faits quotidiens et dérisoires d'occidentale privilégiée. Une giffle... Une réflexion... Une remise en question... Un regard différent sur certaines de nos lectures...



Hommes et femmes déchirés. Livre, littérature, oeuvre, auteur, écrivain, plume, analyse littéraire,analyse littéraire sociétal, analyse littéraire politique, analyse littéraire psychologique, libre pensée,... Hommes et femmes vainqueurs.



Livre Brûlant. Livre Percutant.



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