Alors, dès le retour de son enterrement, je repris son travail. J'entrepris de rédiger une version bretonne de l'histoire de la Bretagne. Et pour cela, je choisis d'écrire l'histoire de ma vie, car Dieu avait voulu qu'elle fût étroitement mêlée à celle de mon pays sur plus de trente ans. C'est ce travail que j'achève aujourd'hui. J'ai posé la plume, tout à l'heure, en fin de matinée, le corps fatigué et l'esprit brûlant. Je suis à présent avec mon frère sur une ondulation de la lande tombant en falaise dans les vagues. Le temps se lève. En bas sur la grève, Muirgheal et Levenken jouent avec les enfants. Parfois, le vent rafle leurs rires et nous les apporte. Il nous fait aussi entendre des plaintes venues du large. La mer s'offusque. Le ciel est sombre. Je reçois la douceur d'une pluie sur la lèvre et des senteurs de genêts m'enivrent. Le cycle de Boduuan commence.