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3.64/5 (sur 32 notes)

Nationalité : France
Biographie :

Catherine Boullery est l'auteure de la saga de fantasy d'Aila.
Huit tomes déjà parus composent cette saga, ainsi que deux intégrales qui regroupent les tomes par quatre en deux époques.

Tome I Aila et la Magie des Fées
Tome II La Tribu Libre
Tome III L'Oracle de Tennesse
Tome IV La Dame Blanche
Tome V La Porte des Temps
Tome VI Une Vie, voire Deux
Tome VII Un Éternel Recommencement
Tome VIII L'Ultime Renoncement
La Première Époque (tomes I à IV)
La Deuxième Époque (tomes V à VIII)

Source : UPblisher.com
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Présentation des huit tomes de la saga de fantasy et de la promotion sur La Dame Blanche (tome 4) en janvier 2019


Citations et extraits (10) Ajouter une citation
Sur les conseils de la camériste, Élina, précise et efficace, emmaillota rapidement un chignon dans une résille, tandis que quelques mèches, artificiellement folles, s’échappaient sur les côtés en boucles lâches et élégantes. Éléonore choisit cet instant pour entrer :
— Aila, venez vers moi… Vous êtes magnifique ! Je suis heureuse de voir que les tenues que j’ai retenues vous siéent à ravir ! J’avais raison de penser que vous valiez plus qu’une combattante. Il y a en vous plus de personnages que vous ne le croyez et peut-être certains dont vous ne vous doutez même pas… Vous ferez une promise tout à fait crédible pour Hubert.
Aila se raidit.
— Une quoi ?
Immédiatement, Éléonore saisit qu’elle avait commis une bévue et se mordit brièvement la lèvre.
— Je suis sincèrement désolée, je supposais que vous étiez dans la confidence…
— Sa promise !
D’un geste brusque, la jeune femme remonta sa robe, traversa la pièce en quelques enjambées et se présenta devant la chambre d’Hubert. Elle frappa pour la forme et ouvrit la porte avec fureur. Bouillant de colère, elle ne remarqua pas la surprise du prince quand il la découvrit, pas plus que les atours qu’il portait, dignes du rang qu’il tenait. Menaçante, elle avança vers lui, le forçant à reculer.
— Votre promise ! Je suis votre promise ! Quand pensiez-vous me mettre au courant ? Juste avant de descendre du carrosse à notre arrivée, vous m’auriez lâché ce petit détail de façon anodine !
— Aila, je vous en prie…
— Votre promise ! Non, mais je rêve… Vous passez trois jours sans m’adresser la parole, vous m’affamez parce que, habitué à votre confort, vous oubliez que la nourriture s’achète ! Je vous sers de poupée que vous faites habiller et coiffer pour plaire à un coureur patenté ! Mais si vous voulez le séduire, allez-y donc tout seul, je vous refile ma robe et mes souliers vernis, vous lui ferez les yeux doux et papillonnerez des paupières derrière la dentelle d’un éventail. Moi, je renonce !
— Aila, supplia Hubert une nouvelle fois.
— Taisez-vous, je n’ai pas fini. Depuis que je suis née, je n’ai jamais été qu’une ombre aux yeux de celui qui m’a donné la vie. Alors, ne pas exister, je connais cela par cœur. Mais vous ! Vous m’avez choisie pour vous accompagner, je n’ai rien demandé, moi ! Et sûrement pas d’être avec vous ! De tous ceux qui ont suivi le même chemin que moi, vous êtes le seul à ne pas m’avoir jugée digne de votre confiance et cela, je ne vous le pardonnerai jamais, vous entendez ! JAMAIS !
Hubert essaya de la retenir par le bras, mais, plus rapide que lui, elle s’échappa, retournant dans sa chambre. Il la rejoignit, tandis qu’elle s’asseyait devant son miroir, déjà occupée à défaire sa coiffure. Discrètement, Éléonore quitta la pièce avec sa camériste et Élina, refermant la porte derrière elles.
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Extrait du chapitre 10 du tome I :
Aubin et Avelin donnèrent leur accord. Laissant les chevaux suffisamment loin, Aubin se glissa sur la droite et Aila sur la gauche, tandis qu’Avelin se positionnait en observateur prudent, mais prêt à intervenir. Elle dénombra cinq hommes de son côté et songea que ce serait tellement pratique si elle pouvait les tuer tous simultanément. Elle prit cinq flèches dans son carquois et, intensément, les observa dans sa main ouverte. Moqueuse, elle pensa : « Ce serait si simple s’il me suffisait de dire : filez, mes cinq flèches, droit dans le cœur de mes ennemis ! » Et ce fut ce qu’elles firent… Les flèches quittèrent sa paume et fondirent toutes les cinq vers les mercenaires qu’elles atteignirent en plein cœur. Ils s’effondrèrent. Aila était statufiée : « Mais comment ai-je fait cela ? Par les fées, mais comment j’ai fait cela ? » Elle entendit le signal d’attaque lancé par Avelin, mais, immobile, elle fixait sa main, revoyant les flèches filer toutes seules. « Je deviens folle… »
— Aila ! Viens ! cria Aubin.
Elle se secoua et, poussant un hurlement, fondit dans la bagarre.

Le combat était achevé depuis longtemps. Le groupe, enrichi de deux membres, avait décidé de dormir tassé dans la cabane qui leur fournirait au moins un abri pour une nuit dont l’obscurité noircissait la forêt. Aila leur apprit la mort de Bascetti, sans parler de sa lutte avec Tête, puis n’ouvrit plus la bouche de la soirée, s’esquivant même discrètement, alors que la conversation battait son plein. Enthousiastes, Barnais et Airin narraient à qui voulait les écouter leurs exploits et comment ils s’en étaient merveilleusement tirés pour un « vieux » et un « joli cœur », comme ils se décrivaient. Surpris par son absence, Aubin vint rejoindre sa sœur, dehors :
— Des soucis, Aila ? Cela ne s’est pas bien passé avec sire Hubert ?
— Si. Enfin, au départ, non. Après, cela a été mieux, même bien.
— Raconte-moi tes aventures. Parce que pour moi, à part ce soir, ce fut plutôt un calme plat !
— Tu sais, pas grand-chose : un…
Elle avait failli avouer un premier baiser, mais elle se retint ; elle n’avait pas envie d’en parler :
— … château, des robes de princesse, un bal, une demande en mariage. Tout ce qui fait la vie d’une femme, sans plus…
— Tu me fais marcher ?
— Non, pas du tout, j’ai vraiment traversé toutes ces épreuves !
— Et qui donc voulait t’épouser ? Dis-moi, ce fut un vrai coup de foudre !
— Et il s’est abattu sur ma vie ! Comme tu vois, j’ai résisté… Tout est pour le mieux…
Aubin, elle le devinait, n’en était pas convaincu :
— Tu en es sûre ?
— Oui, Aubin. J’ai vécu beaucoup de moments très intenses en un temps limité et, ce soir, je me sens un peu… lasse. Après une bonne nuit de sommeil, il n’y paraîtra plus.
— Bon, si tu le dis… Au fait, tu as fait comment pour tirer aussi vite tout à l’heure ? J’ai vu tomber au moins trois hommes simultanément et, au final, tu en as descendu cinq !
— Je ne sais pas. J’ai dû débuter une poignée de secondes avant toi. En tout cas, je te le promets, je ne me suis pas fabriqué un arc à plusieurs flèches !
Elle plaisanta avec Aubin qui lui jeta un dernier regard circonspect avant de se retirer. Et pourtant, elle n’avait pas envie de rire, elle avait effectivement tiré cinq flèches en même temps et se trouverait carrément dans l’incapacité de recommencer tout de suite, si on le lui demandait. Elle ignorait comment elle avait accompli cette prouesse. D’ailleurs était-ce bien elle qui l’avait réalisée ? Les yeux dans le vide, elle se recroquevilla, sa tête sur ses bras croisés, reposant eux-mêmes sur ses genoux. Elle demeurait dans cet état depuis un bon moment quand Hubert vint la rejoindre :
— Aila, où étiez-vous donc passée ? Je vous cherchais…
— J’avais besoin de calme. Désolée de vous avoir faussé compagnie, dit-elle.
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Chapitre 9 du tome III :
Aila trouva l'endroit qu'elle cherchait, loin de toute habitation, perdue au cœur d'une forêt, dans une clairière où elle s'allongea, le ciel au-dessus de sa tête. Elle cessa d'être Aila et se découvrit une infime partie de l'univers... Son esprit investit le monde qui grouillait autour d'elle. Il s'infiltra dans le silence d'un chêne centenaire et se réveilla dans la sève, source de vie, il parcourut les racines, remonta jusqu'à la pointe des feuilles avant de replonger vers le sol où il s'exprima à travers un simple brin d'herbe. Elle se devait de rester humble tout en multipliant les approches... Devenir une abeille qui butinait, telle la pièce anonyme d'une communauté, ou un ver de terre, aveugle et rampant qui lui apprenait que posséder des yeux n'était pas nécessaire pour avancer. Chaque transformation lui délivrait une leçon de vie qui la poussait à aller toujours plus loin dans l'infiniment petit : une fourmi, un grain de sable, une poussière, un rayon de soleil. À chaque pas, Aila reculait les limites de sa connaissance jusqu'à l'étourdissement, elle n'en croyait ni ses sens ni son entendement. Si seulement Hamelin avait été avec elle, il aurait jubilé... Elle perçut le son de sa voix comme l'écho de sa façon de concevoir le monde à travers sa personnalité extraordinaire et généreuse... Alors qu'elle pensait arriver au bout de ses découvertes, elle replongea encore plus en profondeur, glissant sur une piste vertigineuse sans pouvoir s'arrêter. Elle n'était plus le brin d'herbe, ni l'abeille, ni la lumière, mais en eux. Et incroyable ! Loin de former un tout, ils étaient eux-mêmes constitués d'un ensemble d'éléments si petits que les meilleurs des yeux ne les auraient pas discernés, ils n'apparaissaient qu'à un esprit empreint d'une immense liberté, de celle qui pourrait les appréhender sans jamais comprendre leur essence... À peine le temps de souffler, et, de nouveau, elle s'engagea dans une nouvelle descente qui l'entraîna toujours plus en profondeur. Elle frémit. Comment pouvait-elle concevoir que quelque chose d'encore plus insignifiant pût posséder une réalité ? Et pourtant, irrésistiblement, attirée vers la source d'un univers de plus en plus microscopique, elle franchissait des frontières ignorées de tous : celles d'un monde dans un autre monde, une explication des débuts de la vie... Lors de cette chute vertigineuse, elle pénétra dans un lieu dont toute lumière avait disparu, un lieu similaire au cercle noir de l'esprit... Seule, entourée d'obscurité, elle écoutait, à l'affût du moindre signe. Bientôt, elle perçut un frémissement autour d'elle, comme une vibration provoquée par une particule minuscule, si petite et si rapide que son regard ne parvenait pas à la suivre. Quasi indétectable, l'existence de cette dernière était cependant indubitable. Laissant dans son sillage une trace de son passage, cet élément bouleversait l'ombre traversée avant de repartir comme si de rien n'était... Aila ferma ses paupières et inspira longuement. Si elle ne pouvait la capter avec ses yeux, son esprit s'accrocherait à elle jusqu'à s'y fondre et y perdre son identité. Bientôt, elle fusionna avec cette particule qui tournait et tournait encore, inéluctablement, mue par aucune autre envie que celle de virevolter éternellement. Puis, soudain, il lui apparut au centre de toute cette noirceur, si grand alors qu'elle était si petite, si dense alors qu'elle était si légère, si fort alors qu'elle était si fragile et, pourtant, tout autant invisible qu'elle à la perception des hommes... Elle ressentait son attraction et accepta de n'être conçue que pour graviter à sa périphérie, conséquence de la parfaite cohérence de la nature. Elle le visualisa comme le noyau sombre d'un fruit, dont la peau extérieure formerait une enveloppe impalpable. Combien d'heures ou de jours dura l'assimilation de toutes ces nouvelles formes de représentation ? Elle n'en sut rien, sa notion du temps s'était égarée. Alors qu'elle pensait enfin parvenir à une pause salutaire, un concept stupéfiant surgit dans son esprit comme une lueur aveuglante, balayant toutes les croyances qui décrivaient l'origine de la vie : cette dernière n'existait que grâce à cette particule insaisissable, perpétuellement en mouvement autour de son noyau. Et malgré la simplicité apparente de ce système, la diversité de l'univers était née de leur alliance. Par les fées ! Elle l'imaginait à peine : tout ce qui était vivant comme tout autant ce qui ne l'était pas contenaient ce grain et ses microscopiques éléments en rotation éternelle ! Bientôt, Aila cessa d'être seule, de nouveaux venus l'avaient rejointe au cœur de la matière et contribuaient à grossir la pièce centrale. L'esprit d'Aila explosa d'émotion face à la beauté de ce ballet intemporel, cette ronde infinie et magique, cette ronde à l'origine de la création du monde ! La lumière jaillit auprès d'elle, l'aveuglant après l'obscurité qui l'avait entourée. Elle se sentit aspirée et se dirigea sans aucun contrôle vers l'enveloppe. Autour d'elle, l'espace lui parut flou comme si elle se déplaçait trop vite pour en percevoir les détails. Son cœur battant à tout rompre, elle pressentait que son voyage n'était pas achevé, mais toutes ces notions nouvelles avaient ouvert une brèche en elle dont elle tentait encore de maîtriser les effets. À toute vitesse, elle remontait l'infiniment petit, traversa son corps en un éclair avant d'être propulsée vers le ciel. Elle s'éloignait du monde minuscule qu'elle venait de rencontrer. Si grand un instant plus tôt, il s'effaça presque immédiatement, devenant invisible en raison de la faiblesse de ses dimensions. Elle inspira profondément pour tenter de calmer la profusion des sensations étourdissantes qui l'emportaient irrémédiablement. Trop, c'était trop, comme une folie qui menaçait de lui faire perdre la raison... Qui croirait ce qu'elle avait vu ? Personne ! Cette conception appartenait aux secrets inviolables, de ceux à ne jamais dévoiler à quiconque, car peu se montreraient capables d'en accepter la réalité... À présent, où ce déséquilibre permanent l'emmenait-il ? Sa Terre devenait un objet minuscule et, pourtant, visible dans un nouveau cercle noir, qui tournait, elle aussi, autour d'un noyau éclatant de lumière... Là, non plus, elle n'était pas seule, d'autres points tourbillonnaient avec elle à des distances variables... Toujours ce grain central, obscur ou étincelant, avec des corps pour graviter en harmonie avec lui, à grande ou faible vitesse ; l'univers n'était que la répétition sans fin d'un même modèle... Traversant un espace vidé de toute atmosphère, elle se rapprochait de l'astre dont elle perçut la chaleur, puis la brûlure. Perdant sa nature charnelle, elle plongea dans son cœur en fusion. À nouveau, elle se sentit devenir de plus en plus petite, redécouvrant les particules élémentaires invisibles et leur noyau caché dans son enveloppe sombre. Elle hoqueta de surprise tandis qu'un vent solaire l'entraînait au loin. Elle repassa près de sa Terre et s'enfuit vers l'infiniment lointain. Toujours, l'alternance entre les zones actives et celles presque inertes se renouvelait. Sans atteindre les confins de l'infiniment grand, sa vitesse ralentit, lui laissant le temps de contempler ce monde sans horizon, avec humilité et émerveillement. Où qu'elle se dirigeât, seuls existaient ces quelques éléments, si peu nombreux, mais terriblement essentiels, et, aussi incroyable que cette conception pût paraître, leur association avait tout créé, du plus grand au plus petit, tant de richesse avec si peu, une magie encore plus extraordinaire que les autres, une magie qui pourrait devenir sienne...
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Extrait du chapitre 4 du tome II :
Une ultime accélération et elle disparut définitivement aux yeux de ses ennemis. Elle plongea dans l’ombre des rochers, dissipant aussitôt l’illusion qui l’entourait. Les Hagans passèrent sans la voir, fonçant droit dans le piège tendu par les quelques compagnons de la tribu libre. À présent, elle devait retourner soigner Hang, ses amis se débrouilleraient bien sans elle.
Appelant les Esprits de la Terre, elle s’élança, dévalant le trajet en sens inverse à une vitesse vertigineuse comme si sa vie en dépendait. Soucieuse de ses partenaires, une partie de sa conscience demeura auprès d’eux, prête à intervenir en cas de besoin. Arrivée devant le minuscule boyau au bout duquel Hang se mourait, Aila resta un instant à en considérer l’entrée. Comment un homme de sa carrure avait-il pu s’y faufiler et, surtout, de quelle façon allait-elle s’y prendre pour l’en sortir ? Ah, oui… Elle avait oublié qu’elle aussi devait y pénétrer… Rien à faire, elle avait toujours détesté les espaces étriqués et, là, elle venait de tomber sur son pire cauchemar. Elle renouvela son appel aux Esprits de la Terre pour obtenir leur soutien, frémissant à l’idée de s’y glisser. Par les fées, elle avait bonne mine, la chamane guerrière… Elle s’allongea sur le ventre et commença à ramper dans le boyau. Malgré le froid ambiant, rapidement, elle se mit à transpirer. Progresser dans le conduit étroit ressemblait à un véritable défi personnel, surtout quand ses membres répondaient avec retard aux ordres de sa tête. Elle n’osa même pas imaginer son appréhension en l’absence de sa vision nocturne… Heureusement, elle ne tarda pas à rejoindre une minuscule salle dans laquelle elle réussit à s’asseoir à côté de Hang. Complètement avachi, les jambes repliées sous lui, l’homme avait perdu connaissance. Reprenant le contrôle de ses sens un peu dispersés par son cheminement dans ce boyau, elle posa délicatement sa paume sur la blessure la plus grave, percevant instantanément la fragilité de la vie dans le grand corps inerte. La chamane ne perdit pas de temps. Immédiatement, elle renforça l’énergie intérieure du Hagan, s’occupant dans le même temps de réparer la lésion, reconstruisant tout ce que l’épée avait détruit et coupé. Elle frémit en imaginant les dégâts infligés par la lame crénelée lors des allers et retours dans la chair, arrachant tout sur son passage. Cette arme, au maniement complexe, causait des dommages considérables, voire irrémédiables. Quelle volonté de survie incroyable devait posséder le Hagan pour ne pas avoir renoncé en regard de tant de souffrances ?
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Un seul restait et Hang l'avait décidé, cet ultime ennemi serait pour lui. Sous le regard des rares rescapés de cette épouvantable boucherie, le combat qui les opposait s'éternisait. Le Hagan l'aurait considéré comme un valeureux adversaire si le guerrier de Césarus avait été un être normal. Grand, large et musclé, des traits dynamiques, il possédait une technique brillante doublée d'une puissance colossale, mais, au centre de son visage, deux yeux vides, dénués de conscience, démentaient qu'il fut toujours un homme. Apparemment grièvement blessé, il n'en manifestait pas moins une résistance farouche. Exténué, Hang puisait dans ses ultimes ressources et son inflexible volonté l'énergie nécessaire à le contrer sans parvenir à l'abattre. Pourtant, il suffit d'un pied heurtant un rocher enfoui sous le sable, d'un déséquilibre passager, pour que, ses dernières forces unies, Hang s'engouffrât dans la faille défensive de son ennemi et, d'un geste, un seul, la hache pénétra par le crâne, puis fendit la face et enfin le buste en deux parties qui s'effondrèrent sur le sol dans un bruit sourd. Le combat venait de s'achever.
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Elle ne parvenait même plus à être en colère. Seule une tristesse infinie persistait dans son esprit comme dans son cœur… Et voilà que, reléguée à une place mineure, elle s’effaçait comme une quantité négligeable, un objet dépourvu d’intérêt devenu transparent, autant à ses propres yeux qu’à ceux des autres, ce constat engendrant une insupportable souffrance. Elle voulait tant exister ! Prouver à chacun sa force, son talent dans tous les domaines, son indéniable supériorité. Donner l’impression que, pour elle, se battre ne lui demandait aucun effort, que séduire un garçon, n’importe lequel, ne nécessitait qu’un claquement de doigts. Elle, une femme dans un monde encore trop réservé aux hommes avait combattu chaque jour pour résister aux réflexions sexistes de ces mâles arrogants, leur démontrer, quand elle les mettait à terre, que leurs mots ne l’atteignaient pas et que ses aptitudes naturelles les rabaissaient au rang de marionnettes entre ses mains. Alors, comment accepter que son frère, en un instant, fût capable de détruire tout ce qu’elle avait édifié, lui volant l’amitié de Merielle, provoquant l’adhésion de Sekkaï sans aucune action particulière ? La magie… Son cœur s’enfla, mais une nouvelle fois la tristesse l’emporta sur la colère. Pourquoi lui ? Pourquoi ? Comme un cri intérieur de désespoir, sa question explosa dans son esprit. Pourtant, elle croyait tout posséder, tout, se battant avec hargne et panache, et se découvrait presque pitoyable, privée par la vie de ce qui lui revenait de droit. C’était injuste ! Elle se retourna et une larme trouva le chemin de sa joue avant de s’écraser sur le sol. Elle ne pourrait jamais accepter de ne pas être au centre de leurs préoccupations. Exister ! Et elle existerait, devrait-elle leur pourrir chaque heure de chaque jour ! Demain, elle leur prouverait à tous qu’elle ne passerait pas au second plan sans résister.
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À présent ne régnaient plus que d’impénétrables ténèbres. Toutes sensations, physiques ou intellectuelles, s’étaient totalement effacées et, dans le cocon de Tristan qui s’opacifiait progressivement, il en serait resté ainsi pour l’éternité si, indocile, la magie n’en avait pas décidé autrement… Au début, elle signala sa présence par un faible picotement à l’extrémité des doigts du garçon. Si le cerveau du jeune homme avait été conscient, peut-être aurait-il agité le bout de ses phalanges pour se débarrasser de cette impression aussi dérangeante que celle produite par une invasion de fourmis sur sa peau. Mais tel ne fut pas le cas. Dans sa tête, toutes les connexions semblaient débranchées. Cependant, cette entité n’avait nulle raison de se décourager. Poursuivant son chemin, elle se glissa dans sa main, puis s’enroula comme une herbe folle autour de son bras, gagnant peu à peu son épaule. Se divisant, elle entreprit de parcourir tout son organisme, répandant sa chaleur douce comme une énergie vivifiante, un flux encore léger, sans effet observable et, pourtant, présent. Recroquevillé sur lui-même, avec l’apparence de la mort, Tristan ne respirait plus que très faiblement, plongé dans une léthargie si profonde que la magie aurait pu penser qu’il n’en reviendrait jamais. Mais elle n’avait pas besoin de croire. Diffusant l’essence immatérielle de ses pouvoirs, elle continua son voyage charnel, créant des liens lumineux entre différents points de l’anatomie comme sur une carte géographique à dimension réelle : ici, le cœur, là, les poumons, un pied, des doigts et ainsi de suite... À présent que la majorité du corps paraissait sous son contrôle, elle ondula gracieusement vers son dernier objectif, le crâne et, derrière lui, le cerveau, puis, telle une flèche meurtrière, s’y planta dans un jet élancé. Au premier contact, sa pointe effilée sembla se décomposer en centaines de gouttelettes étincelantes qui imprégnèrent chaque lobe de l’organe pour se fondre dans toutes les fonctions indispensables : langage, mouvement, perception, mémoire et tant d’autres. Aussitôt, la peau de Tristan commença à légèrement rayonner sous ses vêtements, puis, comme à la suite d’une explosion silencieuse, n’exista plus autour de lui qu’une blancheur immaculée, aveuglante, qui s’estompa rapidement. Paniqué par le retour brusque de mille sensations, le garçon, haletant, se débattit avec vigueur, malgré les brumes encore manifestes de son esprit, sa tête, lorsqu’il se redressa brutalement, heurta violemment le cocon. Toujours confus, la respiration saccadée comme si l’air lui manquait, Tristan frappa de toutes ses forces contre la paroi qui l’emprisonnait jusqu’à ce que celle-ci cédât sous la férocité de ses coups répétés. La fraîcheur de l’atmosphère l’enveloppa instantanément, le calmant petit à petit, tandis qu’il reprenait son souffle. Peu à peu, il, chercha à remettre un peu d’ordre dans l’incohérence de ses perceptions. Quel était son ultime souvenir ? Au début, l’absence répondit à sa volonté de rétablir le contrôle de ses pensées. Il ne se rappelait absolument rien.
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Alors qu’Amaury s’apprêtait à repartir, la voix d’Inou le rappela.
— Comment ferais-tu pour soigner une côte cassée ?
— Si la fracture semble nette, un à deux mois d’immobilisation devraient suffire. Il est possible de bander le thorax pour améliorer la tenue des os, mais, personnellement, je doute de l’efficacité de ce procédé. Dans des cas plus graves, les traitements deviennent plus compliqués. Après, moi, je m’y connais plus en animaux…
— Et comment peut-on savoir si c’est sérieux ou pas ?
— Chez un chien, palper avec application offre une indication fiable. Pour nous, je suppose que c’est pareil.
— Oui, mais, là, ce n’est pas un homme…
Inou tordit sa bouche de droite à gauche et réciproquement plusieurs fois. Ce tic qu’elle ne contrôlait pas apparaissait quand, embarrassée, elle réfléchissait à la meilleure décision à prendre dans une situation qui l’ennuyait.
— Et tu pourrais déterminer exactement l’étendue de ses blessures sans… enfin, à travers ses vêtements ?
— Probablement…
— Bon alors, vas-y, mais gare à toi si je te vois mettre tes mains à des endroits qui ne sont pas pour toi !
— Oh, dame Inou, j’ai quand même vingt-sept ans ! Je ne suis pas un de ces puceaux en manque de découverte !
— Oui, mais tu n’es pas marié.
— Non, et c’est un bienfait, car, si ma femme apprenait que j’en touche une autre qu’elle, je serais reçu à coups de bâton ce soir à la maison ! s’exclama-t-il, l’air amusé.
Redevenu sérieux, il s’approcha du corps et commença son examen sous l’œil vigilant d’Inou qui n’attendait qu’un dérapage pour taper sur ses doigts. Il palpa les os au mieux pour ne pas provoquer la colère de la tante de Kerryen, vérifiant le sternum, les clavicules et une partie de la colonne vertébrale. Cependant, il profita d’un moment d’inattention de l’intendante, quand Mira pénétra dans la pièce, pour achever son inspection sous des zones plus charnues.
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Refusant d’accepter son échec, elle ne bougea pas et Hang soupira :
— Que tu peux être têtue ! Donc je l’écrase un peu plus. Toujours pas ? Bon, tu me signales quand tu ne peux plus respirer, sinon je continue.
Joignant le geste à la parole, il resserra son étreinte. Soudain, elle se mit à frapper sur son bras frénétiquement et, aussitôt, il relâcha la pression. Naaly se laissa tomber sur le sol, cherchant à reprendre son souffle.
— Tu es complètement fou, finit-elle par lâcher entre deux quintes de toux.
— Tu peux voir ça comme ça. D’un autre côté, avec un autre que moi, tu serais morte…
— Je te déteste !
— Mais oui, Naaly, je sais. Te rends-tu compte que c’est la seule réponse que tu es capable de rétorquer pour expliquer toutes les déceptions que tu rencontres ? Tu détestes ta mère et ton frère parce qu’ils te font de l’ombre. Tu détestes Sekkaï parce qu’il est insensible à ton charme, alors que tous les garçons tombent dans tes bras comme des mouches. Tu détestes Merielle parce que, contre toute attente, elle s’est rapprochée de Tristan et que tu ne veux pas la partager. Tu détestes ton oncle et ton grand-père parce qu’ils ne devraient aimer que toi et que, malheureusement pour toi, ils apprécient aussi ton frère et, en ce moment, tu me maudis, car je liste, sans le moindre remord, tout ce que tu n’as pas envie t’entendre. Tu vaux bien mieux que l’image que tu donnes de toi ! Ras-le-bol de cette fillette capricieuse dont le seul objectif consiste à pourrir la vie des autres !
Il lui tendit la main pour l’aider à se relever, mais elle la refusa.
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Un hochement de tête de Pardon à ses enfants les incita à le rejoindre. Ensemble, ils se dirigèrent vers le côté opposé de la cuvette dont la pente relativement faible aurait semblé simple à grimper si le terrain humide ne se dérobait pas sous leurs pieds en permanence, les amenant à redescendre quand leur volonté les poussait à monter. Plus long que prévu, ce petit jeu ne dura cependant pas éternellement et, enfin, ils accédèrent à une nouvelle plage de sable infini. Au premier pas sur sa surface, un vent inattendu se leva, caressant leur visage de son souffle presque rafraîchissant. Au début, s’il se montra plutôt doux et amical, sa puissance s’intensifia rapidement. Bientôt, pour avancer, le groupe lutta contre lui, se préservant des grains de silice projetés dans leurs yeux. Puis Pardon arrêta ses enfants et la bourrasque cessa. Pourtant, un instant plus tard, celle-ci reprenait, concentrant ses effets sur une zone face à eux dans laquelle elle tourbillonnait avec ardeur. Aveuglés encore, ils se protégèrent au mieux. Puis au bruit des rafales succéda le silence. Devant leurs regards presque incrédules, dans l’air devenu translucide se dessinaient des formes que tous purent identifier : trois bâtons dans lesquels ils se reconnurent, deux empreintes de main droite, une grande et une plus menue, pour ceux qui passeraient la porte quand le troisième demeurerait ici. Pardon réagit aussitôt.
— Je ne sais pas encore comment, mais, cette porte, mon fils, je te jure que tu la franchiras !
— Non.
La réponse de l’adolescent statufia son interlocuteur.
— Persuadé que mon tour arrivait, je m’y suis préparé, poursuivit Tristan. Pense à la suite de votre voyage. Qui mieux que toi veillerait sur Naaly ?
Pardon secoua la tête, puis, les sourcils froncés, insista :
— Je ne t’abandonnerai pas !
— Tu n’as pas le choix ! Aucun de nous ne l’a… De toute façon, restons réalistes, un seul accédera au dernier monde, alors que je m’arrête là ou à la prochaine étape, quelle différence ?
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