Partir loin et seule me paraissait insurmontable. Lorsque j’ai vu le nom du pays apparaître sur l’écran, mon coeur s’est emballé. Alice terminait son e-mail en me souhaitant bonne chance. Je me sentais piégée. Je ne pouvais pas faire comme si je n’avais jamais su. L’offre était là, sous mes yeux. Je n’avais pas le droit de l’ignorer.
Moi aussi, j’ai un secret qui ne peut pas être partagé. Parce que parfois certaines révélations peuvent nous abîmer à tout jamais et qu’il vaut mieux les dissimuler éternellement, simplement pour protéger tous ceux que l’on aime.
Aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours été attiré par les chantiers. Quoi de plus classique pour un petit garçon que de s’émerveiller devant une grue ou une pelleteuse ? Je l’ai toujours affirmé : quand je serai grand, je construirai des routes, des immeubles, et peut-être même des ponts. Il y a bien eu une période où j’ai voulu devenir jardinier, pompier ou encore pilote d’avion, mais quand il a fallu choisir un métier plus sérieusement, je suis finalement revenu à mes premiers amours.
La distance libère certaines pensées que je n’aurais pu dévoiler en sa présence. Je n’ai jamais eu pour habitude de livrer mes états d’âme, mais ce soir, devant mon clavier, tout est plus facile. Je ne sens aucun regard posé sur moi. Je me sens libre de pianoter tous les mots qui ont envie de s’échapper à force d’avoir été trop longtemps retenus prisonniers, par pudeur ou par peur.
Mon secret ne deviendra pas moins douloureux avec le temps, et encore moins avec la distance que j’ai greffé entre lui et moi. Je n’aurais jamais dû le regarder une dernière fois. Je me réveille presque chaque nuit avec son visage devant mes yeux. Impossible à effacer. Il reste là. Immobile. Sans un sourire.
Les filles adorent les hommes qui prennent soin d’eux. J’ai vite compris qu’il fallait savoir être élégant tout en restant simple et être sûr de soi sans paraître prétentieux.
Et si le futur efface quelques traces de ton passé, n’oublie pas qu’il te reste encore une vie au présent. Malheureusement, le temps aura toujours le dernier mot.
« On peut tout fuir, sauf sa conscience. »
STEFAN SWEIG.