Salon du Polar "Les Grands Espaces"
Lorsque je ne serai plus de ce monde
il y aura le même noyer que j'ai regardé
le grand bouquet de ciel au-dessus de lui
le même caillou que j'ai jeté au fond du pré
sans que je sache où il se trouve
Voilà pourquoi j'aime ce monde
parce qu'il n'a pas besoin de moi
de mes amours ou de mes pensées
de ma solitude que j'ai enfermée dans un vieux sac
de cette insondable tristesse
qui fut comme un feuillage
Il y a ce caillou perdu et ce noyer
et tous ces oiseaux que je n'arrive pas à compter (...)
Il y a bien sûr des choses
que je ne confonds pas
le ciel avec le ciel
une mort avec une mort
la douleur qui traverse la douleur
avec ses flèches d'oiseaux
Cependant depuis ta mort
il existe un grand silence
comme un dieu qui aurait tout éteint
un silence dans les mots
dans les pierres et les fleuves
dans les bruits mêmes
dans le jour qui se coupe en deux
imitant le son sec d'une branche
Il y a un grand silence
dans les choses
qui ne savent plus apparaître
et restent ce qu'elles sont :
un chemin un soleil
parfois un mouvement
comme celui d'une prune
lorsqu'elle tombe à terre
ou le simple vol d'un papillon
quand il passe au cœur de l'ombre
et se dissocie soudainement de sa couleur
Tout cela offrant au monde
une impassibilité triste et parfaite.
Il est possible que tu n'épuises
aucune raison du néant
que tu captes ni or
ni soleil
jusqu'à ce que te surprennent
l'ombre
et le tremblement d'une jonquille.
Pourquoi aurais-je besoin d'un maître?
À la femme ou à l'homme
qui parle sans cesse de sagesse
je préfère la placidité du lac.
Lorsque j'écris
je ne sais pas
ce que cela deviendra :
oiseau ou caillou
arbre ou nuage
la plupart du temps rien
je prends simplement conscience
de la table
sur laquelle repose ma feuille blanche
J'essaie toujours ce dialogue
entre l'oiseau et le caillou
entre l'arbre et le nuage
avec la feuille blanche et la table
jusqu'à mêler leur profond silence
que je conjugue avec le mien
Ainsi commence le chant
qui serait les notes
ou les ratures
d'un plus profond silence.
Une clameur de pintades s'éleva en un bouquet sonore et désordonné, lui rappela des bribes d'enfance, le monde intime de sa chair où se renouvelait le foisonnement des couleurs et des êtres.
Les pas et les bruits allumaient la mémoire, menaient aux confins du rêve ou à la réalité lorsque celle-ci est plus un abandon que la conscience de soi-même.
Le mythe de porter en soi…
Le mythe de porter en soi
une roue ou la lumière brisée d'un dieu
te fait sourire
comme lorsque tu étais enfant
et jetais dans la mare
une pierre
qui irisait et recomposait
le vitrail de l'eau.
Mes personnages ne s’engloutissent pas dans les défaites. Ils ne parient pas sur l’espoir ou le désespoir, mesures trop fragiles et perméables à la religiosité du moment. Chaque mot compte. Chaque mot a compté. Ils savent que quelque chose a parlé chez Anaximandre, Rimbaud, Démocrite, Andreï Platonov… à travers la démocratie créatrice de l’amitié, à travers la commune de gens simples…
On est toujours en deçà d'une pensée qui n'ose se construire, d'un émoi dont on ne capte que la surprenante floraison : l'énigme est d'oublier ou de ne plus faire cas de ce qui nous a, une fois pour toute, ouverts au monde.
Lorsque tu disais…
Lorsque tu disais
la source de l'homme c'est l'impossible
il y avait du ciel qui glissait
des mots qui s'ouvraient
sur des fenêtres
pour voir
simplement pour voir.