Elle était dans un état de manque total. Elle avisa un banc public et s'assit. Elle se sentait harassée. Elle ne se sentait pas capable d'escalader cet Annapurna de difficultés qui se profilait devant elle. Elle se demanda à quoi bon faire tout ce qu'elle faisait. Par quelle force destructrice était-elle animée pour renoncer ainsi à cet homme qu'elle appelait de toutes les parcelles de son corps et de sa tête. Elle passa par tous les chemins tortueux que l'on emprunte quand on affronte le vent glacial de la détresse qui souffle sur soi. Elle resta ainsi prostrée pendant une bonne heure. Le jour déclinait et ce fut aussi le vent marin qui la glaça. Elle prit conscience qu'elle avait laissé Marc, seul sur la plage. Elle n'avait pas trop vu le temps passer et elle retourna à grands pas vers l'endroit où elle l'avait laissé. Un peu avant de l'atteindre, elle eut un coup au cœur. Il n'était plus là. Elle jeta vite un regard panoramique, rien à l'horizon. Elle était affolée. Où peut-il être? Il ne peut pas se mouvoir tout seul, cela signifie que quelqu'un l'a bougé. Ca y est, je le sens, il a eu un malaise.
Elle n'osa pas le regarder mais se tint debout en face de lui comme pour lui montrer qu'elle était prête à expier.
Lui, au contraire, la regarda, la fixa même. Puis ses yeux virevoltèrent sur sa femme. Il dévora tout du regard d'une manière quasi frénétique, ses yeux puis sa bouche, ses cheveux, ses jambes et enfin à hauteur de son sexe. Et au fur et à mesure qu'il passait sur toutes les parties de son corps, son émotion grandissait, il susurra un "je t'aime" qui la fit tressaillir.
Et lorsqu'une conversation se transforme en monologue, elle meurt vite de sa belle mort
Croque, croque, vis ce moment sur l'instant, zappe le passé, ne lève pas tes yeux sur le futur, vis l'instant présent !
Devant deux petits cafés encore fumants, elle le pria de l'écouter, car elle lui avoua être dans une panade abyssale. Elle lui demanda aussi s'il pourrait, en tant qu'homme, la conseiller. Elle avait bien les conseils d'une femme, son amie, mais c'était, selon elle, insuffisant.