En Russie, le printemps survient avec une soudaineté miraculeuse. La veille, il semble que la terre restera éternellement dure, que la bise glaciale ne cessera jamais de souffler et voilà que l'air devient doux, que la neige fait place à la boue, que les toits tombent des stalactites et que- les paysans apportent de pleines brassées de branches de saules couvertes de bourgeons argentés.
Bientôt, ils contournèrent un petit lac de boue chaude dont les vertus médicinales constituaient un élément essentiel des cures de la station thermale. ils sentirent l'odeur de soufre bien avant de parvenir aux abords du lac.Incommodées, plusieurs dames enfouirent leurs nez dans des mouchoirs bordés de dentelles.
Ses yeux insolents aux paupières lourdes m’étudiaient
avec une lueur ironique.
— Pour une fois, je ne regrette pas de cuire dans
les rues de cette ville, car je n'aurais pas eu le plaisir de vous entendre
jouer. Quand vous proposez-vous de prendre Vienne d’assaut ?
— Ne vous moquez pas de moi, protestai-je. Je suis
loin d’avoir le talent nécessaire.
— Vous l’aurez, j’en suis sûre. Vous avez le feu
sacré, et je lis dans vos yeux une résolution de fer. Je retiens une place à
votre premier concert.
Je n’eus pas le temps de répondre. Une femme
venait de se joindre à nous. Sûre d’elle, maniérée, habillée avec recherche,
elle me sourit d’un air légèrement moqueur.
— N’attachez pas trop d’importance à ce que dit
Julian, il adore plaisanter. N’est-ce pas, mon ami ? fit-elle
en posant une main possessive sur son bras.
Il s’écarta comme si ce geste caressant lui répugnait.
Ses baisers passionnés me transportèrent dans un autre monde. Cette journée fertile en émotions, ma terreur, tout y concourait. J’aurais pu me laisser emporter par la passion.
Rien n’enchante davantage les enfants que de courir avec eux sur le sable, de tomber dans les mares laissées par le reflux dans les rochers, au pied du château. Parfois, quand je les promène de ce côté, je pense au grand cairn de pierres noires sous l’épaulement de la montagne et à celui que j’ai fait dresser. Il était un Gilmour après tout.
Une femme a besoin d’un homme qui ait foi en elle, qui l’aime, et non d’un critique au cœur dur cherchant toujours la faille…
Ces légendes que mon père tenait de sa nourrice gaélique avaient bercé mon enfance. Désormais, elles seraient mon héritage ; un jour, elles enrichiraient mes rêves d’enfant. C’était trop merveilleux pour qu’on pût en parler de peur que tout s’évanouisse comme l’or magique sous l’arc-en-ciel.
L’expérience m’a appris que l’on ne saurait être trop prudent dès qu’entrent en jeu argent et propriétés.
L'idée ne m'avait pas effleurée qu'il put y avoir en Russie quoi que ce fut de beau. Pourtant, j'eus le souffle coupé quand, au détour d'une rue, m'apparurent les murs crénelés en queue d'hirondelle qui ceinturaient une foret de dômes et de tours dorés scintillant au soleil d'hiver.
— ...les phoques sont si nombreux qu’on organise parfois des chasses. Je me demande comment on peut avoir le courage de les tuer. Ils sont si confiants.
— Il existe des gens qui feraient n’importe quoi pour un profit facile, et leurs peaux sont précieuses.