- On dirait que tu as déjà de la compagnie.
Se mordant la lèvre inférieure, elle se tourna de nouveau vers l'entrée de sa maison.
- Euh, oui, tu ne tombes pas très bien.
Il serra la mâchoire.
- Je ne partage pas, Lora.
Elle fronça les sourcils.
- Partage quoi ?
Le bois du porche craqua.
- Lora ?
C'était la voix du grand connard. Il se tenait dans l'embrasure, le visage à moitié dissimulé dans l'ombre.
- Lora, il y a un problème ?
Kenton sauta sur les marches.
- Oui, il y a un problème. Toi !
- Kenton ! s'écria Lora d'une voix étranglée. Ne...
Tant pis. Il n'allait tout de même pas s'en aller et laisser Lora fricoter avec ce type !
- Est-ce que Lora t'a dit ce qu'elle faisait hier soir ? Ou plutôt, qui elle se faisait ?
- Kenton ! hurla Lora, semblant s'étouffer de rage.
Il s'occuperait d'elle plus tard. Il lui ferait bien comprendre que tant qu'ils se voyaient, ils ne sortaient avec personne d'autre.
Et sûrement pas cet abruti qui se tenait là sans rien dire, les poings serrés. Ni les deux autres grands types qui venaient de se planter derrière lui.
Les deux autres...
Et merde.
- Si tu as un problème avec lui, dit l'un des hommes d'un ton sec, tu as un problème avec nous !
Les ongles de Lora s'enfoncèrent dans le dos de Kenton.
- Je te présente mes frères...
Monica commença à défaire les boutons de sa chemise.
— Non, laisse-moi faire…
Voix bourrue, mains douces.
Délicatement, très délicatement, il lui enleva sa chemise et la laissa tomber sur le sol.
À l’appel de Kenton, elle lança un regard en arrière.
— Tu as été géniale, sur ce coup-là. Vraiment géniale.
— Merci.
— J’ai toujours su que tu étais faite d’acier. Tu as traversé l’enfer, et tu en es sortie grandie. (Il esquissa un sourire à peine visible.) Tu ne t’es pas brisée.
Elle savait qu’il avait subi son propre cauchemar. Il avait bravé les flammes, lors de sa dernière affaire avec la SSD. Elle se força à sourire.
— Toi non plus.
— Et ça n’a fait que nous rendre plus forts. Souviens-toi de ça. Tu n’es pas faible, Sam, et tu ne l’as jamais été.
C’était l’heure pour elle de se montrer courageuse. Je peux le faire. Hyde surveillerait chacun de ses faits et gestes. Si elle se plantait…
Eh bien, Quinlan mourrait. Max la haïrait. Et elle se retrouverait à la rue.
Mais sinon, pas d’inquiétude !
Mais il ne voulait pas qu’elle s’approche des flammes. Bien sûr. Comme s’il pouvait l’en empêcher. Les incendies, c’était toute sa vie.
Et la sienne, c’était la mort.
À eux deux, ils faisaient la paire.
Lora secoua la tête.
— Peu importe. Je meurs de faim. Il est tard, et je ne vais pas rester sous le porche toute la soirée pour que les voisins nous voient nous bagarrer. Jake, ajouta-t-elle en attrapant la main de Kenton, mets une autre assiette sur la table. On a un invité.
Trois paires d’yeux aux iris dorés s’écarquillèrent. Puis, comme un seul homme, ils s’écrièrent :
— Fait chier !
Ouais, Kenton pouvait comprendre.
Manifestement, Beth n’avait pas vraiment envie de se replonger dans ses souvenirs.
Dommage. Le plongeon n’était pas franchement facultatif.
Ah, chérie, vous ne comprenez donc pas ? On n’arrête jamais de souffrir. C’est ce qui nous permet de savoir qu’on est en vie.
(p. 339)
— Si tu as besoin de moi…
— Je sais, tu seras en plein interrogatoire.
Elle comprenait ses priorités. Elle savait qu’il était occupé.
— On s’en fout. Si tu as besoin de moi, tu m’appelles !
Lora cligna des yeux, étonnée.
— D… d’accord. Et… toi aussi, sois prudent, tu m’entends, GQ ? C’est toi qu’il veut, alors ne baisse pas la garde un seul instant.
Samantha écarquilla les yeux derrière ses lunettes.
Un génie précoce. Elle était hyper intelligente, mais manquait de jugeote dans ses relations avec les autres.
— Oh… Je… je… voulais seulement…
Génial. À présent, Monica avait l’impression qu’elle venait de frapper un chiot. Et ce chiot avait de très grands yeux bruns.