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Critiques de D.H. Lawrence (303)
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L'Amant de Lady Chatterley

Voici l'un de mes plus grands coups de cœur toutes catégories confondues.

N'ayons pas peur des mots, en signant ce roman, David Herbert Lawrence a écrit l'un des plus grands romans mondiaux du XXème siècle. Et dire que j'ai hésité longtemps avant de le lire m'attendant bêtement à être déçue. Quelle andouille !



C'est bigrement bien écrit, une sorte de verve anglo-saxonne douce-amère pas très distante de celle d'Oscar Wilde, et nombre d'épiphores (dédoublements de mots ou de morceaux de phrases éminemment porteurs de sens). Au lendemain de la Première Guerre Mondiale, l'auteur nous livre avec une sensibilité lucide et une grande intelligence de la féminité, sa vision désabusée de l'humanité (dont Clifford semble être le symbole), mais pourtant pas totalement dénuée d'espoir comme le suggère la lettre de Mellors qui clôture le roman.



L'histoire pourrait éventuellement se résumer maladroitement comme suit. Dans la haute bourgeoisie un baronnet anglais épouse une belle écossaise, mais manque de chance se fait raccourcir sitôt après en cette fin de World War I. Notre brave Sir Cliffort Chatterley parvient à rester en vie mais mort dans sa moitié inférieure. Il se retranche dans le château familial de Wragby au cœur des vestiges de ce qui fut la légendaire forêt de Robin des Bois, depuis lors investie par des villages ouvriers et des mines bien plus noirs que l'âme du Prince Jean.



La pauvre Constance Chatterley, s'ennuie à mourir dans son donjon campagnard et les prétentions artistiques et scribouillardesques de son glorieux époux n'y changent rien. Alors elle arpente assidument la forêt qui jouxte le parc du château et tombe inévitablement sur un faux rustre, Oliver Mellors, ancien officier dans l'armée des Indes, réfractaire au milieu mondain et au franc-parler assassin. Ce personnage sans concession va fatalement attirer Lady Chatterley bien que notre garde-chasse patoisant et aux trois-quarts ermite se soit bien juré de ne jamais plus retomber dans les filets d'une femme...



Je vous laisse découvrir la suite si vous avez le bonheur de ne pas la connaître car j'aimerais tant avoir le bonheur de relire ce livre "pour la première fois". Il y a, de surcroît, une épaisseur insoupçonnée dans ce livre qui confine à quelques unes des trois grandes questions métaphysiques : D'où venons-nous ? Qui sommes-nous ? Où allons-nous ?



Prenez plaisir, savourez fort et à pleins poumons cette œuvre magnifique, du moins c'est mon appréciation, c'est-à-dire, pas grand-chose.
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L'Amant de Lady Chatterley

Avertissement au lecteur. Cette critique ne porte pas sur un livre du rayon jeunesse.



Pour l'anecdote, lorsque j'ai voulu acheter le roman en cadeau pour un anniversaire, je ne l'ai pas trouvé au rayon littérature anglaise, en dépit de la présence d'ouvrages moins fameux de l'auteur, et le libraire m'as répondu le plus naturellement du monde, devant quelques bibliophiles interloqués, « ah mais c'est au rayon littérature érotique ! suivez-moi » #walkofshame.



***



« We fucked a flame into being ». J'ai lu que ce roman était sulfureux. Je me suis dit bon, dans le contexte de l'époque, une cheville qui dépassait et le Parquet de Paris était saisi, attendons de lire.

Quelle ne fut pas ma surprise, en découvrant qu'effectivement le roman n'avait pas volé sa réputation. Des années plus tard, Tennessee Williams, faisait d'ailleurs hurler le personnage de la mère chrétienne, dans La « Ménagerie de Verre » à l'encontre des lectures de son fils Tom :

« TOM: Yesterday you confiscated my books! You had the nerve to—

AMANDA: I did. I took that horrible novel back to the library—That hideous book by that insane Mr. Lawrence. But I won't allow such filth brought into my house!” 



Il fallut un procès dans les années soixante pour mettre fin à une censure de près de quarante ans en Angleterre. Nous ne devons ce chef-d'oeuvre de la littérature qu'à l'obstination d'un homme préférant sa liberté d'expression d'artiste à une carrière plus lucrative.

Dès 1929, un an après la parution du livre, et un an avant sa mort, David Herbert Lawrence se défendait point par point et alertait sur la vision « grise » et hypocrite de ceux qui condamnent l'érotisme, dans son essai testamentaire « Pornographie et obscénité », renvoyant du côté de la publicité la vision dégradante, dissimulée et honteuse de la sensualité. L'écrivain recommandait notamment « une attitude fraiche et naturelle, sans complexe, envers le sexe » comme « le seul remède à l'heure où nous pataugeons, plus ou moins ouvertement, dans l'inondation pornographique. ».



On pourrait ajouter, pour abonder dans le sens de l'auteur, que nous vivons dans une époque soit hypocrite, soit schizophrène : les interdits moraux de notre société (adultère, plaisirs sexuels, prostitution, libertaires, révolutionnaires, fumeurs de cannabis…) sont précisément ceux qui sont célébrés à longueur de temps par la littérature, la peinture, le cinéma, la musique, les séries télé, la publicité, les célébrités…De Madame Bovary à Pretty Woman ou Titanic, de Bob Marley à Che Guevara.



***



Le personnage, Constance Chatterley, fait montre de cette fraicheur chère à l'auteur britannique, elle cherche d'abord à prendre du plaisir d'une façon presque ingénue. Elle ne porte pas la chape de plomb morale des gens de son temps et fait peu de cas des conventions sociales, qu'elle n'ignore cependant pas. Ce n'est pas un esprit provocateur ou pervers, en réalité sa quête de plaisir, elle la mène par simple « bon sens ». C'est avec amusement que je me remémore ce mélange de candeur et de pugnacité qui fait son caractère.



Puis il y a l'amant de Lady Chatterley. Mais lequel ? Car l'histoire est un petit peu plus complexe, et heureusement, que ce que suggère le titre. Il y a l'amant d'avant le mariage de Constance avec Sir Clifford, puis l'amant de la bonne société, Michaelis, aux moyens duquel elle doit chercher son plaisir par ses propres audaces, et c'est d'ailleurs l'occasion de pages sur la jouissance féminine proprement inéditeset enfin l'Amant (il n'est pas de la Chine du nord, mais du comté de Tevershall) : Oliver Mellors le « game-keeper ».



C'est là que le second sujet se superpose à la quête de jouissance, à la naissance du sentiment amoureux, c'est la transgression seconde, l'aristocrate qui s'éprend du garde-chasse. Car là sont bien les deux transgressions du roman de Lady Chatterley. L'adultère n'en est pas un dans cette oeuvre, la proposition de Clifford, impuissant, à Constance en témoigne. Il lui propose d'être en quelque sorte en couple libre, lui souhaitant d'avoir une vie épanouie, et soulignant que la vie à deux sur le long terme ne peut être menacée par quelques relations sexuelles avec un tiers, cela ne compte pas.



La transgression de classe est reflétée par les nombreux échanges entre les personnages qui sont l'occasion pour Lawrence de livrer son analyse sociologique et sociétale de l'Angleterre d'entre-deux guerres. Sir Clifford aime faire la conversation à sa femme. de ces conversations émergent deux positions, Clifford est pour un ordre immuable, et pour la persistance des classes sociales et des apparences, on se demande d'ailleurs s'il n'a jamais vraiment aimé sa femme pour ce qu'elle est, quand Connie n'est pas seulement libérale, mais libertaire. Si elle a l'impression de dépérir à Wragby, le domaine du couple, elle reste pleine d'espoir et va se construire dans les bois, dans ce retour à la nature, loin des mineurs et de l'industrialisation des masses qui la dégoûte, où elle retrouve Mellors, comme immuable.



Le personnage n'est pas le garde-chasse du coin avec son accent à couper au couteau et son dialecte local. Sous ses faux airs sauvages, c'est un homme raffiné, qui a grandi avec les livres, mais qui est devenu narquois et un peu aigri, nous pourrions dire : nihiliste. Il est toujours celui qui contraste avec ses empressements, il la calme, sans la freiner. Connie certes est empressée et enthousiaste mais elle n'est ni capricieuse, ni immature. Elle observe les faits, elle est ingénieuse, et pour elle tout problème a une solution, c'est d'ailleurs elle qui prend le leadership de leur relation. Et quand ils ne font pas l'amour ils en parlent.



Il y a des scènes qui prêtent à sourire, quand Connie observe avec gourmandise « l'amant » – en fait elle le « mate » - en pleine toilette, torse nu dans son modeste jardin (façon « Samantha Jones ») ou encore lorsqu'elle juge son corps, face au miroir (dans une scène qui rappelle anachroniquement Meryl Streep dans « Sur la Route de Madison »).

Roman moderne et plus subtil qu'il n'y parait, pas seulement la diapo d'une Angleterre en pleine industrialisation, d'une femme assumant son plaisir, mais toute la nuance d'une rencontre loin du romantisme mielleux, une rencontre physique des corps, une rencontre des atomes, des phéromones, où l'on dit des bêtises, où l'on se contredit, où l'on doute aussi de ses sentiments, où l'on pense aussi pendant qu'on jouit, où rien n'est automatique : c'est un roman réaliste.



***



“Sex is just another form of talk, where you act the words instead of saying them » D.H Lawrence, qui inspirera la littérature libertine du XXème siècle, d'Anaïs Nin à Henry Miller, est l'exact opposé De Lamartine en ce sens que le sexe est premier alors qu'il est absent chez Lamartine. Mais ce n'est pas une vision hédoniste du sexe à la Kundera ou une vision jugée morbide, par Michel Onfray notamment (Théorie du Corps Amoureux, le Souci des Plaisirs), chez Sade ou Bataille. C'est encore autre chose, une quête du plaisir réciproque et de la jouissance commune des amants, de la découverte des corps et des sens avec pudeur mais sans crainte de nommer les choses, de donner voix au chapitre du désir. On va, comme rarement en littérature, aux confins d'une intimité, d'une altérité, sans pour cela être dans la surenchère du fantasme ou de la perversion. C'est l'intimité nue, pour ce qu'elle est, sans plus.



“I can't see I do a woman any more harm by sleeping with her than by dancing with her...or even talking to her about the weather. It's just an interchange of sensations instead of ideas, so why not?” Il y a une approche plus candide que séductrice. Quelque chose de naïf, spontané, de « normal » et un refus de toute psychanalyse autour du sexe. Tout ne tourne pas autour du « it » ou « ça » freudien.



Le style de Lawrence est plutôt simple. Il y a quelque chose de maladroit, de répétitif, parfois certains passages vous tomberont des mains, mais aussi quelque chose de direct, de fluide, on passe du monologue intérieur au dialogue ou à la relation épistolaire sans transition. Sa technique c'est la réécriture du roman dans son entier, plusieurs fois (il existe en effet plusieurs versions publiées).

Pour ces raisons-là, celles et ceux qui ont un petit niveau d'anglais ou « wordwise » sur leur liseuse, la version anglaise est assez facile à lire. J'attire votre attention sur certaines traductions qui ont fait le choix (j'ai pu le vérifier) de traduire certains mots, volontairement familiers, dans un langage plus neutre ce qui me semble dénaturer pour partie les personnages. Dans la version originale, Mellors parle un « patois » local et certains choix d'éditeurs le font s'exprimer dans une langue tout à fait courante ce qui trahit le roman car ce n'est pas un hasard si le garde-chasse s'exprime – parfois – dans ce dialecte et ce n'est pas neutre pour ses interlocuteurs.



« The world is supposed to be full of possibilities, but they narrow down to pretty few in most personal experience. » Se glisse aussi une réflexion sombre de l'auteur sur la modernité industrielle et sur les inégalités que répète la modernité, une charge contre les machines, contre une jeunesse, celle des années folles, corrompue par l'argent et le consumérisme « the young ones get mad because they've no money to spend. Their whole life depends on spending money, and now they've got none to spend […] If you could only tell them that living and spending isn't the same thing!”



C'est aussi le roman du désir féminin, tant et si bien qu'une lectrice me confiait avoir d'abord cru que l'auteur était une femme. Dans cette capacité à comprendre la femme dans ses ressorts les plus singuliers, qui en fait un auteur profondément intriguant, peut-être que D.H Lawrence « sort du bois ». Car paradoxalement, si son héroïne est une femme, c'est sur le corps de Mellors, sur son charme que s'attarde le plus l'auteur. Ce sont les descriptions des hommes, notamment Clifford et Mellors qu'il réussit le mieux, comme s'il était séduit avec Connie du corps blanc et sec, des cheveux rougeoyants et des reins sculptés du garde-chasse.



Pour ma part, j'avais condamné depuis longtemps l'éclosion de cette « flamme de pentecôte », mais c'est un roman qui va vers la lumière, alors même que son auteur vit ses derniers mois, emporté par la tuberculose à quarante-quatre ans. C'est formidablement émouvant et, en repensant à « John Thomas » et « Lady Jane » je me réjouis bien de mon erreur.

“il n'y a pas d'amour heureux” écrivit Aragon. C'est beau mais c'est faux.



***

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L'homme qui aimait les îles

Un cabotage existentiel dans le sillage de L’homme qui aimait les îles, de D. H. Lawrence. Trois escales, trois îles, un texte qui aurait pu être l’esquisse de trois tableaux de marine, le thème et le titre s’y prêtaient.



Trois étapes, trois métamorphoses d’un projet ambitieux: créer un univers, un monde à soi, dans un espace clos par les flots. 

Espérer une renaissance dans un lieu idéal, ordonné, loin de la foule et du chaos d'une société d'après guerre bouleversée, en créant une communauté factice où les élus qui accompagnent le protagoniste, "l'insulaire", ont été choisis avec habileté.





Aborder la première île pour y faire son nid, un cocon douillet où ne peut éclore que le bonheur, puis la fuir et l'oublier.

Accoster la deuxième pour y trouver refuge, se déshabiller, défaire les mailles du filet, le trouer et s'échapper encore pour ne pas être piégé.

Enfin jeter l'ancre sur la troisième, s'arrimer à cette ultime parcelle de terre, fixer l'horizon sans que plus aucun signe de vie ne s'y dessine et peut-être enfin accueillir la plénitude, le néant ou une révélation.





Avec L'homme qui aimait les îles, nouvelle écrite en 1926, soit quatre ans avant sa mort, D.H. Lawrence semble nous dire que le bonheur ne réside ni dans un lieu idéal, parfait ou perfectible, ni dans une quête matérialiste mais dans un lieu intime, un îlot imprenable que chacun d'entre nous cache au fond de lui comme un trésor enseveli et, qui ne demande qu’à se réveiller par le biais d'une quête intérieure spirituelle voire mystique libérée de toutes entraves.



En tout cas une navigation inattendue dont les escales nous invitent à profiter de l'empreinte des saisons sur les paysages grâce à l'oeil averti de notre protagoniste, botaniste et naturaliste.



Utopie ou dystopie? il faudra suivre les rêves, les errances, les cauchemars et les désillusions de Cathcart, anti-héros plus qu'héros de cette nouvelle pour apprécier le spectacle final dont la chute offre aux lecteurs de nombreuses pistes de réflexions et interrogations. Une partition marine, sombre et lumineuse, dans les brumes celtiques où il dérive tel un bateau fantôme à la lueur d' Orion et Sirius.





La préface de Thierry Gillyboeuf nous éclaire sur la genèse de L’homme qui aimait les îles : un texte en fait nourri de la vie personnelle et privée de D. H. Lawrence avec notamment la référence à "Rananim"une des petites communautés utopiques créées par l'écrivain, des expériences décevantes qui le feront renoncer à la quête d'une île géographique réelle et d'un lieu rêvé.



Une nouvelle crépusculaire, un conte philosophique portés par une écriture sobre, lyrique et poétique. Une introduction pour découvrir peut-être une autre facette de ses talents, le récit de voyage Crépuscule sur l'Italie.

Un texte beau et émouvant à lire et à relire.

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L'Amant de Lady Chatterley

Quelle pure merveille !

Je rejoins totalement les avis précédents sur ce magnifique livre de D.H. Lawrence !



Nous suivons la vie de l'héroïne de cette histoire, Constance, devenue Lady Chatterley après avoir épousé Clifford Chatterley. Ce dernier est revenu brisé et handicapé de la guerre et doit désormais vivre en fauteuil roulant, totalement dépendant de sa femme.

Dans ce quotidien ennuyeux, Constance est donc à la recherche d'un Idéal, qu'elle finit par trouver dans les bras du garde-chasse de son mari, Oliver Mellors. La tension est d'ailleurs permanente jusqu'à la dernière page ; en effet, la Lady se retrouve face à un choix difficile : une existence morne mais indépendante si elle choisit Clifford ou bien une totale liberté mais une déchéance sociale du côté de Mellors... Il s'agit donc avant tout d'une grande histoire d'amour racontée par Lawrence, et qui ne peut que séduire le lecteur.



Toutefois, derrière l'intrigue amoureuse se cache une dimension symbolique. Ainsi, chaque personnage représente une caractéristique de l'Angleterre de ce début de siècle : Clifford symbolise l'échec, puis la chute de la bourgeoisie ; Constance représente les espoirs d'une société traumatisée par la guerre. Enfin, Mellors est d'une certaine façon le porte-parole de l'auteur, s'interrogeant toujours sur des questions essentielles à cette époque, comme les inégalités entre ouvriers et patrons ou encore la part croissante de l'argent dans la mentalité des Anglais...



Ainsi, ce roman est complet, mêlant amour et réflexion, mais quoi qu'il soit, j'en garderai un excellent souvenir, charmée par des personnages que je n'oublierai sans doute jamais...



A lire absolument !
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L'Amant de Lady Chatterley

« C’est pourquoi je crois à notre petite flamme fourchue. »

Ainsi parlait Mellors, l’Homme des Bois, pour décrire sa relation passionnelle et charnelle avec la belle aristocrate Lady Chatterley. Trois mots à la fois modestes et ravageurs. Trois mots fortement suggestifs et païens…

Tout est confrontation brutale dans ce roman ! L’impuissance et la froideur du Maître de Wragby s’oppose à la sensualité et la force érotique dégagé par Mellors. Le corps sec et maigre de Lady Chatterley qui, au contact de l’Homme des Bois, soudainement s’épanouit pour devenir gracieux et svelte. La forêt, dernier refuge de liberté, de beauté et de sauvagerie qui recule inexorablement face aux destructions du monde industrialisé enfantant des paysages lugubres et des hommes émasculés, sans force, davantage objets qu’hommes.

L’amour irraisonné entre la belle Connie et Mellors balaiera tous les obstacles : les pesanteurs sociales, la différence de classe, la peur du scandale, les douloureux coups d’épingles des commérages et du « qu’en dira-t-on ». Un véritable hymne à la vie !

Pour décrire les relations amoureuses, les termes sont parfois crus mais toujours d’une extraordinaire poésie. Elles subliment la passion qui unit nos deux héros. Ils avancent main dans la main, le nez dans les étoiles, ignorant la médiocrité et la petitesse d’esprit de leurs congénères.

Qui n’a pas connu ces moments de grâce où l’amour rend aérien et invulnérable, qu’on ne cesse durant toute une vie d’essayer de revivre?

Un livre à lire et à relire.









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L'Amant de Lady Chatterley

Braconner le garde-chasse !

Lady Chatterley étouffe de bienséance. Son Clifford est revenu de la Grande Guerre la nouille en berne. Passer ses journées dans la campagne anglaise austère à regarder pousser les fleurs et à nourrir les pigeons, c'est voir sa vie faner avant l'automne. Pour une jeune femme qui a connu les plaisirs charnels avant son mariage grâce aux échanges Erasmus de l'époque, le feu s'éteint mais les braises ne demandent qu'à se raviver. Gare aux tisons.

Constance prête l'oreille et le reste de son anatomie à ses instincts et il n'y a pas que son Lord Cocu qui va en faire les frais. Son auteur aussi. La publication du livre de D.H Lawrence est un roman à elle toute seule. Publié sous le coude et sous la ceinture en 1928, il n'est offert en version intégrale aux lectrices anglaises empourprées qu'en 1960 après un procès retentissant. La victoire du désir féminin.

Insatisfaite, la Lady agrémente donc ses balades dans les bois d'une relation passionnée avec le garde-chasse du domaine et l'auteur décrit de façon explicite la volupté et l'échange de virus. La galinette qui traque le sanglier. le vocabulaire est brut mais ce n'est pas du Rabelais. Chocking dans le cottage ! Gode save the Queen dirait San Antonio. Une aristocrate qui s'encanaille avec la classe ouvrière.

Le mari souhaite une descendance et suggère à la Lady de se dégoter un reproducteur mais ce dernier doit être de la bonne société et il proscrit toute tentation de passion. Dépossédé de ses attributs, l'impuissant tente d'intellectualiser la chose pour la négliger, mais il est débordé par les forces de la nature. Une force de la nature, surtout.

Tout le monde connait Lady Chatterley, pas seulement les petits futés qui ont reluqué en cachette les adaptations érotiques sur le petit écran avec Sylvia Kristel ou Edwige Fenech. J'ai des noms. En revanche, personne ne se souvient du nom de l'amant du titre. Ce n'est pas innocent. L'auteur a voulu en faire avant tout un sexe, un phallus d'or, graal pour cette jeune femme mariée. Peu importe l'emballage. Là est la transgression. Au diable les convenances.

D'ailleurs, je trouve que le roman perd un peu de sa force quand on découvre qu'Oliver Mellors, nom de l'étalon, dispose d'un passé militaire et d'une culture littéraire cachée sous ses apparences d'homme des bois qui coupe le bois torse nu. C'est pas Charles Ingalls. D.H Lawrence tente de rationnaliser la mystérieuse chimie de l'attirance entre deux êtres que tout oppose.

Ce roman est un authentique chef d'oeuvre. Les personnages ne sont pas sympathiques mais ils débordent de vie. Au-delà des galipettes, je n'ai jamais lu de pages qui décrivent aussi bien les sensations amoureuses. Pas les sentiments, les sensations. 50 nuances de volupté dans le grès. La verve de la verge si j'osais. C'est fait. Je ne peux que conseiller la lecture de ce livre en lieu et place de cette littérature érotique discount qui pollue les rayons des librairies avec des couvertures ridicules qui ressemblent à des pubs de lingerie pour la Saint Valentin.

La postérité tend à négliger l'arrière-plan du roman mais D.H Lawrence n'est pas tendre avec l'industrialisation à marche forcée de son temps. le récit ne se limite pas à l'exploration des fourrés et aux tasses de thé entre gens de bonne compagnie. Je n'aime pas la marmelade et les ombrelles.

Le bouquin à offrir à une femme mariée…mais pas la sienne !

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L'Amant de Lady Chatterley

Dans une époque en pleine mutation, quand l'Angleterre agricole est effacée par l'Angleterre industrielle, Constance Chatterley, qui appartient à la classe riche, doit choisir entre deux mondes.



La pauvre Constance n'a pu résister à l'ennui d'une vie auprès d'un homme blessé à la guerre. Au milieu de la forêt de Sherwood, celle de Robin des bois, une cabane accueille ses amours avec le garde-chasse de son mari. Au plus profond des fourrés, peut-être le dernier lieu épargné par la lèpre industrielle des usines et des mines en ce début du XXe siècle, la sexualité avec son amant la révèle à elle-même. Elle trouve sa raison d'être et elle est prête à tout abandonner de son passé.



Dans ce merveilleux roman, puissamment et délicieusement sensuel, si D.H. Lawrence nous livre une vision sombre de l'évolution de la société - l'argent est au centre de la préoccupation des hommes, il régit, pervertit toutes les relations et détruit la beauté de la nature - il espère aussi en une nouvelle Angleterre, incarnée par Lady Chatterley et le garde-chasse, et en l'amour qui dépasse tout.

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L'Amant de Lady Chatterley

Réduire ce roman classique à un simple récit d'adultère serait lui faire grand tort. "L'amant de Lady Chatterley" est bien plus que cela et son personnage principal, Olivier Mellors, garde-chasse, ancien officier aux Indes, est une voix nouvelle qui s'élève, pleine d'humilité et de bon sens, au-dessus du vacarme d'une société d'après-guerre - 14/18 - totalement déchirée entre son besoin de conserver ses traditions et l'élan de modernité qu'elle sent vibrer dans ses flancs.



"L'Amant de lady Chatterley" et son auteur me faisaient peur, pour parler vrai. Depuis des années, je tournais autour d'eux sans oser m'y approcher, comme on n'ose pas passer son doigt dans la cage d'un animal dont on ne sait s'il vous mordra ou vous caressera. Cette appréhension infondée rend encore plus vive ma satisfaction à avoir enfin découvert ce très grand roman anglais dont je ne m'étonne plus qu'il fît scandale lors de sa parution en 1928.



Oui, le style est direct et cru, oui, il y est beaucoup question de volupté mais c'est véritablement un roman érotique dans le sens noble du terme. Ne vous attendez pas à trouver sexe et vulgarité entre ses pages mais un trouble certain vous envahira à la lecture des superbes descriptions pleines de sensualité et de poésie un peu bestiale servant la relation entre Constance Chatterley et Olivier Mellors.



Je le disais en débutant mon propos, "L'amant de Lady Chatterley" est bien plus que le récit d'une histoire d'amour, belle et forte, entre deux êtres que tout semble opposer. D. H. Lawrence a également fait de son roman un superbe pamphlet contre l'industrialisation à outrance et le culte de l'argent, progressant selon lui au détriment d'une forme de sobriété heureuse et de l'amour véritable.



Les descriptions de la nature, livrée à nous dans sa plus belle nudité, valent celles de la relation amoureuse entre les deux protagonistes. Sa parfaite connaissance des mécanismes animant la upper-class anglaise - considérée comme un ramassis de pantins stériles et rabougris - et de la société qui est la sienne permet à l'auteur de développer une critique sociétale pleine d'intérêt et encore terriblement d'actualité aujourd'hui.



L'esthétisme du récit - qui n'est pas sans évoqué les décors de Downton Abbey -, la beauté envoûtante de la plume, la complexité psychologique des personnages vraiment remarquable concourent à faire de ce roman une oeuvre complète, aussi profonde que raffinée.



La littérature avec un grand L.

Ne passez pas à côté de ce chef-d'oeuvre.





Challenge PAVES 2018

Challenge MULTI-DÉFIS 2018

Challenge des 50 Objets 2018 - 2019

Challenge 1914 / 1989 - Edition 2018

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L'Amant de Lady Chatterley

D.H. Lawrence a écrit trois versions de L’amant de Lady Chatterley. Le roman connu sous ce titre en est la troisième ; celle considérée comme définitive par Lawrence et qu’il fit éditer à compte d’auteur, en mars 1928, quelques mois avant sa mort.

Ce n’est qu’en 1960 que le livre est enfin publié en Angleterre après un procès pour obscénité des éditeurs Penguin Books (qui permit ensuite une plus grande liberté d’expression).

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En 1928, L'Amant de lady Chatterley fait voler en éclats les tabous de la puritaine Angleterre, du sexe aux préjugés sociaux. Scandale ! Pourtant, à l'opposé de la pornographie évoquée à l'époque, le roman vibre d'une irrésistible sensualité.

Cette histoire d'une double transgression - conjugale et sociale est un roman d'une passion foudroyante dans le plus exquis des empires, celui des sens. Lorsque David Herbert Lawrence s'y attaque, en octobre 1926, il a 41 ans. Retiré en Toscane, il a rompu avec le «crachin infect» de l'Angleterre industrielle et lutte farouchement contre cette tuberculose qui finira par le terrasser quatre ans plus tard.

« Son roman, Lawrence sait bien qu'il n'a aucune chance d'être publié en Angleterre. Aussi décide-t-il d'acheter du papier et, pour 300 livres sterling, de le faire imprimer à Florence, à compte d'auteur. Il se vend sous le manteau à 1 000 exemplaires, tandis que les douaniers américains le refoulent aux frontières et que Scotland Yard le confisque. Condamné pour obscénité et pornographie, le livre subira de multiples piratages avant qu'une édition expurgée ne sorte en Angleterre, en 1932. Réaction unanimement scandalisée de la critique: il faut être un «pervers», un «esprit malade», pour oser écrire un tel outrage à la morale. 

Ce n'est qu'en 1960 que la version originale du roman paraîtra dans la patrie de Lawrence. Avec, à la clef, 3 millions de lecteurs en huit mois. Lesquels se délectèrent, comme ceux d'aujourd'hui et de demain, de cette symphonie érotique où les amants attisent un brasier étincelant. »



Une œuvre que je ne connaissais que de nom. Bien belle découverte, malgré les difficultés du début à rentrer dans ce monde du Nord de l'Angleterre, ce monde de mines, d'obscurité, de désespérance. Ce roman est l'histoire d'amour adultère entre une aristocrate anglaise mariée Lady Chatterley Constance et son garde-chasse Mellors, un homme de la terre ayant néanmoins un passé militaire qui l'a formé à la société et qui s'oppose au mari Sir Clifford, homme de lettres paralysé suite à ses blessures de guerre.

Cette aventure amoureuse sera le révélateur de la féminité de Connie et surtout son éducation sexuelle avec Mellors, qui lui fera découvrir le plaisir charnel et balaiera ses hontes et complexes.

D'un bout à l'autre du roman, D.H Lawrence nous parle bien sûr d'amour, mais aussi de rapport des classes nantis et ouvriers, le décalage total entre tous ces hommes, mais aussi à la transformation de l'ancienne Angleterre vers un nouveau monde. Les repères sont chamboulés, remis en cause, la première guerre mondiale est passée par là.

Il y a aussi toutes ces pages de descriptions enchanteresses de la nature, par un auteur qui apparemment étouffe dans une Angleterre qui s'est transformée en une vaste sinistre mine de charbon. Il nous décrit une nature très érotisante et éblouissante avec beaucoup de délicatesse. Ce sont sans arrêt des passages de lumière qui émerge parmi toute cette ombre.

L'écriture de D .H. Lawrence est très belle, poétique, bien sûr son langage dans la relation charnelle entre Connie et Millord, est très crue, on peut comprendre qu'il ait choqué à l'époque puritaine où il a été écrit, mais de ce livre émerge une impression de beauté lumineuse dans un monde sinistre.

Une bien belle découverte, un très beau livre que je regrette de ne pas avoir lu plutôt.



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L'Amant de Lady Chatterley

Tu aimes les histoires d'amour sensuelles, libertines, torrides, qui font rosir les joues rien qu'en les lisant, ce livre est fait pour toi.

On y découvre Oliver Mellors, l'homme des bois, un primitif, un rustre, une brute, une bête, un sauvage. Son corps est recouvert d'une épaisse toison, il se nourrit exclusivement de ce qu'il trouve dans la forêt : baies, champignons, fruits et plantes sauvages, c'est le garde forestier.

Lady Chatterley, la chatelaine est en manque d'amour sensuel, son mari est revenu de la guerre inapte à l'acte sexuel. Elle aime observer en cachette le garde forestier faisant sa toilette dehors, à moins 10 degrés, en projetant de l'eau sur son corps et en se donnant de vigoureuses claques sur la peau. Elle n'est pas insensible aux charmes du rustre mais cédera-t-elle à l'appel des sens? La réponse est dans le titre, c'est ça qu'est bien !

Ils deviennent amants et alors là c'est absolument torride, démentiel, abracadabrantesque. Ça fait oula, bang, wizz, shebame, tchoubaï, crac, boum, hue. La débauche des sens, des grimpages de rideaux non stop, un feu d'artifice d'orgasmes, le septième ciel et au delà ...

La morale de cette histoire, c'est que ceux qui s' endorment pendant l'amour, devraient prendre un amant ou une maîtresse, because c'est tchoubaï !

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L'épine dans la chair

Ces trois nouvelles, extraites du recueil Les filles du pasteur, précèdent le roman qui a fait la célébrité littéraire et sulfureuse de D.H. Lawrence, L'Amant de Lady Chatterley. Ses thèmes principaux y sont déjà présents, même si on ne retrouve pas dans L‘épine dans la chair, Couleur du printemps et L'odeur des chrysanthèmes la dimension érotique qui a choqué dans cette oeuvre majeure du XXe siècle.



La belle écriture de l'auteur pour dire l'admirable campagne anglaise, les tourments de personnalités simples ou complexes, tenaillées entre sens du devoir et affirmation de soi, convenances et passion amoureuse, concourent à faire de cette lecture un excellent moment.
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L'Amant de Lady Chatterley

Passionnel,

Fusionnel,

Charnel !

Un trio amoureux !

Le mari Sir Cliffort Chatterley lieutenant de l'armée britannique homme de lettres paralysé suite à ses blessures de guerre.

Constance Chatterley, son épouse, ne désirait et ne recherchait rien qu'à échapper à l'ennui de son couple !

Une vie monotone où elle dépérit peu à peu.



Pourtant un jour !

Une Cabane perdue dans la foret.

Où tout va se jouer !

Elle va y rencontrer Mellors , le garde-chasse.

Taiseux,

ancien officier.



Elle succombera à cet homme dans ce monde silencieux.

Elle cueillera chaque instant dans cette nature préservée.

Tout est vérité dans cette forêt de Sherwood,

Sa vérité

Leurs vérités :

la légèreté de la lumière qui les enveloppe,

les courbes de leur corps qui se font échos,

exaltées,

enflammées,

extasiées.



Elle s'enivre de sa force,

sa chair se parfume de son amour,

Ses frissons d'interdit exaltent leur passion.

Jardin secret,

Espace protégé,

Rébellion contre l'ordre établit.

Espace de liberté.

Rupture des codes sociaux.



Vertiges clandestins ,baigné d'élixir jaillissant d'un amour sans interdit offert dans cet écrin de verdure.



Elle vénérait cet amour, ses mille plaisirs déployés pour la rendre heureuse et pour oublier un mariage poussif.

Elle s'abreuvait à ces instants d'éternité, conquise par toutes ces effluves de bonheur.

Son corps flambait dans l'ombre d'un mariage se délitant dans l'indifférence.

Elle ondulait entre le feu d'un amour rêvé et le métal d'un couple perdu.

Ce torrent de délice qu'elle s'octroyait pour supporter cette tristesse d'une paralysie qui privait son mari d'être complètement lui !

Elle était ce printemps qui revit dans sa sève et ses espoirs de vie.

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L'Amant de Lady Chatterley

Il y a des livres qui se font désirer...

L'amant de Lady Chatterley fait partie de ceux-là.



Il y a longtemps que j'avais envie de lire ce roman. Il était sur mes étagères et ne cessait de me tenter. Pourtant, j'ai toujours remis à plus tard cette lecture. Est-ce parce que l'objet livre en lui-même n'est pas très attirant ? C'est un vieux livre de poche publié en 1966 dont les pages jaunies exhalent cette odeur si familière : ce parfum des vieux livres.

Je ne sais vraiment pas pourquoi j'ai toujours retardé la lecture de ce roman.

C'est comme s'il se refusait à moi...

Mais j'ai fini par le piéger. Il suffisait juste pour cela de l'inscrire au challenge ABC. Ainsi, il ne m'échapperait pas.



Il me fallait lire ce livre dans l'année et c'est ainsi que ni contrainte, ni forcée, je fis le premier pas et le sortis enfin de ma bibliothèque.

Je commençai la lecture de L'amant de Lady Chatterley, heureuse d'avoir franchi ce cap. Je l'avais vaincu. Il ne me résistait plus. J'allais pouvoir enfin le savourer...comme tant d'autres avant moi.

Mais, c'était sans savoir que ce roman était un brin pernicieux et qu'il me réservait quelques surprises..

Parce que non content de s'être refusé à moi durant tant d'années, voilà qu'il me cachait sa véritable nature dès l'instant où je l'entamai.

Il se montra, tout d'abord, pendant une bonne centaine de pages, sous son plus mauvais jour : bavard, ennuyeux, pédant. Contre toute attente, ce roman si longtemps désiré ne me convenait pas. J'avais besoin de passion, d'imprévus, de frissons. Mais de cela, il n'en avait cure. Il continuait à pérorer sur la vie, sur l'amour, sur l'industrialisation, sur l'argent. Il attendait de moi que je refasse le monde avec lui mais ce n'était pas de cela dont j'avais envie.

L'a t-il compris ? Ou était-ce une ruse pour démasquer s'il pouvait me faire confiance ? Était-ce une façon de me dire : « Si tu m'aimes, tu dois tout supporter de moi. Même mes tergiversations les plus extravagantes. »

Toujours est-il qu'il a commencé à se montrer un peu moins froid avec moi. Il s'ouvrait à moi en secret, m'enveloppait fébrilement de ses bras puissants, m'enhardissait au plaisir littéraire et laissait en moi à chaque fois que je le posais, un besoin inassouvi.

Une passion était née.

Sa conversation, dès lors, m'enchantait. Je ne pouvais qu'être d'accord avec sa façon de voir le monde. Il prônait la liberté, le retour à la nature, une société plus juste...il faisait fi des qu'en dira-t-on et des gens bien pensants. Il me fascinait et me troublait tout à la fois.



Il fut mon amant de quelques nuits.

Un matin, il mit fin à notre histoire. Brutalement.

Ce fut si soudain que je me demande encore s'il ne s'agit pas d'un de ses vilains tours.

Pourtant, j'eus beau tourner les pages, chercher désespérément une suite à cette histoire. C'était bel et bien fini.

La fin m'appartenait.

C'est le plus beau cadeau qu'il pouvait me faire.
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L'homme qui aimait les îles

Trois îles, de plus en plus petites, que le héros de D.H. Lawrence, Cathcart, va successivement habiter, dans sa quête de solitude, de silence et d'horizon maritime à contempler.



Curieusement, il commence par une île où il envisage d'implanter une petite colonie humaine avec régisseur, garçons de ferme, gouvernante, maçon, charpentier. Il est le Maître, bienveillant, se rendant compte assez vite que la bienveillance n'est pas perçue comme telle. Il en vient à désirer quitter l'île qui engloutit son argent en travaux dont la vanité lui apparaît peu à peu à mesure que croît son insatisfaction.



Alors, une deuxième île où il s'installe avec un vieux charpentier, un jeune homme, une veuve et sa fille qui l'amène malgré lui vers le sexe de façon "automatique" dit Lawrence. Grossesse, mariage, naissance, insatisfaction pour Cathcart, il est temps de songer à une nouvelle île où il partira seul.



Dans la troisième île, sa préoccupation est le silence, perturbé pour lui par des moutons qu'il fait embarquer par un navire dès que l'occasion se présente. Reste un chat et c'est encore trop, il disparaît de lui-même. Puis vient la neige qui engloutit tout sous des mètres, maison, collines, rochers, île tout entière et peut-être, qui sait, la mer... La neige serait-elle pour Cathcart une Moby Dick imprévue?



Tout au long de cette jolie et attachante nouvelle, les réflexions métaphysiques de Cathcart procurent au lecteur de nombreuses opportunités de réflexion. Sur la nature, d'abord, avec ses fleurs variées au printemps, fleurs que Cathcart souhaite identifier à tout prix dans l'indifférence de ceux qui l'accompagnent. Sur l'homme, la femme, leurs besoins l'un de l'autre, "automatiques" ou sentimentaux. Sur la solitude et l'écoute du silence dans le mugisement perpétuel de la mer, ce silence bruyant qui ne semble pas perturber Cathcart.



Que d'idées, de sentiments et d'interrogations exprimés par Cathcart durant ses séjours îliens, accompagnés par Orion, Sirius et la mer. Chaque lecteur a tout loisir de réfléchir au sens des choses, à l'importance qu'il leur accorde, aux livres -- Cathcart les fait suivre d'île en île car il lui sont indispensables -- , en lisant et relisant des extraits de ce très beau texte du fabuleux D.H. Lawrence.



Je penserai à lui d'une manière différente chaque fois que j'arpenterai le sentier du littoral à Bandol au bord duquel il séjourna de novembre 1928 à mars 1929, face à l'Ile Rousse qui n'a pu l'inspirer puisque ce livre a été publié quelques années avant cette étape varoise de son auteur. Je relirai toujours à chaque passage la plaque évoquant son passage dans cette maison qui n'existe plus.
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L'Amant de Lady Chatterley

Ce monument de la littérature a fait l’objet de toutes les analyses et de toutes les recensions possibles, ma chronique n’apportera donc rien de nouveau, tout a été dit, sans doute très bien, par d’autres. Je vais donc modestement me contenter de livrer mon ressenti à chaud et sans doute de façon un brin désordonnée.



J’aurais du mal à qualifier « l’amant de Lady Chatterley » de roman érotique. Il y a bien des scènes de sexe explicites et un langage cru mais je n’ai pas trouvé à ces passages une dimension érotique. Je n’ai pas eu le sentiment que les scènes de sexe avaient vocation à échauffer les sens des lecteurs. « L’amant de Lady Chatterley » est un roman politique et de ce point de vue, c’est même un brûlot. Lawrence dresse un portrait bien sombre et bien amer de la société anglaise et des rapports de classes. Cette peinture sociale et politique est remarquablement précise et pertinente, c’est à une véritable dissection des rapports sociaux que Lawrence se livre. En effet, il analyse ces rapports de domination dans tous leurs aspects, le sexe étant un de ces aspects. Très clairement, l’auteur se place du côté du peuple, tout en ne présentant jamais les masses laborieuses sous un jour naïvement positif, il est d’un réalisme saisissant. Ce parti pris n’est d’ailleurs pas étonnant, Lawrence était lui-même issu du peuple et il parait évident que Mellors est son alter-ego. Comme son personnage, Lawrence est né dans le milieu ouvrier et a eu l’occasion de s’élever intellectuellement tout en ne reniant pas ses origines modestes. La classe dominante est vivement éreintée dans le roman. Les hommes qui composent cette classe dominante sont des êtres plein de mépris, sûrs de leur supériorité. Leur façon de se voir eux-mêmes offre un contraste saisissant avec la façon dont Lawrence les dépeint. A l’image d’une société gangrénée par l’appât du gain, le capitalisme ne sort pas grandi du roman, les hommes sont comme déconnectés d’une certaine réalité. En s’éloignant de la terre, en n’étant plus que des êtres économiques, ils ont perdu la conscience de leurs corps et ne tirent de la jouissance que dans la consommation, ce que Lawrence reproche d’ailleurs aussi bien aux classes laborieuses qu’à la classe dirigeante. Mais selon Lawrence, le salut ne peut venir que de la classe populaire. Pour peu qu’ils reprennent conscience de la terre et de leurs corps, les hommes du peuple sont encore des hommes capables de prendre et donner du plaisir alors que les hommes de la classe dominante sont dépeints comme dénués de virilité, impuissants ou pleurnichards. Le propos de Lawrence est fort et c’est vraiment cet aspect du roman qui a choqué. Je pense que le caractère sexuel du roman n’a servi que de prétexte pour tirer à boulets rouges sur l’œuvre. Le scandale ne vient pas du fait que Lady Chatterley couche avec un amant mais plutôt que cet amant soit le garde-chasse, un homme de peu au statut de domestique. Ce propos très politique est délivré de façon plus subtile et plus profonde que ce que peut laisser paraitre ce que j’en résume. « L’amant de Lady Chatterley » est vraiment un livre très intelligent, brillant. Je trouve juste, et c’est mon seul regret vis-à-vis de ce roman, qu’il manque un peu d’émotions. Ce roman a stimulé mes méninges mais n’a pas touché mes tripes. J’ai eu le sentiment que cette œuvre s’adressait au cerveau, pas au cœur.



Il ne faudrait pas que le léger bémol que j’évoque à la fin de mon billet vienne refroidir l’enthousiasme de ceux qui envisageaient de découvrir ce roman. « L’amant de Lady Chatterley » est vraiment un très grand roman, d’une intelligence remarquable, qui délivre un propos audacieux avec force et courage.



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L'Amant de Lady Chatterley

Ce livre a une terrible "montée en puissance" !

Je démarre sur 2 étoiles... Mais à la fin du livre, on comprend les points communs de Constance Chatterley et d'Oliver Mellors.



Ils détestent tous les deux les conventions sociales 

Ils sont tous les deux « sylvestres », ils aiment la nature ;

ils ont tous les deux besoin de sensualité douce dans ce monde de tabous !

Les tabous !

Ils détestent tous les deux les tabous de classe ;

Ils détestent tous les deux les tabous sexuels so shocking de cette société anglaise so british, issue de l'empire britannique de Victoria.

Et surtout, surtout...

Constance et Oliver se comprennent par dessus tout, parce qu'ils ont eu, tous les deux, des expériences sexuelles malheureuses.

Et tout ça me plaît, parce que je connais, et je mets enfin 4 étoiles !

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Voici le début de l'histoire...

1919, région industrielle de Sheffield. Sir Clifford est marié à Lady Chatterley. Mais, revenu paralysé des jambes de la guerre, il ne peut pas faire l'amour.

Constance cède aux avances pressantes de Michaelis, mais ses remarques sexuelles abruptes agacent celle-ci.

Puis, pour respirer de toujours assister Clifford dans ses déplacements, elle va assez souvent s'aérer dans le bois de la propriété.

C'est là qu'elle découvre Oliver Mellors, le garde-champêtre de Sir Clifford....

.

Au début du livre, je m'ennuyais, ça valait deux étoiles pour moi : trop vulgaire, trop sexuel, même si je suis loin d'être une sainte-Nitouche, trop peu d'action. Un « roman d'atmosphère »  !

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Puis, deuxième étape, au bout de 200 pages tout de même, Mellors exprime ses idées sur l'exploitation sociale des mineurs : je monte à 3 étoiles !

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C'est alors que Constance veut enfin se débarrasser de cet infâme Clifford, imbu, méprisant, ( la scène avec la voiture de Clifford dans le bois est magnifique d'émotion ), so british, tellement fier de la réussite industrielle de l'Angleterre, … et la deuxième question qui me vient à l'esprit est :

Va-t-elle réussir ? Dans ce monde de conventions ? Et surtout avec un « déclassé social », et les ragot de l'époque qui vont avec ? 

.

La première question qui me tarabuste depuis le début de cette lecture est :



pourquoi ce livre sent-il le souffre ?

Pourquoi ce livre a-t-il été interdit 30 ans en Angleterre ?

Est-ce à cause de son aspect sexuel, ou est-ce parce qu'il critique la société de castes anglaises et sa société industrielle qui enrichit les riches, et rend sous-hommes, bossus, difformes, sans cerveau, et« minéraux », les mineurs de ce pays ?

.

J'ai lu, après le livre, la préface de l'auteur. Et j'ai eu la réponse à ma question !

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David Herbert Lawrence est fils de mineur, comme Oliver ;

il tombe amoureux d'une femme noble, comme Oliver ;

il se passionne pour les « peuples sylvestres », comme Constance.

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Le passage humoristique et tendre sur « John Thomas and Lady Jane » qui, ici représentent affectueusement le sexe de l'homme et celui de la femme, est une allusion à sa deuxième version expurgé des scènes « hard » du livre sur Lady Chatterley.

Le livre ici critiqué est la troisième version.

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Rattrapé par la tuberculose, il voulait absolument publier ce livre avant de partir.

Etant impossible d'éditer en Angleterre pour cause de censure, il publia à compte d'auteur en Italie en 1928. Il est mort en 1930, juste après avoir écrit une apologie de son livre.

.

Sa façon de décrire la sexualité masculine est comique, notamment avec Michaelis, mais assez souvent vraie, bien sûr.

Malraux dit qu'il ne comprend pas la sexualité féminine. Je pense que si. Mais je ne suis qu'un homme.Je vais de ce pas voir les critiques de nos chères soeurs babéliotes pour voir si elles écrivent quelque chose là-dessus : )
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L'Amant de Lady Chatterley

« Je travaille toujours à la même chose : rendre la relation sexuelle authentique et précieuse au lieu de honteuse. Et c’est dans ce roman que je suis allé le plus loin. Pour moi, il est beau, tendre et frêle comme le moi dans sa nudité. »

Lettre de D.H. Lawrence à Nancy Pearn, le 12 avril 1927



Avec une telle profession de foi, c’est en toute confiance que j’ai abordé cette lecture. Cela faisait longtemps que j’y songeais : le thème du livre et l’anathème dont il fut longtemps l’objet, la personnalité attachante de D.H Lawrence, le film que Pascale Ferran en a tiré, tout me séduisait. C’est donc nantie d’une indulgence et d’une bonne volonté inexpugnables que je me suis lancée dans la lecture de ce Classique de la littérature anglaise. Hélas, l’une et l’autre se sont assez vite fracassées contre la prose de l’auteur, souvent poussive, maladroite, parfois tellement emphatique que c’en est ridicule (beaucoup, mais alors beaucoup de points d’exclamation dans ce texte), parfois tellement triviale que c’en est gênant, une écriture méandreuse qui m’a donnée l’impression, sans doute à tort, de ne pas savoir où elle allait.



Au début, ça se présente plutôt bien. Le chapitre premier introduit assez efficacement, sinon élégamment, Connie, son mariage avec Sir Clifford Chatterley, le départ à la guerre de ce dernier, son retour en miettes : handicapé et impuissant. Avec le chapitre deux et la fin de la guerre, commence la nouvelle existence de Connie dans la sinistre demeure familiale des Chatterley, Wragby. :

« Leur existence se déroulait ainsi : dans le vide. Quant au reste c’était une non-existence. Wragby, les domestiques… n’avaient qu’une existence spectrale. »



Là, forcément, je tique un peu. Je me dis : voilà un propos qui réussit l’exploit d’être à la fois redondant et parfaitement creux. Pas terrible, mais pas de nature non plus à me faire abandonner ma lecture, d’autant que j’ai de la bonne volonté à revendre. Je poursuis donc. J’apprends que Clifford, profondément humilié par son handicap, ne veut voir personne à part les domestiques. Rien d’étonnant à cela, me dis-je, et je compatis avec la malheureuse Connie, obligée, dans la fleur de l’âge, de vivre recluse avec un handicapé acariâtre dans une demeure spectrale. Je me dis aussi : vivement l’entrée en scène du garde-chasse, que Connie (et moi aussi) nous distrayions un peu. J’en suis là de mes réflexions quand j’apprends incidemment au détour d’une phrase que « Clifford avait pas mal d’amis, ou plutôt de connaissances, qu’il recevait à Wragby. Il invitait toutes sortes d’écrivains, de critiques susceptibles de vanter les mérites de ses livres. Ils étaient flattés d’être accueillis à Wragby, et ils encensaient.»



C’est là, je crois, en plein milieu du deuxième chapitre, que j’ai commencé à douter de la cohérence de ce récit. Car de deux choses l’une. Soit Connie et Clifford mènent une vie d’ascètes solitaires dans laquelle il ne se passe strictement rien, soit ils reçoivent leurs amis et relations à Wragby. Les deux situations me semblent difficilement compatibles. Pas pour l’auteur, visiblement, qui continue comme si de rien n’était à nous parler des réceptions données à Wragby et du succès grandissant de Clifford. Bref, je me mets à douter, dès lors, une sorte d’engrenage fatal se met en branle. Je suis agacée. Oui, c’est un trait de ma personnalité que je déplore : je m’agace très facilement et il m’est très difficile, ensuite, de me dés-agacer. Donc, me voici passablement agacée, mais toujours engagée dans ma lecture, quand se produit un petit événement : l’entrée en scène au milieu de ce paysage figé d’un tiers personnage, Michaelis, auteur de pièces de théâtre, et dont je n’ai pas réussi à savoir s’il était au faîte du succès ou sur le déclin. Mais là n’est pas l’essentiel. Il devient l’amant de Connie, et surtout il fournit l’occasion à l’auteur qui, manifestement, n’aime pas beaucoup Michaelis, de nous gratifier de quelques unes de ces métaphores dont j’ai découvert, par la suite, qu’il avait le secret :



« Les hommes étaient bien tous les mêmes, ils oubliaient l’essentiel. Ils perdaient la tête, ils partaient comme des pétards, et ils s’attendaient qu’on les suive au ciel, eux et leurs zizis. »



« La déesse du Succès, cette chienne, faisait tirer la langue à des milliers de chiens haletants. Si l’on doit juger au résultat, le premier qui la possède est un caïd parmi les chiens. Michaelis pouvait donc redresser la queue. »



Je précise pour ceux qui auraient, comme moi, l’esprit mal tourné, que la polysémie du mot « queue » en français n’a pas son équivalent en anglais, « tail ». J’ai vérifié. D’ailleurs, tant que j’y étais, je me suis procurée la version anglaise, car, après tout, on n’est jamais à l’abri d’une très mauvaise traduction. La traduction de Pierre Nordon, m’a paru suivre fidèlement le texte, peut-être un peu trop d’ailleurs. En tout cas, pour moi, ce fut le coup de grâce. Et si j’ai poursuivi ma lecture, c’est uniquement parce que je voulais faire la connaissance de Mellors, le garde-chasse. La rencontre n’a pas trop tardé, mais en revanche, j’ai dû encore pas mal patienter avant d’arriver au coeur du sujet : la liaison entre le susdit et Connie.

En attendant, j’ai dû endurer Michaelis, dont la caractéristique première, au lit, est de jouir en moins de temps qu’il n’en faut pour l’écrire. J’ai dû également endurer des discussions pseudo littéraires et pseudo politiques entre Clifford et ses invités, qui m’ont autant ennuyée que Connie. Sur ce point, nous étions manifestement en phase, elle et moi. En revanche, elle s’est aliénée définitivement ma sympathie quand, à une question un brin condescendante de Clifford sur le fait de savoir si elle avait ou non lu Proust, elle répond :

« J’ai essayé, mais il me rase », ajoutant, enfonçant le clou, clouant au pilori ce qu’il me restait d’indulgence à son égard :

« Il me rase avec toute cette subtilité ! Il n’a pas de sentiments personnels, il ne fait que disserter sur les sentiments. J’en ai assez de cette vanité mentale. »



Abasourdie, je fus. D’autant que cette remarque qui, je le dis au passage, dénote une profonde, une abyssale méconnaissance de Proust et de son oeuvre, n’est pas anodine. Elle participe d’une vision du monde éculée qui irrigue le livre de bout en bout : la conviction que le corps est irrémédiablement séparé de l’esprit, seul le corps permettant d’appréhender la réalité dans sa plénitude. Du reste, si Connie avait lu attentivement Proust, elle aurait vu que sur ce point, ils ne différaient pas tant que cela l’un de l’autre. Proust se méfie grandement de l’intelligence et considère que les sens sont le vecteur privilégié de la connaissance. Mais bien sûr, ce qui, chez Proust est infiniment subtil, devient opposition binaire chez Lawrence. Le roman se présente comme une fête des sens en contraste absolu avec l’intellect froid, calculateur, étriqué. En gros, Connie incarne la plénitude du corps, Clifford incarne l’esprit dans ce qu’il a de plus racorni, et Mellors, l’homme des bois, oscille entre ces deux pôles, affichant, du moins en paroles, une nette préférence pour le premier, en particulier pour son phallus auquel il voue une sainte vénération, et un vif mépris à l’égard du second. C’est tout à fait affligeant.



Il est assez piquant de constater que ce qui se présente comme une apologie de la sensualité, de l’amour, de la nature, m’ait paru à ce point creux et désincarné. Que les personnages, Clifford et Mellors en particulier, n’aient jamais pris corps sous mes yeux, l’un, Clifford, l’aristo intellectuel froid, handicapé et impuissant ressemblant à une métaphore, l’autre, Mellors, l’homme du peuple, le garde-chasse homme des bois éveillant Connie à la sensualité dissimulant mal le fait qu’il est un double fantasmé de l’auteur. En fait, les personnages de ce livre sont des idées, des archétypes avant d'être des personnages de chair et d’os. Je ne dis pas que c’est mal, je dis juste que je trouve cela prodigieusement ennuyeux.

Seul un passage a éveillé mon intérêt : celui où Clifford, coincé dans une côte herbeuse avec sa chaise roulante motorisée, s’acharne à vouloir la faire avancer sans l’aide de Connie ni de Mellors, finissant par s’embourber et manquant de peu flinguer le moteur, obligeant Mellors à prendre des risques pour le sortir de là. Cette fois-ci, situation et personnages sont véritablement incarnés : le sentiment d’humiliation de Clifford qu’il s’efforce de cacher derrière une surenchère dans l’arrogance ; la gêne de Connie tentant, avec tact et douceur, de ramener son mari à la raison; l’obligation de soumission de Mellors, qui refuse d’abdiquer sa dignité…



Pour ceux et celles qui, n’ayant pas encore lu ce livre, voudraient s’en faire une idée, disons, plus équilibrée et recueillir des avis nettement plus favorables que le mien, je les invite à lire les excellentes critiques de Fabinou7, ODP31, palamede, berni_29, LaBibliodOnee… sans oublier le savoureux pastiche de Pascontent.

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L'Amant de Lady Chatterley

Un grand classique qui m'attendait depuis longtemps. J'ai franchi le pas. Je suis conquise! Ce roman a longtemps été entouré d'un parfum de scandale, car osé, très érotique... En fait, la réputation de cette oeuvre est exagérée, c'est un livre excessivement moderne, avant-gardiste même pour l'époque. Mais "L'amant de Lady Chatterley" ne se résume pas à un texte érotique. Il évoque la guerre, mais aussi la condition ouvrière en Angleterre et puis aussi le conservatisme de ce pays avec les clivages établis entre les classes sociales. L'oeuvre de Lawrence est une étude de la société des années 1920 dans une ville minière, c'est aussi une bonne analyse psychologique. Et s'il existe des scènes, non pas érotiques mais sensuelles, elles ne sont pas choquantes car elles résultent d'un grand amour passionnel partagé. Un roman superbe. Un véritable coup de coeur.
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L'Amant de Lady Chatterley



Ce roman a eu l'effet d'un grand coup au plexus comme il m'en arrive très peu au cours des lectures. Accusé de pornographie, adapté pour le grand écran avec Sylvia Kristel dans le rôle-titre, j'en repoussais sans cesse la lecture, imaginant ne trouver que quelques images croustillantes.



D. H. Lawrence décrit une femme belle, intelligente et émancipée qui trouve auprès d'un amant l'amour véritable. C'est effectivement exposé sans détour et lorsque les deux amants ne font pas l'amour, ils parlent de façon très directe de sexe et de jouissance. Jamais un auteur n'a écrit avec autant de finesse l'éveil des sensations, en particulier féminines. le problème principal de ce roman n'est pas l'adultère, l'époux impuissant y consent et incite même à concevoir un enfant hors mariage, mais que Lady Chatterley choisisse un homme hors de sa classe sociale. D. H. Lawrence prend en exemple Eastwod, sa région natale, et nous montre sans cesse l'évolution de la vieille Angleterre rurale dont les paysages sont brusquement effacés par l'industrialisation, le nouveau statut des vieux baronnets, la paupérisation des mineurs.



Ce livre fait écho au fameux Maurice de E. M. Forster écrit probablement à la même époque, pas uniquement d'ailleurs parce que le personnage principal succombe au charme de son garde-chasse.

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L'Amant de Lady Chatterley

Roman de la nature, de la force vitale et du sexe sans honte, L'Amant de Lady Chatterley est une lecture de printemps, du temps béni de la sève qui remonte. C'est la lutte de l'animal contre la machine, et du spontané contre le convenable. Roman scandaleux? Pour les Sir Clifford, impuissants cloués sur leurs petites vies intellectuelles, sans doute. Mais on ne peut s'empêcher d'être du côté de Mellors, le garde-chasse sensuel, l'homme véritablement viril, et de Conny, la femme qui découvre, dans les passages les plus beaux du livre, le profond plaisir du sexe quand il est tendre. Roman de la liberté et du retour à l'essentiel oublié, ce corps trop souvent corseté par le triste monde des idées noires et de la spiritualité castratrice, L'Amant de Lady Chatterley procure un frisson plus fort que les longues méditations de la philosophie, parce qu'enfin, l'âme et le corps ne sont plus séparés, comme on a si artificiellement essayé si longtemps de nous le faire gober. Les hommes et les femmes sont d'abord (et ne sont que) des corps qui se cherchent, et le seul miracle, c'est quand ils se trouvent.
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