Gallois né en Angleterre le 5 octobre1959, David M. Thomas est fils d'ouvrier. Il a été partie prenante de la grande grève des mineurs britanniques dans les années 80. Historien romancier, Il écrit en français et vit à Limoges.
-Aux Gallois, répond Dartmann
-Et pourquoi tu penses aux Gallois ?
-Un jour tu m’as dit quelque chose. Tu parlais des Espagnols, tu disais que le mot gallois ne parvient jamais à s’installer dans le cerveau d’un Espagnol. Tu leur dis gallois et ils entendent anglais.
-Et alors ?
-Ce sera pareil pour le marxisme. On dira marxiste et l’interlocuteur entendra toujours stalinien. Même réflexe. On fera l’amalgame entre marxisme et stalinisme comme on ferait l’amalgame du Sermon sur la Montagne et de la Sainte Inquisition, et les idéologues capitalistes et leurs apologues vont jouer sur du velours. Le marxisme se résumera à l’Union Soviétique et cette ânerie d’écolier passera inaperçue.
Bueno… Au début, il a tiré sur nous deux mais Marco m’a dit de descendre de cheval et d’aller me cacher derrière un olivier. C’était la seule chose qui poussait dans la plaine. Alors c’était lui et son cheval contre l’avion et le pilote. L’avion est revenu, Marco a pris le fusil et il a tiré sur l’avion mais lui avec un fusil… c’était plutôt pour se faire l’unique cible, pour attirer le feu du pilote sur lui. Il a remis le fusil dans la fonte et il s’est fié à son talent de cavalier. L’avion est venu en ligne droite sur lui. Je le voyais déjà mort parce qu’un homme et un cheval contre un appareil si puissant et si rapide… Marco fait une feinte à droite, le pilote se rajuste et tire mais la Teresina est déjà repartie vers la gauche et les balles tftftftf passent à quelques mètres de la queue du cheval. Ce n’est que maintenant que je peux admirer tout ça mais je n’étais pas à l’arène des taureaux, j’étais cachée derrière cet olivier et j’avais tellement peur, pour moi d’abord et pour lui aussi. Et ça a continué comme ça, comme une partie de tauromachie, feintes et passes, les balles qui éclaboussaient la terre tftftftf, combien de fois je ne sais plus, et le pilote qui, à chaque fois qu’il ratait son coup, s’énervait dix fois plus, vraiment c’était quelque chose à voir, je vous assure. L’entente parfaite entre homme et cheval, c’était comme s’ils ne faisaient plus qu’un, une seule âme.
"Depuis l’âge de seize ans, Solena, je me bats contre le nazisme. J’ai quarante-deux ans, et je suis internationaliste, mais ça ne veut pas dire que je n’aime pas mon pays. Tout ca pour découvrir maintenant qu’il est devenu synonyme du nadir absolu de l’humanité, un pays et un peuple à tout jamais maudits. On dira dorénavant qu’aucun Allemand ne naît innocent. Le Mal qu’on voit ici est inexpiable. L’Allemagne sera à tout jamais la patrie de Cain, tu te rends compte ? C’est inexpiable."
"Pour tout te dire Dartmann, répond Solena, non, je ne me rends pas compte. Je ne suis pas allemande. Mais là tu pleures, Dartmann, et c’est la terre entière qui pleure avec toi, et pour ma part, je raconterai jusqu'à mon dernier souffle les Allemands qui sont venus en Espagne, qui ont laissé leur peau à la Casa de Campo, sur tous les champs de bataille espagnols. Je dirai à qui voudra m’écouter que j’ai eu la chance de rencontrer un Allemand droit et juste et noble, qui était venu dans mon pays pour nous aider, qu’il y en avait des milliers comme lui en Espagne. Ce n’est pas tous les Allemands qui porteront la marque de Caïn. Voilà. C’est tout ce que j’ai à dire."