Que le récit d'Herzog ne dise finalement pas toute la vérité sur l'aventure ne diminue en rien l'héroïsme profond de ses protagonistes. Plus nous en apprenons, de tous les points de vue qui s'affrontent, sur ce qui s'est passé pendant cette brillante et dramatique expédition, plus la loyauté et l'abnégation de Terray et de Rébuffat apparaissent au grand jour. De Terray, surtout, dont la conduite fut extraordinaire : bien qu'étant le plus fort de tous, par deux fois il renonça à l'occasion qui lui était donnée d'atteindre le sommet ; sans hésiter, non plus, il échangea ses souliers contre ceux de Lachenal, risquant de voir ses pieds geler pour que son meilleur ami puisse redescendre épuisé plus bas dans la montagne.
Quant à Lachenal, quoi qu'on dise et qu'on fasse, y a-t-il dans toute l'histoire de l'alpinisme acte plus noble que le sien ? Puisqu'en ce jour de juin au goût d'amertume où il décida de continuer vers un sommet improbable, il savait très bien qu'il faisait le sacrifice de ses pieds pour sauver la vie de son camarade. Avec toute l'éloquence laconique dont il est capable, il termine ses "Commentaires" par une formulation ramassée de ce que fut sa vérité. Si tant est qu'on puisse un jour arriver à une conclusion définitive sur ce que fut au fond cette épopée de l'Annapurna 1950, il reste au moins les deux phrases de Lachenal pour lui servir d'épigraphe : "Cette marche au sommet n'était pas une affaire de prestige national. C'était une affaire de cordée."
(L'auteur cite Louis Lachenal)
"Pour moi, dit-il dans ses "Commentaires", cette course était une course comme les autres, plus haute que dans les Alpes, mais rien de plus. Si je devais y laisser les pieds, l'Annapurna, je m'en moquais. Je ne devais pas mes pieds à la jeunesse française"
Alors pourquoi avoir continué ? "Pour moi, je voulais donc redescendre. J'ai posé à Maurice la question de savoir ce qu'il ferait dans ce cas. Il m'a dit qu'il continuerait. Je n'avais pas à juger ses raisons ; l'alpinisme est une chose trop personnelle. Mais j'estimais que s'il continuait seul, il ne reviendrait pas. C'est pour lui et pour lui seul que je n'ai pas fait demi-tour."
"Le soleil se lève dans le ciel, resplendit un moment, puis redescend et sombre hors de vue. Il en sera de même des Indiens..."
Dans ses Mémoires, Clum insiste sur le fait que les Apaches lui donnaient, en retour, un titre qu'il orthographie: "Nanthan-bettuny-kahyeh", et traduit par "Chef-au-grand-front"; mais savait-il que les Chiricahuas, eux, l'appelaient "Dindon glouglouteur", à cause de sa démarche affectée, de sa façon de se pavaner? Lorsque Clum s'approchait deux, il se trouvait toujours un Chiricahua pour dire aux autres, en Apache bien évidemment: "Regardez, il laisse traîner ses ailes."
"Je m'émerveillais de tout dans l'histoire d'Albanov [Au pays de la mort blanche], y compris sa conclusion un peu plate quand lui et Konrad, les deux seuls survivants, furent secourus par miracle à bord d'un vapeur à bout de souffle qui les rapatria à Arkhangelsk. Un paragraphe cependant, aux trois quarts du récit environ, me plongea dans un vertige d'incrédulité. Je le lus et relus, cherchant à comprendre ce qu'il avait d'invraisemblable.[...] Albanov tente alors de faire entrevoir à son compagnon Konrad qu'ils peuvent survivre à l'hiver si aucun secours ne se présente. Voici ce qu'il écrit : "Je connais le récit du sauvetage, dans une des nombreuses îles du Spitzberg, d'un troupe russe de chasseurs de phoques qui avait fait naufrage. Ils étaient sans armes. A l'exemple de Robinson, ils vécurent sept ans dans cette île, relativement heureux et contents. Ils se procurèrent vêtements et nourriture par la chasse, sans armes à feu. Ils construisirent toutes sortes de pièges qui leur firent bon usage." Incapable de détacher mes yeux de la page, j'ai pensé : sept ans? Impossible ! Un mythe. Mais, si ce n'est pas le cas..." p21
-Le Grand-Père veut une paix juste, expliqua Arny. Les Apaches doivent cesser de tuer et de voler, et s'établir sur une réserve.
-Les Apaches veulent courir comme le coyote, rétorqua Cochise, ils ne veulent pas qu'on les enferme dans un corral.
"Autrefois, j'allais comme le vent. Aujourd'hui, je me rends à toi et tout est fini."
Geronimo, lors de sa reddition au général George Crook.