Depuis plus de dix ans, toujours le même vertige. La fièvre de l'entrée en scène du premier jour, aucun acteur ne s'y habitue jamais, sauf ceux qui sont sûrs d'un talent qu'ils ne possèdent pas. Son pouls s'accélère, respirer à pleins poumons, sourire, ouvrir sa sacoche, sortir ses affaires, les poser sur le bureau.
Nul ne connaît son âge. Soixante-quinze ou quatre-vingt ans. Elle marche à peine voûtée, pas une de ces petites vieilles qui vont à petits pas ; elle a dû être belle, une dame à fière allure, sur qui les hommes se retournaient dans la rue. Elle avance au rythme d'une vie en veilleuse, mais son pas est sûr, on ne l'a jamais vue trébucher, tout juste si elle se tient parfois au mur pour reprendre souffle. La vieillesse, on ne peut pas y échapper qu'à la condition de mourir jeune.
Les jeunes oublient qu'ils auront peut-être la chance, ou la malchance, d'être vieux un jour. S'ils s'en souvenaient, cela altérerait leur jeunesse. Comme de se rappeler sa jeunesse gâche parfois la vieillesse.
Je veux aider ma maman à grandir.