Un évenement boulversant m'est resté à jamais en mémoire. Un jour, durant la récréation, j'ai aperçu un garçon étendu par terre. Il y avait du sang près de sa tête. Il avait fait une mauvaise chute et sa tête avait heurté l'asphalte. Je me suis éloigné, effrayé. Le surveillant est intervenu. On a transporté le blessé à l'intérieur. Puis une ambulance est venue le chercher. Le lendemain, on nous appris qu'il était mort à l'hôpital. Il n'avait que neuf ans. Il se nommait Pierre. J'ignorais qu'on pouvait mourir à cet âge.
Elle s’est assise et s’est mise à feuilleter le journal de la veille en silence. Cela a duré plusieurs minutes. Lorsqu’elle s’est levée, elle m’a regardé en souriant: «Même si j’ai bien dormi, je ferais bien une petite sieste. Tu viens?…» Et cette fois, elle ne s’est pas dirigée vers la chambre qui me sert de bureau, mais vers la mienne dont j’ai tout de suite regretté un peu le désordre.
Elle a sorti quelques préservatifs de son sac à main en m’invitant à choisir. «Je préfère cela, a-t-elle précisé. Si tu es d’accord…»
Yolande savait s’y prendre. Avec douceur et naturel. Sans gêne aucune. Avec ses mains et avec sa bouche. Le plaisir qu’elle m’a procuré m’a fait réaliser que je n’avais pas été aussi heureux avec une femme depuis longtemps.
J’ai parlé deux fois de la chose à grand-père David et il m’a dit qu’il ne savait rien. Il peut bien dire ce qu’il veut. Il est habitué à inventer. C’est un écrivain!
Je l’aime depuis toujours. Il remplace mon père. Celui que je ne connais pas. Celui qui n’existe pas. C’est facile de répondre cela à un enfant de cinq ans: Ton père n’existe pas. Mais je ne suis plus un enfant.
Une fois, quand j’étais plus jeune, comme je passais devant chez elle, une voisine a dit à une autre voisine en me désignant: Il n’a sûrement pas été conçu par l’opération du Saint-Esprit. J’ai demandé à maman, Annie, ce que ça voulait dire. Elle m’a répondu: C’est une expression qui fait allusion à la conception de Jésus. Il en est question dans le Nouveau Testament…
Quand je suis retourné à l'université à l'automne, j'ai pensé raconter cette anecdote à mon professeur qui nous avait parlé de Blanche Hervieux. Puis je me suis dit qu'il était préférable de laisse planer le mystère.
Pour moi, Blanche Hervieux n'est pas vraiment disparue. Je relis parfois ses textes et je me souviens de son sourire de vieille dame et de sa voix très douce. «J'espère que vous aimez la poésie...»
Dès qu’ils ont mis les pieds dans la place, ils s’exclament avec un tel bonheur qu’ils dérangent parfois les habitués venus là pour lire ou pour rencontrer des connaissances. Quand leurs manifestations deviennent trop bruyantes, les gens autour s’arrêtent de parler, les observant, intrigués ou agacés.
Son fils se met à chantonner. Sans doute un air appris à la maternelle. Un peu plus et il aurait l’air heureux malgré ses vêtements qui ne sont plus tout à fait à la mode. Elle pense au bain du soir auquel le garçon prend toujours un vif plaisir. Cela la fait sourire.
Dans la ville où il habitait depuis l’âge de douze ans, certains l’avaient surnommé David qui fait tout. Cela lui permettait de rencontrer beaucoup de gens et de toutes les classes sociales. Cela l’inspirait parfois dans son travail d’écriture.
Pendant plusieurs années, il s’est appliqué à désinfecter tout ce qui lui tombait sous la main, dans les couloirs et les chambres où régnait le malheur. Il ne réparait pas les corps, mais leur permettait de survivre dans la propreté. Il distribuait les sourires comme d’autres les médicaments [...]