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Critiques de Doris Lessing (526)
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Les Grand-mères

Un ciel sans nuages. Le murmure des vagues sur la plage. Le sable chaud. Mouvements nonchalants de longs bras et de longues jambes halés. Décontraction et calme aristocratique. Effluves de poussières chaudes, nuits câlines. Sveltesse des femmes et beauté des hommes qui « jouent aux statues ». Belles demeures au bord de la plage, et fenêtres grandes ouvertes sur des jardins ensoleillés. Délicieuses et sensuelles jeunes femmes. Un sentier qui monte en serpentant au milieu des arbustes. Paréos et serviettes de bain. Corps dorés au goût de sel.

C'est un monde de conte de fées que nous présente la vénérable et très british Doris Lessing. Un « beau monde, lisse et éclatant de soleil, de sport et de bonne chère ! » Un monde bleu où les vies sont faciles, les existences paisibles et insouciantes. Liz et Roz ; Ian et Tom ! Vous les verrez vieillir, ces deux femmes étincelantes, à la beauté éternelle et à la réussite insolente ! Vous les verrez grandir, ces deux éphèbes qui deviendront beaux comme des Dieux.

Puis vous porterez leurs lunettes noires de soleil pour vous rendre soudainement compte que ce monde de « papier glacé » n'est pas aussi lisse qu'on voudrait bien vous faire croire. Un lien invisible, mais infrangible, lie ces quatre nantis de l'existence. Vous les verrez s'ébattre avec jouissance dans une passion fusionnelle, éruptive, teintée d'homosexualité. Une ardeur incandescente qui fascine. Qui met mal à l'aise aussi dans la mesure où elle est terriblement exclusive et chasse tous les autres, non sans méchanceté et mépris.

Ne vous laissez surtout pas engourdir par le style noble et raffiné de l'auteur, par la nonchalance stylée des personnages. Vous lirez une histoire dure, violente, amère, sans concessions, qui s'achève sur un rire moqueur et cruel.

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Mémoires d'une survivante

Incompréhensible, impénétrable, indéchiffrable, énigmatique, inaccessible, déconcertant, abscons, illisible, opaque, ténébreux, nébuleux… En un mot : impigeable.

J’ai tenu comme un brave soldat jusqu’à la soixante-dixième page, essayant de découvrir avec l’héroïne ce qu’il y avait derrière le mur, d’où venait Emily, cette étrange jeune fille au sourire pervers, trop grande, trop mur pour son âge, puis j’ai abandonné. Je n’en pouvais plus. C’est terrible de lire des lignes entières sans jamais rien comprendre.

La quatrième de couverture dit pourtant explicitement : « un livre vibrant de puissance évocatrice, au climat étrange et prenant ». Tu repasseras ! Je parlerais plutôt de climat ennuyeux et fastidieux. Et en restant poli encore !

En plus d’être incompréhensible, j’ai lu quelque-chose de douceâtre, d’incolore, de froid… Mais alors vraiment froid !

J’avais pourtant encensé « Les grand-mères », mais ce livre était…. Je ne pourrai même pas le dire, car on est dans le domaine de l’inexprimable…

Ça peut paraître un rien arrogant de parler ainsi d’un livre écrit par Doris Lessing, cette vieille dame so British, prix Nobel en plus.

Mais franchement, sur ce coup, j’ai entravé que pouic…



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Le carnet d'or

Un livre pas facile, mais comme pour l’ascension d’une montagne, l’ivresse ressentie et la vision qu’on a au sommet valent l’effort qu’on y met.



Un bouquin pas facile à cause de son format rébarbatif, plus de760 pages en format poche, en peu de chapitres, très denses, avec de pleines pages sans alinéas. Pas évident à concilier avec les interruptions de lecture inévitables dans la vie quotidienne.



Cette œuvre de la récipiendaire du Nobel 2007 est un texte difficile aussi par sa structure, avec une héroïne qui vit dans les « femmes libres » et qui écrit des carnets qui sont des romans, des commentaires ou des journaux intimes. Pour compliquer les choses, son héroïne a réutilisé les noms : dans le texte qu’elle écrit, le fils prend le nom de l’ex-amant.



Pas faciles non plus les thèmes abordés. On traite de la condition des Noirs en Afrique et ensuite des divers rôles de femmes, de la bonne épouse au foyer à la maîtresse, de la mère consolatrice ou castratrice. Toute la gamme des émotions y passe, du grand amour à la culpabilité, du désir sexuel à la froideur, de l’amour maternel au cynisme ou à la folie.



Le processus d’écriture lui-même est très présent, vécu et commenté par l’héroïne écrivaine. Elle partage ses doutes, ses nécessités et ses questionnements, à travers ses multiples cahiers.



On y trouve aussi le thème de la politique, à travers les adeptes du Parti communiste dans les années 50, parti rigide qui cultive le mensonge stalinien et dont les membres éprouvent douloureusement les contradictions. Ce n’est pas unique aux socialistes de l’époque, c’est inhérent à l’expérience militante, car dans les syndicats ou les mouvements étudiants, après le « high » des manifestations et la solidarité, les activistes retombent difficilement dans le quotidien de leur travail ou de leurs études.



Si vous êtes un bon public, la qualité de la prose vous entraîne, vous sentez la chaleur de la vallée africaine, tremblez de peur ou vous émouvez de joie par la lecture. Mais lorsqu’une histoire touche la santé mentale, comment ne pas être mal à l’aise aussi? Difficile de ne pas se laisser atteindre par le désespoir et la confusion mentale, par l’angoisse et la désintégration des personnes…



Une grande oeuvre littéraire à parcourir, si on a l’énergie pour envisager la longue randonnée…

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Le cinquième enfant

♬ Famille nombreuse, famille heureuse ♬...

Dire qu'un livre vous touche paraît parfois être l'expression d'un lieu commun. Ici ce livre m'a touché au ventre, c'est-à-dire qu'il m'a fait mal et une fois que je me suis relevé, je ne sais toujours pas pourquoi il a eu cet effet, ou oui un peu bien sûr, mais pas vraiment et au moment où je vous écris je ne suis pas certain que ce que je vous révèle de mon ressenti soit celui que je pourrai vous avouer demain. Ce livre continue de cheminer en moi.

Ici chaque page du récit joue avec l'ambivalence.

Je suis sorti bousculé de ce récit qui paraît si simple au premier abord.

Au début du roman, c'est une histoire d'amour ordinaire, un bonheur simple dont rêvait David et Harriet. Ils s'aiment et dès les premiers jours qui fondent leur couple, ils rêvent d'une progéniture et pour cela ils achètent une grande maison. Cette famille en devenir s'annonce sous les meilleurs auspices, même si dans leur entourage plusieurs s'accordent à penser que ce serait bien de prendre un peu de temps avant ce projet de vie.

La vie suit son cours comme un long fleuve tranquille, quatre enfants vont ainsi naître à la suite, jusqu'au jour où vient une cinquième grossesse non désirée. Aïe ! Harriet ressent très vite que l'enfant qu'elle porte n'est pas ordinaire, mais un intrus qui lui déchire les entrailles, celui que toute la famille déteste déjà avant même l'instant où il va naître. Celui qu'on attend avec comme un monstre.

L'enfant naît, prématuré, mais ayant déjà un poids au-delà de la norme.

L'enfant, Ben, n'est pas anormal, mais ressemble à une sorte de gnome à la force prodigieuse. On voit qu'au début, chacun tend les bras comme pour conjurer une crainte malsaine, mais l'enfant n'exprime aucune tendresse, semble totalement indifférent à son entourage, froid, dénué d'émotion. Sa venue dans la famille, son attitude associale puis brutale plus tard, vont bousculer le cercle familial. Des actes vont être posés, je ne vous en dit pas plus...

Ce roman est ma première immersion dans l'univers de Doris Lessing. Je découvre un roman puissant, totalement déstabilisant, cruel aussi, cruel par le ressenti des personnages, les non-dits, mais aussi par le poids d'une tension qui monte, qui nous happe, qui nous saisit au bord d'un cauchemar... Qui peut nous mettre en défaut aussi.

Car Ben va grandir. Il pose des actes à sa manière, ne trouvant pas sa place auprès des siens. Comment lui répondre ? Que faire de lui ?

J'ai adoré ce roman concis qui dit plusieurs choses, mais ne serait-ce que la différence et la manière de l'accueillir...

J'ai adoré ce roman parce qu'il nous bouscule dans nos retranchements, met à nu nos incertitudes. J'ai particulièrement adoré le personnage de la mère, ballottée entre compassion et angoisse... Il peut se lire de plusieurs manière, un peu comme un conte ou une fable...

Et puis il y a l'écriture de Doris Lessing, finement ciselée, impitoyable, ayant par moment comme un goût de fantastique, qui passe au scalpel l'envers des relations familiales, mais aussi la société britannique des années soixante-dix.

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Les Grand-mères

Au sommet d’un belvédère baigné par le soleil, un drame se joue. Deux belles-filles bafouées retirent leurs filles à leurs maris un peu trop accoquinés avec les grand-mères. Amours croisées et adultères répétés, l’intrigue ne laisse clairement pas indifférent.



Doris Lessing se fait plaisir en une centaine de pages sur un sujet sûrement bien maîtrisé, mais très restreint au niveau du volume et de l’approfondissement. Malgré son prix Nobel, je ne conseille surtout pas d’aborder son œuvre avec ces Grand-mères. En effet, rien que le style déjà m’a énervé comme pas possible : cassant, multipliant les digressions sans intérêt, n’arrêtant que trop rarement d’abuser des parenthèses et autres tirets de ponctuation, l’ensemble en deviendrait presque casse-tête à lire. Du côté de ces grand-mères, comme l’auteur est adepte des situations anticonformistes, elle mise sur l’étrangeté des relations fusionnelles entre deux femmes depuis leur plus tendre enfance, qui iront jusqu’à se lier charnellement l’une avec le fils de l’autre, et vice-versa. L’ennui vient du fait qu’elle crée là des personnages constamment aveugles devant leur réalité et volontairement égoïstes au point de ne penser qu’à leur bien-être et blesser tout leur entourage.



Un tout petit roman que j’ai trouvé aussi limité qu’agaçant. Bien dommage au vu de la renomme de son auteur, mais le fait est là : je ne conseille pas ces Grand-mères ; mieux vaut découvrir Doris Lessing par une autre de ses ouvrages (en espérant que cela ne représente pas l’ensemble de son œuvre pour laquelle elle reçut son Prix Nobel…).
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Le cinquième enfant

Difficile de rentrer dans ce roman qui date des années 80. L'écriture est concentrée, sans chapitre, sans véritable pause. Cela ajoute à l'intensité du sujet, un enfant inadapté au sein d'une famille anglaise. Ce roman m'a rappelé Rosemary's Baby de Ira Levin.

Cela pose également la question de l'instinct maternel, de l'amour ou pas porté à son propre enfant, de l'acceptation de la différence, de la responsabilité vis à vis de nos enfants...

C'est tendu, intense, malsain, horrible.

Mais cela vaut le coup de lire ce roman.
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Le cinquième enfant

Lu dans le cadre du challenge Nobel.



Harriet et David étaient faits pour se rencontrer. Personnalités semblables, un peu ternes, même conception de la vie, conformistes, ils rêvent de fonder la famille idéale, nombreuse, chaleureuse, un vrai foyer de convivialité. Et donc, ils se marièrent et eurent beaucoup d’enfants.

Mais surtout ne vous imaginez pas que le reste de l’histoire est un conte de fées tout en roses et violettes. Cela n’aurait aucun intérêt. Sous des apparences heureuses, c’est au contraire le début d’une descente aux enfers.

Cela commence par la maison, immense, achetée sur un coup de cœur malgré la dépense déraisonnable. Puis Harriet qui tombe enceinte et doit renoncer à travailler. Mais le jeune couple peut compter sur l’aide de la famille. Et après quelques années, le rêve semble en passe de se réaliser, malgré l’épuisement d’Harriet et la crise financière des années 70 : les 4 enfants sont adorables, la maison grouille de monde à chaque période de vacances.

C’est alors que, malgré les précautions, Harriet comprend qu’elle attend un cinquième enfant, et que la grossesse va mal se passer. Le fœtus fait preuve d’une force et d’une rage inouïes, torturant sa mère de l’intérieur comme s’il voulait se venger de ne pas avoir été désiré. A sa naissance, cet enfant étrange provoque le malaise, puis la peur, de son entourage. Différent, froid, ne manifestant aucune émotion hormis des accès de rage destructrice, sa mère voit en lui un monstre venu des temps anciens.

Difficile d’en dire plus sur cette graine de sociopathe sans dévoiler la trame de l’histoire, mais sachez que ce roman est brillant. Mais brillant comme l’acier, et tout aussi glacial. En moins de 200 pages, il amorce plusieurs pistes de lecture : sort réservé aux enfants « différents » dans la famille, à l’école, dans la société. Dilemme d’une mère qu’on culpabilise d’avoir enfanté ce monstre, tiraillée entre un reste d’instinct maternel et une aversion pour son rejeton, entre cet enfant qui la phagocyte littéralement et le reste de la fratrie délaissée. Désarroi du corps médical, résistance du couple. On s’interroge aussi sur la nature du Mal, inné ou acquis, sur son origine. Pourquoi un tel coup du sort sur cette famille parfaite ? Critique féroce de la middle-class britannique trop orgueilleuse et condescendante ? Métaphore de la crise économique et des années sombres de l’IRA dans lesquelles le pays va bientôt basculer ?

Ce roman court mais très riche ne fait pas vraiment dans le bon sentiment. Réaliste et sans fioritures, il se lit comme un thriller. Angoisse et malaise suintent à toutes les pages. Il est saisissant, effrayant. En peu de mots, il vous marque pour longtemps. Je pense que c’est ce qu’on appelle le talent…

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Le temps mord

"Le Temps mord" est un passionnant recueil d'articles de Lessing, particulièrement centré sur la littérature, la seule croyance qu'elle garda à la fin de sa vie, -"les livres m'ont faite ce que je suis".-

Les sujets sont aussi divers que colorés; de la Vieillesse, à Jane Austen et sa conception de la liberté de la femme, une notion abscons à l'époque / de la vraie personnalité de Virginia Woolf qui transparaît tout autre dans son oeuvre, au " féminisme simple et naïf "de D.H.Lawrence / de la vie sexuelle insatiable de Tolstoy ( 13 enfants dont 9 survécurent ) qui prône en bon chrétien l'abstinence sexuelle, à l'utilité pratique de la littérature / de la tyrannie du "politiquement correcte", à l'accaparement des sources vives du savoir et de la sagesse par des institutions religieuses de toutes sortes (L'ecclésiaste ) / de Boulgakov ( un de mes écrivains de prédilection )qu'elle qualifie de " grand écrivain de science fiction"( moi qui ne l'ai jamais considéré tel, plutôt écrivain d'un fantastique et d'un imaginaire, parabole sur la nature du communisme soviétique) et sur lequel elle pose la question de, s'il

"aurait recouru à l'allégorie et le camouflage s'il n'avait pas été soumis à la censure ?",

à Anna Kavan, romancière anglaise dont l'œuvre est la métaphore de sa vie......



L'article sur Boulgakov est un bel hommage faites à l'écrivain. Qui ne connaît pas encore ses œuvres , à sa lecture n'aurait qu'une envie, le découvrir au plus vite.

Alors que dans un autre article sa pique à Graham Greene est vénéneuse, -"On ne peut s'empêcher de penser qu'il s'est converti au catholicisme afin d'avoir un terrain propice où épanouir son don pour les satisfactions lugubres de la culpabilité."-

Une pique aussi à Virginia Woolf, à propos de son oeuvre initiatique, des textes de "La maison de Carlyle ", qu'elle admire pourtant comme écrivaine ,-"Il est toujours instructif de voir sur quelles grossièretés originelles un écrivain a conquis son équilibre –sa maturité.-"





Doris Lessing est un electron libre, une liberté qu'elle a payé au prix fort, une liberté de pensée que j'admire.

Sans concession elle nous livre ses réflexions sur divers grands auteurs et leurs livres ( dont quelques inconnus, du moins pour moi ), des sujets sociaux et politiques, les grand maux de ce monde et sur ses passions, entre autres, le soufisme et les chats.......intelligent, brillant !

Un livre fort intéressant que je recommande vivement, et par la même occasion, voudrais conseiller la lecture passionnante de deux de ses livres autobiographiques,

" Dans ma peau " et " La marche dans l'ombre ", si ce n'est déjà fait.



« J'ai ma Voie qui me suffit, en accord avec ma place dans le monde et dans la partie du monde où je me trouve. »( propos de derviche )

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Filles impertinentes

Un inédit de Doris Lessing, auteure découverte il y a bien longtemps avec le « Carnet d’or » !!!



Ce texte très court n’en est pas moins dense, et assez douloureux. Le prix Nobel de Littérature y raconte son enfance, ses rapports difficiles et houleux avec sa mère, un père qu’elle adorait, mais qui avait été profondément traumatisé par la première guerre.



Ses difficultés de rapport avec cette mère énergique, autoritaire, mais pétrie de conventions, ayant à sa décharge, aussi supporté moult épreuves, ont été telles que la narratrice parle le plus souvent d’elle à la troisième personne… pour mettre à distance… en quelque sorte des rapports complexes, jamais pacifiés…



« Nous parlons sans cesse du fossé entre les générations. Mais fut-il jamais aussi marqué qu’entre la génération de mes parents et la mienne , Ils croyaient que l’Empire britannique était la plus grande puissance au service du bien existant au monde, et que Dieu était aussi de cet avis. Que les blancs étaient supérieurs à tous les hommes d’autres races, et que le peuple anglais était supérieur à tous les autres peuples blancs. Que la minorité blanche dans les colonies était là, avec l’assentiment de Dieu, pour civiliser et faire progresser les indigènes. Ils croyaient au Devoir. Au patriotisme. A l’Amour du travail bien fait. A la pérennité du mariage. A la vie de famille » (p.122)



Ce récit me fait songer à maints égards à un autre texte autobiographique d’une dame, écrasée par la personnalité très forte d’une mère, … je parle de Marguerite Duras, avec ce texte exceptionnel, « Un

Barrage contre le pacifique »…



Doris Lessing raconte… reconnaît son injustice envers sa mère…Mais aussi la nécessité « vitale » de s’affranchir de cette personnalité trop forte et rigide…dans un contexte colonial, de surplus .



« Ce qui m’inquiète aujourd’hui, c’est que mes pensées n’ont guère évolué depuis lors. D’un côté, cette pauvre femme n’avait commis d’autre faute que d’avoir connu une série de malheurs, à commencer par la mort de sa mère quand elle avait trois ans, et elle méritait d’être aimée, soutenue, entourée de tendresse. Pourtant je devais la combattre à tout instant, autrement elle n’aurait fait qu’une bouchée de moi. (p.130) »…



De nombreux éléments de cette enfance très riche en émotions , familialement et socialement ( par cette implantation en Rhodésie, dans une société à l’opposé de leur milieu d’origine : l’Angleterre bourgeoise et guindée…)expliquent l’esprit extrême d’indépendance de cet écrivain. Après ce récit… je lirai ou relirai ses textes , avec une autre attention, un regard autre….un texte très court mais qui narre mille choses d’une génération, d’une époque… d’une vision du monde, d’êtres fracassés par la guerre.

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Ces prisons où nous choisissons de vivre

Doris Lessing a reçu le prix Nobel en 2007, un peu avant que je crève dit elle avec humour.... ou pas, car elle se méfie de la gloire, elle qui a écrit des livres sous un autre nom, et a été rejetée par les éditeurs qui ne reconnaissaient pas son écriture.

Les prisons où nous choisissons de vivre , ce sont des conférences où elle explique son point de vue. Elle a appartenu au Parti Communiste, elle a milité pour la cause des noirs en Rhodésie où elle a vécu, elle a été considérée comme féministe, et pourtant, elle affirme que la liberté pour les femmes advient quand elles ne pensent pas écrire « comme des femmes ».

Ses thèses :

les humains se laissent aller à la violence depuis le moment où ils n ont plus été des animaux.

Les groupes , qu’ils soient politiques, religieux ou gouvernementaux, créent une barbarie basée sur le concept : j ai raison et vous avez tort , avec la certitude absolue , liée à un sentimentalisme presque religieux, et autant de mauvaise foi, que les autres ont tort.

La proximité de pensée avec Gérald Bronner, Apocalypse cognitive , chronique par AnnaCan, saute aux yeux , avec la différence que Doris Lessing parle du tout puissant fanatisme du Parti communiste, et pas des réseaux sociaux qui n’existaient pas à son époque .

Pour elle, le lavage de cerveau , suivi d’une non reconnaissance des millions de morts en Russie et en Chine, continue à opérer .

Et , bien sur, nous sommes incapables de nous rendre compte de cette illusion de groupe, alors que nous nous conformons à la pensée selon un code moral dont nous n’avons pas conscience’

Nous pensons être libres de penser, alors que nous reproduisons les mêmes loyautés aveugles, les mêmes dogmes sacrés, la même obéissance aux slogans.

Nous savons beaucoup sur le cerveau, cependant nous acceptons par exemple d être exposés à la violence à la télévision, nous perdons notre sensibilité et mettons en avant , cependant, la pureté de notre cœur.



LC thématique Octobre un verbe dans le titre

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Victoria et les Staveney

Je l’avoue, j’ai beaucoup de difficultés à rédiger la critique de ce roman. Cela fait dix minutes que j’essaie d’écrire la première phrase, peine perdue.

Donc me voilà déjà à la troisième phrase, et je n’ai encore rien expliqué.



Essayons de commencer par l’histoire.

Victoria est une petite fille noire que nous suivrons tout au long (enfin, c’est beaucoup dire parce que le roman est TRES court et les ellipses sont nombreuses, ainsi que les résumés) de son enfance, son adolescence et sa vie de jeune femme jusqu’à trente ans.

Elle vit à Londres, élevée par sa tante car sa mère est morte très jeune, tante qui tombera malade très vite et dont elle devra s’occuper jusqu’à la mort de celle-ci, lorsque Victoria aura quatorze ans. Victoria ne restera jamais seule, non. Et elle se souvient avec précision d’un épisode de son enfance (raconté dès la première page) où un jeune garçon blanc, l’ainé de la famille Staveney, a ressenti de la compassion à son égard. Le hasard fait bien (ou mal ?) les choses, elle rencontrera encore un membre de cette famille, des années plus tard…



Je n’ai pas réussi à ressentir une once de sensation positive ou négative. Peut-être est-ce dû à l’extrême brièveté du roman, probablement, oui. Les sentiments sont évoqués et expliqués de façon très juste, mais il me manque l’étoffe, le velours qui enrobe l’histoire. J’ai davantage l’impression de lire un exposé sociologique s’attachant à un point de vue, celui de Victoria qui à elle seule symbolise la condition féminine noire et pauvre.

Exposé très vrai et bien décrit au demeurant, mais ….



Voilà que je ne parviens pas non plus à trouver la dernière phrase de ma critique, celle qui devrait laisser un léger sillage (du moins c’est toujours ce que j’espère). J’en reste donc là.

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Les Grand-mères

Des grand-mères indignes diront les bien-pensants, des femmes libres affirmeront les esprits ouverts. En réalité ni l’un ni l’autre, car si les deux amies Roz et Lil sont plutôt des femmes égoïstes, se souciant de leurs belles-filles comme d’une guigne, assumant sans complexe les relations sexuelles qu’elles ont avec le fils l’une de l’autre, elles sont amoureuses. Des histoires d’amour, forcément sans avenir, auxquelles il faudra bien qu'elles donnent une fin.



Avec ce sujet sur les relations de femmes mûres avec des hommes jeunes, Doris Lessing inverse une situation largement admise dans les sociétés patriarcales et pointe l’injustice faite aux femmes. Sans faire de ses héroïnes des femmes sympathiques, elle les soumet implicitement à notre jugement moral pour que nous le remettions éventuellement en cause.



Une belle démonstration sur l’inégalité des hommes et des femmes qui souffre probablement de sa brièveté et de sa forme pour être tout à fait séduisante.

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Les Grand-mères

Il faut une certaine maturité à une femme, pour imaginer une histoire aussi inhabituelle. Doris Lessing, qui la portait en elle, sans doute depuis un moment, a attendu d'avoir 86 ans pour l'écrire. On trouve des quantités de romans avec des héros âgés aimant avec des fortunes diverses, un égoïsme certain, de très jeunes femmes, mais l'inverse est un sujet plutôt tabou, dans la société comme dans la littérature.

Deux amies, Roz et Lil élèvent quasiment seules leurs deux fils. Ian le fils de Lil devient l'amant de Roz, et Tom celui de Roz devient l'amant de Lil. Ces relations deviennent au fil du temps, des histoires d'amour sincères et profondes, mais sans issue, dans lesquelles, les femmes trouvent dans la douleur, et même un peu d'humour, la force de la rupture inévitable en déclarant simplement : " nous allons devenir des parangons de vertu ! " . Leur amitié peu commune les transcendent comme des "matriarches" , les piliers d'une famille dans laquelle les belles filles, plutôt effacées sont reléguées à des fonctions procréatives.

C'est avec un récit construit et sobre, que le grand auteur britannique nous parle de faux semblant, de la fuite du temps et du vieillissement.

De la grande littérature !









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Les Grand-mères



Ce court roman a été écrit vers la fin de la vie de Doris Lessing. Pour beaucoup, ce serait une œuvre à oublier de par son style et le thème abordé. Doris Lessing n’aurait-elle au contraire passé outre les attentes de son lectorat en publiant une œuvre volontairement provocante sur la place de la femme. Le texte interroge sur le jugement moral. Dans le cas présent, l’image habituelle de grand-mère est largement écornée. J’ai aimé la manière dont le thème est abordé : le texte est concis et surtout les relations entre les personnages le plus souvent suggérées.













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Le cinquième enfant

Etonnante Doris Lessing : voilà une oeuvre d'une très grande profondeur psychologique et sociale mais qui se lit comme un thriller, et tangente même les codes du fantastique.

"Le cinquième enfant" se dévore, mais, comme aux entrailles de sa mère lors de la gestation, il fait mal par où il passe.

Le roman s'ouvre pourtant sur la perspective d'une représentation on ne peut plus normée du bonheur : celle de la famille, qu'Harriet et David ont décidé de construire, nombreuse, très nombreuse, à rebours des moeurs qui se développent autour d'eux quand ils unissent leurs destin et mettent en oeuvre leur projet à la fin des années soixante. La grande maison, un enfant arrive, puis deux, puis quatre, la maison, épicentre de la félicité familiale, se remplit à chaque fête de la famille étendue.

Une fêlure, pourtant, dès le départ, que personne ne veut voir : Harriet, épuisée, ne peut se passer d'aide.

Puis arrive la cinquième grossesse. Là, le roman ne fait pas que basculer dans une tension irrésistible: il remet en cause tous les postulats de départ et questionne en profondeur le rapport à la normalité sociale, les fondements de l'amour maternel, et même l'essence de l'humanité.

Un exercice littéraire terrifiant et prodigieux!
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Le cinquième enfant

Harriet et David travaillent dans la même société, elle est graphiste et lui architecte. Ils s’aiment, décident de se marier et se promettent d’avoir beaucoup d’enfants.



Pour accueillir leur future grande famille, leur choix s’est arrêté sur une immense bâtisse dans la banlieue de Londres. Rapidement les grossesses se succèdent dans une maison joyeuse toujours pleine, les fêtes de famille réunissant les parents ainsi que frères et sœurs du couple, chacun attiré par l’harmonie qui y règne. La naissance de Ben, le cinquième enfant, arrivé trop vite après la dernière naissance, fait basculer la vie de tous dans un malaise aussi puissant qu’indéfinissable. Déclaré normal par les médecins, Ben ne ressemble pas à un bébé classique et allie une force inouïe à une grande violence, d’ailleurs sa mère ne peut s’empêcher de le comparer à un troll.



Ce roman n’est pas sans rappeler Rosemary’s baby, même si Ben n’est pas l’émanation du Diable comme dans la nouvelle d’Ira Levin, il transforme la vie familiale en enfer. Avec une tension allant crescendo, Le Cinquième Enfant nous plonge dans un monde d’autant plus effrayant qu’il est banal : celui des enfants inadaptés, mal acceptés dans une société conservatrice et individualiste où l’animalité de Ben, présente en tout homme, ne peut s'exprimer que par la violence. Une très belle fable de Doris Lessing sur le mythe de la famille parfaite.



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Les Carnets de Jane Somers, Tome 1 : Journa..

Je suis perplexe : j'ai apprécié ce roman journal intime, mais pas totalement, et j'ai quelques difficultés à démêler les bons des désagréables côtés du récit car bien sûr tout se tient et l'écriture est talentueuse.



Je m'explique. L'histoire, la forme, le style : pas de problème. C'est plutôt le personnage central du roman qui rédige à la première personne ce journal qui m'a dérangée.

Veuve sans enfants d'une cinquantaine d'années, Jane Somers dirige avec panache un magazine féminin londonien. Toute sa vie est centrée sur son travail et son apparence irréprochable : un modèle de femme active séduisante. Certes, elle vient de perdre son mari et sa mère, mais globalement ça va plutôt bien pour elle.

Puis, un jour, elle rencontre Maudie Fowler, une femme âgée de plus de 90 ans,

pauvre, malade, isolée, acariâtre, vivant dans des conditions d'hygiène déplorables.



Va naître alors au fil des visites de Jane à Maudie une amitié improbable. Jane s'investit de plus en plus dans le soutien matériel et affectif à Maudie, faisant ses courses, nettoyant son intérieur crasseux, allant jusqu'à prendre en charge la toilette de la vieille femme qui lutte contre sa propre décrépitude pour éviter le placement en hospice. Les hauts le cœur ne sont parfois pas très loin à la lecture de certains passages très réalistes et je l'admets décrit avec talent.

Mais, je n'ai marché qu'au ralenti, lu sans passion cette histoire.



Certes, Doris Lessing livre à son lecteur une analyse pertinente et sans concession de la vieillesse et son naufrage, mais l'attachement de cette quinqua ripolinée, brillante et pour tout dire égoïste reste assez peu probable pour moi, comme ça du jour au lendemain - comme si finalement elle jouait un rôle dans le roman, restait en marge, pour se faire pardonner une vie superficielle et une absence auprès des siens.

Le personnage de la vieille dame confrontée à son inexorable décrépitude est en revanche admirable de dignité, en lutte pour tenir coûte que coûte et préserver son indépendance le plus longtemps possible.



Au final, un roman fort sur l'amitié et surtout la vieillesse, mais je retiendrai cette distance vis à vis du personnage principal qui m'empêche de donner les 4 étoiles du roman qu'il faut lire sous peine de passer à côté de quelque chose d'intéressant, j'ajoute que je ne suis pas sûre de lire le tome 2.





Challenge Nobel 6/
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Les Grand-mères

Challenge Nobel 2013/2014



Roz et Lil sont deux amies d'enfance que rien ne sépare pas même le mariage, puisqu'elles l'ont célébré le même jour et habitent l'une en face de l'autre.

Enceinte au même moment, elles élèveront leur progéniture côte à côte, comme des frères jumeaux.

Les années passent. Le mari de Lil meurt dans un accident de voiture. Celui de Roz demande le divorce. Il lui reproche de se sentir exclu de leur relation et de l'éducation de son fils.

Mères et fils forment alors une famille fusionnelle à quatre jusqu'à ce qu'ils deviennent adolescents. Tout bascule après une relation sexuelle entre Roz et le fils de Lil et inversement entre le Lil et le fils de Roz.

Devenus amants, les deux hommes finiront par se marier avec deux filles de leur âge et élèveront leur enfants avec l'aide des grand-mères. Mais ces relations quasi incestueuses ne seront pas sans conséquence sur leur vie.



Premier livre que je lis de Doris Lessing est déjà happée par son écriture, par son sens de la psychologie. J'ai tout de suite remarqué le point de vue externe qu'elle emploie dans la narration. Ce regard sur ce quatuor fusionnel on le retrouve d'ailleurs dans celui de la serveuse du bar le "Baxter's" où ils viennent régulièrement. Elle envie leur bonheur, mais finalement elle s'aperçoit qu'il y a quelque-chose qui cloche dans leur relation, dans cette démonstration de perfection familiale.
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Les Grand-mères

Les grand-mères...

Comme celles que je n'aurais jamais voulu avoir.

Comme celles qui s'immiscent dans la moindre parcelle d'intimité de leur famille.

Comme celles qui refusent le bonheur des autres, indépendant du leur.

Comme celles qui manipulent avec talent les émotions de chacun.

Comme celles qui isolent ceux qu'elles aiment, telle une veuve noire.

Comme celles qui se déclarent indispensables.

Comme celles qui laissent leur égoïsme s'exposer au grand jour.

Comme celles que Doris Lessing a imaginées avec talent.



Cette lecture est dérangeante, désarmante, malsaine et étouffante.

Ce huis-clos m'a coupé les ailes et m'a parfois donné la migraine.

Rien que pour cela, je salue le talent de l'auteur et je ne suis pas étonnée qu'elle ait été récompensée d'un prix Nobel de littérature.



Un tout petit roman dont la force va laisser des traces dans la vie de toutes les belles filles opprimées par leur belle-mère, dans le quotidien de ces fils trop couvés et dans ma vie de lectrice passionnée par les émotions contrastées des relations humaines.
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Les Grand-mères

Court roman où l'on suit deux vieilles femmes, voisines, et leur amitié fusionnelle. Les deux auront des fils à la même date et les élèveront comme des jumeaux. Quand ils seront adolescent, chaque mère entamera une relation avec le fils de l'autre. Éventuellement, les fils partirons, iront faire leur vie, se marieront, auront des enfants.



C'est là que l'histoire commencent. Les femmes sont grands-mères maintenant. Plutôt détestables, d'ailleurs. Et les fils, belles-filles suspicieuses, et petits enfants viennent pour les vacances.



Tout cela forme un roman plutôt déconcertant où la Nobel de littérature (qui avait alors 86 ans) soulève plus de questions qu'elle n'en répond. Est-ce un roman féministe? Agiste? Toutes ces réponses? Je ne sais pas. Et je ne sais même pas si cette incertitude est la force ou la faiblesse du livre.
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