Ellen Richardson

Lizzie vous a raconté comment on s'est rencontrées ? J'étais tombée dans un grand trou plein de boue et elle m'a aidée à en sortir. Mes tongs n'ont pas survécu. Heureusement que je prévois toujours une paire de rechange - enfin, plutôt dix, pour être honnête.
Elle leva un pied aux ongles vernis, fin et élégant, dans une tong en plastique ornée de paillettes.

Le ridicule ne tue pas, lui rappela Sierra. Bien au contraire : il faut rire de soi-même au moins quinze fois par jour, sinon on se transforme ne vieux biscuit rassis et ça s'appelle être adulte.

Elle s'était liée d'amitié avec des baleines, avait découvert un trésor englouti, bravé un fantôme - ou en tout cas un phoque très curieux -, allumé un feu toute seule. Elle se sentait l'âme d'un héros !
Pourvu que sa tante voie les choses de la même façon...

-Tu es complètement cinglée!
- Comme tous les gens intéressants.

Lizzie s'élança en courant à l'assaut de la colline, son sac sur le dos. Le soleil allait bientôt se coucher, et elle était en retard pour la soirée pyjama dans la cabane de Tash.
C'était la faute de Céleste, une amie de sa tante en visite chez elles. Pendant le dîner, Tante Dina lui avait raconté que Sunday House serait hantée par le grand-père de Tash, le vieux Blake. Céleste était complètement obsédée parles fantômes. Elle avait passé le reste du repas à questionner Lizzie, allant jusqu'à la poursuivre dans le hall d'entrée alors qu'elle s'apprêtait à sortir.
Lizzie arriva bientôt devant le cimetière, où la tombe du vieux Blake, conformément à ses dernières volontés, n'avait jamais été refermée. Alors qu'elle longeait le mur, elle étouffa un cri.
Une silhouette immense aux épaules difformes et dépourvue de tête venait de surgir devant elle dans la pénombre. Lizzie retint son souffle. Cette chose ne pouvait pas être humaine... pourtant, elle avait des jambes. Et des pieds chaussés de tongs rose fluo. Une deuxième créature, en tongs violettes à paillettes, apparut à ses côtés avec un petit chien.
-Tash ! Sierra !
Mojo, le border terrier, se précipita vers Lizzie en aboyant comme un fou.
- Pfiou ! souffla Sierra en laissant tomber par terre les énormes cartons qu'elle transportait. Espèce de lâcheuse, tu étais censée nous aider à installer tout ça dans la cabane ! Qu'est-ce que tu fabriquais ?
- Il s'est passé quelque chose ? demanda Tash en se délestant de son chargement avec plus de précautions. Tu as l'air contrariée.
Lizzie soupira.
- Une copine de Tante Dina est venue passer quelques jours à la maison. Et elle est un peu...
Elle se reprit, ne voulant pas critiquer Céleste devant ses amies.
- Enfin... elle voulait bavarder et elle m'a mise en retard.
- Ouah ! s'exclama Sierra. Tu as survécu au syndrome de l'invitée-ennuyeuse-à-mourir ? Félicitations ! Pour la peine, je te pardonne.
- Tu arrives pile à temps pour nous aider, fit Tash avant de lui tendre un carton.
- Qu'est-ce qu'il y a, là-dedans ? Ça pèse une tonne ! protesta Lizzie.
- Tu le sauras bientôt... répondit Tash d'une voix mystérieuse.

- Allez, les filles, une dernière fois ! lança Sierra, son iPod à la main.
Lizzie soupira en entendant les accords de basse et le boum boum boum de la batterie. Même si elle adorait «Toutes ensemble», le dernier tube des Sparks, elle n'en pouvait plus. Elle avait la gorge douloureuse et les jambes en coton à force de chanter et danser.
- Pitié ! gémit Tash avant de se laisser tomber sur le lit. Ça fait des heures que tu dis «une dernière fois»...
- Moi aussi, j'ai besoin d'une pause, avoua Lizzie en s'affalant sur le sol de la chambre, où Tash avait poussé ses affaires pour qu'elles puissent répéter. Mon cerveau et mes jambes ont cessé de communiquer.
- Franchement, vous ne faites aucun effort ! ronchonna Sierra. Tash, tu te débrouilles pas mal avec le chant, mais il faut vraiment que tu retiennes la choré, sinon on ne gagnera jamais Stars de demain !
- C'est facile pour toi ! Tu danses hyper bien. Moi, mon truc, c'est plutôt le surf et la voile. Je suis trop nulle sur une piste.
- Mais non, tu n'es pas nulle, la rassura Lizzie. Tu es juste fatiguée.
Elle savait combien Sierra rêvait de remporter le concours de jeunes talents et de se produire sur la scène du festival de Sunday Island. Heureusement, elle venait d'avoir une idée géniale pour la convaincre de les laisser souffler.
- Dites, je meurs de faim ! Pas toi, Sierra ? l'interrogea Lizzie.
- Pfff, tu ne m'auras pas comme ça ! Même si je suis une goinfre, certaines choses passent avant la nourriture. Enfin, parfois.
- D'accord. Dans ce cas, je vais devoir rapporter les cookies façon pain d'épices que Tante Dina avait préparés. Espérons qu'elle ne se vexe pas.
Sierra prit un air rêveur.
- Façon pain d'épices ? Tu veux dire caramélisés à l'extérieur et fondants à l'intérieur ? Où sont-ils ?