Reprenons les mises en garde de Pierre Nora : "La nation elle-même est tout entière une représentation. Ni un régime, ni une politique, ni une doctrine, ni une culture, mais le cadre de toutes leurs expressions..." Si la nation s'affirme comme le résultat d'une construction, d'une élaboration, d'une édification, il faut bien convenir que l'aventure bourguignonne a manqué assurément de matériaux et de temps pour en assurer le chantier. Se considérant avant tout comme des princes des fleurs de lys, jusqu'à Charles le Téméraire, les ducs n'avaient certainement pas le désir de tendre vers un esprit national unificateur en marge du royaume de France. Inscrits dans une pyramide vassalique qui faisait de leurs seigneurs des sujets du roi de France, ou des vassaux impériaux, les hommes de la Bourgogne ducale ou de Franche-Comté, n'avaient pas à coeur de s'unir dans une entité politique à part entière.
p. 343
Cette histoire des transfuges et des fidélités fragiles à la cour de Bourgogne démontre que l’État souverain s’appuyant sur une nation n’est pas la forme ultime de gouvernance pour un certain nombre d’hommes. Certains n’ont d’autre ambition que de garantir leur salut à la fontaine d’honneurs royale, d’autres préfèrent s’en éloigner pour faire perdurer un monde où les relations contractuelles s’imposent et où le pouvoir se partage.