Citations de Elvire Murail (267)
"_Je suppose qu'il y a un lien entre la roue à brandons, remarqua Chacha.
_Bien sût ! Henri avait des plaisirs simples : il se réjouissait de voir des enfants brûlés vifs devant ses fenêtres. C'est là que l'histoire, si elle est vraie, prend un tour encore plus sinistre. Il n'y avait pas que des enfants accusés de sorcellerie qui passaient de vie à trépas. Il y en avait aussi qui disparaissaient mystérieusement. Leurs corps calcinés réapparaissaient parfois flottant dans la rivière. On a soupçonné Henri, mais ça s'est arrêté là. Il n'y eut jamais d'enquête. L'argent achète les consciences..."
" Car comment accepter que des parents aient pu sacrifier leurs propres enfants sans y voir l'intervention du diable ? Il est peut être rassurant de penser que les hommes ne sont pas les seuls coupables de leurs pires actions. Nous devrions pourtant admettre que nous sommes les créateurs du mal que nous causons. Le diable a bon dos, parfois..."
" S'occuper de Lubin, c'était comme gravir une montagne à la force du poignet. Un brin fatigant."
" C'était juste pour te demander si tu voulais des pâtes, des nouilles ou des spaghettis pour le déjeuner !"
" Tu sais ce que signifie Lubin ? "Petit loup", Maxime, ça veut dire " le plus grand". Moi grand. Toi, petit. Pigé ?"
C'est fou ce que les conversations qu'on a avec soi-même peuvent être dénuées de tout intérêt et de tout sens logique.
(p. 31)
"Lubin était réduit à faire ses devoirs pour se distraire. C'est dire la profondeur de son désespoir."
"_Ce n'est pas parce qu'on a dix ans qu'on n'a pas de problèmes."
"Mais toi, qu'est-ce que tu en penses?
"Je pense que vous êtes une tordue avec un nom ridicule."
La psychologue resta bouche bée.
"Vous voulez que je développe ?" proposa Malo.
Mlle Crapatte ne souhaita pas le revoir;"
Ce matin-là, j'aurais tout foutu par la fenêtre si j'avais pu. Au-dessus, Rachmaninov jouait l'opus quatre cents décibels, à côté Sparks et Beatrix s'écorchaient vifs, environ cinq cents décibels et en dessous un gosse hurlait pour se faire entendre dans le tintamarre avec la mère en sus : j'allais devenir sourd dans la minute qui suivait. Je sortis sur le palier en poussant moi-même une gueulante, histoire de ne pas être en reste.
(p. 57)
"Lubin détourna le regard. Elle était trop belle, cette fille, ça faisait mal aux yeux."
Il faut observer une chose avec beaucoup d'attention pour découvrir sa vérité cachée.
- Vous portez toujours des pantalons ?
- Ça vous embête, hein ? Si j'avais des jupes, vous pourriez passer votre main dessous.
- Je ne suis pas sûr d'en avoir envie.
- Allons donc ! Osez dire que vous ne vous intéressez pas à mon cul !
- J'ai horreur de la vulgarité chez les femmes.
- J'en suis persuadée. En tout cas, vous ne me ferez jamais croire que vous êtes venu ici pour regarder mes toiles.
- Pourquoi m'y avoir invité, alors ?
- Je n'ai jamais dit que je ne voulais pas baiser avec vous.
- Ah ! Je vous plais ?
- Oh que non !
- Pourquoi faire l'amour dans ce cas ?
- Parce que je veux savoir COMMENT vous baisez. Ça m'intéresse.
- C'est une drôle d'idée ! Quelle est la place du plaisir là-dedans ?
- On verra bien.
- Je ne veux pas de vous, merci.
- Je ne vous crois pas. D'ailleurs, je vais me déshabiller, ça m'étonnerait que ça ne vous tente pas, à la longue.
Quand papa avait ramené le chien de la SPA, Marie-Beth avait voulu le baptiser Rémi. On lui avait répondu que ce n'était pas un nom de chien. Elle l'avait donc appelé Sido.
[Elle a] "un oeil qui regarde le ciel et un oeil qui regarde les pâquerettes".
Camilia rêvait. C'était son rêve préféré, celui auquel elle pensait très fort avant de s'endormir en espérant qu'il reviendrait, une fois encore, durant la nuit.
Les navets, les épinards et les haricots verts ne sont pas infects. Ce qui est dégoûtant, c'est de jeter la nourriture. C'est une insulte envers tout ceux qui n'ont pas les moyens de s'en offrir, du gratin de chou-fleur.
A force de mettre le diable à toutes les sauces, on finit par le voir dans sa cuisine.
(p 132)
Camilia fila à toute vitesse. Elle craignait d'autres questions. Il lui parut évident que M. Sam s'interrogeait, lui aussi, sur les événements récents. Et qui sait ? Peut-être avait-il vu les Ombres. Il fallait qu'elle trouve Gall pour lui raconter cette histoire de points telluriques. C'était la clé, elle en était persuadée. Mais que se passerait-il à Samain ? Les vacances les éloigneraient de la pension. Ils devaient rester. Camilia aurait eu du mal à expliquer pourquoi, elle avait le sentiment qu'ils devaient attendre l'ouverture de la porte. Peut-être pour renvoyer les Ombres d'où elles venaient. Ou alors... Une idée encore informe, comme une boule de magma en fusion, se mit à tourner dans sa tête. Quelqu'un essayait de lui parler, là, à l'intérieur d'elle-même. Les mots n'étaient pas exprimés, l'idée était inaccessible. Et pourtant... Il lui vint, comme un choc, que seule l'ouverture de la Porte lui rendrait compréhensible cette voix qui cherchait à l'atteindre.
Comment pouvais-je venir en aide à Joss Hardy ? Il y avait de fortes chances qu'il oublie mon intervention, et en tout cas ce qu'il m'avait dévoilé. Il valait mieux que j'efface de ma mémoire les paroles dérisoires d'un misérable poivrot. Oui, retourner dans mon confort individualiste, rayer de mes pensées les problèmes des autres, comme tout le monde, comme toujours... Après tout, qui me tend la main, à moi ? Pourquoi aiderais-je ceux qui ne font rien pour moi ?
(p. 72-73)