Le geste d'écrire, qui n'a pas été et n'est pas davantage un acte spontané ou naturel, implique une lutte sans cesse recommencée et renouvelée avec la langue. Comment expliquer le sentiment, la sensation presque physique, d'aborder une langue difficile, qui résiste à venir spontanément et d'abondance ? J'essaie de nommer ce qui arrive régulièrement qui ne ressemble pas tant à une absence de disposition, plutôt à l'infinie nécessité d'être fidèle à ma pensée, envers et contre tout.
Il était une fois dans la diarrhée du temps qui n'avance ni ne recule une masse infâme nommée Bloody Mary qui à peine née fut livrée à un carrefour où jamais personne ne s'aventurait. Forêt, dédale, labyrinthe, trachée-artère. C'est un lieu mental : sans petit poucet, sans prince charmant. Pour Œdipe aux pieds enflés un berger royal. Pour Bloody Mary dehors dedans le rouge sur toutes surfaces. Les yeux rougis. Comme j'ai pleuré quand j'ai dit ma demande. On a sucé Bloody Mary.
J'ai tenté une définition de l'écriture au féminin. Cette écriture propose l'émergence du sujet-femme dans un langage conscient du fait que la langue patriarcale rend souvent invisible le féminin.
Je suis touchée et tendue par leur aptitude au malheur. L'un et l'autre nous transmettent leur disposition à déclencher le drame, à le fabriquer de toutes pièces. (p. 37)
"Les abandons n'ont pas de fin."
J'affirme alors que je ne quête pas une identité mais une nouvelle subjectivité.
Ce qui va sans discontinuer
façon multidirectionnelle –
conduit hors de soi.
J'ai refusé d'être une victime de ma naissance. ( p.131)
N'importe quelle autorité représente la loi et la loi n'a qu'un but, punir. (p.100)
L'argent est l'indice réel de l'intelligence. (p. 73)