Le mythe de sainte Geneviève vu par François Esperet (France 2, 2020)
Un extrait audio de l'émission "Le Jour du Seigneur", par David Millait et Adrien Soland, diffusée le 20 décembre 2020. Invité : François Esperet.
je sens leur souffle idiot de leurs naseaux camés
je vois leurs yeux aveugles se noyer en souriant
dans l'effondrement des paupières et des cernes
au fond boueux exsangue de leurs tristes orbites
quelle différence entre le bijoutier et moi je suis
plus talentueux que lui c'est une histoire de don de Dieu
je travaille à la fois moins mieux et plus vite que lui
ce qu'il met des années à amasser en quelques instants
je lui dérobe sans insulte et sans violence avec art
oui un artiste voilà ce que je suis
À Franck adolescent le daron chassé de race a remis dans le sang son héritage il y a six ans
le daron rigolait bien ricard en main quand un flingue est venu lui cracher son venin dans la nuque
le ricard aujourd’hui le pain blanc de ce jour anisait son palais colonial avant la nuit bénie
le flingue un pistolet de schmitt enlevé deux ans plus tôt par des gitans sur un barrage
le pistolet puceau numéroté noir automate issu de la manufacture à Saint-Étienne
le schmitt adjudant ventru lassé des lois les yeux pochés d’ennui la main mal assurée
les gitans coupables en rentrant d’un périple étaient venus tous phares éteints percuter
le barrage halte à la sortie d’un bled herse et fusil gendarmerie flingue arraché s’étaient enfuis
le venin trois ogives enfoncées dans la moelle épinière étuis laissés négligemment par terre
la nuque herculéenne en sa raideur était comme un défi lancé de dos rien à foutre à ses ennemis
la race est faubourienne et trafique à Paris sous les guerres et la paix de sa gouaille éternelle
le faubourg après-guerre a glissé jusqu’aux portes et puis fait sécession de Malakoff à Charenton
la sécession du Val-de-Marne et son armée confédérée de généraux dixie la banlieue sud
les généraux vainqueurs à vingt ans se fêtent et puis soudain défaits se perdent à la Santé
Paris tapin d’éternité les millions de clients qui t’habitent et te baisent à prélever d’autorité
les guerres offrande à l’occupant de chair à dragonnade au bras des assassins nos filles
la paix répudier les aînées tonsurées solder les minous blonds des vierges aux soldats nègres
la gouaille avaler des filles au bal un mois plus tard enamourées les recracher sur le trottoir
On peut travailler sans semer des veuves et des mères éplorées le long des routes
l'imagination parfois s'échappe en égrainant son chapelet quand j'irai crever au fond d'un terrier
le chapelet des rêves avides et des regrets repus se prie un peu sans façon un clochard fripon
la prière en devançant chaque impression le verbe en procession portera la croix selon les usages
la procession de tous les noms qu'on m'a donnés m'escorte en cet équipage j'irai du pied droit
l'avenir entend mon pas quand je tapine et puis m'appelle rose des bois par-ci rose des bois par-là
le pas qui m'emmène à la tombe en tambourinant des talons pour tout héritage je laisse aux soldats
les talons mes tuteurs ont soutenu toujours intransigeants la peau de mes tatouages et mes badinages
Vous vous souvenez que les seules personnes dans l'Évangile auxquelles Jésus promet la condamnation éternelle ne sont pas celles qui ont commis le mal mais celles qui ont omis de faire le bien. Ne pas faire le bien quand nous devons le faire, le faire peu quand nous devons le faire beaucoup, le faire relativement quand nous devons le faire absolument, le faire de mauvaise grâce quand nous devons le faire de bonne grâce, voilà ce qui, en un sens, est plus grave que de faire le mal (page 80).
La pureté est le libre choix de ce qui est profitable au milieu de ce qui est permis (page 189).
l'avenir un septième jour adviendra mon bien-aimé je suis la femme éternelle