Les bienfaits de la scolarisation n'étaient au reste pas si évidents pour les filles que pour les garçons. Ceux-ci étaient appelés à exercer un métier, à communiquer l'extérieur, tandis que leurs sœurs étaient vouées à la maison et aux travaux domestiques. Il a, d'autre part, fallu attendre la loi de 1867 pour que les institutrices laïques puissent obtenir la garantie d'un traitement minimal. Dans beaucoup de régions rurales, moins payées que les domestiques, ces institutrices étaient isolées dans leur pauvreté et surveillées de telle manière que le sort de la religieuse apparaissait enviable à côté du leur : condamnées par l'opinion au célibat, elles devaient arborer une tenue et un comportement aussi austère qu'irréprochable. La tentation était donc grande pour une part d'entre elles d'aller en ville où, comme institutrices libres ou sous maîtresses pensionnat, elles pouvaient s'échapper à cette pression permanente et connaître une rémunération moins chiche.
Lorsqu'un ouvrage du siècle dernier* traite d'éducation, sans plus de précisions, c'est en général des garçons qu'il s'agit. Beaucoup de livres de pédagogie sont rédigés de telle sorte qu'on pourrait croire que les filles n'existent pas. L'élève n'est pas abstrait pour autant : il est masculin, voilà tout.
* XIXème siècle
Il se poursuit sans rupture un mouvement nettement antérieur au XIXe siècle pour beaucoup de régions, qui mène les Français de la culture orale à la culture écrite par le moyen de l'alphabétisation. Celle-ci est terminée à peu près en 1900, et pour sa plus grande partie grâce à l'école.
Au début du 19ème siècle, l'enseignement secondaire des garçons était déjà l’héritier d'un long passé. Le sentiment qu'un enseignement supérieur à l'école élémentaire était dû aussi aux filles fut, en revanche, lent à se diffuser.
L'"ignorance" au XVI° siècle n'est pas tant l'analphabétisme que la méconnaissance des vérités de la religion et la barbarie à laquelle sont voués ceux qui ne connaissent pas les lois morales.
L'image du petit enfant abandonné au "tour" d'un hospice répugne au XIXe siècle français. Le décret de 1811 prescrit aux hospices d'en ouvrir un, mais beaucoup ont refusé. Les tours, là où ils existaient, sont remplacés par des bureaux d'admission, qui promettent le secret le plus total.