Mon ami Elliot et moi, dix ans, nous sommes les héros de notre vie, et personne ne nous prendra notre place. Elliot le dit et je le crois. Certains aiment prendre en main la vie des autres pour se sentir supérieurs et utiles, mais personne ne parviendra à prendre la nôtre. Notre vie, c'est nous qui la dirigeons.
Dans ma vie, « punition » est un nom féminin qui signifie : « Oscar, range ta chambre ! »
Parfois, on se demande dans la vie pourquoi on réagit de telle ou telle manière, mais on ne se rend pas compte qu'on est simplement influencé par ceux qui se trouvent au-dessus de nous dans l'arbre généalogique.
– Et la vérité est dans le grille-pain.
C’est ce que Monique, la locataire du rez-de-chaussée, répète tous les matins. Elle ajoute :
– On peut avoir envie de sauter d’un pont, ce n’est pas pour cela qu’on le fait. Moi, je veux faire du saut en longueur, je ne sais pas où en faire parce qu’il faut du sable. Quand on n’a pas de sable sous les pieds, on ne saute pas.
Puis elle avale une tartine. Penchée à sa fenêtre, elle désigne régulièrement une saleté sur le pare-brise d’une voiture garée.
– Tu la vois, là ? Un peu plus grosse qu’un point à la fin d’une phrase ? Eh bien, dans l’Univers, Oscar, nous sommes aussi gros que cela.
Je trie les habits mouillés, les disperse, les jette au loin à grands coups de gifles que j’aimerais me donner. Ma tête fonce à l’intérieur du tambour, rien. Je suis un boulet de canon crevé. Ou le contraire. Ma joie irradie. C’est mon habitude : il ne me faut que quelques secondes pour virer du tout au tout. Je suis inconstant, ma mère me traite de bipolaire. Je raffole de ce nom car, lorsqu’elle le prononce, j’ai tendance à croire que je suis deux fois un ours blanc.
D'habitude, à la maison, personne ne me parle vraiment. Je n'attire pas l'attention. C'est logique : je suis poli, j'aime ce qu'on me prépare à manger, je regarde à la télévision ce que les autres regardent, je reste muet le plus souvent possible pour qu'on me laisse tranquille. Ce n'est pas que je cherche à ne pas exister aux yeux de mes parents : c'est que mes parents, de toute façon, ne me voient pas...
Pourquoi Ludivine passe-t-elle son temps avec cette fille? D'accord, Bashia peut parfois être sympathique, mais autant je pourrais être ami avec un morceau de carton ou un sac en plastique, autant, avec elle, jamais. Elle a des antécédents sérieux dans sa famille, son cousin est meurtrier, il a avalé des poissons rouges vivants. Je me méfie.
"Je suis piégé. Mes oreilles bourdonnent comme le tambour d'une machine à laver. Je sens en moi le vide intersidéral qui enveloppe Jack et son vaisseau dans Galaxie 2071. C'est glacial. Pourquoi suis-je toujours interrogé lorsque je ne connais pas la réponse? Soit je suis maudit, soit mon destin est pourri."
Fiche signalétique de ma mère.
Prénom : Hélène.
Age : trente-cinq ans.
Métier : sans.
Elle aime : son fils.
Elle n'aime pas : moi.
Cette fiche, ça m'évite de devoir trop parler d'elle et c'est bien.
(p. 11)
J'étais vraiment devenu "Quelque Chose" : j'étais le garçon qui avait changé depuis que sa mère l'avait comparé au Minotaure.