Il y a des temps nécessaires où être assis au sombre de la forêt ne peut pas se dire avec des mots.
Il y a aussi un temps pour se mettre debout, pénétrer l'obscurité et marcher sur les sentiers qui cheminent le creux de l'être.
je dois dire qu'il y a aujourd'hui beaucoup de livre où on plaque un truc haletant, un suspense, un appât, mais où on n'a pas fait ce travail , qui est toujours à faire, de la singularité de l'écriture. (p 29)
- Le petit chapeau du mot brûler, c’est comme un toit pour me protéger !
Où sont les mots ? Où restent les mots ? Où sont les mots ?
Non pas de cris, tu ne cries pas tu ne cries pas.
Que reste-t-il de la nuit ? Quelques heures.
Des mots non dits. Son histoire cachée.
Elle rentre telle une péniche qui atterrit dans l’univers de l’ombre.
Sa nuit recèle un secret.
Laisser le temps effacer de son disque dur la férocité. Laisser le temps effacer le souffle laid qui courts dans ses os. Ce morceau d’histoire bien réel qui ne s’évapore pas. Qui résiste à ses nouvelles mémoires.
« Avec le temps, pense-t-elle, les choses devraient se tapir, peut-être s'oublier. C'est ce qu'elle espère, mettre le chagrin au fond d'une poche, en coudre les bords et enfermer le vêtement dans un placard aux lourdes poches. »
Lorsqu’elle sort de l’immeuble, la pluie aboie sa soif de la rajeunir de quelques milliers d’années. Ses crépitements tigrent la danse de ses hanches, et l’odeur du ciel fanfaronne comme un essaim d’abeilles.
Notre peur de souffrir contribue irrémédiablement à notre souffrance. Mais comment parler de cela à quelqu'un qui souffre à ce point ?
Comment vais-je me réconcilier ? demande Abeille. Je suis devenue une femme cabossée. Je m’en veux de ne pas avoir crié, de ne pas avoir été au bureau de police.
Souillure.
Viol.
Cheyenne prend Abeille dans ses bras.
- Je m’en veux de me sentir sale. Je me sens coupable de ne plus m’aimer
pour lire le braille avec plus de précision, on déplace les doigts verticalement plutôt qu'horizontalement, les récepteurs sont plus sensibles quand on les déplace dans ce sens. Les doigts se meuvent avec précision lorsque le corps a appris, lorsqu'il a pris la mémoire du chemin de lecture.