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Critiques de Georges Duby (141)
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Histoire de France Hachette, tome 1 : Le Mo..

Ce n'est pas le meilleur ouvrage qu'ait produit Georges Duby. On est loin de ses réflexions sur l'art, sur la société médiévale, sur la hiérarchie sociale, sur le rôle du prêtre et du chevalier, sur l'imaginaire de la féodalité, sur la place de la femme en société ou sur la lecture et la contextualisation qu'il fait de la bataille de Bouvines, par exemple.

En comparaison ce livre sur Le Moyen-Âge, 987-1460, publié dans le cadre d'une collection sur l'Histoire de France, paraît plutôt banal, et il l'est d'autant plus quand on lui oppose des travaux comparables écrits par d'autres historiens sur le même sujet. On a l'impression ici d'un manque d'originalité, et Georges Duby ne nous apporte rien que nous ne sachions déjà, surtout de nos jours.

Tout y est dit de l'essentiel, d'Hugues Capet à Charles VII, mais on l'avait dit avant Duby. Aussi, même si la lecture est agréable, elle n'apporte pas ce que l'on penserait pouvoir attendre de cet immense auteur. On voit bien que Georges Duby, qui appartenait à la lignée des historiens formés à l'esprit de l'école des Annales, était peu fait pour l'histoire conventionnelle et qu'il n'y montrait pas les mêmes qualités que celles qu'il développait quand il écrivait ses grands ouvrages universitaires ou ses écrits sur l'histoire de l'art.

Reste, bien sûr, que l'on a plaisir à parcourir les pages de l'Histoire de France médiévale vues à travers les yeux de ce grand spécialiste du Moyen Âge.



François Sarindar

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Les trois ordres ou l'imaginaire du féodalisme

Ils sont trois à s'être questionnés sur un phénomène qui leur a servi à cerner sous des angles différents ce que l'on a appelé le féodalisme : Ganshof pour répondre à la question, qu'est-ce que la féodalité ? Bloch pour analyser les structures de la société féodale et enfin Duby pour explorer un imaginaire qui a permis lentement à cette société médiévale occidentale de s'auto-analyser, de s'accepter et de se définir, ce qui n'allait pas de soi, car la réalité d'une structuration ne se mesure qu'après sa mise en place dans les faits avant même qu'on ne puisse se mettre à l'étudier. C'est pourquoi la construction de la société médiévale en trois ordres - clergé (qui prie et rapporte les choses aux fins dernières), noblesse (qui a fonction théoriquement de combattre donc de défendre, mais quoi et qui en réalité ?) et travailleurs (qui ont pour principale obligation et raison d'être de nourrir et de créer les objets du quotidien à la force de leurs mains pour le bien de tous mais qui ont besoin pour cela de conditions optimales de paix, ce qui n'est pas forcément facile à obtenir vu leur position d'inférieurs par rapport aux deux autres ordres) est d'abord réalité avant de devenir vision de soi globale, plus ou moins bien acceptée et partagée. La difficulté vient de ce que les deux ordres qui détiennent le pouvoir : ceux qui prient et ceux qui combattent, ne partagent pas forcément les mêmes intérêts, les mêmes priorités et la même vision des choses. C'est toute la problématique abordée et adoptée par Georges Duby qui constate que c'est dans la France du nord que cette conscience de la fragmentation de la société en trois ordres distincts et concurrents mais complémentaires et indissociables s'est forgée dans cette aire géographique aux XIe et XIIe siècles, et qu'elle a intégré les nécessaires et inévitables évolutions que les rapports de force entre noblesse, clergé et tiers État (lui-même fracturé entre bourgeois, artisans,populations rurales libres ou asservies, etc.) ont pu susciter à tous les niveaux et à tous les instants. Tantôt les faits ont favorisé une classe plutôt qu'une autre, à tel ou tel moment, mais ces trois ordres ont finalement fonctionné pendant plusieurs siècles tantôt en tension et tantôt en alliances circonstancielles, selon les situations économiques et sociales et les intérêts propres à chaque catégorie, le pouvoir spirituel et le pouvoir temporel se disputant la primauté sur tous les autres et faisant quand même alliance entre eux pour maintenir, tant bien que mal, leur férule sur le troisième ordre, tantôt obéissant et tantôt grondant, le tout fonctionnant tant bien que mal jusqu'à la Révolution.

D'où la difficulté conceptuelle globale à se reconnaître dans pareille division d'état et de fonctionnement hiérarchique d'une société, où tout vient encore se compliquer du fait des différences existant entre les sexes



François Sarindar
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La Chevalerie

Je ne vous ferai pas l'affront de vous présenter Georges Duby. Dans ce très bel ouvrage, il s'adresse aux jeunes afin de leur expliquer ce monde un peu complexe qu'est la chevalerie. Il va alors se faire conteur et dérouler tel un parchemin l'histoire d'Arnoul de Guînes, de son enfance à l'adoubement, de son mariage à la bataille de Bouvines. Ses propos sont étayés par de magnifiques illustrations d'Olivier-Marc Nadel et, lorsque cela est possible, de photographies mettant en relief ce qu'il nous reste aujourd'hui.



Pour intéresser les jeunes (et les moins jeunes, ne boudons pas notre plaisir...), ce spécialiste du monde médiéval emploie le tutoiement. On a l'impression qu'un documentaire se déroule sous nos yeux. D'ailleurs, c'est le but recherché. En effet, l'auteur note dans sa préface : "Je t'emmène. Nous partons à l'aventure. Un peu comme ces explorateurs qui essayent d'entrer en contact avec des tribus encore inconnues. ce que nous cherchons, nous aussi, ce sont des hommes, les chevaliers. Nous voulons savoir comment ils ont vécu, ce qu'ils pensaient, et ce n'est pas facile.

En effet, nous devons nous enfoncer, non pas dans des forêts impénétrables comme les explorateurs, mais à travers les siècles."



On apprend beaucoup grâce à ce livre. Georges Duby a fait le choix de suivre un personnage historique à travers les écrits de Lambert, le prêtre qui célébrait la messe dans le château de la famille d'Arnoul. Mais il précise également, par honnêteté, que le récit de ce personnage étant très court, il est obligé d'aller chercher ailleurs afin de faire évoluer son personnage et d'arriver à enseigner quelque chose : il puisera donc dans d'autres textes (et notamment dans l'Histoire de Guillaume le Maréchal) mais aussi dans l'archéologie. En tous les cas, le pari de faire découvrir le monde médiéval est tenu !



Je laisse le mot de la fin à l'auteur lui-même : "Je te préviens : l'historien de ces époques lointaines avance à l'aveuglette, et certaines de nos interrogations resteront toujours sans réponse".
Lien : http://www.lydiabonnaventure..
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L'économie rurale et la vie des campagnes dan..

L’occident chrétien au moyen-âge ( sur cinq siècles ) ...



En vérité je vous le dit , laissez-vous pénétrer par l’esprit de l’époque . Mais , mes amis , mes compères , en vérité je vous le dis , le christianisme médiéval n’a encore jamais fait de dégâts cérébraux à ce jours , or donc , si même d’aventure vous êtes marxistes orthodoxes , à tendances agnostiques néo contemporaines , post révolutionnaires petite bourgeoise coco nid , d’obédience végétarienne . Et bien messires et gentilles dames entendez l’opus dei et n’ayez crainte car hier comme huis , les voyes du seigneur sont toujours impénétrables .



Si on veut un texte excellent qui soit solidement documentée et agréablement écrit sur l’occident médiéval , c’est Duby qu’il vous faut . Il ne faut donc pas hésiter à « farfouiller « dans sa bibliographie .

L’OCCIDENT MEDIEVAL : possède certaines caractéristiques fondamentales : Il est chrétien , il est occidental , il est principalement rural , il connaît une renaissance urbaine .



Je tiens ici à préciser que le christianisme médiéval occidental est pour moi un brillant trait de civilisation . De ce fait je tiens à dire aussi , que c’est avec grand plaisir que j’explore depuis longtemps cet élan religieux et fabuleux qui est fondamentalement à l’origine de la renaissance de la civilisation occidentale , qui la pauvre revenait de bien loin en ramant comme une forcenée ...



De ce fait encore , je tiens à témoigner personnellement de ce que cet aspect chrétien de l’univers médiéval ne m’a jamais , comme le disait mon grand-père sur d’autres sujets : « jamais fait un deuxième trou du cul « , passez-moi l’expression , merci .... J’espère qu’il en sera de même pour vous et si cependant , c’était le cas il faudrait d’urgence se présenter aux services vétérinaires qui sont largement à votre disposition , mais normalement tout devrait bien se passer , mais allez-y les vétos sont là sinon ! .



Ça va ? Toujours intéressé par les preux chevaliers et par la dame à La Licorne ?

Non sinon , Je vous dis cela parce que si vous êtes incapable de respecter viscéralement le caractère chrétien de cette civilisation , et bien faite plutôt du tricot ...



Bon : Deux tomes denses , bien écris qui feront de vous des médiévistes certifiés , enfin j’exagère mais presque à peine .

L’ouvrage ( en deux tomes ) considère l’économie rurale sur une période qui va du IX e siècle au XIV e siècle et il couvre l’Europe du Saint Empire Romain Germanique , France , Angleterre et des bouts d’Espagne et du Benelux ....



Il conduit le lecteur des « sommets « de la renaissance carolingiennes aux affres des grandes pestes ravageuses du XIV e siècle . Ce monde rural est passée au peigne fin selon un canevas unitaire qui n’empêche pas néanmoins de faire ressortir des spécificités locales dans le cheminement ou on passe de la villa gallo-romaines ou du vicus paysan à la seigneurie foncière ou au vicus libre .



L’ouvrage permet de déterminer les densités de peuplement , les rendements , les structures de la propriété foncière , la mise en place des structures politiques feudataires banales et celle de la privatisation du pouvoir régalien , avec la mise en place et la théorisation de la seigneurie banale , et féodale et de la seigneurie foncière avec les exceptions ,comme les alleux libres ( nobiliaires ou vicus paysans ) et la mise en place progressive d’un certain enfermement social malgré une amélioration des standards de vie ( ce point étant fluctuant néanmoins ) .



Le droits écrit , la coutume , les taxes ( tonlieux , tailles et pontenages , dimes , taxes spécifiques ) , églises privées , église abbatiales et monastiques affranchies de toutes tutelles politiques et elles même potentats politiques progressivement . L’étendue maximum des horizons ruraux ( espaces connus , utiles et parcourus à pieds et en charrois et chevaux et ânes ) , les bourgs seigneuriaux et les bourgs ecclésiastiques , la renaissance des techniques agricoles , ( terrois ) , les outils de fer , l’attelage , la naissance des communes et la renaissance des villes libres ou non ...



Ces deux tomes sont prodigieux de maitrise , le premier porte sur le neuvième siècle , le deuxième traite de l’élan expansionniste rural et de la mise en place du monde plein . Avec la création de champs et de forêts domaniales , des villages des églises , des chemins , des villes ...

L’amélioration des rendements , et des qualités de vie est certains , mais se développe un enfermement social se met en place , mais c’est très progressifs et de toute façon les cartes sont redistribuées au XIV siècle , mais antérieurement c’est l'essartage qui vient aussi adoucir les conditions des plus pauvres .



La renaissance de l’écrit est un fait majeurs ( une constante médiévale ) , le retour aux arts appliqués antiques , la redécouverte de l’extérieur au monde occidental : islam , Afrique du nord , Byzance , élan architectural roman abondant et religieux , et aussi élan d’ architecture privée en pierre ...



Je reproche cependant à cet ouvrage de sous-estimer très nettement la conservation urbaine en Europe du haut moyen-âge au XIe siècle ...

Mais le lecteur acquière ici indiscutablement une connaissance standardisée et approfondie des campagnes européennes sur cinq siècles et c’est aussi incroyablement possible que c’est agréable et motivant ....



Ce que ce texte a d’exemplaire , c’est l’égard qu’il a pour les sources et pensez toujours que l’histoire .... c’est les sources ....

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Petit atlas historique

Voici un petit livre vraiment très bien fait et qui donne une vision particulièrement intéressante de l'histoire (350 pages tout de même, mais dans un format très pratique et pas trop lourd).

Je le trouve très comparable à l'excellente émission de Jean-Christophe Victor intitulée Le Dessous Des Cartes proposée depuis plusieurs années sur la chaîne ARTE.

Ceci donne une vision dynamique des évolutions intervenues sur un territoire donné au cours du temps.

C'est un atlas mondial, bien que l'Europe y occupe une place prépondérante, et c'est un ouvrage historique qui couvre presque toute l'histoire de l'humanité (depuis la colonisation de la terre par l'homme jusqu'à 2000 environ).

On n'entre pas vraiment dans le détail mais l'on a une bonne vision d'ensemble et des tendances évolutives, ce qui est l'objectif de l'ouvrage.

Vous voulez connaître la dernière grande terre colonisée par l'homme ? Rendez-vous page 15 et vous verrez qu'il s'agit de la Nouvelle-Zélande vers l'an 1000.

Vous voulez connaître les grandes lignes de la domination égyptienne au Moyen Orient environ 1500 ans av. JC ? Rendez-vous page 26.

La Pologne des Piast du Xème siècle vous intéresse ? Rendez-vous page 93.

Vous aimeriez parfaire votre connaissance des états soudaniens en Afrique de l'ouest au XIVème siècle ? Rendez-vous page 136.

Les civilisations précolombiennes vous intriguent ? Rendez-vous pages 144-145.

Les mouvements de la guerre civile espagnole des années 1930 vous questionnent ? Rendez-vous page 284-285.

Le baratin de Nastasia vous ennuie ? Rendez-vous sur une autre page.

Bref, un vrai bon petit ouvrage clair et densément renseigné qui trouve son utilité entre toutes les mains des plus diverses gens. Mais ce n'est bien évidemment que mon avis, susceptible de vous laisser Duby-tatif, c'est-à-dire, pas grand-chose.
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L'économie rurale et la vie des campagnes dan..

L’occident chrétien au moyen-âge ( sur cinq siècles ) ...



En vérité je vous le dit , laissez-vous pénétrer par l’esprit de l’époque . Mais , mes amis , mes compères , en vérité je vous le dis , le christianisme médiéval n’a encore jamais fait de dégâts cérébraux à ce jours , or donc , si même d’aventure vous êtes marxistes orthodoxes , à tendances agnostiques néo contemporaines , post révolutionnaires petite bourgeoise coco nid , d’obédience végétarienne . Et bien messires et gentilles dames entendez l’opus dei et n’ayez crainte car hier comme huis , les voyes du seigneur sont toujours impénétrables .



Si on veut un texte excellent qui soit solidement documentée et agréablement écrit sur l’occident médiéval , c’est Duby qu’il vous faut . Il ne faut donc pas hésiter à « farfouiller « dans sa bibliographie .

L’OCCIDENT MEDIEVAL : possède certaines caractéristiques fondamentales : Il est chrétien , il est occidental , il est principalement rural , il connaît une renaissance urbaine .



Je tiens ici à préciser que le christianisme médiéval occidental est pour moi un brillant trait de civilisation . De ce fait je tiens à dire aussi , que c’est avec grand plaisir que j’explore depuis longtemps cet élan religieux et fabuleux qui est fondamentalement à l’origine de la renaissance de la civilisation occidentale , qui la pauvre revenait de bien loin en ramant comme une forcenée ...



De ce fait encore , je tiens à témoigner personnellement de ce que cet aspect chrétien de l’univers médiéval ne m’a jamais , comme le disait mon grand-père sur d’autres sujets : « jamais fait un deuxième trou du cul « , passez-moi l’expression , merci .... J’espère qu’il en sera de même pour vous et si cependant , c’était le cas il faudrait d’urgence se présenter aux services vétérinaires qui sont largement à votre disposition , mais normalement tout devrait bien se passer , mais allez-y les vétos sont là sinon ! .



Ça va ? Toujours intéressé par les preux chevaliers et par la dame à La Licorne ?

Non sinon , Je vous dis cela parce que si vous êtes incapable de respecter viscéralement le caractère chrétien de cette civilisation , et bien faite plutôt du tricot ...



Bon : Deux tomes denses , bien écris qui feront de vous des médiévistes certifiés , enfin j’exagère mais presque à peine .

L’ouvrage ( en deux tomes ) considère l’économie rurale sur une période qui va du IX e siècle au XIV e siècle et il couvre l’Europe du Saint Empire Romain Germanique , France , Angleterre et des bouts d’Espagne et du Benelux ....



Il conduit le lecteur des « sommets « de la renaissance carolingiennes aux affres des grandes pestes ravageuses du XIV e siècle . Ce monde rural est passée au peigne fin selon un canevas unitaire qui n’empêche pas néanmoins de faire ressortir des spécificités locales dans le cheminement ou on passe de la villa gallo-romaines ou du vicus paysan à la seigneurie foncière ou au vicus libre .



L’ouvrage permet de déterminer les densités de peuplement , les rendements , les structures de la propriété foncière , la mise en place des structures politiques feudataires banales et celle de la privatisation du pouvoir régalien , avec la mise en place et la théorisation de la seigneurie banale , et féodale et de la seigneurie foncière avec les exceptions ,comme les alleux libres ( nobiliaires ou vicus paysans ) et la mise en place progressive d’un certain enfermement social malgré une amélioration des standards de vie ( ce point étant fluctuant néanmoins ) .



Le droits écrit , la coutume , les taxes ( tonlieux , tailles et pontenages , dimes , taxes spécifiques ) , églises privées , église abbatiales et monastique affranchie de toutes tutelles politiques et elles même potentat politiques progressivement . L’étendue maximum des horizons ruraux ( espaces connus , utiles et parcourus à pieds et en charrois et chevaux et ânes ) , les bourgs seigneuriaux et les bourgs ecclésiastiques , la renaissance des techniques agricoles , ( terrois ) , les outils de fer , l’attelage , la naissance des communes et la renaissance des villes libres ou non ...



Ces deux tomes sont prodigieux de maitrise , le premier porte sur le neuvième siècle , le deuxième traite de l’élan expansionniste rural et de la mise en place du monde plein . Avec la création de champs et de forêts domaniales , des villages des églises , des chemins , des villes ...

L’amélioration des rendements , et des qualités de vie est certains , mais se développe un enfermement social se met en place , mais c’est très progressifs et de toute façon les cartes sont redistribuées au XIV siècle , mais antérieurement c’est l'essartage qui vient aussi adoucir les conditions des plus pauvres .



La renaissance de l’écrit est un fait majeurs ( une constante médiévale ) , le retour aux arts appliqués antiques , la redécouverte de l’extérieur au monde occidental : islam , Afrique du nord , Byzance , élan architectural roman abondant et religieux , et aussi élan d’ architecture privée en pierre ...



Je reproche cependant à cet ouvrage de sous-estimer très nettement la conservation urbaine en Europe du haut moyen-âge au XIe siècle ...

Mais le lecteur acquière ici indiscutablement une connaissance standardisée et approfondie des campagnes européennes sur cinq siècles et c’est aussi incroyablement possible que c’est agréable et motivant ....



Ce que ce texte a d’exemplaire , c’est l’égard qu’il a pour les sources et pensez toujours que l’histoire .... c’est les sources ....

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Le temps des cathédrales. L'art et la société, ..

Ne confondons pas tout à fait le livre et la série d'émissions télévisées baptisées : Le temps des cathédrales - des émissions rendues possibles grâce à l'appui déterminant de Roger Stéphane ; elles furent, on s'en souvient, savamment présentées et commentées, d'une voix chaude et posée, par Georges Duby en personne ; série inoubliable, qui ne fut pas qu'un inventaire du patrimoine architectural et monumental religieux du Moyen Âge, mais l'occasion de comprendre comment de la puissance d'une religion qui imprégnait tout, sans tenir les commandes gouvernementales des pays de la zone européenne, on fit le symbole d'un pouvoir divin supérieur à toute activité humaine, que celle-ci fût ou non sacrée, en même temps qu'un moyen de sanctifier et protéger cette action dont on disait qu'elle était faite pour célébrer la gloire de Dieu, même si cette glorification servait parallèlement - ou principalement - l'orgueil des hommes sous les aspects de la dévotion et de la foi.

L'ouvrage est bien plus dense que le texte des émissions où il s'agit d'illustrer par l'image et par le verbe : les pages du livre sont chargées, remplies d'exemples qui illustrent le propos, de descriptions d'éléments et d'ensembles qui semblent caractériser un style dans ses évolutions ou servir de charnière entre deux manières ou deux époques, et le discours en est plus difficile à suivre, du moins au début. Dans le livre, tout comme dans la série télévisée, il est d'abord question des lieux où s'enracine l'art monumental religieux du Moyen Âge : dans la référence pas complètement oubliée à la Rome impériale, dans l'équilibre provisoire trouvé sous Charlemagne fondateur d'un Empire qui n'allait pas durer bien longtemps, dans la volonté de l'Eglise catholique d'incarner un pouvoir souverain, d'essence divine, placé au-dessus des pouvoirs laïques et temporels, invités à rendre la seule justice humaine sous le regard des ministres de Dieu sur Terre. Dissipant les discours convenus sur les "terreurs de l'An Mille", Duby en vient à montrer comment a éclos puis s'est développé l'art roman, puis il procède de même pour l'art gothique, en soulignant que ce qui était d'abord caché, préservé, réservé à l'élite des orants et des officiants autour de l'espace consacré du chœur, où seuls les moines et les prêtres, les abbés et les évêques avaient droit de se trouver, dans un contact privilégié avec le monde divin, est devenu lieu d'enseignement et d'exégèse par la représentation aussi bien que par la parole, et que l'on est passé progressivement de l'image d'un Dieu en colère et d'un Dieu de punition à un Dieu compatissant, et que, du portail du terrible jugement dernier figuré au tympan de l'église de Moissac, on est, petit à petit arrivé à un temps où, dépassant le besoin de se repentir et de revenir aux sources par l'austérité de l'art cistercien et la simplicité de l'art franciscain, la terreur entretenue a fait place à la joie et à la confiance du bourgeois heureux de voir s'élever, par ses dons généreux, l'art de l'envolée spirituelle sous les hautes voûtes de cathédrales gothiques vouées à monter toujours plus haut vers le ciel, jusqu'aux limites du possible. Les temps heureux sont repérables dans le décor sculptural et dans les verrières et les rosaces qui renvoient l'image d'une société en expansion et rayonnant de tous ses feux et de tous ses fastes. Du XIIe au XIIIe siècle, la foi semble tranquillement bercer les hommes dans des certitudes que rien ne semble pouvoir ébranler. Mais le XIVe siècle et le début du XVe siècle marquent le retour du doute et de la peur, les épreuves et les malheurs de la guerre de Cent Ans et de la propagation de la peste, avec leur cortège de morts, amènent les hommes à regarder en face la souffrance, à montrer le visage de la mort dans toute sa crudité, et à multiplier les images du Christ supplicié sur sa croix, vision doloriste qui mettra du temps à s'estomper. La fin du XVe siècle voit en partie reculer ce phénomène, en un temps où les puissants veulent transformer les châteaux crènelés, devenus inutiles avec le développement de l'artillerie, en belles demeures princières. Le goût du beau, et celui du luxe reviennent, mais le religieux, s'il semble encore dominant, est en train de perdre la partie, alors que l'artiste apprend à s'émanciper de ce cloisonnement dans la relecture des événements humains sous le seul regard de Dieu et à représenter enfin l'individu pour lui-même, à l'identifier et à l'immortaliser dans la réalité de ses traits, victoire totale sur les représentations stéréotypées, figées et hiératiques des époques antérieures.

L'humanisme était déjà en train de poindre.

François Sarindar, auteur de : Lawrence d'Arabie. Thomas Edward, cet inconnu (2010)

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Seigneurs et paysans

Georges Duby, médiéviste émérite, écrit "Hommes et structures du Moyen-âge" en 1973, dont "Seigneurs et Paysans" est le second tome. Avec une maîtrise consommée de la langue française, et une souplesse intellectuelle qui le mène de l'étude très matérielle de l'outillage rural et de l'économie des monastères à celle des représentations mentales de l'époque, Georges Duby nous rend familière la vie quotidienne de nos ancêtres des Xème au XIIIème siècles.



Pour autant, en dépit des talents pédagogiques de Duby, Seigneurs et Paysans n'est pas un ouvrage grand public, mais un travail d'étude, qui pourra paraitre rébarbatif à qui ne s'intéresse pas particulièrement à la recherche historique. Dans le cas contraire, on pourra apprécier à sa lecture le questionnement scientifique, le travail de rapprochement des faits et des hypothèses explicatives... comme lors de fouilles archéologiques ou dans un bon Agatha Christie.



De même, le lecteur de romans de terroir ou s'intéressant simplement aux régions étudiées par Duby, y trouvera aussi son compte. L'historien investigateur traverse ainsi successivement l'économie paysanne des Alpes du sud au 14éme siècle, les villes du sud est de la Gaulle et leur évolution du 8éme au 11ème siècle, la désertion des villages antiques et l'exode dans les zones franches initiées par les libéralités plus ou moins grandes des seigneurs, l'évolution majeure des techniques agricoles, faisant tâche d'huile autour des monastères.



Point d'orgue à son étude, Duby nous plonge alors dans les archives de la célèbre abbaye de Cluny, depuis sa formidable ascension du XIème siècle,dopée par les dons en or d'Alphonse VI d'Espagne, jusqu'au déclin engagé dès le siècle suivant par le goût du luxe, l'usage croissant du crédit et l'incapacité de l'ordre à se réformer. L'or, qui quittait précédemment l'abbaye sous forme de dons massifs aux indigents, profite à présent aux marchands et prêteurs de tous bords.



Duby achève son tableau par un éclairage sur l'évolution des institutions judiciaires, qui, à cette époque comme aujourd'hui, interagissent directement avec les bouleversements sociaux et les grandes tendances économiques, les freinant ou encourageant au gré des enjeux de pouvoirs du temps.



Lecture sérieuse, studieuse, mais instructive à divers points de vue.

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Art et société au Moyen Age

Cet intéressant petit essai de l'éminent médiéviste Georges Duby nous introduit à l'art du Moyen-Age, du Vème à l'orée du XVème Siècle. Georges Duby s'y emploie à montrer comment l'évolution de l'art procède de celle des représentations mentales, et donc de celle des rapports sociaux.

Ainsi, si l'Europe du sud verra persister entre le Vème et le Xème siècle, une tradition du monumental et du travail de la pierre, les pays du nord connaissent l'influence de traditions plus portées sur l'orfèvrerie, le travail du métal ou du bois sur de petits objets, au transport aisé, cela dans un monde rural exposé aux vagues d'invasions ou de pillages. Les monastères, fonctionnant en réseaux, se constituent en hâvres de connaissance . Les grands ordres, à commencer par Cluny, puis les ordres mendiants, n'en prêchent pas moins le dénuement et le détachement du matériel.

Aux siècle suivants, marqués par un accroissement démographique et un mieux vivre, le clergé séculier, au premier rang desquels les évêques, puis les papes, reprennent le pouvoir, portant dans les villes un renouveau de l'art monumental. Le XIIème siècle et la 1ème moitié du XIIIème siècle verront l'extraordinaire floraison des cathédrales. Les échanges artistiques se diffusent à l'échelle européenne entre le nord et sud, suivant la route des marchands. On redécouvre Aristote et l'art du raisonnement, profane ou non. L'artisanat se trouve valorisé, et des commandes plus individuelles, celles des grands bourgeois et seigneurs, plus cultivés, prolongent le mouvement de construction.

Enfin, malgré des flux et reflux, au gré des périodes plus difficiles de guerres de famines ou de peste, les années 1250 à 1400, au cours d'un long mouvement de valorisation de l'individu, verront éclore la modernité pré-renaissance au travers du développement d 'un art pour l'art, porté cette fois par des mécènes, bourgeois, seigneurs ou clercs, qui financent toujours chapelles et oeuvres d'art, mais entendent désormais que celles-ci restent dédiées à leur personne et leur famille, à leur salut, au moins autant qu'à Dieu. Le savoir, enrichi des apports arabes, grecs, juifs, se sécularise aussi, et la prière relève de plus en plus souvent de la sphère personnelle. Les Très Riches Heures du Duc de Berry , au début du XVème siècle, illustrent parfaitement cette lente appropriation individuelle de la pensée, plus autonome, de l'art pour l'art, dont l'esthétique conduira à des dérives maniéristes, et de la foi, qui se veut de plus en plus intérieure.

Ainsi, en 110 pages à peine, dans un style toujours aussi soigné, George Duby nous guide au cours d'une longue marche sur plusieurs siècles. On y découvre une évolution non assurée de l'art, de la pensée, fluctuant suivant les supports sociaux (démographie et situation de paix ou non, rapport entre les hommes, pouvoirs et richesses, techniques de production). Mais Georges Duby nous confie cependant pour fil d'Ariane le rapport au religieux : l'art et la pensée se sont d'abord perpétués au service de Dieu et de la foi, dans le refuge de la religion, puis, celle-ci se donnant de plus en plus à voir, ils se sont développés aussi hors d'elle, dans un long processus d'émancipation. Les traces de ces étapes successives continuent de marquer avec force nos coeurs de villes anciens, nos campagnes et faubourgs, et l'artisanat d'art traditionnel, qu'il soit vivant ou conservé dans nos musées.
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La Chevalerie

Quand Bertrand, sire de Born en Périgord, chevalier troubadour du XIIe chante les plaisirs de combattre, cela vous met tout de suite dans le bain. Jugez plutôt !

" Je vous le dis, je trouve moins de plaisir à manger, boire et dormir qu'à entendre le cri "à moi" s'élever dans les deux camps, les chevaux sans cavalier hennir sous les ombrages et les appels au secours, moins qu'à voir tomber les uns et les autres dans l'herbe au-delà des fossés, qu'à voir les morts avec , fichés dans leurs flancs, des tronçons de lance et leurs petites bannières."



Voilà, ça c'est dit ! ça fait partie des joies du Moyen âge ! Et n'allez pas me dire que j'exagère, que le Moyen âge n'était pas une période si barbare.

Bon, ce n'est pas comme cela dans tout le livre. Et bien heureusement car Duby s'adresse à la jeunesse. L'historien les entraîne sur les pas d'un chevalier : Arnoul,fils du comte de Guînes, seigneur d'Ardres. Avec lui, l'aventure est assurée et c'est un vrai plaisir de suivre le périple de cet enfant qui deviendra un chevalier aguerri et téméraire.

L'histoire de ce chevalier n'est pas si banale. Pourtant, c'est celle de tout chevalier. Elle est un support pour bien comprendre les habitudes, les mœurs, l'esprit chevaleresque et guerrier qui animait chaque jeune noble du Moyen âge. Tout y est bien détaillé et l'iconographie riche illustre fort bien les propos.

Georges Duby signe là un ouvrage de qualité qui ne peut que ravir les enfants ou adolescents intéressés par cette période et notamment par la chevalerie.
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Le dimanche de Bouvines - 27 juillet 1214

Georges Duby n'était évidemment pas attendu dans le genre histoire événementielle. Il s'était plutôt fait remarquer dans l'histoire de la France rurale et commençait d'aborder une analyse de la société organisée selon ses stratifications sociales et les symboles vivants de celles-ci : le paysan, le chevalier et le prêtre (régulier ou séculier). Il était aussi passionné par les questions liées à la création artistique alors encore enfermée dans le moule religieux et l'histoire sainte (l'émancipation réelle ne viendra qu'au quinzième siècle).

Et pourtant attiré plutôt par ces problématiques, ce qui était sans doute dû à sa tendance initiale à lire les aspects sociaux, culturels et religieux selon la grille de lecture marxiste des questions historiques, et influencé qu'il était par la pensée de Marc Bloch et par les orientations nouvelles de l'Ecole des Chartes, qui privilégiaient le fait social plutôt que la focalisation sur un fait historique, Georges Duby accepta la proposition que lui fit Pierre Nora en octobre 1968 d'écrire le volume consacré à la bataille de Bouvines dans la collection : Les trente journées qui ont fait la France, publiée par NRF Gallimard. La bataille s'est livrée le 27 juillet 1214, aux lisières des frontières de la Francia d'alors, et elle a opposé l'empereur germanique Otton IV et quelques-uns de ses alliés au roi capétien Philippe II dit Philippe Auguste. Ce dernier avait alors affaire à une véritable coalition, et le fils de Philippe Auguste, le futur Louis VIII le Lion, devait lui-même stopper les forces anglaises débarquées à La Rochelle et lancées dans une attaque vers le Maine et l'Anjou ; en réalité, le roi Plantagenêt Jean, que l'on surnomme Jean Sans Terre, frère de feu Richard Cœur de Lion, n'ira pas plus loin que La Roche-aux-Moines, qu'il assiègera en juin, et dont il s'éloignera dès le 2 juillet devant l'arrivée des troupes de Louis. Libéré de cette menace, Philippe Auguste allait pouvoir livrer bataille aux forces d'Otton IV, ancien duc de Brunswick et à celles de Ferrand de Portugal, comte de Flandre, qui constituaient l'aile gauche de l'armée ennemie et Renaud de Dammartin, comte de Boulogne, lui-même flanqué de Guillaume de Salisbury à l'aile droite. Côté français, Robert de Dreux à gauche et Eudes de Bourgogne ainsi que le Frère Guerin (un évêque ! celui de Senlis) encadraient le roi. La bataille se joua d'abord au centre, et la mêlée fut d'abord confuse. Philippe Auguste s'aventura un peu trop en tête et fut mis à terre par l'ennemi, mais un groupe de chevaliers vint à sa rescousse et Philippe ne voulut lâcher aucun pouce de terrain. Les Français montrèrent tant d'opiniâtreté que les troupes allemandes finirent par lâcher prise. Aux ailes, les derniers contingents germaniques engagés ne tardèrent pas à se replier, laissant le comte de Flandre et le comte de Boulogne seuls aux prises avec les Français. Malgré une résistance acharnée, les alliés français de l'Empereur allemand ne purent tenir tête à nos troupes et durent finalement accepter de se constituer prisonniers. Ces captifs furent évidemment des trophées de choix dans la marche triomphale qui ramena Philippe Auguste vers Paris. Le roi n'avait pas particulièrement souhaité croiser le fer avec l'ennemi, surtout que le 27 juillet tombait un dimanche en 1214, et que de bons chrétiens se devaient d'éviter de répandre le sang d'autres croyants ce jour-là, car c'était tout de même le jour du Seigneur (le jour du repos divin dans le mythe de la création et celui où l'on doit se recueillir et communier). La propagande royale s'arrangea donc pour que l'on comprît bien que Philippe Auguste avait été contraint au combat.

Georges Duby traita bien sûr le sujet sur le plan événementiel, mais, comme il était prévisible, il en fit un prétexte pour vite revenir à une relecture des faits sous l'angle des rôles sociaux et hiérarchiques joués par chacun des acteurs en fonction de leur place dans la société médiévale. Il y a tout un discours autour de la place et de l'action qui reviennent au chevalier dans le fait militaire. Les milices urbaines ont beau avoir elles aussi pris leur part du succès ce 27 juillet 1214, elles ne peuvent avoir la vedette au Moyen Âge. Elles n'en ont acquis qu'à la suite des révolutions de 1789, 1830, 1848, puis de l'instauration d'un régime républicain au lendemain de la défaite de Napoléon III face aux Prussiens en 1870. Bouvines aura une autre dimension entre 1870 et 1914 : il s'agira pour les Français de réinterpréter les faits dans le cadre d'une logique collective, celle de la revanche de tout un peuple sur l'adversaire allemand, après l'annexion au Reich par celui-ci de l'Alsace et de la Moselle. On mettra alors l'accent sur le rôle joué par les milices communales lors de la bataille de Bouvines. Il n'est que de lire l'Histoire de France d'Ernest Lavisse pour s'en convaincre.

Duby a bien sûr rompu avec cette présentation des faits, et il a élargi la réflexion en replaçant l'événement dans le processus d'une affirmation du pouvoir monarchique sous l'égide des Capétiens doublé par un effort incessant en vue de l'unification du royaume et d'une volonté de centralisation de ce même pouvoir "rassembleur" et en réalité pré-étatique.

Le discours n'a rien perdu de sa pertinence.

Mais il faudrait à présent le réactualiser.

Nous avançons dans la construction européenne et il est maintenant inévitable que nous présentions la bataille de Bouvines comme un événement qui prend sens à l'échelle de l'Europe continentale, car il y eut tout de même ce jour-là une forte concentration de représentants des grandes puissances de l'époque.

François Sarindar, auteur de : Lawrence d'Arabie. Thomas Edward, cet inconnu (2010).
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Saint Bernard : L'art cistercien

Un ouvrage qui convient parfaitement à Georges Duby, dont le style est tout de rigueur (non sans beauté, mais d'une beauté sans fioriture), à l'image de l'art cistercien, sobre et épuré dans l'ornementation, tout de lignes pures et de fonctionnalité dans la destination, pour que l'orant aille à l'essentiel : l'action de grâces, sans aucune ostentation, dans un décor sans étalage de richesse, sans décoration foisonnante.

Et tout, dans la vie du moine cistercien, rejoint cette sévérité d'apparence, pour ne pas sacrifier au futile : la vanité des choses est connue dans cet Ordre religieux fondé par Robert de Molesme en 1098 et illustré par Saint Bernard de Clairvaux (1090-1153) ; aussi les églises abbatiales ont-elles les mêmes contours nets que les granges, les dortoirs, les réfectoires et autres bâtiments conventuels ; le modèle s'en est facilement exporté à travers toute l'Europe. Et c'est la force, la singularité et la beauté de l'art cistercien - car il s'agit bien d'un art - que d'être réduit à cette "extrême simplicité". Fontenay, Sénanque, le Thoronet, Fontfroide et Silvacane sont quelques exemples de cette architecture.

François Sarindar, auteur de : Lawrence d'Arabie. Thomas Edward, cet inconnu (2010)
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Histoire de la vie privée, tome 4 : De la Révol..

L'Histoire de la vie privée est l'un de ces projets globalisants que l'historiographie française multipliait avec une rare ambition durant les années 70 et 80, sous la houlette de l'immense Georges Duby : Histoire de la France rurale, puis de la France urbaine, et avant celle des femmes en Occident. Nourrie de son admiration pour Fernand Braudel, cette histoire laissait délibérément l'événementiel de côté pour se lancer dans l'exploration des courants de fond qui parcourent les sociétés, et mettre du sens sur les évolutions de long terme. De façon absolument pas accessoire, c'était aussi une histoire d'une grande exigence littéraire qui révéla des plumes remarquables, à commencer évidemment par celle de Duby. C'est dans la marmite de cette histoire-là que je suis tombé, jeune godelureau tout frais inscrit à la fac de Nanterre, et je crois bien que je ne suis jamais sorti de la marmite en question.

Ces livres, qu'il faut lire dans leur édition grand format pour profiter de leurs superbes illustrations, sont des objets éminemment dangereux : on sait quand on les ouvre, jamais quand on les referme. Au départ, en effet, je n'ai empoigné ce volume 4 que poussé par l'une de ces interrogations qu'un auteur peut se poser dans l'écriture d'un récit historique : ma scène se passe en 1905 sur une plage de l'ouest, un garçon de dix ans découvre la mer, s'avance au bord de l'eau, se déchausse et … et là, foutrebleu, la panne.

Bon. Sachant que ce garçon est le fils d'un ingénieur à la fois veuf et libre-penseur, et que subséquemment le gosse n'a pas fait sa première communion, qui était à l'époque considérée à bien des égards comme l'adieu au monde de l'enfance, peut-on dès lors imaginer qu'au moment de se mouiller les pieds il retrousse audacieusement un bas de pantalon, ou au contraire, la bienséance du temps demeurant ce qu'elle est, le gaillard reste-t-il nécessairement affublé de culottes courtes ? Telle est la question qui me taraude au moment où je me tourne vers ma bibliothèque, car oui, en effet, faut pas croire, un auteur se pose parfois des questions d'une profondeur insoupçonnée.

Et puis une page en appelant une autre, les chapitres ont bientôt défilé. Peut-être y avait-il de ma part une sorte de stratégie dilatoire. Peut-être ai-je cherché à retarder le moment de me coltiner avec la matière romanesque, laquelle m'inspire aujourd'hui comme un soupçon d'angoisse après plus de deux années sans pouvoir écrire. Mais quelle qu'en soit la raison, le fait certain est que j'ai été très heureux de cette plongée dans les six-cent pages de ce beau volume. Heureux comme un poisson dans l'eau de sa marmite.
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Histoire des femmes en Occident, tome 2 : L..

« Histoire des femmes. Tome II. Le moyen âge » est un ouvrage collectif de plus de 560 pages, paru chez Plon en janvier 1991. Rédigé par des Maitres de conférence, des Professeurs d'Université et des Chargés de recherche, tous éminents médiévistes intervenant sous la direction bienveillante mais attentive de Georges Duby et de Michelle Perrot, ce tome 2 de la collection «  Histoire des femmes en Occident », a l'ambition de montrer aux lecteurs, et par le menu détail, ce que fut à cette époque la vie des femmes, leur place, leur condition, leurs rôles, leurs pouvoirs, leurs formes d'action, leur silence et leur parole. Autant vous dire que l'objectif est atteint.



Pour ce qui concerne l'entreprise, il faut admettre la difficulté de parler des femmes sans se limiter aux héroïnes et aux femmes d'exception ; en faisant ce choix, les contributeurs utilisaient les sources qui font foi sans pour autant négliger la voix des humbles.

Pour ce qui concerne la période, il faut en reconnaitre la singularité : elle s'étend sur plusieurs siècles (de la fin de l'Empire romain à la Renaissance), l'essor économique est inégal selon les pays mais progressif et significatif, l'espérance de vie est limitée (30 ans au 12ème siècle), la femme mariée à 9 enfants en moyenne (mais la mortalité avant l'âge de quatre ans est colossale), les cités « se mettent en place » (les paysans représentent près de 90 % de la population active), le droit se constitue (droit canon pour les questions religieuses, droit romain au Sud et droit coutumier dans le reste du pays pour ce qui concerne les questions temporelles), il y a une division très nette et socialement imposée entre l'homme et la femme (la femme est illettrée et cantonnée à une stricte activité domestique), les excès sont condamnés quand l'entrée en religion, la maternité et le mariage sont glorifiés, la femme, soumise à Dieu et à son mari, doit renoncer à toute ambition familiale et sociale, l’Église omniprésente « classifie » les femmes en vierges, veuves et épouses (la fameuse triade), les mariages sont arrangés (avec un écart moyen de plus de 15 ans entre mari et femme), la monogamie reste le seul fait des pauvres, un couple sur trois est issu de deuxième voire de troisième noce (les hommes meurent à la guerre ou d'épidémie) et les écrits sont rares (il faut attendre le 15ème siècle pour assister à l'invention de l'imprimerie).

La société n'est pas restée immobile sur cette période : l'évolution du statut économique et culturel de la femme a été lente mais réelle. Toutefois, il faut rester prudent : les écrits auxquels se réfèrent les contributeurs de cet ouvrage collectif sont le fait d'hommes (la documentation est donc androcentrée), de surcroit d'hommes de religion (qui se refusent à la société des femmes -lesquelles sont impures et tentatrices- et qui s'imposent chasteté et célibat) et leurs écrits dépeignent les femmes comme autant d'exemples le plus souvent à condamner (le trait est misogyne, quelque peu forcé et sous-tendu par un imaginaire puissant et largement livresque). Si on ajoute à ce tableau le fait que les commentaires des rédacteurs de l'époque brouillent plus l'image qu'ils ne l'éclairent, il n'est pas simple pour le lecteur d'aujourd'hui de se faire une idée claire de la façon dont la femme pouvait vivre sa vie à cette époque.

Pendant une grande partie de cette époque la femme reste un objet et la tradition comme l’Église font le maximum pour verrouiller toute velléité de libération de la femme. Heureusement les temps nouveaux s'annoncent avec, pêlemêle, la reconnaissance du fait que le mariage ne doit pas être exclusivement tourné vers la procréation, des clercs qui écoutent voire dialoguent davantage avec leurs fidèles -y compris de femmes-, le début de représentations (peintures, sculptures) féminines, des femmes qui exercent des activités artisanales, la valorisation de la sexualité comme garante de l'équilibre, la constitution de groupes de femmes, et j'en passe et des meilleurs. Alors, c'en est fini de l'épouse chaste, parfaite maitresse de maison, respectueuse, fidèle, empressée, avisée, irréprochable, subordonnée à son époux, attentive à ses beaux-parents, muette, révérente et totalement obéissante à son mari ? Pas tout à fait, mais voici venir la conseillère et la guide spirituel de son mari, prenant soin de ses enfants, veillant au bon comportement de la maisonnée et disposant d'initiatives (religion, morale, port des vêtements, accès aux produits « de luxe ») ! Il y aura malheureusement un sérieux coup de volant dès la fin du 15ème siècle mais c'est une autre histoire ...



Au final, un ouvrage passionnant, bien construit, très touffu, abondamment documenté, et agrémenté de dessins et de reproductions en noir et blanc, ce qui en facilite sa lecture. Je me contenterai de renvoyer les passionné(e)s vers une lecture complémentaire, à savoir le « Dictionnaire raisonné de l'Occident médiéval » (1999). Je recommande et mets 4 étoiles.
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Histoire de la France urbaine, tome 2 : La ..

Il n'est pas toujours facile de faire un travail collectif, même quand ce travail semble être conduit par une ligne directrice. Question de tempérament sans doute : trois plumes d'historiens bien différents : André Chédeville, Jacques Le Goff et Jacques Rossiaud. C'est à Le Goff que fut confiée la tâche de l'introduction générale. L'approche eût été différente si elle avait été faite par l'un des deux autres. Fallait-il ne considérer le phénomène urbain médiéval français qu'à travers celui du mode de production féodal ? Et est-ce que ce phénomène date surtout des XIe, XIIe et XIIIe siècles, comme s'il s'agissait d'une nouveauté ? N'eut-il pas son commencement vers le Ve siècle ? Et quel fut le rapport de l'Église et des communes, et la réaction du clergé par rapport à cette cristallisation urbaine, toujours très liée cependant pour des raisons vitales et commerciales au monde rural environnant ? En analysant toutes ces questions sur divers plans, en prenant pour cadre géographique un mélange de notre France contemporaine et du royaume médiéval avec le comté des Flandres placé dans sa mouvance jusqu'en 1384 et tout cela selon un découpage chronologique en trois grandes périodes : de 900 au milieu du XIe siècle, de 1150 aux années qui précédèrent la guerre de Cent ans, et enfin de 1340 à la fin du XVe siècle, on obtient quelque chose d'un peu artificiel, ce qui nuit en partie aux contributions fort enrichissantes des trois hommes lorsqu'on les prend isolément.

François Sarindar
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Atlas historique mondial

Première bible de l’apprenti historien que je suis encore, cette réédition de l’Atlas historique mondial de Georges Duby est l’occasion de se repasser des cartes plus ou moins célèbres sur les grands événements de l’histoire du monde, d'autant plus qu'elles sont organisées selon des grandes catégories : histoire du monde, histoire de chaque continent, histoire des grands pays européens, etc. Des cartes belles et nombreuses donc, mais aussi des commentaires précis et nécessaires, rédigés par un historien (médiéviste) renommé, ainsi que des index très utiles et des chronologies uniques. Bref, un ouvrage foncièrement utile et à avoir toujours sous la main quand on étudie un phénomène historique d’importance.



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Guerriers et paysans, VII-XIIe siècle : Premi..

Publié en 1973 par Georges Duby, « Guerriers et paysans (VIIè-XIIè Siècle) » raconte la lente naissance de ce qu'on pourrait appeler l'espace européen – un espace tout autant mental et religieux que physique ou économique.

À partir de sources très lacunaires, et qu'il faut sans cesse lire entre les lignes, Duby traque patiemment les premiers indices de cette construction de quelque 600 ans, qui donnera lieu à ce qu'il présente comme le « premier essor de l'économie européenne. » Pour ce faire, tous les savoirs sont convoqués, de la climatologie à l'histoire des mentalités, en passant par la démographie, l'archéologie ou l'étude des techniques agricoles.

Cette Europe « de rite latin » s'est très largement construite sur une exploitation croissante du milieu naturel, la part cultivée gagnant peu à peu sur la part sauvage et forestière du paysage européen.

Mais le phénomène auquel le grand médiéviste accorde le plus de place est la manière dont, tout au long de cette période, les grands (qu'ils soient laïcs ou religieux), se sont appliqués à détourner à leur profit les maigres fruits du travail paysan. Dans une Europe progressivement christianisée (et ce jusque sur ses marches les plus turbulentes que sont la Hongrie ou la Scandinavie), la guerre devient en effet une activité marginale, dont les produits raréfiés ne permettent bientôt plus à l'aristocratie de maintenir son fastueux train de vie. Dès lors, celle-ci n'a plus d'autre choix que de pressurer la foule famélique des esclaves, mais aussi les paysans libres, dont la condition finit, lentement mais sûrement, par se confondre avec celle de la population servile.

Paradoxalement, cette oppression n'aura pas que des inconvénients ; Duby y voit même la clé du décollage économique européen. Elle obligera en effet les paysans à perfectionner les techniques agricoles afin de produire davantage pour assurer leur propre survie ; elle relancera également le commerce et la circulation monétaire, qui avaient quasiment disparu à la suite de l'effondrement du monde romain.

Un livre dense, mais que j'ai lu avec plaisir, car il est très bien écrit et toujours porté par la volonté de rendre l'histoire accessible au plus grand nombre.
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Le chevalier, la femme et le prêtre

L'éminent historien Georges Duby nous offre les résultats de ses recherches concernant l’institutionnalisation du mariage chrétien au cours du Moyen Âge central. On peut sourire rien qu'en lisant le titre "Le chevalier, la femme et le prêtre", soit pour le côté "Le bon, la brute et le truand", soit plus "socialement" pour constater que la femme est encadrée par le chevalier et le prêtre ; une astuce notable de l'auteur déjà.

En étudiant les rapports au mariage entre idéaux chevaleresques et idéologie chrétienne, Georges Duby finit par toucher l'ensemble des mentalités de la société française du Moyen Âge central. Même si elle a été largement influencée par le contexte contemporain de l'auteur concernant le mariage et qu'elle se focalise, à mon goût, beaucoup trop sur une possible confrontation ouverte entre monde laïc et monde religieux, c'est une œuvre à fortement considérer tant l'ouvrage a fait date dans l'historiographie française.
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L'Europe au Moyen Age

Avec L'Europe au Moyen-Age, il nous est offert une lumineuse initiation au Moyen âge par un historien de renom.



Avec un style subtil, une langue riche et un propos agréable à lire, toujours enrichissant, nous accédons aux multiples richesses de cette époque de notre histoire. Georges Duby, remarquable historien, par sa plume, rend lumineuse une époque réputée obscure. Il nous révèle la pureté des styles roman et gothique dont les plus belles réalisations architecturales nous étonnent toujours.
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Petit atlas historique

Cet ouvrage est vraiment très bien fait, à tout point de vue.



Il est tellement malaisé de dénicher LE guide qui mêlera érudition et vulgarisation sans pour autant compter 957 pages et peser sur vos genoux aussi lourdement qu'une encyclopédie !



D'un format proche du poche, ce guide peut demeurer à portée de main en toute occasion et être ouvert aussi bien lors de la lecture d'un roman historique pour apporter un éclairage sur la situation géo-politique ou géo-économique de telle ou telle région du monde à telle ou telle date que lors d'une discussion entre amis quand les avis divergent sur un détail, ce livre mettra tout le monde d'accord. Il peut aussi être lu pour lui-même, pour acquérir une bonne base de culture générale historique, tout en révisant sa géographie, ce qui est loin d'être inutile.



Parce que les explications de l'historien émérite Georges Duby sont étayées par une parfaite maîtrise de son sujet, une vision pragmatique de la cartographie historique et une approche universelle de l'Histoire, l'Europe n'est pas présentée ici dans sa suprématie désuète, on s'intéresse à toutes les parties du globe, à toutes les époques. Un éclairage captivant sur l'ensemble des civilisations ! Les commentaires sont simples et succincts et ne servent qu'à illustrer la carte et non l'inverse !



Je recommande chaudement, surtout à celles et ceux qui, comme moi, sont resté(e)s sur leur faim en voulant se rafraîchir la mémoire avec l'Histoire pour les Nuls, trop incomplète et subjective.
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