La chronique de Gérard Collard Tout autour des halles
En ce début de week-end, notre chroniqueur Gérard Collard a décidé de vous présenter un livre sur une période bien particulière. L'histoire de "Tout autour des Halles quand finissait la nuit" (de Gérard Landrot aux éditions de l'éditeur) se déroule à Paris sous l'occupation et après la libération. Un livre qu'a particulièrement apprécié notre libraire... Regardez... La présentation du livre "Tout autour des halles quand finissait la nuit" par l'éditeur : Après avoir été violée par son oncle, Hermine S., dite Mimine, se retrouve pensionnaire d'une maison close du quartier des Halles à Paris. Mais, n'ayant ni goût ni talent pour son nouveau métier, elle accepte de devenir la concierge du 62, rue Montorgueuil. C'est de ce poste d'observation qu'elle traverse la drôle de guerre, l'Occupation et la Libération. le récit, écrit à la première personne, dépeint la vie quotidienne sous la botte allemande, du marché noir à la rafle du Vel d'Hiv ; raconte la résistance, la collaboration, l'épuration et ses cortèges de femmes tondues... Écrit dans une langue gouailleuse et imagée, Tout autour des Halles quand finissait la nuit met en scène le petit peuple d'un Paris disparu, décrit par une femme drôle et bouleversante. Vous pouvez commander "Tout autour des halles quand finissait la nuit" sur le site de la librairie en ligne www.lagriffenoire.com
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Et c'était un peu ma vie résumée : j'étais concierge et pourtant, par hasard, je me retrouvais au milieu des gens les plus importants de Paris. (p.149)
Les journaux écrivent ce qui leur chante ou ce qu'ils peuvent. On est même pas certains de ce que racontent les canards clandestins parce que tout le monde exagère dans un sens ou dans un autre. Tout le monde veut tirer la couverture à soi. Alors : à qui se fier ? Chacun y va de son petit discours. C'est le règne du n'importe quoi et les bobards vont bon train. (p. 215)
Il paraît que rien qu'à la Plaine St Denis, il y a eu au moins 600 morts et je sais plus combien de blessés [cette nuit-là sous les bombardements]. Des femmes, des enfants, des vieux... (...) Malgré les évacuations forcées, because les pillards, c'est plein de gens qui fouillent dans les ruines pour retrouver un parent, un voisin, ou des objets au milieu des canalisations d'eau ou de gaz éventrées. Et le pire c'est que dans ces ruines il y a des bombes à retardement qui continuent à tuer les sauveteurs... Du coup les gens en ont vraiment plein le dos des Anglais et surtout des Ricains qui lâchent leur purée de mort de très haut.
Pétain en a profité pour redorer son blason et il a vite fait de rappliquer à Paris où il était plus revenu depuis 40. Et mine de rien, il a fait un gros succès.
(p. 205-206)
(...) un type tellement radin que dès qu'il voyait des cantonniers refaire la route, il allait marcher dans le goudron frais pour faire l'économie d'un ressemelage. (p. 133)
Monsieur Armand dit que ce sont des gars du Jeune Front. [...] A Jules qui s'indigne, il confie que leur chef est un petit voyou qui s'appelle Robert Hersant. (p.130)
Quand c'étaient des Anglais, en général, notre tournée commençait par la maison, tenue par madame Simone Jean de Laroche, au 30 rue Lepic. Ils appréciaient tous la spécialité des lieux: la fessée ! Mais attention, pas n'importe quelle fessée, expédiée n'importe comment ! De la fessée raffinée, trois étoiles.
On sentait bien qu'ils avaient tous du pognon depuis longtemps et pour longtemps. Que ça changerait jamais pour eux...
(p145)
Toujours des questions sans réponse. Des questions qui font tellement mal que tu aurais envie de pas te les poser,
(p203)
Il vous faut être du dernier chic parisien. En un mot apprendre à être ce que les anglais cappellent snob! (...) Vous devez avoir une opinion sur tout, éviter le solennel et prendre la vie à la blague, ne jamais être exact à un rendez-vous, savoir tous les potins, mais ne donner de l'importance à aucun, ne jamais dire le vrai mot pour les choses un peu méprisables: un menteur n'est qu'un "blagueur"; une femme qui trompe son mari 's'amuse"; une escrocquerie est une "indélicatesse". Il faut aimer la campagne même si vous n'y allez jamais, faire semblant d'avoir tout lu et d'être dans le train du dernier bateau, oublier certaines choses qu'on connait bien et avoir l'air de savoir les choses qu'on ne comprend pas...
"Confiscation des biens et suppression du droit de vote". Je me bidonne: j'ai plus rien du tout à moi, quant au droit de vote, ça fait même pas six mois que nous, les femmes, on y a droit. Je m'en passerai bien encore pendant cinq ans!