Une partie de ceux qui ont élu Paris comme séjour temporaire ou définitif caressent l’espoir d’épouser l’existence de ces créatures et d’accéder avec elles à l’éternité, sans savoir très bien comment s’y prendre :faut-il être frôlé de leur aile, mordu dans le cou, embrassé sur la bouche, regardé dans les yeux ?
Paris est aussi la résidence de créatures fantastiques, esprits errants, revenants nostalgiques, ombres sans maîtres, spectres porteurs de messages, willis gracieuses et tristes, immortels de toutes origines, avec leur cour de mages, de mediums et d'intercesseurs théurgiques.
Pour qui sait les voir, Nerval se balance encore à une grille, Stendhal s'effondre apoplectique sur le boulevard des Capucines, Ödön von Horvarth est écrasé par un marronnier devant le théâtre Marigny. Aux Batignolles, Jean Eustache se tire une balle dans le coeur.
Franz parla de leurs vies antérieures, à la cour de Chypre, quand lui-même s'appelait Ptolémée ; dans un monastère de Cordoue, où Andreas noviciait sous le nom d'Hermano Juan de la Luz, lorsque Franz, connu alors comme Don Alberto Velasco, effectua une retraite après la mort de sa mère ; au théâtre Sant'Angelo de Venise, où le compositeur fit engager l'écrivain. Anita écouta tout sans sourciller. Franz lui montra un portrait de Don Velasco, peint par Jan van Kessel, qui malgré ses maladresses lui ressemblait passablement.