L'une des caractéristiques de cette crise musicale est la séparation entre musique légère et musique sérieuse. Cette séparation n'est-elle pas très curieuse ? Ne peut-on se divertir qu'avec la pire camelote musicale ? Sommes-nous obligés d'arborer une mine sérieuse et des allures de snob quand nous écoutons de la musique classique sérieuse ?
L'"indifférence de la musique à nos véritables réalités sociales" : telle était pour Hanns Eisler l'une des causes d'un phénomène généralisé, la "bêtise en musique". Uniformisée, rendu consommable et voué à une identification antihistorique, la musique, en raison de son "caractère protéen" et de sa distance par rapport au monde des objets réels, peut devenir le "foyer de l'idiotie". L'ambition du compositeur doit être inverse : au lieu de fournir des drogues musicales - à effet de transe --, c'est le développement de la sensibilité et la "purification des sentiments", comprise comme un bonheur concrètement expérimentale, qu'il doit s'efforcer d'atteindre grâce aux possibilités complexes de son art.