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Citation de mandarine43


[ Incipit ]

Il aurait dû y avoir un souffle funeste dans l'air. Ou un froid à vous glacer la moelle des os. Quelque chose. Une mélodie éthérée que seuls Elizabeth et moi aurions pu entendre. Un sentiment de tension. Quelque classique prémonition. Il y a des malheurs quasi prévisibles - ce qui est arrivé à mes parents, par exemple - et puis d'autres moments sombres, des moments de violence soudaine qui changent irrémédiablement le cœurs d'une existence. Il y a eu ma vie avant le drame. Et il y a ma vie actuelle. Les deux, hélas ! n'ont plus grand-chose en commun.

Elizabeth se taisait pendant le trajet, mais cela n'avait rien de surprenant. Même gamine, il lui arrivait de sombrer dans d'imprévisibles accès de mélancolie. Murée dans son silence, elle se laissait aller à la contemplation ou à la trouille, je ne savais jamais. Ça devait faire partie du mystère, je suppose, mais là, pour la première fois, j'ai senti le fossé entre nous. Notre couple avait survécu à tant d'épreuves. Survivrait-il à la vérité ? Plus exactement, aux mensonges par omission ?

La climatisation bourdonnait doucement dans l'habitacle bleu. Dehors, il faisait une chaleur moite. Typique du mois d'août. On a traversé le pont de Milford au-dessus de la Delaware et on a été accueillis en Pennsylvanie par un sympathique employé du péage. Une quinzaine de kilomètres plus loin, j'ai repéré la borne sur laquelle on lisait : LAC CHARMAINE – PROPRIÉTÉ PRIVÉE. J'ai bifurqué sur le chemin de terre.
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