LE VASE BRISE
Si la rose penche si
Elle abdique vespérale
Le pur trésor aboli
Un à un de ses pétales
Et que mortellement nue
Sans la forme et la couleur
Elle ne soit devenue
Rien qu’une absence de fleur
N’en accuse du feu fin
La braise assez débonnaire
Ni l’onde omise, mais bien
Quelque éventail délétère.
(à la manière de S. Mallarmé)
.
ZONE (d’après G. Apollinaire)
A la fin tu es las de ce monde moderne
O tours de la défense vous offusquez l’avenue des Ternes
Tu en as assez de vivre dans le post-futurisme
Tu n’étais pas fait pour le temps de l’électronique
Avec ces logiciels et ces fax et ces répondeurs
Dont tu ne saurais pas te servir d’ailleurs
Tu aimais les tramways mélodieux avec leurs feux verts
Et tu subis l’entassement incommode du RER
Tu aimais flâner sur les rives de Seine
Et tu ne le peux plus elles sont pleines
D’automobiles et désormais sous les ponts
Passent des poissions qui montrent un ventre blanc (...)
.
BOOZ INSOMNIEUX (d’après V. Hugo)
(…) Tout dormait dans Passy et Levallois-Perret,
Les souffles de la nuit avaient l’odeur du Bois.
Un fiacre frêle et incertain passait parfois,
Descendant l’avenue. Et il se demandait,
Perplexe, regardant vaguement les étoiles,
Quel exact artisan, quel parfait horloger,
S’était complu, méticuleux, à remonter
Ce ressort éternel qui soulevait les toiles.
.
BALLADE DES ETOILES DU TEMPS JADIS
(d’après F. Villon)
Dites-moi où n’en quel pays
Est Sophia la belle Loren
Lollobrigida et Vitti,
Qui ne lui cédaient qu’à peine
BB aux bêtes tant amènes,
Dessus banquise ou dans les champs,
Aux phoques donnant tendre aveine *.
Où sont les Etoiles d’antan ?
Note : aveine = avoine
PHARES
Tzigane effervescent dont l’archer enjôleur
Se grise des arabesques souveraines,
Aragon Aragon qui fait jaloux le cœur
Mélodieusement des humides Sirènes.
Mauriac, calme jardin qu’embaume la résine.
Des enfants sérieux et purs chantent Mozart.
Mais la nuit est brûlante et lourde, où se devine
En ce vert paradis l’aile d’un Ange noir.
Malraux, vaste Musée, où l’on voit des Hercules
Se mêler à des Christs, cependant que s’élance
La haletante voix qui, dans les crépuscules,
Fait au loin fulgurer ses hautaines cadences.
Hérissé, profil fou, regard fixe et farouche,
Crachant, griffant, mordant, comme un chat qu’on a pris,
Affreux et pitoyable, ô cuirassier Destouches,
Eperdument dans la fureur et dans le bruit (…)
LE VASE BRISE
Si la rose penche si
Elle abdique vespérale
Le pur trésor aboli
Un à un de ses pétales
Et que mortellement nue
Sans la forme et la couleur
Elle ne soit devenue
Rien qu’une absence de fleur
N’en accuse du feu fin
La braise assez débonnaire
Ni l’onde omise, mais bien
Quelque éventail délétère.
(à la manière de Mallarmé)