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4.16/5 (sur 132 notes)

Nationalité : États-Unis
Né(e) à : Tysmenitz, Galicie , le 08/02/1906
Mort(e) à : Albuquerque, Nouveau-Mexique , le 13/10/1995
Biographie :

Henry Roth est un romancier américain, de confession juive. Né en Galicie, à l'époque province de l'empire austro-hongrois, il émigre aux États-Unis à l'âge de trois ans avec sa famille. Il passe son enfance au sein de la communauté juive de New York. Son premier roman, L'Or de la terre promise (Call it sleep), est publié en 1934 qui passe inaperçu.

Il épouse, en 1939, Muriel Parker, fille d'un pasteur baptiste et pianiste qui renoncera à sa carrière pour l'accompagner dans l'État du Maine où il exerce plusieurs métiers (garde forestier, infirmier dans un hôpital psychiatrique, aide plombier…).

C'est en 1964, soit trente ans après, que L'Or de la terre promise est réédité et vendu à plus d'un million d'exemplaires. Ce succès inattendu permet à la famille Roth de déménager au Nouveau-Mexique et convainc l'auteur de se remettre à écrire en 1979.

En 1994, soixante ans se sont alors écoulés depuis la publication de son premier roman quand À la merci d'un courant violent sort en librairie.
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Source : Wikipédia
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Citations et extraits (21) Voir plus Ajouter une citation
Mais il voulait une histoire, il en avait un besoin maladif ; non seulement les histoires vous transportaient dans l’imaginaire, mais elles vous tenaient en haleine, et pendant tout ce temps, elles vous disaient ce que les gens éprouvaient, ce qu’ils voyaient et entendaient, et comment ils vivaient... C’était ça l’important : ils appartenaient à un monde, un monde qui n’existait peut-être plus, et c’était la seule façon de l’approcher.
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Seulement, la bar-mitsva lui fit comprendre qu'il n'était juif que parce qu'il se devait de l'être ; il détestait être juif ; il ne voulais pas être juif, ne voyait aucune vertu l'être , et il comprit soudain qu'il était pris au piège, prisonnier d'une identité dont il n'avait pas la moindre chance de se libérer un jour.
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[...] ... On était en juillet, un mois avant le début de la guerre. La proche famille de Ma devait arriver en Amérique d'ici quelques jours, partie du petit village de Veljich, en Autriche-Hongrie, pour venir s'installer à Harlem. Leur appartement, un vaste six-pièces bien situé, au deuxième étage seulement, avec chauffage à la vapeur, électricité et eau chaude courante - et même stores rayés au-dessus des fenêtres de devant - se trouvait au milieu du bloc, au milieu de la 115ème Rue, entre Park Avenue et Madison Avenue. En "yinglish", on appelait ça un shaïner b'tveen - littéralement : "un joli entre." C'était un quartier cent pour cent juif et sympathique, et en plus très pratique pour les courses. Tout près, le marché juif des voitures à bras s'abritait sous le grand pont en fer du New-York Central Railway, sur Park Avenue ; les immigrants pouvaient sans contrainte y marchander en yiddish avec les colporteurs. L'appartement possédait en outra l'avantage d'être en face de celui de tanta (tante) Mamie et sa famille (sans nul doute une raison supplémentaire pour laquelle les deux oncles américanisés d'Ira, Moe et Saul, l'avaient choisi). Mamie pouvait ainsi parler à Bobe [grand-mère maternelle d'Ira) et à Zaïde [grand-père maternel de l'enfant], ou encore à l'un de ses frères et soeurs - et inversement - d'une fenêtre à l'autre, sans que quiconque eût besoin de sortir de chez soi. ... [...]
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Debout devant l’évier de la cuisine, les yeux fixés sur les robinets de cuivre qui brillaient si loin de lui et sur la goutte d’eau pendue au bout de leur nez, qui grossissait lentement, puis tombait, David pris conscience une fois de plus que ce monde avait été créé sans tenir compte de lui. Il avait soif, mais la cuvette de fer reposait sur des pieds presque aussi hauts que sa propre personne. Il aurait beau étendre le bras ou faire de grands sauts, jamais il n’atteindrait le lointain robinet. D’où venait cette eau qui se cachait dans la courbe secrète du cuivre ? Où allait-elle quand elle descendait en gargouillant le long du tuyau d’écoulement ? Quel univers étrange devait se cacher derrière les murs d’une maison ! Mais il avait soif.
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[...] ... Ira pleura un nombre incalculable de fois. Et il se désola quand il vit approcher le moment où il lui faudrait se séparer de Jean Valjean - à la fin du livre qu'il gardait sous son lit, dans sa petite chambre sombre, et avec lequel il se réveillait le samedi et le dimanche, tel un précieux cadeau qui l'attendait. Il fit durer le plaisir, relut, rêva. Des centaines de mots nouveaux se dissimulaient au détour des phrases, des mots inconnus parmi les centaines de pages du récit, et qui ne présentaient pourtant aucun obstacle à la compréhension. Il ne possédait pas de dictionnaire - l'idée d'en avoir un ne lui était même jamais venue à l'esprit. Il n'en avait pratiquement pas besoin. Il lui semblait que ses sentiments seuls le guidaient à travers le contexte, et, une fois deviné le sens des mots, ceux-ci paraissaient ensuite se loger dans son esprit et y demeurer pour qu'il puisse en admirer à satiété le lustre et la résonance.

Au petit bonheur, après Huckleberry Finn et L'Appel de la Forêt, il goûta avec voracité, et au hasard de ses fantaisies, des livres qui allaient du Loup des Mers à Lorna Doone, en passant par Les Cavaliers de la Sauge Pourpre, Les Trois Mousquetaires, Le Prisonnier de Zenda, Notre-Dame de Paris, Le Comte de Monte-Cristo, les contes fantastiques de Poe, et puis She de H. Rider Haggard, Ben Hur de Lew Wallace, et ... chose étrange : dans le monde des textes imprimés, le monde qui se situait entre les pages de couverture d'un livre, le monde des histoires "vraies", comme auparavant dans celui des mythes, il s'imaginait être chrétien, ainsi que l'étaient les héros des livres - sauf Ben Hur, un Juif romain ou un Romain juif, peu importe. Ira s'imaginait donc être chrétien. Que pouvait-il faire d'autre alors qu'il aimait et estimait le héros ? Tout ce qu'il demandait à un livre, c'est de ne pas trop lui rappeler qu'il était juif ; plus un livre l'impressionnait, plus il priait pour qu'on oublie les Juifs. ... [...]
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C'était la veille de Noël. On rentrait à la maison. Tommy et moi, à l'arrière de la grande camionnette de Quinn, la nouvelle White. Hormis quelques commandes qu'on n'avait pas pu livrer, les immenses paniers étaient enfin vides. Minuit approchait, et nous nous prélassions sur les coussins qui servent à recouvrir les paniers afin de les protéger du gel. La camionnette filait vers le sud tandis que, épuisés, nous pouffions de rire à chaque remarque stupide. Une série de cahots nous apprît qu'on traversait les rails du tramway de la 125e Rue déserte.  De temps à autre, les phares des véhicules venant en sens inverse éclairaient le visage d'Irlandais de Tommy avec ses lèvres minces et ses dents écartées. Demain, c'était Noël. Demain, personne ne travaillait...

   - Quelle adresse t'as dit, déjà ? 119e Rue ? demanda Quinn.

   - Ouais."

  Quelques minutes plus tard, on arrivait à la petite épicerie A & P au carrefour, dans laquelle brillait encore une faible lueur bleutée. Quinn s'arrêta, descendit et vint ouvrir les portes arrières. "Brrr", fit-il en carrant les épaules dans le froid, puis il attendit que je sorte, les mains étrangement croisées à hauteur de son visage, comme en un geste de prière.

   "Merci, Quinn, dis-je en sautant à terre.

   - Joyeux Noël.

   - Hein ? Ah ouais. Joyeux Noël, Quinn.

   - Joyeux Noël,Ira ! cria Tommy de l’intérieur du véhicule, agitant la main dans la pénombre.

  - Ouais, joyeux Noël, toi aussi."

  Quinn claqua la porte, puis alla se réinstaller au volant. La camionnette démarra et je la suivis un instant des yeux : elle accéléra et ne fut bientôt plus que deux points rouges qui s'éloignaient au milieu des piliers. Le temps que j'arrive sous le pont  et les points rouges se trouvaient en haut de la colline, sur la 116e Rue. Lorsque j'atteignis l'immeuble sombre qui faisait l'angle, ils avaient disparu.

   119e Rue. Après minuit, déserte, familière et pourtant étrangère. Les talons de mes chaussures résonnant sur le pavé, je me dirigeai à pas lourds vers le perron de chez moi. Jamais je n'avais vu autant d'étoiles, des étoiles qui parsemaient le ciel et qui scintillaient, aussi serrées que les trous de la râpe de Ma. Drugstore plongé dans le noir, confiserie plongée dans le noir, perron devant moi plongé dans le noir, et fenêtres noires au-dessus de ma tête. Seul brillait le petit réverbère un peu plus loin. Après la crise de fou rire à l'arrière de la camionnette, après tant d'heures passées ensemble, je me retrouvais seul. Après tant de monte-plats, de sous-sols, d'escaliers de service, après avoir rencontré tant de domestiques et reçu tant de merci, le silence, la lassitude.

   Et peut-être même la tristesse en dépit de la monnaie qui tintait dans ma poche. " Il y a quelque chose pour toi dans la caisse à provisions. Joyeux Noël." Serait-ce que je me sentais de nouveau oublié, exclu, victime d'une espèce d'ostracisme naturel ?... Je grimpai les marches de pierre du perron, passai devant la rangée de boîtes aux lettres en cuivre toutes cabossées et pénétrai dans le long couloir silencieux au bout duquel, au pied de l'escalier, la petite ampoule électrique diffusait une lumière blafarde.    Création de mon imagination exacerbée par la fatigue, sur le palier du dessus, brandissant sa crosse, se dressait le pape vêtu d'une robe de brocart qui luisait dans l'ombre. Je réprimai un frisson et montai vers lui. Il disparut. J'arrivai devant la fenêtre noire près de laquelle s'était tenue la silhouette. On ne voyait rien au travers. Bon sang ! c'était toujours le même problème : seul, seul. Fouillant dans ma poche à la recherche de ma clé, je puisai une  piètre consolation dans la présence des pièces de monnaie. Noël pour le monde entier, Noël pour les flics irlandais et les concierges irlandais, Noël pour les coiffeurs italiens et les marchands de glace italiens, Noël pour les balayeurs en uniforme blanc. 

   J'entendais les mots " joyeux Noël "résonner dans ma tête. Bon sang ! que j'étais fatigué ! Et seul !
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Putain ! Le scabreux, le sordide, la perversité et la misère, en regard de n’importe lequel des personnages d’Ulysse, il en avait à revendre, à surprendre, à se pendre. Mais le langage, oui le langage pouvait métamorphoser comme par magie l’ignominie de sa vie et de ses pensées en précieuse littérature, en cet Ulysse tant vanté. Il pouvait le libérer de son exil dépravé, de son esclavage inaltérable. La sensibilité et la volonté, mis sous forme de langage, venaient facilement à bout du silence, de l’exil et du mensonge.
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-Tu as commencé par rédiger un premier jet sans ta sœur, et, inéluctablement, elle a fini par s’insérer dans ton récit, aussi étrange, aussi bizarre que puisse paraître le fait de commettre un inceste sans mentionner l’existence d’une sœur, en tout cas au début. Tu as amputé le début de ton histoire, et il va falloir que tu fasses amende honorable. Une force qui a exercé une telle influence dans ta vie ne peut pas être étouffée. – J’avais espéré, une fois que j’aurai fini, après que j’aurais déballé toute cette misère, l’introduire sous la forme d’un autre personnage… - Dans ce cas-là, tu te retrouvais avec une histoire boiteuse. (…) Décharge ta conscience. Il est évident que tu ne peux pas faire autrement, car tu n’es pas différent de celui que tu étais…
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Il était ce qu’il était, et ce qu’il était, il ne pouvait pas lui dire – du moins pas plus qu’il ne l’avait fait, et c’était déjà trop, si bien qu’il serait peut-être préférable qu’il s’éloigne, qu’il laisse leur amitié mourir de sa belle mort. Et puis qu’il laisse les paroles d’Edith glisser sur lui jusqu’à ce qu’il puisse décemment prendre congé. Il était expert dans l’art de faire semblant d’écouter. De plus, il était assez fatigué pour craindre de se découvrir davantage s’il s’engageait trop dans la conversation, s’il alimentait l’intérêt d’Edith par ses réponses. Elle parlait des pratiques de certains hommes d’affaires respectables, de gens pieux, riches, mariés et influents, de choses qui étaient réellement sordides, avec de jeunes enfants et des prostituées – des oncles avec leurs jeunes nièces, que cela n’empêchait pas de tenir un discours moralisateur de façade. Ceux-là étaient méprisables à cause de leur hypocrisie. Et elle détestait les hypocrites.
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Il était sans cesse écartelé entre des désirs contradictoires. Ayant publié un roman, il voulait d’abord et avant tout en écrire un autre. Seulement, faute d’être indépendant sur le plan économique, il n’avait pas les moyens de s’atteler à une longue œuvre ainsi qu’il aurait pu le faire grâce à la générosité d’Edith. Cette source était tarie, sauf s’il se reniait et renonçait à son désir d’acquérir une autonomie d’adulte. Il n’y avait en outre aucune garantie, ni aucun signe, qu’un retour à la situation antérieure, au ménage à trois qu’ils formaient avec Dalton, produirait de meilleurs résultats que ceux obtenus au cours des quatre années qui s’étaient écoulées depuis qu’il avait fini son roman. Ce qui amenait la question de la subsistance, de la recherche d’un boulot. Or, un boulot l’empêcherait sans nul doute d’écrire…
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