Une sueur épaisse lui collait à la peau. Amy prit lentement conscience de ses cheveux, mouillés et piquants, qui s'enfonçaient dans sa peau et ses yeux. Une gêne bien dérisoire par rapport à sa cheville cassée et à son crâne commotionné, mais c'est cette douleur qui la gênait le plus.
Elle était allongée par terre, incapable de bouger pour partir de là, la sueur refroidissant dans son dos. L'odeur des arbres emplissait d'un lourd parfum son nez cassé.
Amy mettait tout son cœur à haïr ses cours de français. La prof était une conne, et pourquoi diable fallait-il qu’une fenêtre soit du masculin ou du féminin ? Mais elle aimait l’idée de connaître cette langue. Le français était une langue sexy. Elle s’imaginait pouvoir séduire quelqu’un d’un peu plus évolué que Jake en lui murmurant à l’oreille quelques mots en français. Quelqu’un de plus vieux. De beaucoup plus vieux. Elle aimait Jake, bien sûr; elle le pensait vraiment quand elle le lui disait. Son prénom était soigneusement écrit au Tippex sur son sac et, quand elle pensait à l’avenir, il en faisait partie. Mais depuis quelques semaines, elle avait commencé à remarquer de plus en plus les différences qui les séparaient.
Le français était une langue sexy. Elle s’imaginait pouvoir séduire quelqu’un d’un peu plus évolué que Jake en lui murmurant à l’oreille quelques mots en français. Quelqu’un de plus vieux. De beaucoup plus vieux. Elle aimait Jake, bien sûr ; elle le pensait vraiment quand elle le lui disait. Son prénom était soigneusement écrit au Tippex sur son sac et, quand elle pensait à l’avenir, il en faisait partie. Mais depuis quelques semaines, elle avait commencé à remarquer de plus en plus les différences qui les séparaient.
La boisson avait cimenté leur relation, mais elle n’était pas tout, et l’alcool était devenu moins important pour Matt avec le temps. Ils parlaient, riaient et obtenaient d’excellents résultats en cours (lui en criminologie, elle en littérature anglaise), en partie grâce à leurs discussions passionnées, mais aussi par esprit de compétition. Dès le premier mois, il n’y avait plus eu qu’eux. Pas lui ou elle : toujours eux.
On regarde le cerveau des patients au repos et on en capture les parties qui s’allument. Il y en a très peu, en général. Après, on commence à demander des choses au cerveau. On lui demande d’imaginer et de se souvenir. On pose des questions simples, qui seront faciles même pour un cerveau endommagé avec des souvenirs quotidiens à partir desquels il pourra travailler. Parfois, surtout chez les patients les plus jeunes qui étaient actifs peu de temps avant, on leur demande de s’imaginer en train de jouer à un sport, comme le tennis.
Je n’étais pas jalouse d’elle. À la limite, c’était de lui que j’étais jalouse, oui. J’avais envie d’avoir l’amour de Violet rien que pour moi, mais j’aimais être spectatrice de ce lien si spécial qui les unissait. L’amour en pleine œuvre. Un homme doux et travailleur, notre foyer confortable et notre magnifique bébé…
Maman aime faire comme si elle ne supportait plus papa, et lui aime la taquiner en l’appelant « bobonne » ou en la critiquant, mais au fond, je suis convaincue qu’ils s’aiment encore. Quand on s’installe devant une de leurs séries favorites, ils se collent l’un contre l’autre, les longs cheveux blonds de maman s’étalant sur son torse, et la main de papa sur sa jambe. Quand on est en voiture, ils discutent comme s’ils ne s’étaient pas vus depuis des semaines, si bien que Robin et moi avons depuis longtemps renoncé à les interrompre pour réclamer des bonbons.
L’eau, c’était important. Toute autre boisson plus forte qu’une bière légère priverait le corps de davantage d’hydratation que celle fournie par la boisson, et la déshydratation était un réel danger.
Je pense qu’il nous a fallu six bons mois pour tomber dans les clichés de l’homme qui travaille dur et qui ne souhaite qu’un peu de calme à son retour le soir, et de la femme qui passe ses journées seule à gérer sans discontinuer les exigences d’un enfant. Je me souviens d’avoir lu un article qui comparait le fait de s’occuper d’un nouveau-né à de la torture psychologique. Il est tout bonnement impossible d’être au meilleur de soi-même dans ces conditions, et c’est pourtant le moment où vous aimeriez le plus l’être.
Robin ne lâche pas l’écran de télévision des yeux, le menton en avant, un air déterminé imprimé sur son visage. Devant elle, tout un tas de couleurs vives et de voix douces. Les programmes pour enfants. Chaque minute est emplie d’histoires de triomphes tout simples, d’entraide entre amis et d’acquisition de nouvelles compétences. Il n’y a pas de méchant, pas de culpabilité, pas de peur. Tout le monde est heureux, sur son écran.