Les unions heureuses sont celles où les époux savent tout l'un de l'autre, ou bien celles où ils ignorent tout. Les mariages médiocres sont fondés sur une demi-confiance : on laisse échapper un aveu, un soupir ; on livre une parcelle de désir ou de rêve, puis on prend peur ; on se rétracte ; on s'écrie : "Mais, non, tu n'as pas compris..."; on murmure lâchement : "Tu sais, il ne fallait pas prendre à la lettre ce que j'ai dit" ; on se hâte de renouer les cordons du masque, mais, déjà, l'autre a vu ces larmes, ce sourire, ce regard inoubliable... S'il est sage, il ferme les yeux. Sinon, il insiste, s'acharne : "Mais tu as dit... Ecoute, je ne te comprends pas, tu m'as avoué toi-même..." Puis "Jure-moi que tu ne regrettes pas cette femme... Jure-moi que tu ne regrettes pas cette vie..."
Thérèse, dans l'ombre du lit conjugal, répétait à voix basse :
- Jure-moi que tu ne penses plus à Renée... Jure-moi que tu es heureux...