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Citations de Jean Genet (415)


Mon enfance était morte et, avec elle, en moi, les puissances poétiques. Je n'espérais plus que la prison demeurât ce qu'elle fut longtemps, un monde fabuleux. Un beau jour, tout à coup, à des signes je compris qu'elle perdait ses charmes. Cela veut dire, peut-être, que je me transformais, que s'ouvraient mes yeux à la vision habituelle du monde.
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(Solange s'accroupit sur le tapis et, crachant dessus, cire des escarpins vernis.)
CLAIRE : Je vous ai dit, Claire, d'éviter les crachats. Qu'ils dorment en vous, ma fille, qu'ils y croupissent. Ah ! ah ! vous êtes hideuse, ma belle. Penchez-vous davantage et vous regardez dans mes souliers. Pensez-vous qu'il me soit agréable de me savoir le pied enveloppé par les voiles de votre salive ? Par la brume de vos marécages ?
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Claire/Madame : Et ces gants ! Ces éternels gants ! Je t’ai dit souvent de les laisser à la cuisine. C’est avec ça sans doute que tu espères séduire le laitier. Non, non, ne mens pas, c’est inutile. Pends-les au-dessus de l’évier. Quand comprendras-tu que cette chambre ne doit pas être souillée ? Tout, mais tout ce qui vient de la cuisine est crachat. Sors. Et emporte tes crachats. ! Mais cesse !
Solange/Claire : Je vous hais ! Je vous méprise. Vous ne m’intimidez plus. Réveillez le souvenir de votre amant, qu’il vous protège. Je vous hais ! Je hais votre poitrine pleine de souffles enbaumés. Votre poitrine…d’ivoire ! Vos cuisses…d’or ! Vos pieds…d’ambre ! (Elle crache sur la robe rouge.) Je vous hais !
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Sans dire exactement le contraire de ce qui fut, l’écriture n’en donne que la face visible, acceptable pour ainsi dire muette car elle n’a pas les moyens de montrer, en vérité, ce qui la double… Or, comme toutes les voix la mienne est truquée, et si l’on devine les truquages aucun lecteur n’est averti de leur nature. Les seules choses assez vraies qui me firent écrire ce livre : les noisettes que je cueillis dans les haies d’Ajloun. Mais cette phrase voudrait cacher le livre, comme chaque phrase la précédente et ne laisser sur la page qu’une erreur ; un peu de ce qui se passa souvent et que je ne sus jamais décrire avec subtilité et c’est subtilement que je cesse de le comprendre…
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La chambre de Madame. Meubles Louis XV. Au fond, une fenêtre ouverte sur la façade de l'immeuble en face. A droite, le lit. A gauche, une porte et une commode. Des fleurs à profusion. C'est le soir. L'actrice qui joue Solange est vêtue d'une petite robe noire de domestique. Sur une chaise, une autre petite robe noire, des bas de fil noirs, une paire de souliers noirs à talons plats.

Claire, debout, en combinaison, tournant le dos à la coiffeuse. Son geste - le bras tendu - et le ton seront d'un tragique exaspéré.

Et ces gants! Ces éternels gants! Je t'ai dit souvent de les laisser à la cuisine. C'est avec ça, sans doute, que tu espères séduire le laitier. Non, non, ne mens pas, c'est inutile. Pends-les au-dessus de l'évier. Quand comprendras-tu que cette chambre ne doit pas être souillée? Tout, mais tout! ce qui vient de la cuisine est crachat. Sors. Et remporte tes crachats! Mais cesse!
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La solitude, comme je l'entends, ne signifie pas condition misérable mais plutôt royauté secrète, incommunicabilité profonde mais connaissance plus ou moins obscure d'une inattaquable singularité.
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Je me recouche jusqu’à l’heure du pain. L’atmosphère de la nuit, l’odeur qui monte des latrines bouchées, débordantes de merde et d’eau jaune, font les souvenirs d’enfance se soulever comme une terre noire minée par les taupes.
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Les révolutionnaires risquent de s'égarer dans trop de miroirs . Il faut pourtant des moments saccageurs et pillards , côtoyant le fascisme , y tombant quelques fois momentanément , s'en arrachant , y revenant avec plus d'ivresse . ( " Le captif amoureux " Gallimard folio page 424 )
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Sans me croire né magnifiquement, l'indécision de mon origine me permettait de l'interpréter. J'y ajoutais la singularité de mes misères. Abandonné par ma famille il me semblait déjà naturel d'aggraver cela par l'amour des garçons et cet amour par le vol, et le vol par le crime ou la complaisance au crime.

Ainsi refusai-je décidément un monde qui m'avait refusé. Cette précipitation presque joyeuse vers les situations les plus humiliées tire peut-être encore son besoin de mon imagination d'enfant, qui m'inventait, afin que j'y promène la personne menue et hautaine d'un petit garçon abandonné, des châteaux, des parcs peuplés de gardes plus que de statues, des robes de mariées, des deuils, des noces, et plus tard, mais à peine plus tard, quand ces rêveries seront contrariées à l'extrême, jusqu'à l'épuisement dans une vie misérable ; par les pénitenciers, par les prisons, par les vols, les insultes, la prostitution, tout naturellement ces ornements (et le langage rare s'y attachant) qui paraient mes habitudes mentales, les objets de mon désir j'en parai ma réelle condition d'homme mais d'abord d'enfant trop humilié que ma connaissance des prisons comblera.

Au détenu la prison offre le même sentiment de sécurité qu'un palais royal à l'invité d'un roi. Ce sont les deux bâtiments construit avec le plus de foi, ceux qui donnent la plus grande certitude d'être ce qu'ils sont – qui sont ce qu'ils voulurent être, et le demeurent. La maçonnerie, les matériaux, les proportions, l'architecture sont en accord avec un ensemble moral qui laisse indestructibles ces demeures tant que la forme sociale dont ils sont le symbole tiendra. La prison m'entoure d'une garantie parfaite. Je suis sûr qu'elle fut construite pour moi – avec le palais de justice, sa dépendance, son monumental vestibule.

Selon le plus grand sérieux tout m'y fut destiné. (pp. 97-98)
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LA PARADE


SILENCE, il faut veiller ce soir
Chacun prendre à ses meutes garde.
Et ne s’allonger ni s’asseoir
De la mort la noire cocarde

Piquer son cœur et l’en fleurir
D’un baiser que le sang colore.
Il faut veiller se retenir
Aux cordages clairs de l’aurore.

Enfant charmant haut est la tour
Où d’un pied de neige tu montes.
Dans la ronce de tes atours
Penchent les roses de la honte.
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J'éprouve comme une curieuse soif, je voudrais boire, c'est-à-dire souffrir, c'est-à-dire boire mais que l'ivresse vienne de la souffrance qui serait une fête. Tu ne saurais être malheureux par la maladie, par la faim, par la prison, rien ne t'y contraignant, sois-le par ton art.
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Inventez, sinon des mots, des phrases qui coupent au lieu de lier.
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Les trois sommets invisibles les uns aux autres, à tour de rôle se répondaient – à cette époque ou un peu plus tard Boulez préparait Repons – le soleil n’était pas encore levé mais il coloriait de bleu à l’est le ciel encore noir
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Mes aimés seront ce que vous appelleriez : des voyous de la pire espèce
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Les arbres du silence accrochent des soupirs.
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Piquer son cœur et l'en fleurir
D'un baiser que le sang colore.
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Ecrivez des pièces si vous voulez mais ne salopez pas les miennes. Je fais ce que je veux. J'écris comme je veux.
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...cette haine dirigée contre lui mordait son marbre et sculptait sa beauté.
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Notre-Dame ne pensait à rien, et c’est ce qui lui donnait l’air de tout savoir d’emblée, comme par une sorte de grâce.
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Si dans vingt ans je rencontrais au bord de mer un promeneur couvert d'un grand manteau , et que je lui parle de l'Allemagne et de Hitler , il me regarderait sans répondre et brusquement , saisi de panique , je soulèverais le pan de manteau et je verrais à sa boutonnière la croix gammée . Je bégaierais : " Alors , Hitler , c'est vous ? " . Ainsi m'apparut Divers , aussi grand , aussi évident , aussi pur que l'injustice divine . ( " Miracle de la rose " Gallimard 1951 , page 250 )
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