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Critiques de Jean Hegland (1081)
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Dans la forêt

Enfin ! Enfin un roman réaliste et saisissant sur la fin de notre civilisation de consommation où l'essence, l'électricité viennent à manquer… Enfin un roman ne nous proposant pas une fin du monde suite à une invasion extra-terrestre, une infection, une attaque de mutants, une météorite (ou que sais-je encore) le tout dans une époque lointaine et futuriste où le personnage central aurait pour mission de sauver le monde. Bref, une fin du monde souvent décrite comme un aléa venant de l'extérieur où l'homme serait une victime et non un acteur. Non, rien de tout cela. Un roman simple, reprenant le vécu de Nell à travers son journal. Cela parle immédiatement au lecteur qui peut de suite s'identifier à cette jeune fille et sa sœur qui au départ restent dans l'expectative en espérant un retour à la « normale » puis qui prennent leur destin en main lorsqu'elles comprennent que ce qu'elles ont connu est du passé et qu'une nouvelle ère plus proche de la nature, moins dépendante de tout ce qui est matériel s'ouvre devant elles.





Un roman magnifique qui au départ peu dérouter par sa simplicité. Effectivement, les raisons du changement sont évoquées brièvement, aucune information n'est donnée au lecteur qui se retrouve plongé dans une sorte de huis clos au milieu d'une forêt avec deux jeunes filles loin de tout, attendant et vivotant. Le lecteur a envie d'en savoir plus sur les raisons, les conséquences d'un point de vue terrestre mais les seules informations sont celles que donne Nell. Très rapidement, le lecteur comprend justement que dans une situation identique, le commun des mortels serait dans la même situation ; à savoir peu informé, dépendant des rumeurs, des on-dit qui courent et se préoccupant surtout de survivre en attendant des jours meilleurs.





Un roman réaliste puisque l'auteur ne se permet pas d'édulcorer la situation et le récit ne tombe à aucun moment dans le pathos. Les deux jeunes filles se retrouvent livrées à elle-même sans mère, puis sans père. La société qu'elles ont connue se désagrège à vue d'oeil, l'homme devient égocentrique, cherchant à survivre au détriment des autres, et ce par le vol, le viol. Voir les espérances futiles (entrée à Harvard, devenir danseuse) de Nell et Eva petit à petit disparaître au profit d'une prise de conscience de la réalité et de problèmes essentiels (faim, soin, danger) et les voir réagir en faisant appel à leur instinct primal (inné) et non à leurs acquis scolaires est passionnant. Leur découverte que la forêt n'est pas seulement un lieu mais une source de richesse et pourvoyeuse de besoin est magnifiquement décrite dans ce livre.





Un roman écrit il y a plus de vingt ans et qui pourtant reste d'actualité, abordant des problématiques réalistes comme la fin des énergies fossiles, une société basée et dépendante de l'électricité, des machines, des ordinateurs où l'homme n'a qu'une place de consommateur. La perte de cet acquis permet à l'homme de se retrouver avec lui-même mais également de redécouvrir la nature qui l'entoure. Cela redonne sa véritable place à l'homme qui a tendance à se croire supérieur, invulnérable et autonome. Comme l'auteur le dit si bien dans son récit au travers d'un échange entre les deux sœurs, notre civilisation « électricité » n'existe que depuis à peine deux cents ans alors que l'homme, lui était là bien avant et sans en avoir besoin.





Comme le démontre l'histoire, des civilisations se sont créées et ont été détruites… pour permettre à l'homme à chaque fois de rebondir. Ce livre n'est pas seulement un roman « apocalyptique » mais un beau message d'espoir concernant l'homme et un retour à l'humilité de celui-ci. Un livre qui ne laissera pas indifférent dans tous les cas. 👍
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Dans la forêt

Sous des airs de science fiction, c’est plutôt une robinsonade que nous propose avec beaucoup de talent Jean Hegland. Certes, il n’y a pas la mer, mais l’environnement hostile et l’isolement total du reste des humains (s’il en reste) recrée les conditions d’une vie insulaire.



On sait que des événements graves se sont produits peu à peu, (épidémies ?, catastrophe économique, on en sait trop rien et ce n’est pas le sujet) , ruinant l’organisation, qui après coup apparaît bien précaire, de nos institutions. Fin de la distribution d’électricité, fin des communications, des sources d’énergies fossiles, fin de toute activité commerciale, Nell, Eva et leurs parents sont contraints de vivre en autarcie à l’orée d’une forêt. Quatre, trois puis deux, c’est bientôt seules qu’Eva et Nell vont gérer leur existence, pour assurer leur survie.



Frugalité, utilisation des moindres objets qu’avait amassés leur père (au cas où….), jardinage, les deux jeunes filles ne renoncent cependant pas à leurs rêves, la danse ou Harvard. Malgré les contrainte de plus en plus exigeantes, l’une étudie et l’autre s’exerce à la barre.



Le moindre objet récupéré devient une ressource, et c’est grâce à un carnet vierge que Nell utilise pour noter ses états d’âme et ses projets , autant que ses souvenirs que nous sommes conviés à partager son intimité.



C’est avec beaucoup de pudeur que l’auteur analyse la relation fusionnelle et sensuelle qui se construit entre les deux soeurs. Le désir a ses exigences et s’accommode avec la réalité.



La qualité de la narration est excellente, le ton est juste, et permet une communion sans réserve avec les propos de la jeune narratrice.



Un petit bémol pour la fin (que je tais, bien sûr). Certes il n’est pas simple de se sortir de se genre de récit mais ici on sombre un peu trop dans la métaphore



Enfin, ce roman aux allures post-apocalyptique ne doit pas rebuter les anti-science-fiction. Les circonstances qui sont à l’origine de ce huis-clos tragique ne constituent qu’un prétexte, pour un magnifique récit, qui ne tombe pas dans le piège d’un message moralisateur, tout en pointant bien du doigt la précarité des artifices qui nous permettent aujourd’hui de profiter d’un environnement confortable sans effort.
Lien : http://kittylamouette.blogsp..
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Dans la forêt

C'est un bien curieux Noël que s'apprêtent à fêter Nell et Eva puisque aujourd'hui le monde a changé. Il n'y a plus d'électricité, plus de téléphone, plus une goutte d'essence. Aucun avion dans le ciel. Les écoles, les bibliothèques et les banques sont fermées. Et c'est à quelques dizaines de kilomètres de Redwood, à l'orée de la forêt, que les deux sœurs, orphelines depuis peu, tenteront de marquer le coup. Nell recevra un cahier, retrouvé par hasard derrière une commode. Pour Eva, ce sera sa paire de chaussons de danse que sa sœur lui aura réparée. Un Noël bien loin de ce qu'elles ont connu. Une vie bien loin de ce qu'elles se sont imaginées, la danse pour l'aînée, Harvard pour la benjamine. Aujourd'hui, il faut apprendre à survivre dans ce monde, se battre, s'adapter...



Dans ce récit post-apocalyptique, le monde n'est plus ce qu'il était. Ni eau, ni électricité, ni essence, réduisant toute activité commerciale et économique presque à néant. Les gens fuient vers un ailleurs, tentent de comprendre ce qui s'est passé. Épidémie ? Guerre? Attaque chimique ? Personne ne le sait. C'est dans ce contexte de désolation que tentent de survivre Eva et Nell, deux soeurs âgées respectivement de 18 et 17 ans. Apprenant à se servir du moindre objet, cultivant chaque parcelle de leur potager, minimisant les repas, économisant sur ce qu'il leur reste d'essentiel tel que la farine ou le sucre, inventant une nouvelle vie, elles survivent tant bien que mal dans cette maison, désormais seules, leurs parents étant décédés. Nell, la narratrice, rapporte jour après jour, son quotidien qu'elle note dans le cahier offert par sa sœur. Le lecteur partage avec elle ses doutes, ses angoisses, ses espoirs. Deux sœurs pour lesquelles on éprouve compassion et attachement. Jean Hegland dépeint à merveille d'une part la relation entre les deux sœurs, quasi fusionnelles, et d'autre part, cette nature environnante, foisonnante et parfois hostile, cette forêt imposante, personnage à part entière de ce roman. Elle décrit avec moult détails le quotidien d'Eva et Nell, leur vie dans cette clairière. Ce huis-clos, paru il y a 20 ans aux États-Unis, fait preuve d'une originalité et d'une richesse incomparables, d'une narration vivante et vivifiante. Un temps suspendu troublant, sensuel et puissant...
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Dans la forêt

Nell et Eva s'apprêtent à célébrer noël, mais cette année la fête de la nativité a un gout amer. Le premier noël sans les parents et surtout sans électricité.

Elles vivent dan la forêt depuis toujours. Le désir de Nell était d'entrer à Harvard mais c'était avant le grand chamboulement.

Eva c'est la danse sa raison de vivre comme jadis sa mère, mais danser sans musique c'est comme peindre sans couleurs.

Une autre vie s'offre à elles, pas facile, cruelle, au rythme des saisons elles apprennent à survivre avec le petit espoir du retour de la fée électricité.

" Dans la forêt" de Jean Hegland est un petit bijou, ce roman écrit en 1996 n'a pas pris une ride.

" Dans la forêt" nous rappelle que l'espèce humaine est en équilibre instable, que la nature est plus forte, que nous ne pouvons lutter face à elle.

Nous, qui sommes habitués au confort , qui polluons, détruisons les ressources, la vie animale, ce roman a de quoi nous faire réfléchir. Nous entrons dans cette forêt inquiétante, l'odeur des mousses et champignons est omniprésente, les feuilles qui craquent sous les pas, le murmure d'un ruisseau qui trace son chemin, les séquoias, arbres majestueux et immortels....

Tout cela Nell et Eva vont le découvrir. Et pour finir je voulais parler de la tension psychologique palpable entre deux sœurs que tout sépare.

Un magnifique roman qui nous remet à notre place.

bonne lecture et n'oubliez pas d'éteindre la lumière en sortant.

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Dans la forêt

Me voilà de retour après quelques heures d'immertion totale auprès de Nell et Eva, dans la forêt, où le monde s'est quelque peu arrêté, loin de toute cette frénésie actuelle de la surconsommation.

Seules les étoiles viennent éclairer l'obscurité.

Seule la nature remplit les ventres.

Seuls l'amour et l'envie de vivre viennent envelopper nos douces héroïnes dans ce roman hyptonisant à souhait.

Dans la forêt, il y a de l'entraide, de l'amour, des peurs, des disputes, mais il y a surtout le vent de la vie.



« Pourquoi les hommes cherchent-ils à marcher sur l'eau quand il est possible de danser sur la terre ? »



Magnifique roman, bien écrit, bien traduit, bien construit. le roman débute dans la brume des souvenirs de la cohésion familiale où le pire est à craindre. La société s'effondre et emporte avec elle ces êtres au ciel en avance. Puis il y a l'après, la vie n'est pas un long fleuve tranquille, même en pleine forêt, dans une maison prête à s'effondrer elle aussi. Les deux soeurs vivront ces tumultes au gré des saisons, en autarcie. Les rêves les tiennent debout un moment, finissent par s'éteindre, la survie comme seul bagage.



Brillamment servi, Dans la forêt est un roman époustouflant sur fond apocalyptique, un portrait de deux soeurs tenaillées par la vie. Une force incroyable se dégage de ce roman. C'est certes un peu lent mais on se sent vite happé dans cet univers clos. Car les mots sont justes, les personnages sont là, on les voit, on les sent, on les devine.

Quel voyage mes amis!
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Apaiser nos tempêtes

Dans la forêt, 683 chroniques, une note moyenne de 4,19/5, autant dire que la barre est haute pour ce second roman de Jean Hegland. Roman publié sous le titre de Windfalls en 2004 et qui, à lire les notes de l’auteure, n’a pas convaincu certaines maisons d’édition.



Apaiser nos tempêtes est un tout autre livre, plus personnel, plus sociologique aussi. Ce roman est Le livre sur la maternité. L’auteure s’attarde sur une multitude de situations en regard de la maternité (avortement, mère solo, maladie de l’enfant, adolescence difficile, deuil, culpabilité maternelle, peur, etc etc). J’ai parfois eu l’impression d’un abécédaire de la maternité, c’est tout dire. Autant dire qu’il faut aimer les enfants pour se plonger dans ce pavé. Car ça va parler enfants et ça va aller très vite. Bébés, enfants, jeunes ados, ça défile. Sans réel temps pour s’attacher, pour ressentir.



Deux héroïnes, Anna et Cerise. Deux univers opposés, l’une réussit, l’autre échoue. C’est net et précis et ça abonde de clichés tellement redondants que ça me laisse bien perplexe.

Une disparité aussi entre les deux héroïnes, Cerise m’a semblé plus travaillée, plus attachante, plus vivante aussi. Anna m’a semblé plus insipide et sans grand intérêt.



Je n’ai pas toujours réussi à bien comprendre ces deux mères et lorsque j’y parvenais (quelle mère ne s’est elle pas sentie dépassée à endosser plusieurs rôles dans une journée ?), c’est alors l’Amérique que je ne comprenais pas. Tellement froide et sclérosée dans l’indifférence et le chacun pour soi. En lisant ce livre, on mesure la chance de vivre en France ou en Belgique quand on est mère célibataire, sans travail qui plus est.



Dommage que Apaiser nos tempêtes s’apparente davantage à un roman sociologique avec un ensemble de figures hâtives, faciles autour de la maternité sans réel ancrage ou accroche émotionnelle. 550 pages et pourtant j’ai trouvé que tout allait trop vite.



Ce roman me laisse donc sur des impressions mitigées, malgré une histoire fluide qui se lit aisément, je n’en garderai pas un souvenir mémorable. Quelques coquilles ont également gêné ma lecture, ce qui est bien dommage vu le prix d’un tel roman.
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Dans la forêt

Essayons de nous orienter, d'accord ?

Nous nous rendons en Californie, plus précisément à Redwood City, située sur la péninsule de San Francisco.

Au loin, une forêt de séquoias, et au milieu coule une rivière (elle était facile, celle-là).

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C'est dans cette luxuriante forêt que se trouve, très à l'écart des plus proches voisins, la maison de la famille dont nous parle Jean Hegland.

L'époque, on n'en sait rien, hormis que c'est dans le futur.

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La mère, danseuse professionnelle qui a bien malgré elle transmis sa passion à sa fille aînée, Eva, succombe à un cancer. Quelque temps plus tard, le père qui ne s'est jamais remis de la disparition de sa femme, est victime d'un accident.

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Les deux gamines, sortant à peine de l'adolescence, se retrouvent seules et doivent apprendre à se débrouiller.

L'apocalypse a eu lieu, on n'en connaît pas la raison.

Tout a commencé par des coupures d'électricité, de temps en temps et de courte durée au début, puis de plus en plus fréquentes et plus longues.

Jusqu'à ce qu'il n'y ait plus d'électricité du tout.

Nul besoin de vous faire un dessin de toutes les répercussions qu'entraîne cette pénurie.

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Nell, 17 ans, soeur cadette d'Eva la danseuse, grande amoureuse de littérature, cherche des solutions dans les livres et encyclopédies.

C'est elle la narratrice du roman et tout nous est transmis par son journal, dans lequel elle rapporte tous les détails de son quotidien.

Il doit être grassouillet, le cahier...

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Ce qui m'a frappée dans ce roman, c'est la beauté de la plume.

Je ne vous cacherai pas que sans elle, j'aurais peut-être baissé les bras à un moment parce qu'il ne se passe pas grand-chose et l'abondance de détails m'a un peu ennuyée.

Juste un peu, parce que l'autrice a le don de nous embarquer pour aller plus loin et encore plus loin dans notre lecture.

Et d'une histoire lisse, elle arrive à nous immerger dans un merveilleux voyage, où les émotions se bousculent.

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Les liens entre les deux soeurs sont extrêmement forts. Bien sûr qu'elles sont différentes et se disputent, ne sont pas forcément d'accord sur tout.

Mais c'est le profond amour qu'elles éprouvent l'une pour l'autre qui domine, même quand elles ne se parlent pas.

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J'ai beaucoup aimé ce roman, inspiré de l'histoire de Lone woman, Amérindienne dernière survivante de sa tribu, les Nicoleño, qui vécut dans un isolement total sur l'île San Nicolas, dans les Channel Islands de l'actuelle Californie de 1835 jusqu'à sa découverte en 1853. (merci Wiki.)

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Je finirai ma bafouille en remerciant chaleureusement ma Sandrinette.

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Dans la forêt

C'est la panne.

Le cauchemar de tout babelionaute qui se respecte.

La panne… d'inspiration ?

Nenni, la panne d'électricité.

Plus de jus.

Plus d'ordi.

Plus d'internet.

Plus d'amis.



La mouise absolue.



C'est la panne donc, dans cette maison familiale isolée en lisière de forêt californienne. Une famille un brin fantasque y vivait jusqu'ici en belle harmonie avec la nature environnante. Pour eux rien de très alarmant nonobstant, les réflexes autarciques permettront de subsister jusqu'au "retour à la normale", comme dirait la essaineséèf.



Faudrait juste pas que le problème persiste...



Pour connaitre la suite il te faudra pénétrer Dans la forêt, gardant en tête que si cette aventure frise la fiction post-apocalyptique, il serait injuste de la réduire à ce seul concept. Car d'apocalypse il n'est finalement question que de loin, en arrière-plan d'une singulière et palpitante chronique écolo qui nous cause d'isolement, de retour à la nature, et de liens familiaux.



L'on constatera non sans déplaisir (en tout cas moi) que dans cet ouvrage édité aux Etats-Unis en 1996 (et traduit en France il y a deux ans seulement, va savoir pourquoi), Jean Hegland évoquait déjà les fâcheuses conséquences d'une surconsommation forcenée. Mais plutôt que de s'appesantir sur les erreurs passées, son futur est espérance et son récit tout en étonnants contrastes, oppressant et néanmoins très lumineux.



Petite remarque en aparté, mon côté binaire aurait bien apprécié une suite à ces péripéties. Même vingt-ans après… pourquoi pas ?




Lien : http://minimalyks.tumblr.com/
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Dans la forêt

Tout d'abord un grand merci à babelio et à tous ses «adeptes» sans qui je n'aurai pas lu ce livre, en effet je ne suis pas un adepte du genre «nature writing» mais certaines critiques m'ont attiré, alors pourquoi pas...



J'ai été happé par la poésie de cette histoire, c'est très bien écrit et agréable à lire.

L'auteure pose les questions sur notre rapport à la nature, sur la fin de l'opulence et sur un autre mode de vie possible. Un retour forcé à l'essentiel où l'on s'aperçoit que les habitants des campagnes s'en sortent mieux que ceux des villes, mais ce n'est pas une surprise.



Bref un roman d'anticipation qui pourrait bien devenir réalité...

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Dans la forêt

Cela faisait un moment que j'avais envie de lire ce livre. Je ne vais pas parler d'un coup de cœur mais plutôt d'un coup au cœur. L'écriture est belle, intense et magnifique. L'histoire, elle, est terrifiante. Ce roman a été écrit il y a 21 ans et il faut regarder la vérité en face : cela pourrait très bien être la réalité de demain. Mieux vaut ne pas lire ce livre si on n'a pas le moral... quoi que de toute façon on l'aura perdu en le refermant.



Quelques passages m'ont vraiment perturbée pour ne citer qu'un exemple. Bref, impossible de ressortir indemne de cette lecture.



Quoi qu'il en soit, merci à Neneve de l'avoir choisi pour la pioche d'août.

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Dans la forêt

Un nouveau trésor que nous offre l'excellente maison d'édition Gallmeister après My Absolute darling, quel cadeau, merci !!!



Comment rendre l'Apocalypse intimiste, la faire vibrer d'une émotion ardente et laisser le lecteur pantelant de reconnaissance ?



1- Faire la part belle à l'imagination. Tout est suggéré dans ce roman d'une grande finesse. Pas de zombies, de combats, de surenchère d'action. A peine nous suggère-t-on que les Etats-Unis ( le monde peut-être ) est dévasté par une catastrophe politique non identifiée qui a plongé le pays dans le chaos, sans électricité, sans essence. le rythme du récit oscille entre lenteurs hypnotiques et accélérations emplies de suspense.



2- Recentrer l'action sur deux héroïnes adolescentes, deux soeurs qui depuis « que c'est arrivé », vivent celles, isolées en bordure d'une forêt, seul espace lieu qui traverse le récit de A à Z. Un roman du repli, de l'enfouissement, de la résistance. Ce qui est magnifique dans ce roman de la résistance, c'est la puissance émotionnelle qui se dégage de chaque victoire du quotidien, de chaque acceptation de la perte du monde d'antan. L'éveil vers une autre vie est possible uniquement à ce prix.





3- Insuffler de la poésie dans chaque page. La magie naît d'un rien, d'un sachet de thé décoloré, du souvenir d'une musique qui vous a fait dansé et que vous entendez toujours dans la tête, de l'évocation d'une belle chose du passé. Toutes les incursions de Nell et Eva dans la forêt sont d'une rare beauté. Cette forêt qui est toujours là, immuable, alors que la civilisation et la modernité disparaissent, cette nature qui nourrit, protège et sauve. La fin est bouleversante, là, la forêt prend toute sa place. L'écriture est puissante.



4- Faire confiance aux lecteurs. Jean Hegland nous livre une réflexion très subtile sur notre rapport à la nature et notre société déconnectée d'elle avec ses actes irréfléchis aux conséquences dramatiques, mais jamais cela ne passe par une dénonciation frontale lourdaude. Les survivants post-Apocalypse seront ceux qui sauront renouer avec la sagesse humble des Amérindiens du passé .



" Je n'ai jamais vraiment su combien nous consommions. C'est comme si nous ne sommes tous qu'un ventre affamé, comme si l'être humain n'est qu'un paquet de besoins qui épuisent le monde. Pas étonnant qu'il y ait des guerres, que la terre est l'eau et l'air soient pollués. Pas étonnant que l'économie se soit effondrée, s'il nous en faut autant à Eva et à moi pour rester tout bonnement en vie. je me dis, parfois, que ce serait tellement mieux si l'on devait taire nos désirs, nous débarrasser de notre besoin d'eau, d'abri et de nourriture."



5- Célébrer la force que l'on peut puiser dans la lecture. Tout au long du récit, le cheminement intérieur de la narratrice vers l'acceptation de cette nouvelle vie se fait grâce à sa précieuse encyclopédie, d'abord lue solennellement pour ne pas sombrer puis comme ressource pour survivre. Magnifique message quand la fin de la civilisation semble inéluctable.

Cela m'a fait penser au court roman de Jack London, La Peste écarlate, lu il y a peu. Là aussi, un monde post-apocalypse mais plus de 70 ans après la catastrophe, là aussi les livres comme trésor par le biais d'une grotte-bibliothèque laissée en héritage aux survivants pour leur transmettre le savoir du passé.
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Dans la forêt

« C'est incroyable comme l'espoir plane tout près du désespoir ».



Dans la forêt de Jean Hegland vous trouverez, vous lecteurs cueilleurs de belles histoires, une magie sylvestre, qui enveloppe de ses nuances de verts, de la douceur de ses feuilles et du piquant de ses épines, les épreuves de vie de Nell et de sa soeur Eva, ces deux nymphes des bois. Cette forêt qui de repère austère et isolé, va devenir au fil de ce roman initiatique, une nature nourricière et généreuse, un nid sauvage. Pour peu qu'on prenne le temps de connaitre sa logique et de percevoir son mystère. de la respecter. En cela ce livre est avant tout à mes yeux une merveilleuse fable écologique.



Dans la forêt, craquent des étincelles de poésie à chaque feuille tournée, à chaque page retournée. Une poésie aromatique. Mélancolique. Bucolique. Magique. Cosmique. Animiste.



« Quand nous avons fait l'amour, l'obscurité était si totale que je n'arrivais pas à distinguer son visage, bien qu'il ne soit qu'à un souffle du mien. Aussi ai-je regardé les étoiles, et je les ai vues se parer d'un nouvel éclat et descendre sur nous au point qu'elles semblaient juste au-dessus de nos têtes, au point que, si je le voulais, il me suffisait d'ôter mes mains des épaules d'Eli pour les disposer autrement d'un geste ample. Mais brusquement, ce qui se passait sur terre a nécessité toute mon attention. J'ai fermé les yeux, j'ai senti une nouvelle galaxie d'étoiles s'épanouir en moi ».



Dans la forêt bruisse un amour fou, celui de ces deux soeurs, inséparables même pour l'amour d'un autre, inséparables même quand la mort rôde, inséparables pour accueillir la vie. L'amour indescriptible pour leurs parents décédés desquels elles ont hérité tant de choses, du recul et de la légèreté grave de cette mère énigmatique, du pragmatisme de ce père bon comme le pain. Ce livre est une ode à la famille, à ses multiples ramifications, son écosystème, son instinct, ses racines qui fondent la granularité, la force, unique et singulière, de tout individu. Les souvenirs de leur vie de famille d'avant les événements se nichent dans les tiroirs, dans tous les lieux et les odeurs. Partout se cache pour mieux surgir la vie d'antan, souvenirs qui sont tout autant douleurs que devoirs de mémoire.



« Chaque fois que nous avons ouvert un placard ou un tiroir, je me suis arc-boutée, prête à reculer et à me sauver alors que les souvenirs attaquaient, crotales au bruit de crécelle et aux crochets s'enfonçant dans ma chair. Mais curieusement, même quand ils mordaient, ces souvenirs n'étaient pas venimeux. Cet après-midi, ce qui m'a rendue triste, c'est le peu de choses qu'il reste quand une personne est partie. Quelques photos, un foulard en soie, un carnet de chèques – et où sont-ils, les gens qui possédaient autrefois ces objets ? Dans quelle pince à cheveux ou chemise de travail notre mère et notre père résident-ils ? ».



Dans la forêt se noircissent les feuilles du journal de Nell qui relate jour après jour le quotidien dans cet après, dont nous ne comprenons pas très bien les tenants et les aboutissants. Les événements qui ont plongé les humains dans ce qui semble bien être une situation « post-apocalyptique », arrivent comme floutés et filtrés par la densité des arbres et des buissons, et semblent multifactoriels : épidémies, finitude des ressources notamment des ressources pétrolières, guerre civile, crises économiques, chômage de masse et misère galopante, trou dans la couche d'ozone, tout est mentionné pêle-mêle au gré des rumeurs, nous ne savons pas exactement et cela donne beaucoup de réalisme au récit car à la place de Nell et de sa soeur Eva, nous n'en saurions pas plus nous non plus, tous les canaux de communication étant devenus caduques. le fait est qu'il n'y a plus d'essence, plus d'électricité, plus d'eau, que tous les magasins sont fermés, tout comme les écoles, les bibliothèques, les mairies, que les habitations ont été pour la plupart abandonnées. Alors ces deux soeurs, jeunes filles désormais orphelines, âgées respectivement de 17 et 18 ans, se contentent d'essayer de survivre dans cette maison isolée en pleine forêt, près de Redwood, espérant des jours meilleurs, pour Eva le retour de la musique et des ballets de danse, pour Nell les études à l'université. Seule compte la survie.



La survie, dans la forêt, c'est apprendre à se servir du moindre objet, réutiliser la moindre chose, cultiver le potager, entretenir le verger, faire des bocaux de tomates, de haricots verts, de prunes, de betteraves, de pêches d'abricots, préparer des fruits et des légumes séchés, ramasser et manger des glands pillés en farine, calculer pour savoir combien de temps pouvoir tenir, couper du bois…La survie c'est tenir, saine de corps et d'esprit dans ce huit-clos oppressant, dans une incertitude totale, une solitude vertigineuse. La survie c'est faire osmose avec la forêt et ses cycles, avec ses animaux sauvages, apprendre d'elle et la laisser nous cueillir.



« Je n'avais jamais réalisé à quel point un potager peut être un jardin d'agrément aussi joli. Les courges arborent de larges fleurs dorées, les fleurs des tomates font comme des étoiles jaunes çà et là parmi les feuilles vertes, et les haricots sont décorés de bourgeons couleur lavande ».



J'ai été envoutée par ce lieu. Je crois que j'aurais pu vous partager des centaines de citations tant l'écriture de Jean Hegland est magnifique. Que ce soit le lien qui unit les deux soeurs, leurs jeux dans la forêt, la description des parents, la tragédie de leur mort et la douleur sans nom qui s'en suit, les espoirs des deux soeurs, la découverte de l'amour physique, tout est narré avec subtilité, délicatesse. Cette robinsonnade est tout simplement belle, désespérément belle.



« Nous aurions pu développer des racines, tellement nous sommes restés là longtemps. Développer des ailes et nous élever tels des anges à travers le tunnel de la souche jusqu'au ciel, sans cesser de communiquer par ce langage muet que nous venions de nous découvrir en commun, le langage fluide et précis des langues. Parfois la forêt donnait l'impression de mener sa vie dans son coin, parfois elle donnait l'impression de se rapprocher, de planer au-dessus de nous ».



Dans la forêt, des effluves sensuels, des réminiscences gourmandes sont des baumes salvateurs, des parenthèses enchantées, des odes aux sens et aux plaisirs simples que la vie, même dans ces conditions extrêmes de survie, peut procurer. le hot-dog rêvé se fait fantasme, le vieux chocolat retrouvé par hasard trésor inestimable. L'orgasme nécessaire.



« Je me demande si je serai toujours comme ça, seule, toujours obligée de me satisfaire moi-même avec moi-même, ma main enfoncée entre mes jambes si bien que mon corps forme une espèce de cercle, un zéro, enfermant le vide limpide du néant, un ruban de Möbius ou un ouroboros – le serpent qui avale sa propre queue ».



Les livres post-apocalyptiques ont décidément quelque chose de fascinant, aimés ou non, difficile d'y être totalement indifférent. Ce futur inquiétant à la fois si lointain et si proche semble inconcevable mais probable, dissonance cognitive, angoissante parfois terrifiante. Et il existe autant de styles post-apo qu'il y a de lecteurs : en version SF « pure » avec l'exploration et la colonisation de planètes lointaines plus clémentes et explications scientifiques pointues des phénomènes, ou en version plus romancée et plus ancrée dans le monde tel que nous le connaissons et dans laquelle l'explication importe moins que les émotions et les réactions humaines ; en sombre versant dystopique ou en lumineux scénario utopique.

« Dans la forêt » de l'américaine Jean Hegland est une dystopie étonnamment lumineuse, très réaliste, ancrée dans un monde proche du nôtre. Ce qui fonde sa belle singularité est son extraordinaire humanisme, sa poésie renversante et sa dimension profondément écologique.







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Apaiser nos tempêtes

Parce qu'elle se sentait bizarre, lointaine, parce que les odeurs et le goût avaient changé, Anna décide de consulter et ce que l'infirmière lui apprend ne la surprend pas vraiment. Le résultat de son examen est positif. Au vu de sa réaction, cette dernière comprend qu'il s'agit d'un accident. Aussi lui propose-t-elle de prendre rendez-vous avec le médecin. Pour la jeune femme, il ne fait aucun doute qu'elle n'est pas prête à devenir mère. Photographe, elle veut terminer la fac. Elle a beau ressasser, se poser mille questions, une seule issue est envisageable...

Alors que l'année scolaire se termine bientôt, Cerise, qui entretient une relation pour le moins instable avec Sam, commence tout juste à se demander si elle n'est pas enceinte. Repoussant l'idée d'en parler avec ce dernier et encore moins avec sa mère, Rita, avec qui elle vit, elle décide d'appeler une association qui lui conseille de garder le bébé. Bien qu'en désaccord avec sa maman, qui lui refuse aussitôt son aide et l'informe qu'elle devra se débrouiller toute seule, la lycéenne décide de garder l'enfant...



Une couverture magnifique, un titre (trouvé par Franck Bouysse pour l'édition française) qui l'est tout autant pour un roman qui traite, avec finesse et beaucoup de sensibilité, de la maternité. Où l'on suit, à tour de rôle, la vie, durant quelques années, de Cerise et Anna, deux jeunes femmes qui tombent enceintes par accident mais qui ne font pas le même choix. Quand l'une garde l'enfant à venir, l'autre avorte. Deux décisions qui, immanquablement, vont les affecter. Au delà de la maternité, l'auteure aborde également l'avortement, l'éducation, le deuil, la féminité, l'amitié mais aussi l'art (dessin et photographie). Avec beaucoup d'émotions, Jean Hegland explore, avec finesse, ce que donner naissance ou non change la vie. Un roman initiatique universel et poignant qui met, là aussi, sur le devant de la scène deux héroïnes touchantes.



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Dans la forêt

Nous traitons mal notre terre nourricière, un jour il faudra le payer d'une manière ou d'une autre. Au fond de la forêt, Eva et sa soeur découvrent ce moment. Elles vont devoir vivre par leurs propres moyens. Les moyens du bord, quand on n'a plus ni électricité, ni réserves de nourriture, ni personne à qui parler, qui finalement les ramènent aux valeurs premières.



On pourrait dire qu'il s'agit ici d'une fable dystopique pas très originale, porteuse d'un message qui ne l'est pas plus (toutefois qu'il est important de répéter). Mais on passerait à côté de l'essentiel. Car la beauté de la forêt, les personnalités attachantes des deux soeurs, leurs rapports entre elles et à la nature, finement analysés, nous plongent dans un monde sauvage, parfois âpre, beaucoup plus clément que celui du consumérisme. Et cela est rassurant de voir exister ce monde, l’homme risquant de ne pas survivre sans une solidarité et une responsabilité vis-à-vis de l'environnement.
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Dans la forêt

Il en va ainsi de certains livres : on sait dés la première page qu'on ira jusqu'au bout. Il y a certes l'écriture magnétique de l'auteure américaine qui retient l'attention, une plume souveraine alliant le prosaïque et le mystique.

Mais il y a surtout ce huis-clos qui voit son espace se réduire encore et encore au fil des pages avec une étrangeté inquiétante mais aussi paradoxalement avec une sérénité libératrice. Probablement une vertu régénératrice de l'effondrement de la société, on ne peut que se réinventer, transcender ses peurs et ses limites, faire appel à des ressources insoupçonnées pour maintenir sa vie debout.

C'est ce que j'ai aimé dans Dans la forêt, roman qui met en scène des personnages appartenant à un monde en voie de disparition, dévasté pour des raisons vaguement évoquées mais les Dieux n'y sont pour rien. Seul l'homme en est l'artisan. On peut ressentir un léger frisson dans le dos parce que le monde en question est le nôtre, et on devine des problématiques très contemporaines.

Dans ce roman, on observe deux jeunes soeurs qui mènent leur existence au coeur de la forêt nord-californienne, à distance du bruit et des rumeurs les plus folles. Installées à plus de cinquante kilomètres de la ville, elles ont su s'adapter aux restrictions les plus diverses_comme les coupures d'électricité_leurs parents leur ayant donné une éducation en marge de la société de consommation. Portées par leurs rêves de carrière, elles laissent le sentiment dans un premier temps de vivre dans un monde provisoire en s'accrochant aux vestiges de la société d'avant, mais progressivement les repères traditionnels disparaissent et les dangers guettent.



Comment devenir adulte dans un monde devenu chaotique et sauvage qui a balayé le passé d'un revers de la main et qui ne donne guère de raison d'espérer ? S'il y a les renoncements auxquels elles finissent par se résoudre, les défaites qui les révèlent à elles-mêmes, il y a également d'étonnants sursauts qui confèrent à cette fratrie une résistance qu'elle n'aurait jamais pu envisager dans des conditions de vie ordinaires. Jean Hegland a créé un binôme puissant dont la force provient de ce qu'elles partagent ensemble, condition nécessaire à leur survie. Il en ressort un fort sentiment de solitude qui est à la fois la protection et le désarroi de ce duo aux pulsions obscures et laisse le sentiment d'avoir sous les yeux les reliques d'un monde en ruine. Mais loin de la pesanteur anxiogène et asphyxiante que l'on trouve fréquemment dans ces romans post-apocalyptiques, Jean Hegland a su donner à cette fiction des lueurs denses et fragiles, sensuelles et envoûtantes, à l'image de ses héroïnes, des lueurs qui exaltent l'âpre beauté des liens du sang.

Et la nature primitive, salvatrice, cette forêt mystérieuse et insondable symbole d'immutabilité du temps, source de rédemption alors qu'au début elle n'était sinon hostile en tout cas guère accueillante selon les mises en garde de la mère des jeunes filles.

C'est assurément un beau roman intimiste qui frappe par sa force méditative, il nous renvoie à notre propre vulnérabilité et la fragilité de nos sociétés trop dépendantes.

Belle découverte.
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Dans la forêt

À quoi bon une critique de plus ? Tant pis, je le tente quand même.

Ce roman extraordinaire, dense et prenant conte l'isolement et la survie d'une famille américaine, dans un pays soufflé, disloqué, emporté, dévasté par une catastrophe politique pas identifiée sans essence , ni électricité, sans âme qui vive, ni ravitaillement possible, les avions et les trains ne circulent plus......Des rumeurs courent et les gens s'enfuient ...

Il débute un soir de noël et réunit deux soeurs, Nell et Eva, 17 et 18 ans, autour d'un grand vide....

Pas de dinde ni de sapin, pas même la certitude que l'on soit le 25 décembre et surtout pas de parents à embrasser.

Leur mère a disparu en premier, victime d'un cancer, après avoir acheté les derniers bulbes flamboyants de tulipes rouges disponibles....

Leur Père ne tarde pas à la suivre, la cuisse méchamment pulvérisée par sa tronçonneuse , lors d'une sortie malencontreuse en forêt .



L'auteur dresse un tableau de désolation apocalyptique et pourtant que de lumière au sein de cet effondrement : le souvenir d'une musique, un vieux chausson de danse ou un sachet de thé décoloré!



Nell et Eva demeurent seules .

Ces deux héroïnes réunies sont bien décidées à survivre par le biais de leurs passions respectives, la danse et la lecture , par la force de leur espoir , au coeur de la forêt, pleine de rires et de douleur, de larmes et de doutes, de silence, de chagrin refoulé, d'expériences toutes nouvelles, de connaissances inédites, de vie nouvelle et de nouveaux savoirs, entre frayeur et joie, énergie et désespoir ....

La romancière montre , avec talent et doigté, comment il va falloir apprendre à survivre, à grandir et s'épanouir autrement, à se battre et à faire confiance à la forêt , qui regorge de richesses inépuisables, telles des" .Robinsons ".



C'est un livre puissant , étonnant qui nous happe, à la fois simple et réaliste, inventif, en mouvement, un "refuge" dévorant où rien n'est plus comme avant.

Une oeuvre saisissante, ambitieuse où l'on ne tombe jamais dans le pathos, sensible et dérangeante, émouvante, inquiétante et oppressante, apocalyptique , qui paradoxalement , redonne espoir , un retour à l'avant, une espèce d'humilité originale de retour à la vie !!



Magnifiquement écrit et pensé, fin et de toute beauté, il nous fait réfléchir à notre condition et nous renvoie à l'essentiel, à l'essence même de la vie!



Pour moi un coup de coeur!

Une fiction sincère et puissante, d'une intelligence rare , authentique , brillante !

Merci à Marylin, mon amie de la médiathèque .





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Dans la forêt

Oublier, tout oublier, rayer leur vie d’avant, leur vie dans une société de consommation, dans l'opulence des pays riches, leur adolescence, leur bande d’amis...et tout perdre, il faut le vivre pour réaliser !



L’espoir les soutient, peut- être l’électricité reviendra-t-elle ? Peut-être Eva pourra -t-elle retrouver tout ce qui faisait sa vie : la danse, peut-être Nell pourra-t-elle a nouveau espérer être admise à Harvard ? peut-être… mais le temps s’étire, et de malheur en malheur, ces deux sœurs qui ont eu à subir le deuil, vont devoir réorganiser leur vie.



Prévoir l’hiver, s’adapter, se montrer économes, question de survie.

Ce roman très fourni apporte au lecteur maintes pistes de réflexion : pour qui s’est penché sur les traités de collapsologie, il peut faire frissonner car il constitue un bel exemple de ce qui pourrait se passer en cas d’effondrement, comment les hordes humaines viendrait se jeter sur les réserves, on peut d’ailleurs le constater avec l’actualité, il amène à réaliser que notre confort pourrait vite disparaître faute d’électricité et d’eau courante…



Mais le récit ne s’arrête heureusement pas à ces faits, il mise sur les ressources de nos deux héroïnes pour organiser leur vie, cultiver, accueillir ce que mère nature peut offrir, montrant la capacité de l’être humain à trouver en lui des possibilités insoupçonnées.



J’ai craint au début de trouver quelques longueurs dans ce roman, il n’en fut rien, je me suis d’abord attachée au passé de ces deux jeunes filles pour, comme elles, me tourner vers leur avenir, admirative de la détermination de Nell, compatissant à leur situation peu enviable.



La fin quoique logique si on y réfléchit bien, m’a bien surprise…



Un bon roman que je recommande.
Lien : https://1001ptitgateau.blogs..
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Dans la forêt

Ma libraire, de temps en temps, propose des "livres-mystères" qu'elle emballe joliment, avec quelques thèmes pour nous orienter dans notre choix. Avec la fête des mères, j'ai eu envie de me laisser tenter, les thèmes me faisant envie : apocalypse, forêt, nature, survivalisme, sœurs, États-Unis. Ça sentait le nature-writing à plein nez, j'étais obligée de le prendre ! Et j'en suis doublement satisfaite : d'abord parce qu'il était dans ma liste d'envies depuis très longtemps, mais aussi parce que je l'ai beaucoup aimé.



Les événements se déroulent dans et aux abords d'une maison proche de Redwood, en Californie, entourée d'arbres à des kilomètres à la ronde. Nous suivons Nell et Eva, sœurs et orphelines, tentant de survivre après la catastrophe apocalyptique qui vient de toucher tout le pays. Il n'y a plus d'électricité, plus d'essence, plus aucune technologie. La nature a, en quelque sorte, repris ses droits, il faut trouver les moyens de s'adapter et les ressources nécessaires afin de continuer son bout de chemin.



J'ai été immédiatement charmée par la plume de l'autrice, à la fois enivrante et poétique. D'autant plus que le récit est sous forme de journal, écrit par Nell, nous permettant d'être au plus près de ce que les filles vivent et ressentent dans leur nouveau quotidien.



Nature-writing oblige, la forêt est un personnage à part entière et joue parfaitement son rôle. Elle isole davantage nos deux protagonistes. Elle sait se faire clémente, puisque c'est chez elle que Nell et Eva puisent en partie leurs ressources, tout en restant effrayante, par sa faune et sa flore pas toujours accueillantes, mais aussi par les douloureux souvenirs qu'elle abrite.



Nell et Eva sont deux jeunes filles très attachantes. L'une férue de danse classique pendant que l'autre se plonge dans les livres en tout genre, elles voient leur avenir voler en éclats et sont contraintes de changer totalement leur mode de vie. Elles apprendront le concept d'autosuffisance et, malgré les difficultés et le manque de moyens, elles se débrouilleront finalement très bien. Leur relation, tantôt fusionnelle ou beaucoup plus distante, émeut et les rend de plus en plus touchantes. On ressent leur peine et leur désespoir, tout autant que leurs moments de fierté et de petits bonheurs.



L'histoire est enclavée dans une atmosphère oppressante marquée par le silence, l'isolement, l'attente, la solitude, la peur. À travers elle, on perçoit la lenteur du temps qui passe, tout comme la sensation de danger que discernent les filles.



C'est dans son ensemble un très beau livre, touchant, douloureux parfois, plein de sensibilité, respectueux de notre mère Nature.



C'est un très beau cadeau que je me suis offert !

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Dans la forêt

Vu le grand nombre des critiques de ce livre... Je vais patienter pour les lire après avoir rédigé mes propres impressions sur cette lecture aussi passionnante que passablement déroutante !



Une rapide parenthèse pour dire et redire mon enthousiasme pour la qualité des choix des éditions Gallmeister...

Découverte complète de ce texte et de cette auteure qui a édité avec beaucoup de difficulté ce roman, il y a plus de 20 années [1996], qui finalement connut un grand succès !



Deux adolescentes, Nell et Eva, se retrouvent orphelines, complètement isolées dans la maison familiale, au coeur de la forêt, dans un monde qui s'effrite: plus d'électricité, plus de téléphone, plus de magasins, plus de médecins, plus d'hôpitaux; plus d'écoles, etc.



Elles doivent se débrouiller pour survivre... Il y a l'évocation de leur enfance, avec des parents aimants et excentriques, leur vie atypique au coeur de la forêt, où elles sont non scolarisées...et vivent, apprennent à leur rythme

Cette fiction à maintes égards était très en avance !



Fiction époustouflante... qui après des années, n'a pas pris une ride, en dénonçant déjà de façon sous-jacente notre société de consommation....



Ces deux soeurs se retrouvent seules à faire face pour survivre, déployer toute leur imagination et leur inventivité pour rester en vie...

C'est alors un apprentissage en profondeur de la nature, de l'essentiel ...



Dans cet espace vierge, dépourvu de toute civilisation, et quasi de trace humaine, les deux soeurs doivent réinventer "leur vie, leur chemin", dépasser leurs différences ainsi que leurs désaccords, comme comment

utiliser au mieux le peu d'essence qui leur reste ?!

Nell avait la possibilité de partir avec son petit ami, pour Boston, à pied... espérant un avenir meilleur, mais au bout d'une journée de marche, Nell renonce, ne se résoud pas à abandonner sa soeur, la seule famille qui lui reste....

Hormis ce huis clos sororal réconfortant [même si quelque peu tumultueux], l'arrêt de toute activité, les coupures d'électricité , l'absence de ligne téléphonique, plus d'essence , et la barbarie, la sauvagerie pointeront à l'horizon comme dans un no man's land, un territoire qui n'a plus ni loi ni limite où chacun se débrouille comme il pourra... en sachant que tout pourrait être permis et survenir !!



Le récit pourrait être des plus angoissants, mais l'amour très fort entre ces deux soeurs leur permet de garder énergie et volonté, en dépit de toutes les difficultés à assumer; les souvenirs aimants et heureux avec leurs deux parents est un terreau nourrissant, vivifiant, leur permettant en évoquant les beaux souvenirs, de se ressourcer, de tenir bon...



Un texte insolite, troublant... comme si ces deux soeurs,

seules au monde, recommençaient à leur manière, une

histoire de l'Humanité. Devant survivre, elles se rendent

compte qu'elles n'ont pas été assez attentives, qu'elles ne se sont pas assez intéressées à ce que leur père leur transmettait sur le potager, la forêt...et qu'au début des temps, les humains ont survécu avec rien, avec cette nature qu'ils ont apprivoisée, appris à connaître...



Je redis la joie et l'enthousiasme d'avoir lu et pris connaissance de l'univers original de cette auteure américaine, Jean Hegland... Je serai curieuse de

connaître ses autres écrits... et les autres thèmes qu'elle a pu traiter....



Une lecture qui fait, de plus, abondamment réfléchir... qui restera , j'en suis sûre très longuement dans mon esprit....



Je terminerai par cet extrait...significatif, de l'ampleur des réflexions suscitées par cette fiction, où Nell et Eva, les deux soeurs trouveront leur manière de "recommencer" une vie autre, après toutes les épreuves vécues ensemble pour survivre et surmonter leurs peurs ...Elles se sont délestées de tout ce qui faisait leur existence passée,

pour apprendre à réfléchir et aborder leur passage sur cette terre , autrement...





"— Quand l'homme est-il apparu ?

— Quoi ?

— Quand a-t-il évolué ?

— Homo sapiens sapiens est apparu à la fin du Pléistocène moyen, ai-je

répondu, citant l'encyclopédie.

— C'est-à-dire ?

— L'homme est apparu il y a au moins cent mille ans. Peut-être même

deux ou trois fois ça.

— L'homme est apparu il y a au moins cent mille ans. Et depuis quand

l'électricité existe ?

— Eh bien, Edison a inventé la lampe incandescente en 1879.

— Tu vois ? Tout ça… (et d'un ample mouvement du bras, elle a

désigné les pièces de la seule maison que j'avais toujours connue) n'était que…

comment l'as-tu appelé ? Une fugue dissociative.

Elle a montré ensuite l'obscurité qu'encadrait la porte ouverte.

— Nos vraies vies sont là-bas.

— Mais que se passera-t-il si on a n'a plus à manger, ou si on tombe malade ?

On pourrait mourir.

— On peut se retrouver sans plus rien à manger ou tomber malade ici.

(Elle a éclaté de rire). Nellie, l'homme meurt depuis au moins cent mille ans.

Ce n'est pas important de mourir. Bien sûr qu'on va mourir." (p. 296)

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Dans la forêt

J'ai lu toute la nuit .



C'était un roman fascinant, plus fascinant que cet auteur américain misanthrope de mes cours de littérature il y a fort longtemps, dont je craignais une forme de parenté avec ce roman. Or là, point de prêchi-prêcha pompeux mais une histoire de survie et d'espoir racontée sous la forme d'un journal intime magnifiquement rédigé.



L'apocalypse est en train de se produire de façon insidieuse et progressive, un peu ce qui pourrait nous arriver à vrai dire, une sorte de tiers-mondisation rampante.. Plus d'électricité, puis plus d'essence, des maladies infectieuses qui se propagent. Rien de spectaculaire, pas de Martiens, de zombies, pas de cataclysme, juste le dénuement progressif des gens, et le monde qui devient menaçant. C'est tout simplement à contre courant de ce qui se fait dans le post apocalyptique hollywoodien.



Deux jeunes filles, des soeurs , l'une danseuse classique, l'autre brillante intellectuelle, organisent leur existence à la lisière d'une grande forêt de Californie, dans la maison de leurs parents un peu bohèmes, loin de tout et découvrent dans l'adversité comment survivre dans la nature.



Des conflits, des drames, du découragement, de la jalousie, des moments émouvants pour passer de l'idée qu'on viendrait les sauver à la détermination de s'adapter à ce nouveau monde comme l'ont fait avant elles les Indiens Nomos de Californie, un peuple de chasseurs cueilleurs . Nos Robinsonnes des grands espaces ne sont pas des gosses si fragiles que ça .



C'est plein de rebondissements, de rencontres, d'émotions, une écriture magnifique, incontestablement le meilleur roman que j'ai lu depuis longtemps.





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