Cambeyrac, dans le Sud-Ouest de la France, en 1943. Un village français vivant l’Occupation.
Julien Sarlat se réfugie chez sa tante Angèle après avoir sauté du train qui l’emmenait en Allemagne s’acquitter de son STO. Par chance, un homme usurpe son identité et meure sur le champ. Plus besoin de fuir puisqu’il n’est plus...
Se cacher devrait suffire, en attendant les nouvelles de la guerre qui annonceraient l’espoir d’une libération...
Rien n’est joué pour l’instant, en 1943, et la vie du village s’organise tant bien que mal entre marché noir, pénuries et trahisons. La milice et les résistants plaçant chacun leurs pions.
Derrière ses persiennes, Julien voit tout (dont la scène mémorable de son propre enterrement), compte les points, et attend que l’espoir revienne... Celui d’une libération, mais qu’il souhaiterait plus amoureuse que militaire ! Incarné par Cécile, l’amour ne peut être que passionnel. À la vie, à la mort, un an dans cette chambre à attendre. Un an de sursis.
Superbe album de Jean-Pierre Gibrat, dont je ne me lasse décidément pas de découvrir le talent. Son talent de conteur, scénariste et poète, et bien sûr son talent de dessinateur. Un "style Gibrat" dans lequel la finesse du ton se marie avec la beauté du trait et l’éclat des couleurs.
Lu en janvier 2018.
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C'était une vieille croyance orientale que le sang d'un seul Juste pouvait racheter l'humanité du crime, de la souffrance et de la mort. Puisse le sang du Juste qui vient de périr à son poste, victime de haines inexpiables, soulever dans le monde une si grande horreur que les peuples dressés soudain contre la guerre, y trouvent la force d'arrêter - il en est temps encore - le bras des égorgeurs.
C'est le voeu que devant le cadavre sanglant de son directeur, la rédaction de l'Humanité, formule ici de toute la force de son coeur.
p3, Manifeste du Gouvernement, Extrait de la feuille du journal, que Mattéo piétine en repeignant par rituel le bateau de son père, anarchiste espagnol, tombé également un 1er Aout...
Sans le regarder elle passe,
lui ça lui glace le dos,
Il se sentait dans une impasse
Juliette visait un peu plus haut...
Juste un aller retour à Berlin
T'es vraiment trop con, tiens.
Engage-toi, l'étranger. Allez viens... !
Mattéo finalement prendra le chemin
pour une Dame, en Somme....Putain !
Alors pourquoi pas un voeu pieu ?
Pendant que ses copains s'empalent
" Délivrez nous du Mal"
déversez notre sang, fermez-nous les yeux.
Bel-Ami, nous compte les Bécasses
pendant que vous rêvasses
Des Livres,
Nous,
Des Mots......pas Sang.
" Voilà, Voilà : comme je dis toujours"
Toujours p3 soit dit en passant.....
très bel album, riche en texte , riche en histoire, riche en Humanité
Bravo Mattéo, bravo JP Gibrat à l'UNANIMITE
Post Socialistique : Je confirme le singulier de voeu pieu, pour le pluriel ...lisez Herman Hesse, et son Demian mais faudra attendre 1919.
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Mattéo est jeune. Il est beau et follement amoureux de Juliette. Mais, Mattéo est pauvre, espagnol et fils d'un anarchiste réfugié près de Collioure. Il n'a d'autres choix que de travailler dans les vignes des riches de Brignac, dont le fils Guillaume plaît beaucoup à Juliette.
Le 1er août 1914, date-anniversaire de la mort de son père, la France mobilise.
Son pacifisme vrillé au corps ne résistera pas à la pression sociale du village qui s'est vidé de ses hommes, ni à la pression amoureuse de Juliette, qui ne voit dans la guerre qu'une aventure héroïque. de nationalité espagnole, rien n'obligeait Mattéo à s'engager.
D'un triangle amoureux à l'enfer des tranchées. L'horreur de la guerre et son cortège d'injustices. Les mêmes qu'au village mais dans la boue, le sang et avec la mort comme fidèle compagnie.
Le scénario bien ficelé de Jean-Pierre Gibrat est en place. Son style charnel et son coup de crayon sensible le subliment. Un tome magnifique ! Vite la suite !
Lu en novembre 2017.
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Ca y est le tome 1 de Jean-Pierre Gibrat « Mattéo » est passé devant mes yeux ébahis.
Et mon petit de cœur de cinquantenaire de s’émoustiller devant ce qu’on appelle un coup de … cœur.
Un vrai régal, visuellement d’abord chaque case est d‘un réalisme bluffant, l’histoire se met rapidement en place et l’on découvre les ravages de la guerre mais ceux aussi de l’amour. La guerre tout d’abord, engagé pour montrer à la belle Juliette que lui, Mattéo à aussi la fibre patriotique comme ce Guillaume, bien né, qui lorgne sur la demoiselle.
Gibrat rend magnifiquement la stupidité de la guerre, ces dessins montrent avec réalisme toute l’horreur des tranchées et ces millions de vies jeter à la mort.
L’amour d’un jour, l’amour toujours comme dirait … je sais plus qui, pas le truc niais mais celui qui vous laisse anéanti la boule à l’estomac. Mattéo n’a pas le choix malgré l’avis de l’ami Paulin.
Le scénario ensuite classique mais rehaussé par des dialogues en tout point remarquable font de ce tome 1 une réussite incontestable.
Et comme la fête des « Papounets » c’était hier, devinez quoi les tomes 2 et 3 sont sur ma PAL. Pas de seconde à perdre j’y retourne.
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Cambeyrac, Aveyron, 1943. C'est en pleine nuit, alors que tout le village dort profondément, que Julien pénètre chez sa tante, Angèle, par la fenêtre. Il est aussitôt accueilli par Pépère. Fatigué après avoir marché deux jours et deux nuits, il s'endort rapidement sur le sofa. Au matin, Angèle est plutôt surprise de le trouver là, persuadée qu'il allait rejoindre le Service du Travail Obligatoire, en Allemagne. Mais, Julien s'est tout bonnement exempté lui-même et a sauté du train qui devait l'emmener là-bas. Il n'a pas d'autre choix que de rester caché. Chez son ancien instituteur, un juif déporté par les Allemands, semble le lieu idéal. D'autant que les gendarmes sont venus annoncer une bien mauvaise nouvelle à Angèle : le corps de Julien a été retrouvé dans le train bombardé, ses papiers sur lui. De là où le jeune homme se cache, il assiste à son propre enterrement. Mais aussi, au fil des jours, à la vie du village et plus particulièrement aux allées et venues de Cécile, son ancienne petite amie...
Alors que, au loin, la guerre bat son plein, que les résistants mènent des missions secrètes, que la milice rôde partout, que la vie, malgré tout, continue pour d'autres, entre apéro sur la place du village ou parties de pétanque avec le curé, Julien, lui, vit reclus dans son petit logement. À travers les persiennes et sa longue vue, il ne loupe presque rien de ce qui se passe autour de lui. Jean-Pierre Gibrat nous offre avec Le sursis un album d'une incroyable justesse, aussi bien sur le fond que sur la forme. Le scénario nous balade entre amour et trahison, bravoure et lâcheté alors que se profile l'espoir d'une paix retrouvée. Ses personnages, si bien fouillés et vivants, que ce soit Julien qui a déserté, la belle et éblouissante Cécile ou encore Paul, le résistant, sont très attachants. Sur la forme, Gibrat met magnifiquement en lumière tous ces paysages, tous ces portraits et toutes ces scènes (fussent-elles de nuit ou bruyantes sous un soleil radieux). De véritables œuvres d'art !
Un album émouvant et sensible...
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Mattéo gardera-t-il sa barbe ?
Avant son départ pour Petrograd, Mattéo se laisse pousser la barbe, pour faire plus « sérieux » devant la révolution qu’il va voir se réaliser devant ses yeux. Il ne se rasera « que dans la contrariante éventualité d’une revanche de l’ancien monde » (p. 13).
En 1917, la capitale russe brûle d’une fièvre révolutionnaire inextinguible. Mattéo ne peut résister à ce feu qui l’attire. Son ami Gervasio, qui l’accompagne, craînt même qu’il fasse son « petit Lénine » (p. 13), et lui rappelle qu’ils ne sont pas bolchéviques, mais anarchistes.
Mais, il n’y a pas que le feu libertaire qui étreint Mattéo, la flamme de la passion ne va pas tarder à se raviver. Avec Juliette, qui le fait tant espérer, puis avec Léa, qu’il rencontrera là-bas, en Russie. Elle lui fera connaître un amour libéré. En sera-t-il de même du modèle de société qu’elle va lui présenter ? On connaît la suite, les bolchéviques tiennent le haut du pavé, et les idéaux communistes qui les font tant vibrer seront vite abandonnés.
Ce deuxième tome mêle une nouvelle fois admirablement la petite et la grande histoire. La passion amoureuse pour libérer les hommes, et le désir que la justice règne enfin sur la société et libère l’humanité. Devant la décomposition bolchévique de l’idéal communiste, Mattéo gardera-t-il foi en l’espoir et brûlera-t-il encore du feu libertaire hérité de son père ? Un album remarquable !
Lu en novembre 2017.
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Pour tout dire , je ne suis pas un grand fan de bande dessinée mais , lorsqu'un ami m'a proposé la lecture du " Sursis " , je n'ai pas pu résister et me suis lancé à la découverte du petit village de Cambeyrac durant les années d'occupation , une occupation parfois violente , une occupation parfois d'un calme presqu'ennuyeux ... Dans ce village , le jeune Julien , réfractaire du STO , se terre , observant le monde comme il va , fuyant aussi bien la collaboration que la résistance , seulement fou de jalousie pour la jolie Cécile qu'il voit évoluer depuis sa " cache " dont il ne sort que la nuit....
D'abord , j'ai été , je l'avoue , fasciné par le destin de Julien , la dérision de la vie , qui , quoi qu'on fasse , conduit toujours à la mort , il n'y a pas de chemin menant à la vie éternelle....J'ai pu découvrir son caractère , ses états d'âme , sa jalousie , son humour , ses facéties , tout cela guidé par son amour pour Cécile .
L'art de la bande dessinée semble s'appuyer sur la justesse et l' impact du texte par rapport à l'image et , sans être puriste , il me semble que Gibrat est sacrément bon dans l'equilibre entre l'un et l'autre.
Quant au dessin , il est d'une qualité incroyable , montrant la vie et les objets de la vie quotidienne avec une finesse extraordinaire . On a parfois l'impression de se trouver réellement sur la place du village ou dans la cuisine en train de partager le repas avec Angele et Julien.Mention très bien aussi pour l'alternance des " clairs et des obscurs " qui donnent à l'ensemble une atmosphère incroyable , le plus souvent pleine de menace .
Enfin , je terminerai par les personnages dont le dessin montre des postures qui se suffisent à elles - mêmes , à exprimer bien des choses . C'est extraordinaire , notamment dans l'expression des regards ou les positions que prennent untel , unetelle pour s'exprimer . On a la sensation " d'entendre parler les images "...
La vraie vie saisie au bon moment .C'est très beau , vraiment , un bon moment de lecture du texte et de l'image, un bon moment , tout simplement et un dénouement......à couper le souffle.
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Le front pataugeait à moins de 200 km, mais Paris sifflotait, Paris s'en foutait. J'imaginais une ville sans hommes, tu parles ! Les bourgeoises avaient toutes un coquin crocheté à leur bras, fumant sous les ombrelles. Des permissionnaires ? Des réformés ? Des planqués ? Des chanceux ! Il fallait peut-être ajouter aux misères du front celle d'être cocu.
Oui, Paris s'amusait, ça piaffait d'insouciance à pleines terrasses, la guerre planquée au fond du jardin.
p56
Anarchiste, pas par conviction, plutôt héréditaire
Bolchevik, armée blanche, prolétaires il s'y perd
Par chemin de fer, il rejoint les barricades
Guerre et Paix à Petrograd
Révolution Russe, son organisation intrinsèque
1917-1918 MattéO échecs
encore une belle fresque historique
JP Gibrat un petit rien d'héroïque...
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Après avoir decouvert " le sursis " , la lecture du " vol du corbeau " est devenue une évidence tant je m'étais trouvé sous le charme . Franchement , Gibrat , c'est , comme on dit , " du lourd , du très lourd " dans son domaine , un incontournable , un maître.....Mais je laisse la parole aux connaisseurs....
Je ne soupçonnais pas qu'on puisse laisser tant d'émotion filtrer au travers d'une bande dessinée , au travers de dessins si soignés , si précis, si justes....
Le lieu , Paris . L'époque , la fin de la guerre , moment particulier où il convient d' assurer sa survie après une longue période d'égarements , de choix discutables ou héroïques , une période où seuls les salauds avaient droit à la parole et à
la parade tandis que les autres...... Le lieu : la cellule d'un commissariat où se trouvent deux personnages qui ne vont plus se quitter , la militante communiste Jeanne et le désinvolte, attachant et facétieux " monte en l'air " ,François....
GIBRAT nous plonge à nouveau dans l'atmosphère particulière de la fin de la seconde guerre mondiale , période opaque où les masques tombent....
On retrouve dans cet album la force des propos et la délicatesse des dessins se mêlant avec équilibre et justesse pour donner à l'ensemble une force et une splendeur incroyables . Les héros sont magnifiques , regards troublants , violents , déterminés ou abattus mais jamais vaincus , langoureux aussi dans la belle histoire d'amour qui naît sous nos yeux . Les paroles sont condensées , savoureuses ou graves et chaque personnage voit ainsi , à travers le propos et le dessin , se révéler sa personnalité .Le ton est tel qu'on passe du rire aux larmes , de la joie de vivre à l'angoisse de mourir, et ce avec économie mais justesse dans le choix des mots . Du grand art , une bande dessinée de " qualité supérieure " à même de séduire autant les puristes ( mais je leur laisse la parole ) que les profanes tels que moi .
Mais , au final , ceci n'est pas vraiment une bande dessinée , c'est bien plus que ça , c'est l'imagerie d'une période, celle de l'Occupation . C'est beau , palpitant , drôle , angoissant, c'est l'extraordinaire reflet d'un moment tragique de notre histoire avec , une fois de plus , un dénouement incroyablement intelligent , inattendu et fort , vraiment. De la " belle ouvrage " , une lecture formidable à ne pas rater , même si l'on n'est pas trop adepte de ce pourtant superbe genre littéraire , comme moi ...
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" Cher ami, vous n'êtes pas sans savoir que Dieu, dans sa grande bonté, nous propose de partager le pin...
Et nous, dans notre grande sagesse, nous nous contentons de son ombre.." Augustin, Radical-Socialo, p37
♫ Fait-on pousser du blé en faisant des discours ?
Faut-il un uniforme pour détester la guerre ?
Faut-il pour être un homme ne plus chanter l'amour ?
Faut-il mendier son pain, et ne plus être fier ?
Da-da-da-da-dam
Da-da-da-da-dam
Faut-il pour être libre, avoir les cheveux longs ? ♫
Idées courtes et Cheveux longs - 1966 - Johnny Hallyday
Refermées, les portes du pénitencier
Il a été maté au bagne
Aout 1936, Collioure, Soleil, la Mer
Cool il est devenu Mat et Eau
Front Populaire , Flonflons et bal en plein air
Congés payés, ballade en vélo, clémente météo
Augustin, Paulin, Amélie mélo
les amis de Mattéo
Et sa Jolie Juliette mattée au balcon
parenthèse avant crise Espagnole
Maté au gnole
allongés sur la plage, cartes postales
Témoin attentif des mutations sociales
un tableau digne de Hopper
autre Tub de notre grand Rocker
Jean Pierre Gibrat pour ce bon humour, merci
Rien qu'un Au revoir à notre Johnny....
Noir c'est noir telle sera Mattéo rit ...
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Quatrième époque, dans laquelle Mattéo débarque littéralement sur les côtes espagnoles, armes rutilantes à son bord, accompagné de ses amis Robert et Amélie échappée des griffes "rad-soc" bon teint de son ex-compagnon.
Les côtes catalanes qui les accueillent représentent aussi de nouvelles terres de doute pour Mattéo et ses "compañeros". L'engagement est au coeur de ce quatrième tome. Ils sont là pour défendre la République espagnole, en danger depuis la tentative de coup d'état fasciste. S'engager, mais pour qui ? Pour quoi ? : « On est venu pour se battre, on est bien d'accord... Contre qui, c'est facile, mais avec qui ? Socialistes, communistes, anarchistes ? » (page 9). Car si la guerre civile est déjà commencée, une vague révolutionnaire enflamme le front républicain et réchauffe les coeurs des espoirs qu'elle promet. Le résultat est compliqué, mais vivifiant : « ...un bordel pétillant, avec toutes ses tendances, des plus radicales aux plus modérées, fraîches et joyeuses, et encore fraternelles... » (page 8).
Mais pour Mattéo, cet engagement est aussi personnel. Toujours à la recherche de sa propre voie, de son identité : « Tu sais même pas pourquoi tu es là... T'essaies de te fuir, c'est tout... » (page 18). Juliette, Amélie, Anechka... D'amour en amitié, Mattéo doute : « L'engagement ? Un courant chaud pour promener le bazar de notre petite existence, avec toutes nos désillusions en fond de cale. » (page 32).
L'impuissance, les doutes... Pourtant, sa place dans les Brigades internationales, autrement dit les engagés étrangers pour la République espagnole, n'est plus à prendre. A la tête de la conquête du village d'Alcetria, Mattéo renoue avec son passé. En premier lieu, avec son père libertaire qui s'est battu sur les mêmes terres. La mise en pratique de ses idéaux sera dure à appréhender : « un petit laboratoire champêtre, avec mise en commun des outils, des efforts et des éventuelles recettes » (page 56). L'application de la justice, notamment pour le sort d'un curé-sniper pose des cas de conscience criants de vérité.
La fin de ce nouvel album nous laisse dans un suspense haletant, entre l'histoire publique et personnelle, dont Jean-Pierre Gibrat manie toujours aussi bien ce difficile enchevêtrement. Même si ce tome est un peu moins enlevé que les précédents - de nombreuses planches pleines pages en témoignent - l'éblouissement rendu par les couleurs flamboyantes des aquarelles de Gibrat est toujours aussi magique.
En trois mots : Vite, la suite !
Il va falloir pourtant attendre... Alors, à bientôt Mattéo !
Lu en décembre 2017.
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1936, en France. Nous retrouvons notre héros, Mattéo. Nous l’avions laissé en partance pour le bagne en 1918. Il a été libéré, mais surtout il semble libre. Il est en congés. En congés payés. 1936, le Front populaire est au pouvoir, Léon Blum en tête, et « tout sembl[e] possible, même le meilleur... » (p. 10). Mais, le Front populaire n’a pas éradiqué le pire : un fascisme rampant, celui des ligues nationalistes comme la Cagoule est en train de proliférer sous couvert de mépris de la bourgeoisie face à ces vacanciers envahisseurs... Mais, le pire ne concerne pas que le territoire français : en Espagne, un coup d’état a eu lieu, et le refus de Léon Blum d’aider la République espagnole a du mal a passer parmi les amis internationalistes de Mattéo. « Ils vont les laisser crever ! » (page 20). Entouré de Paulin, son fidèle ami aveugle des suites d’une blessure pendant la Grande Guerre, Amélie et son compagnon socialiste mais pas trop, et bien sûr la toujours aussi belle Juliette... Écrasé par les années de bagne, Mattéo retrouvera-t-il foi en l’avenir et surtout en ses idéaux de justice sociale et d’amour de la vie... ?
C’est un second cycle qui commence avec ce nouveau magnifique tome signé Jean-Pierre Gibrat. C’est sublime ! Que dire de plus ? Le scénario est plus introspectif, mais embrasse toujours à merveille la petite et la grande histoire. Quant au dessin et aux couleurs... Un chef d’œuvre !
Lu en décembre 2017.
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C'est le dernier tome qui vient clore les aventures de Mattéo qui est passé de la Première Guerre Mondiale à la Seconde tout en faisant également la révolution en Russie ainsi que la guerre d'Espagne afin de défendre ses idéaux de démocratie. On peut dire que c'est un combattant, le Mattéo.
Mattéo est toujours hors-la-loi et il n'est pas le bienvenue en France mais c'est beaucoup trop risqué de rester en Espagne. Il est accueilli par un vieil ami Paulin à Collioure alors qu'il vient de perdre sa mère. Il retrouve également Juliette et il semble toujours en pincer pour la belle Amélie.
Cette belle fresque imaginé par Gibrat nous emporte dans un final assez grandiose. Cela se laisse lire toujours aussi agréablement. Le cheminement personnelle de Mattéo est rattrapé par la grande Histoire.
Au niveau du dessin, c'est comment dire, tout simplement magistral et parfait. J'ai toujours considéré que l'auteur est l'un des meilleurs dessinateurs et il le prouve une fois encore. Son trait n'est pas seulement fin et délicat, il transporte véritablement au panthéon dans une fluidité sans pareille.
Bref, c'est une belle et grande série qui s'achève dont le héros décidément très attachant a porté les illusions et les espoirs à travers son romantisme et sa passion.
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♫Yo, pas grand chose de beau à raconter en vérité
Plus rien à faire, plus rien à dire, toujours pas d'rimes envers l'austérité
C'est pas d'ma faute si les hommes aiment se faire la guerre, se baiser entre frères
Pour des histoires de croyances, de pez' ou d'tech
C'est crade, la vie, vos dictons s'contredisent
Faut rester sur sa première idée : y a pas qu'les cons qui n'changent pas d'avis ♫
Sur les toits du monde - Seyté - 2018
Sur les toits de Paris
rencontre avec un monte-en-l'air
des mots à la Prévert
"Un type particulier, un droit commun
qui n'est ni droit ni commun"
et une idéaliste plutôt très jolie
Faire le mal par la petite échelle
plutôt que faire le bien à tout prix
performances ascensionnelles
le vertige me colle au crépi
combines mesquines inoffensives
vs la liberté au coût dissuasif....
Philosophie sur les toits
Textes et Dessins de Gibrat
Il a pris de la hauteur,
Gite et couvert d'un béret Zina
parmi les plus grand auteurs
au niveau des gargouilles
dur dur ça fout la trouille.
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Un pur régal! Dessin, couleurs, scénario, tout est parfait!
Le parti pris de "voyeurisme" ou de "noctambulisme" du récit est vraiment bien trouvé : Julien, le héros qui n'en est pas un, est un réfractaire du STO, plus concerné par son béguin pour une jolie serveuse de bar que par les démêlés de la résistance et de la milice. Pourtant, malgré le soleil qui filtre entre les persiennes, malgré les joyeuses parties de pétanque, malgré l'excitation d'une fenêtre allumée où se découpe la silhouette de la jolie Cécile , la guerre est là quand même, tapie dans ce charmant village aveyronnais. Elle fait parfois une irruption brutale dans le fil ensoleillé des journées immobiles et celui plus dynamique des nuits, passées au ravitaillement de notre reclus volontaire.
J'ai pensé au Hussard sur le toit de Giono pour les jeux plongeants de perspective, pour la neutralité bientôt intenable du point de vue, et pour la lumière de Cambeyrac qui m'évoquait celle de Manosque.
Le choléra, ici, c'est le nazisme, bien sûr, mais plus encore les égoïsmes, l'individualisme, le sacro-saint confort qui font fermer les yeux sur l'horreur de la guerre et qui soufflent toutes ces petites et grandes lâchetés de nos vies moyennes.
Julien n'est pas un héros, il s'est mis entre parenthèses. Mais il est en sursis.
Sans faire la morale, sans faire jouer les grandes orgues, par la subtilité d'un scénario sans effets de manches et le charme d'un dessin magnifique, Gibrat m'a totalement emballée!
Un grand merci à Sebthos, génial poisson-pilote!
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Mattéo tome 3.
On retrouve avec un grand plaisir, Mattéo, Paulin, Amélie et Augustin son petit ami du côté de Collioure, ou ils viennent passer les premiers congés payés. L’occasion pour Mattéo de retrouver sa mère et quelques vieilles connaissances. Et tandis que les sombres dictateurs s’agitent en coulisses pour leurs monstrueux desseins, l’insouciance est de mise. Mais voilà la fibre républicaine coule à flot dans les veines de nos vacanciers, leur esprit sérieusement échauffés et pas que par le soleil.
Alors là les amis, le J.P. Gibrat place la barre très haute.
Comme qui dirait estomaqué ! Car cette année 1936, est en tout point remarquable. Tant sur le plan scénaristique que par les sublimes dessins de Gibrat, tout confère à viser les étoiles. Et pour ma part ça sera 5 évidemment. Plongez vous dans l’univers de Gibrat, c’est absolument génial.
Alors Mate Hé Ho, c’est du top niveau.
Un seul regret, il va falloir attendre la suite.
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Mattéo tome 2.
Voici notre jeune héros amoureux déçu, plongé dans la révolution russe du côté de Petrograd, au grand désespoir de sa mère. Dans ces périodes tourmentées, Mattéo découvre la complexité de la situation et ses dangers. Mais les bras de la pasionaria Léa apaisent les douleurs du cœur.
Des dessins d’une grande force, visuellement magnifique, un scénario top niveau, avec une belle illustration des problématiques de l’époque, un héros à l’empathie évidente, des personnages fouillés qu’on prend plaisir à suivre, il n’en faut pas plus pour faire de ce tome 2 une vraie réussite. Gibrat dose grande histoire et destin personnel avec une justesse qui nous emporte sans problème.
Un bonheur à regarder à et lire.
J’ai adoré.
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C'est en compagnie de ses enfants, sa maman et son ex-femme que Philippe fête ses 53 ans. Ambiance bon-enfant, on ouvre les cadeaux dans la bonne humeur et l'on trinque tous ensemble. Le téléphone sonne, c'est le fiston qui répond puis qui passe le combiné à son père en lui disant que c'est son patron au bout du fil. Tout le monde trouve cela étonnant qu'il appelle un dimanche. Lorsqu'il revient, les remarques fusent à propos de cet appel. Aussitôt, Philippe leur fait la remarque que cela va s'arrêter puisqu'il est viré, du jour au lendemain. Sa famille et ses amis le réconfortent en lui disant que de toute façon, il en avait assez de cette boîte, qu'il pourra trouver un autre travail qui lui conviendra mieux et qu'il aura le temps de chercher étant donné les indemnités de licenciement qu'il pense toucher. Mais, voilà, l'entreprise a délocalisé en Hongrie, Philippe peine à trouver des interlocuteurs et voit ses indemnités lui filer sous le nez, sans compte les points de retraite qu'il n'arrive pas à justifier. C'est le début de la déchéance...
Une famille soudée, un travail confortable, des amis sincères, une maison coquette, un quotidien somme toute banal jusqu'au jour où... Personne ne s'y attend et malheureusement, de nos jours, c'est monnaie courante. Même si le personnage de Philippe sombre bien vite malgré l'entourage si présent, il n'en reste pas moins une description bien amère de notre société. Gibrat nous livre un premier album au scénario qui manque un peu de rythme mais les personnages sont si touchants, sincères et ordinaires que l'on suit avec plaisir les mésaventures de Philippe. Durieux a fait un très joli travail: des dessins simples, un trait maîtrisé et une mise en image dynamique.
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Avec Le Sursis, Jean-Pierre Gibrat nous livre sa version d' "Un village français" dans un album de bande dessinée de qualité.
Dans cette première partie d'un diptyque, Gibrat pose le contexte : un envoyé au STO s'évade de son train, mais tout son village le croit mort car celui-ci a déraillé juste après son évasion. De ce postulat de départ, naît une situation cocasse mais révélatrice de cette période si particulière que fut l'Occupation.
D'un sujet somme toute classique, Jean-Pierre Gibrat nous livre une palette très intéressante de son talent. Même si le scénario est franchement classique, nous profitons par contre de planches tout bonnement magnifiques, telles d'humbles peintures à l'eau détaillant ici un bout de tissu pour une robe à carreaux, là un détail architectural, ou ici encore le galbe d'une peau féminine. Des dessins magnifiés qui tiennent parfaitement à flot ce Sursis, qui ne s'explique pas dans cet opus.
Ce premier tome ne peut donc pas vraiment se lire seul, et la deuxième partie du diptyque est nécessaire pour cerner comme il convient cette œuvre de Gibrat.
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Le jour du débarquement américain en Normandie, Jeanne, jolie résistante parisienne coiffée d'un béret rouge -réseau communiste oblige!- rencontre dans la cellule d'un commissariat un peu bousculé par l'actualité du jour, François, un monte-en-l'air plein de bagout et un brin cynique....expert en serrures et en évasion! Ils s'evadent , donc, par les toits couverts de zinc de Paris, mais la demoiselle a le vertige, des chaussures à talons compensés et, bientôt , une méchante entorse...
Cavalcade, rendez-vous manqués, arrestations, délation, traque, planques: derrière Jeanne, clopinant sur une patte, on sillonne Paris, en vélo-taxi, en bus à plate-forme, en scooter et même, avec un couple inénarrable de bateliers qui font penser à ceux de l'Atalante, en péniche - dans la lumière dorée d'un été qui, malgré le danger toujours là, fleure déjà la libération toute proche...
Formidable BD une fois de plus, racontée par Jeanne elle-même , d'abord fortement agacée par le détachement goguenard de son Arsène Lupin, puis de plus en plus attendrie, attirée par ce gentleman cambrioleur qui l'a prise sous son aile avec une surprenante sollicitude...
Une histoire de guerre et une histoire d'amour, comme pour le Sursis -avec lequel, surprise, mystère, on trouvera aussi d'autres points communs inattendus..- mais cette fois pas de voyeurisme un peu passif : l'imminence du danger et la griserie de la liberté à portée de fusil provoquent une maturité accélérée des jeunes héros. Jeanne voit ses préjugés fondre comme neige au soleil, François, sans se départir de son cynisme élégant, prend des risques qui peuvent lui coûter cher..Le récit suit le rythme, mouvementé, de cette accélération sentimentale et de cette échappée belle.
Magnifique dessin, cadrage élégant, couleurs somptueuses, scénario au cordeau et texte pertinent, le vol du corbeau - Ami, entends-tu le Vol noir du corbeau sur nos plaines? chantaient les partisans- est en tous points parfait....jusqu'à sa fin, où une petite tache rouge sur la neige en dit plus qu'un long discours..
Un régal, de la première vignette à la dernière,
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