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3.21/5 (sur 17 notes)

Nationalité : France
Né(e) à : Montluçon , 1955
Biographie :

Jean Védrines est un romancier français.

Il est le petit-fils de l'aviateur Jules Védrines et le fils d'Henri Védrines, député communiste de l'Allier.
Ancien élève de l'École normale supérieure de Saint-Cloud, agrégé de lettres modernes, il publie son premier roman, Château perdu, en 1997 : « Le livre se passe sur trois jours, qui concentrent trois siècles de l'histoire du sud (de l'Italie). C'est une sorte de parcelle ou de miroir de l'éternité, un temps qui serait celui des saints, un temps plus chrétien qu'historique. »
Il dédie son deuxième roman, L'oiseau de plomb, à son grand-père, "Charles-Toussaint Védrines, baptisé Jules par ses compagnons d'armes, qui, le dix-neuf janvier 1919, posa sèchement son Caudron G7 sur le toit des Galeries Lafayette puis, le vingt et un avril, voulant franchir les Alpes, se manqua et tomba près du Rhône à Saint-Rambert-d'Albon."
Stalag, publié en 2004, confirme l'originalité et la créativité de la langue de Jean Védrines: « Stalag est une œuvre hantée par les mots et par les voix qui les parlent, les blessent, les chantent, parfois miraculeusement, avant qu'ils ne disparaissent dans les gouffres glaciaux et noirs. »
En 2007, dans L'Écoute intérieure, il anime les entretiens où Michel Chaillou évoque la naissance de l'écriture.
Avec L'Italie la nuit, Védrines revient au décor de son premier roman, le sud italien, les Pouilles.
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Source : Wikipedia
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Romancier de la révolte et de la parole vive, Jean Védrines se lance avec "L'enfant rouge" dans une archéologie des convictions, à la fois sévère et lumineuse, placée sous l'exigence de la vérité. En savoir plus : https://www.fayard.fr/litterature-francaise/lenfant-rouge-9782213721866


Citations et extraits (29) Voir plus Ajouter une citation
(…) gamin : t'as remarqué que le vent qui te mord souffle de l'est, des steppes ?

Tends mieux l'oreille, là, comme ça : oui, dans ce coin d'l'atelier... T'entends pas autre chose, dans Ie raffut de la bourrasque ?

T'entends pas comme des grosses voix d'hommes, un chœur qui chante contre le froid, la mort ? C'est un chant russe, gamin. .. Le chant d'Octobre, là-bas...

Et t'as pas besoin d'en saisir les paroles, d'en deviner ce qu'y dit, les broutilles, le détail : tout de suite, hein ?, tu sens la force qu'il donne, la chaleur, le bon feu...

Faut les suivre, Henri, y aller, y emboîter le pas... Chante, mon gars, chante avec moi le vent et la tempête, chante à tue-tête et tu seras, et on sera sauvés.. . »
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Ça empêche pas qu'il se portait toujours premier pour la grève. Ou pour décider les autres, les entraîner à réclamer leur dû, se bagarrer. Toujours lui qui allait en délégation causer à l’ingénieur, au patron... En 1935, cinq fois il a été fichu dehors ! Pour manger, il acceptait de balayer, de trimballer des choses pas propres. Mais aucune usine n'en voulait : une tête dure, ils disaient tous. Un genre de Russe (note : Védrines ça sonne Lénine).
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Des syllabes de là-bas, j’ai entendu en regardant les sapins. Des « r » roulés, l'un sur l'autre, « Wer-macht », il me semble, et des « k » claqués en série, consonnes nazies, « Luckau, Luckenwalde » et, plus nettement, quoique moins violent, «Finsterwalde», le nom de la ville allemande que ce printemps j’ai sans cesse estropié devant Thollus. Sûr et certain : je venais de les guigner à la volée, sans y faire gaffe, quand j'avais feuilleté les liasses du père.
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Des années plus tard, j’ai lu Jules Verne l'arpenteur, moi aussi, un des rares auteurs où j'ai bien voulu suivre le père très longtemps. (Dans nos premières lectures, on suit sans y penser les parents, la maîtresse d'école, on n'entre pas là-dedans tout seul, on ne pourrait sûrement pas, tant est impérieuse la voix écrite à laquelle on va se donner, tant c'est l'autre monde, l'étrangeté, l'oubli de soi.)

Mais, à partir de onze, douze ans, tout roman que le père recommandera me semblera âpre, impénétrable, non que le livre le soit, mais parce que je ne peux plus lire par-dessus son épaule, ou comme s'il m'accompagnait, même de loin, à bonne distance. Plus jamais avec sa voix, son souffle - la parole prodigieuse que jusqu'alors je lui avais prêtée.

Si, dans une autre maison, je réussis à devenir Nemo, si mon nom est enfin Personne, c'est que je n’accueille plus le père.
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Pour une fois, essaie de réfléchir, de te comporter en adulte. Je m'adresse à toi comme je ferais à un militant aguerri, quelqu'un qui serait expérimenté. Dans la lutte que nous menons, Jean, tu sais bien qu'on ne peut pas tout dire, qu'on doit garder absolument des secrets.,. Des secrets qui ont sauvé beaucoup de camarades pendant la Résistance.

Si ton père, pour une fois, te demande ce petit renoncement (pas de questions sur ce rendez-vous), c'est qu'il a de bonnes raisons. Et, bien sûr, le Parti aussi. ..

Retiens ça : un vrai camarade sait se taire. »

J'ai compris : dans son plastique marron, l'histoire du militant illégal sera bien du voyage.
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Il a dû sentir mon regard, ma colère : il tourne un peu la tête de mon côté, sourit gêné, gauche comme souvent, il écarte légèrement les bras, me montre ses paumes bizarrement ouvertes, souffle un mot que je n'entends pas, que j'essaie de lire sur ses lèvres, le répète, et soudain j'ai compris, il a repris deux syllabes de notre enfance, deux éclairs, coups de tonnerre qui ouvraient les pus sérieux de nos rituels, il a dit un mot simplet, presque nu, il a murmuré : "les clous", et je l'ai revu percé par le mot, la chose, dans l'ombre de la cour d'école ou de notre cabane, et hurlant une histoire qui guiderait nos jeux.
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Une certitude pourtant, dans ces apparitions, ces figures sans nom, lentes et presque froides qui tournent et traînent près de l'eau, sous les arbres : une autre image, bien plus brûlante, une lueur vive, souple, jamais retouchée ni glacées par les années, l'oubli ou les rêves, se glisse toujours entre les visions de la rivières, les scènes de foule grise, troue la lumière étale et terne, ranime la cendre triste, éteinte du souvenir, fait resplendir devant Nardo un détail, un instant rayonnant que la mémoire veule, infidèle, la traînée, la putain voulait broder grossier, recoudre de fils grisâtres, épais, crins sales et trompeurs ...
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Mais là-dedans ont vibré des sons désagréables, des nasales brèves, leur battement métallique. Une formule sèche, j’ai pensé, une phrase d’annonce très courte, trop courte pour une telle assistance, des professeurs, tout de même, des gens lettrés, les semblables de Paul. Car j’imagine qu’on ne vas pas l’honorer – un des objets de la cérémonie d’après lui – devant un public ilote, qui ne serait pas du métier. Moi qui redoute les maîtres, les reconnais partout, dans le train, le métro, la rue, repère au premier coup d’œil, ce que la parole professorale défait dans un visage, les cicatrices, les blessures qu’elle y creuse, j’ai su d’emblée qu’ici tous étaient de la partie : ils méritaient mieux que ces trois nasales, leur pincement bref.

Surtout que l’homme se tait toujours, une poignée de secondes, sûrement, mais incongrues, insupportable, l’obligation pour nous de le regarder au visage, maintenant, de guetter inquiets sur ses lèvres les prémices de la parole. De drôles de lèvres, fines et courbées, un arc d’aigreur qui creuse très bas ses plis, à gauche et à droite de la bouche, va finir par faire sillon jusqu’au menton, une coupure profonde, on dirait, taillée par une parole acide, mauvaise. Sa manière à lui, je pense, de rappeler aux rangs serrés devant lui qu’il a été des leurs, qu’il porterait du métier au moins ce prétendu stigmate : le bec amer, les lèvres mangées, rabougries par leur claquement, par tous ces mots qui reprennent, corrigent, morigènent sans cesse. Une bouche qui des millions de fois à dit : "Non ! Faux ! Nul !", et joui de le répéter, le marteler. Une assurance, une morgue dans cette lippe qui me déconcertent : comme si cet homme était certain que tout professeur est d’abord un claque-bec, comme si Paul, par exemple, aimait rabrouer, lancer des reproches, des menaces à ses ouailles, lui qui rechigne à noter bas, près du zéro d’infamie, ou même en deçà du dix salvateur, qui craint alors d’humilier, de blesser.

Et plus morgueux encore, l’homme, vraiment insolent, de suggérer si fort qu’il a échappé à la condition modeste où végète son public… "Un contremaitre, ce gars, en somme !, je vois en un éclair. Ça y plairait guère, à cet évident prétentieux, mais il est de la même estrace que Testanière, contremaître aux Ateliers mécaniques des Bourbons, un zigue qui n’avait pas supporté de faire à vie ouvrier tourneur, de se colleter en solitaire la machine obtuse. Comme nous autres, d’ailleurs, tous des O.P.1 ou des O.S. Sauf qu’au lieu de se révolter, de gréver ou de glisser sous le tabouret de tôle un bouteillon de blanc bien vert, torche-tripes, il avait choisi de plaire à ses chefs, de faire son lèche-cul, son obséquieux jaunâtre, et de s’élever à la seule cime, la seule immense altitude qu’il pouvait concevoir : une place un cran au dessus de lui dans le métier, la "maîtrise", un ingrat travail de chefaillon, de contrôleur du pauvre monde, quarante bonhommes sous lui à faire baver, marner au moindre de ses ordres. Mais sa parole contre la tienne en toute circonstance, un type impossible à jamais critiquer, ni secouer, quoi qu’il fasse, même une grossière erreur… un intouchable."
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Une beauté, on trouve, mademoiselle B., les cheveux et les yeux pailletés d'or, les mains blanches aux doigts fins, délicats. Des lèvres rieuses, surtout,
et des phrases qui bondissent, légères, cascadent jusqu'à nos tables, éblouissent nos cahiers.

Elle dessine les mots. Un don qu'elle a, qu'on n'a jamais connu chez d'autres.
(...) C'est à ce moment qu'on les voit dessinés : dans l'air par-dessus nos têtes, au ciel qui luit à la fenêtre.

Toutes sortes de mots, des très simples, des plus rares.
"Des dorures", on se murmure en grand secret, certains, depuis que la maîtresse nous a montré une photo couleur de la galerie des Glaces, que tout ce qui est beau a l'éclat solaire de Versailles.
A commencer par ses yeux irisés, illuminés quand elle déclame, module ses phrases.

Souvent, elle respire encore plus bruyant, rythmé, et voilà qu'elle fait même apparaître les choses dont elle cause ! Dans la classe, pile sous notre nez !
Un arbre, la première fois, je me rappelle.
Paul, qui les aime tant, en était transi d'émotion
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Si son père était ouvrier, comme le mien - notre honneur, notre fierté aujourd'hui -, sa mère faisait l'institutrice et, à ce titre, pouvait, malgré le métier de son homme, loger dans un appartement juste au-dessus de ses classes - des CM1 ou CM2, des "primaires" en tout cas ("Des primates !", dira Paul un peu plus tard pour rire, échapper à tout ça).

Si bien que, le soir après six heures, l'enfant ne quittait pas l'école,
le logement lambrissé de boiseries à mi-hauteur, les mêmes que dans la salle des cours moyens en dessous.
"Moyen, mi, demi : les mots qui ont raboté mon enfance", ironisera Paul.

Moi, je trouvais qu'il n'y avait rien de médiocre, de "moyen" dans ces bâtiments vides d'élèves, ces couloirs déserts, soudain corridors de châteaux, de palais, ces salles livrées à l'ombre et à nos cavalcades ...
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