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Citation de Sophie13


« Quand Bruno fut assez près, il constata que le garçon était assis en tailleur et fixait la poussière au sol. À l’arrivée de Bruno, il leva la tête et Bruno découvrit son visage. Un drôle de visage. Il avait la peau presque grise, mais d’un gris que Bruno ne connaissait pas. Et de grands yeux couleur caramel, dont le blanc était très blanc. Deux immenses yeux désolés qui mangeaient son visage et fixaient Bruno.
Bruno était certain de n’avoir jamais rencontré de garçon aussi maigre et aussi triste de toute sa vie et pensa qu’il ferait mieux de lui parler.
— J’explorais, lui dit-il.
— Vraiment ? répondit le garçon.
— Oui. Depuis presque deux heures.
Ce n’était pas l’exacte vérité. Bruno n’avait consacré qu’un peu plus d’une heure à son exploration, mais il jugea qu’un brin d’exagération ne pouvait nuire.
Exagérer n’était pas la même chose que mentir et lui donnait l’air plus hardi qu’il ne l’était.
— Tu as découvert quelque chose ? demanda le garçon.
— Pas grand-chose.
— Rien du tout ?
— Enfin si, je t’ai trouvé, dit Bruno après un temps.
Il regarda le garçon et envisagea de lui demander pourquoi il était si malheureux, mais, songeant que la question pourrait lui paraître grossière, il hésita. Il savait que les gens malheureux n’aimaient pas qu’on les questionnât sur leur tristesse. Ils en parlaient parfois d’eux-mêmes et devenaient alors intarissables sur le sujet pendant des mois. Bruno décida d’attendre avant de dire quoi que ce soit. Il avait fait une découverte, et maintenant qu’il tenait enfin quelqu’un de l’autre côté de la barrière, il fallait en profiter pour tirer le maximum de cette opportunité.
Il s’assit par terre en tailleur de son côté de la barrière pour imiter le garçon, en regrettant de ne pas avoir pris de chocolat ou de gâteau à partager avec lui.
— J’habite une maison de ce côté-ci de la barrière, dit Bruno.
— Ah bon ? J’ai aperçu la maison de loin une fois mais, toi, je ne t’ai jamais vu.
— Ma chambre est au premier étage, dit Bruno. De ma fenêtre, je vois de ton côté. Au fait, je m’appelle Bruno.
— Moi, c’est Shmuel, dit le garçon.
Bruno plissa le front, pas certain d’avoir bien entendu.
— Comment ? demanda-t-il.
— Shmuel, répondit le garçon, comme si c’était la chose la plus naturelle du monde. Et toi, c’est comment ?
— Bruno.
— Je n’ai jamais entendu ce nom-là, dit Shmuel.
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